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ANNUAIRE
L'INSTITUT DES PROVINCES.
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ANNUAIRE
L'INSTITUT DES PROVINCES
DES CONGRÈS SCIENTIFIQUES.
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1508.
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Paraîit tous les ans, du 1°", au 15 février.
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. {DERACHE, RUE DU BOULOY , 7;
Éniies (DENTU, PALAIS-ROYAL :
CAEN, A. HARDEL, RUE FROIDE, 2.
Est nl HE oise."
PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES
en 18572 :
Par M. DE CAUMONT.
Les membres de l'Institut des provinces morts en 1857
sont au nombre de. six : MM. le comte DE MÉRODE, le
baron pD’HOMBRES-FIRMAS, le prince Ch. BONAPARTE, le
baron CHAILLOU DES BARRES, COMMARMOND, de Lyon,
BERTINI, de Turin,
M. le comte Félix DE MÉRODE, inspecteur divisionnaire
de la Société française d'archéologie, est mort à Bruxelles,
au commencement de l’année 1857; jamais perte n’a été
plus douloureuse pour l’Institut des provinces et pour la
Société française d’archéologie dont il était un des
membres les plus dévoués.
Tout le monde connaît le rôle éminent qu'avait joué, en
Belgique , le comte Félix de Mérode dans les événements
.… politiques de 1830. Cet illustre rejeton d’une des plus an-
ciennes familles de ce pays, montra un dévouement, une
énergie et un désintéressement qu’on ne rencontre plus
dans les âmes de notre siècle. On sait qu’il ne voulut pas
de la royauté que lui offraient ses compatriotes.
Mais ce que tout le monde ne connaissait pas,
c'était sa bonté, sa simplicité , sa franchise, son goût
décidé pour l'étude.
Il vint, il y a 45 ou 46 ans, dans le Calvados,
pour y visiter les principaux édifices de nos villes et de
nos campagnes. Depuis celte époque, il a souvent
YI PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES
assisté aux réunions générales de la Société française
d'archéologie et à plusieurs sessions du Congrès scien-
tifique de France. A Nîmes, en 1844, il fut élu vice-
président général du Congrès scientifique. 11 fut encore
appelé à cette fonction, l’année suivante, à Reims; la
même année , à Lille, il avait présidé plusieurs séances
du Congrès archéologique. En septembre 1846, il faisait
partie de notre bureau, à Autun et à Châlons, où se
tenaient des séances générales de la Société française.
Enfin il présidait, à Laon, le Congrès archéologique
en 1851.
M. le comte de Mérode correspondait fréquemment
avec l’Institut des provinces et la Société française d’ar-
chéologie; avant sa mort, il entretenait encore celle-
ci des observations qu'il avait faites dans ses dernières
excursions en France et en Allemagne.
M. le baron d’Homgres-Frrmas est mort à Alais (Gard).
Les travaux météorologiques, paléontologiques et agri-
coles de M. le baron d’Hombres-Firmas sont Connus dans
tous les pays, et l’Académie des sciences Pavait, il y
a long-temps , élu membre correspondant dans la section
d'économie rurale. {
M. le baron d’Hombres-Firmas avait, pendant plusieurs
années, fréquenté les Congrès scientifiques de la France,
de l'Italie et de l’Allemagne. Nous avions, en 4840, établi
des rapports intimes avec lui dans unede ces réunions et,
depuis lors, nous avons pu le compter au nombre de nos
amis les plus dévoués. Sans parler des diverses réunions
auxquelles il prit partavec nous, il rendit , en 1844, un
grand service à l'institution des Congrès scientifiques,
M. Lallemand , correspondant de l’Institut de France à
Montpellier, avait effectivement demandé et obtenu pour
EN 1857. j VIT
cette ville la XII°. session du Congrès scientifique de
France; mais, quelques mois avant l’ouverture de cette
session, il m’envoya sa démission, déclarant que tout son
temps allait être absorbé par les soins qu’il voulait donner
à l'amélioration de l'établissement thermal du Vernay,
dans les Pyrénées, devenu sa propriété. M. Lallemand
ajoutait qu'il ne connaissait personne , à Montpellier, qui
püt accepter la mission de le remplacer dans les prépa-
ratifs du Congrès.
L’embarras était grand , je pensai admet à
M. le baron d’Hombres-Firmas et à transférer la session
à Nîmes : la proposition que je lui fis fut acceptée , et,
quelques jours après, M. d’Hombres-Firmas venait à
Paris, recevoir de lInstitut des provinces, convoqué
extraordinairement, chez moï, rue Richelieu, 63, sa no-
mination de secrétaire-général de la XIE, session. Cette
session , convoquée par MM. d’Hombres-Firmas et de La
Baume, fut très-satisfaisante, malgré le peu de temps qui
restait pour la préparer; elle fut présidée par M. le comte
de Gasparin, ancien ministre, membre de l’Institut.
Deux ans après (18/16 ), M. d’'Hombres-Firmas siégeait
au Congrès scientifique de Ne à rm et au Con-
grès scientifique italien , à Gênes, :
Quand M. Dumas, ministre de l’agriculture , du
commerce et des travaux publics, reconstitua le Conseil
général de lagriculture en 1849, il y appela, pour repré-
senter le département du Gard, son vieil ami, le baron
d'Hombres-Firmas, et nous partageâmes avec lui, pendant
un mois, les travaux de cette session qui s’ouvrit sous la
présidence de Sa Majesté Napoléon II, alors président de
la République.
A partir de 1850, M. d'Hombres-Firmas parut rarement
b
VIII PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES |
aux grandes réunions scientifiques, au sein desquelles if
aimait tant à se trouver, parce que la surdité dont il était
précédemment affecté fit des progrès qui ne lui per-
mettaient plus d'entendre les discussions ; mais il n’en fut
que plus laborieux dans son cabinet ; il continua de cor-
respondre activement avec ses amis et avec les Sociétés
savantes dont il faisait partie; malgré son âge avancé, il a
pu étudier et travailler jusqu’au dernier moment.
M. d'Hombres avait été maire d’Alais et membre du
Conseil-général du Gard; il était, depuis plus de trente
ans, chevalier de la Légion-d’Honneur.:
M. le prince Cu. LUCIEN BONAPARTE (| prince de Ca-
nino), qui avait long-temps. habité Rome et qui avait
épousé sa cousine, la fille du roi d’Espagne Joseph,
était correspondant de l’Académie des sciences de l’In-
stitut ; le prince avait conquis ce titre par des travaux
considérables sur l’anatomie comparée , notamment sur
l’ornithologie. |
Nous avons, comme on le sait, fondé , en 1833 , le
Congrès scientifique de France ; le prince de Canino
voulut, six ans après (1839) , établir un Congrès sem-
blable pour lItalie , et il le convoqua à Pise. Nous avons
dit, dans le Bulletin monumental, en quoi le Congrès
italien différait du nôtre, quant au mécanisme et à la
division des sections. |
Le prince assista, en 1841, au Gonsres scientifique de
France, à Lyon.
On sait quel rôle le prince a joué dans la révolution
romaine ; nous ne l'avons retrouvé qu'après son entrée
en France. Alors, il se mit tout entier à l'étude et fut un
des membres les plus assidus des séances-hebdoma-
ENTLSG7 1 M IX
daires de lAcadémié des sciences ; il vint au Congrès
scientifique de France, à Nancy, en 1850, et y pré-
sida la section des es sciences physiques ; il assista régu-
lièrement aussi aux séances du Congrès des délégués
des Sociétés savantes, à Paris. Dernièrement M, le Prince
de Canine avait visité les collections de la Faculté de
Caen , celles de M. Le Prêtre et celle de M. de La Fres-
naye , à Falaise; à cette époque , sa santé était déplo-
rable et sa mort, arrivée en juillet 1857, n’a élonné
personne. Fe Shetiee Li 2
M. le baron CHAILLOU-DES-BARRES , officier de la
Légion-d’Honneur et grand-croix de l'ordre du Mérite de
Bavière, était né en Nivernais, dans l’année 1784, et avait
long-temips occupé de hauts emplois dans l’adminis-
tration, Il avait été, dès l’année 1805, auditeur au Conseil
d'État; puis, en 4807, intendant de la Silésie; en 1809, ‘
préfet de l’Ardèche, et, en 1815, préfet de la Creuse.
Rendu plus tard à la yie privée , il put se livrer à l'aise à
son goût pour. les sciences et les lettres. Il publia ,
en 4821, un Essai sur la législation des grains, œuvre
dans laquelle sont retracées toutes les vicissitudes de la
réglementation de cette matière , ‘en même temps que
sont mises en lumière les docti tegs les plus irrépro-
chables d’une saine économie politique. Un peu plus
tard, il fit représenter’; à l’Académie royale de Musique,
l'opéra de Lasthénie , dont Hérold avait fait la musique,
et qui eut vingt-c ing représentations. Il fut, en 1898, l’un
des fondateurs d’un journal politique pour le département
de l'Yonne , sous le titre de Mémorial, qui eut, pendant
quatre ou cinq ans, un très-grand succès. Après cette
époque, ses études se tournèrent exclusivement vers
x PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES
Phistoire et l’archéologie. Un recueil annuel, l'Annuaire
de l'Yonne, qu’il contribua à créer, publia, à partir de
4837, plusieurs notices de lui sur l’abbaye de Pontigny
et sur quelques résidences seigneuriales de cette contrée.
Il les a depuis réunies et publiées à part. Membre du
Conseil général de l'Yonne, depuis 4834, il a été long-
temps le secrétaire de cette Assemblée. Il fut nommé
membre de l’Institut des provinces, en 1851, et assista,
en cette qualité, à plusieurs congrès scientifiques, notam-
ment à celui de Dijon, aux Congrès archéologiques de
Sens, Nevers et Auxerre; et, à Paris, à plusieurs des
congrès des délégués des Sociétés savantes. Plein de
dévouement pour les intérêts de la science et de Part , il
était, depuis plusieurs années, président de la Société des
sciences de l’Yonne, et venait d’être nommé président de
la Société centrale d'agriculture de ce département. Il est
mort à Paris, le 22 août dernier, à l’âge de 78 ans (1).
M. A. COMMARMOND, conservateur du musée lapidaire
de Lyon, chevalier de l’Aigle-Rouge de Prusse (4°. classe)
et de l’ordre de St.-Maurice , vient de mourir ( décembre
1857). On n’oubliera jamais le dévouement avec lequel cet
honorable membre de l’Institut des provinces avait rempli
les fonctions, importantes et difficiles, de secrétaire-général
du Congrès scientifique de France en 4841. Cette session
du Congrès a été la plus nombreuse et la plus belle de
toutes celles qui ont eu lieu depuis l’origine de linsti-
tution , si l’on excepte celle de Strasbourg qui a surpassé
toutes les autres. M. Commarmond , qui portait un grand
(1) Renseignements fournis par M. Challe, d'Auxerre, sous-
directeur de l’Institut des provinces.
En 1857. xt
intérêt à ces réunions, auxquelles ses fonctions ne lui
ont pas permis d'assister chaque année, a présidé la
section d’archéologie à Strasbourg, en 1842 ; inspecteur
divisionnaire de la Société française d'archéologie, il or-
ganisa les réunions générales de cette Compagnie qui
se tinrent, pendant deux jours, à Lyon, en 18/46.
M. Commarmond était possesseur d’un cabinet d’anti-
quités d’une grande valeur, que la ville de Lyon avait
acheté, il y a quelques années.
La collection lapidaire de Lyon s’est enrichie, sous
M. Commarmond, d’un nombre considérable de monu-
ments épigraphiques , qui appartenaient à divers parti-
culiers et qui se trouvaient épars dans plusieurs quartiers
de la ville; ces conquêtes importantes sont dues, pour
la plupart , aux actives démarches du conservateur dont
le gouvernement fera époque dans l’histoire'‘de l’impor-
tante collection de Lyon, la plus considérable de France,
M. Commarmond avait commencé la description de
toutes ces richesses et avait publié, il y a quelque temps,
un magnifique volume d’épigraphie, qui a fait sensation à
l'étranger, puisque c’est à cette publication que l’auteur a
dû la décoration de St.-Maurice et celle del’Aigle-Rouge :
il n’était pas encore membre de la Légion-d’Honneur,
quoique cette distinction luieût été promise il y a {7 ans; |
et ce n’est pas le seul exemple que nous ayons du peu
d'empressement que l'on met chez nous à récompenser
les travaux scientifiques de la province, et de l'indifférence
qu’on témoigne pour les publications qui ne sortent pas
de Paris, lesquelles même sont appréciées à l'étranger.
Nous ne dirons rien des autres publications de”M.
Commarmond, qui sont nombreuses et qui, presque
toutes , ont rapport à l'archéologie et à Ja numismatique.
È
XII PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES,
M. BERTINI , commandeur de l’ordre de St.-Maurice ,
officier de la Légion-d’'Honneur, membre de la Chambre
des députés de Sardaigne et ancien doyen de la Faculté de
Médecine de Turin, est l’auteur d’un grand nombre
d'ouvrages estimés. Il avait , depuis vingt années, assisté
constamment aux sessions du Congrès scientifique de
France ; il en avait été élu vice-président général quatorze
fois, et avait présidé une fois la section de Médecine.
Chaque année, on était sûr de trouver le savant Italien
arrivé, un des premiers , dans la ville où se tenait le
Congrès. L'année dernière encore , il quittait La Rochelle
pour se rendre à Bruxelles, où, trois jours après, il était
élu vice-président général du Congrès de bienfaisance.
Quoique M. Bertini fût d’un _àge. avancé (79 ans), son
excellente santé et son activité , qui ne s’était pas ralentie
depuis vingt ans, faisaient espérer pour lui une carrière
encore longue. Il est mort, le 23 avril, à Borge, sa ville
natale, dans la province. de Saluces, où il était allé passer
ue Co gs
Va
pra merite nouveaux ont été élus, en 1857, par
l’Institut des provinces,
XIIE
COMPOSITION DU BUREAU.
Directeur-général: M. pe Caumont # OX GK, fondateur
des Congrès scientifiques de France.
Pour la classe des sciences, M. EuDes-DEsLONG-
camps #%, doyen de la Faculté des sciences,
à Caen, correspond! de l’Institut de France.
Secrétaires- | Pour la classe des lettres, MM. BonDeaux,
généraux. | docteur en Droit, à Évreux; Rexauir,
inspecteur. divisionnaire de l'Association
normande, conseiller à la Cour impériale ,
à Caen.
Trésorier : M. Gauceax Xe, inspecteur de l'Association nor-
mande, rue de la Marine, à Caen.
Sous-directeurs régionaux :
MM. Le Gaz %, conseiller à la Cour impériale, sous-directeur
pour le Nord-Ouest, à Rennes.
Des Mouurs, inspecteur-divisionnaire des moïfutients À
sous-directeur poux la région du Sud-Ouest, à Bor-
deaux.
P.-M. Roux % GC >, membre de asie, sous-
* directeur pour la région du Sud- Est, à Marseille.
Victor Simon €, conseiller à la Cour impériale, sous-
directeur pour la région du Nord-Est, à Metz.
CnaLze %, sous-directeur pour la région du Centre, à
Auxerre.
MM
LISTE
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES {1},
w
S. M. NAPOLÉON III, Empereur des Français.
Le comte AzexANDRE DE HUMBOLDT, à Berlin.
Le prince Lucien BonaparTE €, sénateur, membre de
plusieurs Académies.
3, GrrarDiN 3€, correspondant de l'Institut de France,
à Lille, |
Le vicomte pe Cussx O > C XK, membre de plusieurs
Académies, à Paris ; et à Vouilly ( Calvados).
Le GranD à, D. M, : ancien maire de St.-Pierre-sur-
Dives, ji
LamserT, conservateur de la Bibliothèque publique de
Bayeux.
Baron pe La FResnayxe 3, membre de plusieurs Acadé-
mies, à Falaise.
Eroc-Demazt, ancien vimuer “HS R de l'Institut, au
Mans.
L'abbé LorTin, ancien trésorier de l’Institut , id.
L'abbé Bouver, ancien membre du Conseil, id,
De Manseuz, chef d'institution, à Laval,
Auger, chanoine titulaire de Poitiers.
Bourzcer 3, membre de plusieurs Sociétés savantes,
à Clermont-Ferrand,
Lecoe €, sr ame dd de l'Académie , à Cler-
mont-Ferrand.
Léon pe La Mann, avocat, à Alençon,
Tarzciar %, conseiller à Ja Cour impériale de Douai.
(1) On a suivi pour cette liste l'ordre chronologique des nominations.
LISTE DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XV
MM. Guerrier pe Dumasr X, membre de l’Académie, à
Nancy. | |
Boxer %, professeur d'agriculture, à Besançon.
Buvienter %#, membre de D'amaunt Académies, à
Verdun.
Soxer-WiLLEMeT $, trésor rieridteli vite de l’Académie,
à Nancy. -
Croizer , curé de Neschers, près d’Issoire.
Weiss O X, bibliothécaire, correspondant de l’Institut
de France, à Besançon.
MiLLET, naturaliste, président de la Société d'agriculture,
à Angers.
Bonxer %#, D.-M., professeur à l'École de Médecine,
correspondant de l’Institut de France, à Lyon.
Fourner %, professeur d'histoire naturelle à la Faculté
des sciences , correspondant de l’Institut de France , à
Lyon.
SeRINGE Xe, professeur de botanique à la même Faculté.
Victor Simox <, ancien secrétaire-général du Congrès,
conseiller à la Cour impériale, à Metz,
Moueror O %£, correspondant de l’Institut de France,
à Bruyères ( Vosges). |
Herr 3%, professeur à la Faculté. de Droit, à Strasbourg.
Mgr. Donxer O €, cardinal-archevêque de Bordeaux.
Mg’. Gousser O £, cardinal-archevêque de Reims.
FerET, conservateur de la Bibliothèque , à Dieppe.
Mg”. Cousseau €, évêque d'Angoulême,
De La FareLLe $£, ancien représentant du Gard, à Nimes,
L'abbé Desrocues, euré d’Isigny ( Manche).
De Cayroz €, ancien député, à Compiègne.
Bwzeuz, membre du Conseil général, à Blain (Loire-
Juférieure ). |
Drouer, inspecteur divisionnaire de la Société française
d'archéologie, au Mans.
XVI
LISTE
MM. Marquis De Vigraye, géologue, à Cheverny, près Blois.
DucnATELLIER, ancien secrétaire-général de l'Association
bretonne, à Pont-l’Abbé ( Finistère }
De La Baume %#, conseiller à la Cour impériale, à
Nimes, : or QE
Comte pe MONTALEMBERT €, ancien pair de France,
inspecteur divisionnaire de la Société française d’ar-
chéologie pour. la conservation des monuments, à
Paris.
Reper, conservateur dei ‘Archives de la Vienne, à
Poitiers.
Ÿ. Hucuer, membre de plusieurs Sociétés savantes , au
Mans (Sarthe),
Comte ne Tocquevizze O X, ancien ministre, membre
de l’Académie française, à Tocqueville (Manche).
Tessrer, membre de plusieurs Académies, à Anduse.
Comte A. pe Goureurs, membre de plusieurs Sociétés
savantes, à Lanquais (Dordogne).
Vauss %, directeur de l'Observatoire, correspondant de
l’Institut de France, à Marseille,
Gocuez >, membre de plusieurs Académies, quai
Schæ pflin, 3, à Strasbourg.
L'abbé Voisin, membre de plusieurs Académies, au Mans.
Le GLay >, conservateur des Archives, correspondant
de l’Académie des inscriptions, à Lille ( Nord )
Kuacman O XK, directeur de la Monnaie, membre du
Conseil général du commerce, à Lille (Nord).
Hermann, membre de plusieurs Académies, de la Sociélé
des Antiquaires, etc,, à St.-Omer ( Pas-de-Calais ).
Jourparn, chanoine de la cathédrale, à Amiens.
L'abbé DuvaL, membre de la Société française d’archéo-
logie pour la conservation des monuments, à Amiens.
F, Worcrez, membre de plusieurs Académies, à St.-
Quentin.
\
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XVII
MM. Baron pu Taya %, président de la Société d'agriculture
des Côtes-du-Nord, à St.-Brieuc. |
Desnoyers, vicaire-général d'Orléans, inspecteur des mo-
numents du Loiret,
MALHERBE, président | de la Société d'histoire Fhlurelle,
à Metz, conseiller à la Cour. impériale.
BaLLIN Ÿ£, archiviste de l'Académie des sciences, arts et
belles-lettres de Rouen. %
Bazzy O %£, ancien président de eee de Médecine
à Villeneuve-le-Roy (Yonne).
Perir €, proviseur du Lycée de Rennes.
Comte pe Trisran %, membre de plusieurs Académies,
à Orléans.
Comte pe LocnarT ÿ£, directeur du musée d'histoire na-
turelle, à Orléans,
Baye-Mouizzarp O 5%, membre de l’Académie de Cler-
mont, conseiller à la Cour de cassation,
Beauner La Farce %, ancien sous-préfet, membre de
l’Académie de Clermont,
Perir-LarirTe, membre de l’Académie de Bordeaux,
L'abbé BLararrou, chanoine, professeur à la Faculté de
Théologie de Bordeaux, g
BarrTaéLemy £, conservateur du musée d'histoire natu-
relle , à Marseille.
Berruzus #, médecin de la Marine, à Marseille, membre
de plusieurs Académies,
Coquan» X£, ingénieur des mines, professeur. de : géologie,
à Besançon.
Casrez, agent-voyer chef, à St.-Lo,
L'abbé Devoucoux, secrétaire perpétuel de la Société aca-
démique, et vicaire-général d'Autun. H «
Niepce, procureur impérial, à Brignolles ( Var).
Baron pe CoNrenan O Xe, directeur général de l'admi-
nistration des Cultes, à Paris.
XVII
MM.
LISTE
Comte OLIVIER DE SESMAISONS, ancien directeur de FAsso-
ciation bretonne, à Nantes.
Cuampoiseau >, secrétaire général de la XVe, session du
Congrès scientifique , à Tours. F z
De Sourpevaz €, id., juge d'instruction, à Tours.
J. De FONTENAY, membre de plusieurs Académies, à Autun.
Mg’. Parisis O XK, évéque PAE ras, ancien Appipentant
du Morbihan. |
De GLANVILLE, inspecteur des monuments de la Seine-
Inférieure, président de l’Académie, à Rouen.
L'abbé Le Perir, chanoine honoraire de Bayeux, secré-
taire-général de la Société française d’archéologie pour
la conservation des monuments, à Tilly ( Calvados).
E, De Bois, ancien représentant du Finistère, président de
la classe d'histoire de l'Association bretonne, à Quimper.
- L'abbé Lacurie, chanoine honoraire de La Rochelle,
inspecteur divisionnaire des monuments historiques, à
Saintes.
MaTHERON, Ph. %, ingénieur, membre de plusieurs
Sociétés savantes , à Marseille,
De La Tennavr, directeur de la Société Linnéenne, à
Bordeaux.
De BuzonniÈèRe, secrétaire-général de la XVIIIe. session
du Congrèsscientifique de France, membre de plusieurs
Académies, à Orléans.
La Crosse C 3%, sénateur, ancien ministre des travaux
publics, à Paris, |
Duraur De Moxtrort %£, ex-président de la Société de
statistique des Bouches-du-Rhône, à Marseille.
Général Rémon»G O #£, ancien député, membre de plu-
sieurs Académies, près Gisors.
Gopezze >%, membre de plusieurs Académies, conseiller
d'État.
Monière, secrélaire-général de l'Association normande,
directeur des Cours spéciaux du Lycée, à Caen.
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINGES, XIX
MM, Lerrsvri-DururLé C 3, sénateur, inspecteur-division-
naire de l'Association normande, ancien ministre, à
Pont-Authou
Lr Norman, ancien sous-préfet , membre de plusieurs
| Sociétés savantes, à Vire. ï
Vicomte pe FaLLoUx x, ancien ministre de l’Instruction
publique, à Segré (Maine-et-Loire).
* De Kenprez, ancien représentant d’Ille-et-Vilaine, ancien
élève de l’École des Chartes, à Rennes.
Alp. Le FLacuais, membre des Académies de Caen et
de Rouen, à Caen.
L'abbé Crosnier , protonotaire apostolique du Saint-
Siége, vicaire-général de Nevers, "inspecteur des monu-
ments de la Nièvre, à Nevers. |
AussanT, membre de plusieurs Académies, professeur
en Médecine, à Rennes.
Taror & , président de chambre à la Cour d’appel de
Rennes, secrét. général de la XVI°. session du Congrès.
Comte Louis pe KercorLay, ancien secrélaire-général de
l'Association bretonne, à Fossieux (Seine-et-Oise ).
À. TasLé ÿ£, conseiller à la Cour d'appel de Rennes.
Barné, sculpteur, lauréat de l'exposition régionale de
l'Ouest, à Rennes.
Baron De GirarvorT %, O 3, membre de plusieurs Aca-
démies, sous-préfet, à Nantes.
GuÉRANGER, ancien président de la Société académique de
la Sarthe, au Mans.
L. De La Morts, membre de l’Académie, inspecteur des
établissements de bienfaisance, à Bordeaux.
ManécHaz 3%, ingénieur des” Passer -chaussées, à
Bourges.
MaAcHARD #&, ingénieur en chef, id.
Bertranp 3, maire de Caen, doyen % la Faculté des
lettres, à Gaen. Rte
XX LISTE
MM. Vazrar, ancien recteur de l’Académie du Lot, membre
de l’Académie, à Bordeaux.
Botucuer-DE-PERTHES >, président de la Société d'’émula-
tion, à Abbeville,
RaynaL.%f, avocat général près la de de cassation.
De LA MonneraAYe, président du Conseil général du
Morbihan, à Rennes. 4
Porrier Ÿ£, conservateur de la bibliothèque publique
de Rouen.
Taévenor, chef d’escadron, secrétaire de section à la
VIe, session du Congrès scientifique de France, à
Clermont-Ferrand,
Marquis DE CHENNEVIÈRES-POINTEL #£, membre de plu-
sieurs Académies, inspecteur-genéral des musées de
province, à Paris.
GuiLrory aîné 3%, secrétaire-général de la X°, session
du Congrès scientifique de France, président de la
Société industrielle, à Angers.
De VenneLu-Puoirazeau, inspecteur divisionnaire de la
Société française d'archéologie pour la conservation
des monuments , à Nontron ( Dordogne )..
De Surieny , membre de l’Académie de Mâcon, à Mâcon
(Saône-et-Loire ). à
M. CanaT, président de la Société académique de
Châlons-sur-Saône.
BouLancé, ingénieur des ponts-et-chaussées, rue Olivier,
7. 27; à Paris.
Comte pe Merzer, inspecteur divisionnaire des monu-
ments, membre de plusieurs Académies , à Chaltrait
( Marne ).
Victor Perir, membre de plusieurs Sociétés archéo-
logiques , à Sens (Yonne).
Travers, professeur honoraire de littérature latine à la
Faculté des lettres de Caen, secrétaire perpétuel de
MM
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES,. XXI
l'Académie des sciences, arts et belles-lettres, à
Caen,
Durré La. Manéme, docteur en «Droit, secrétaire de
section à-la XVIe, session du Congrès scientifique de
France, substitut, à Caen.
Rosran, inspecteur des monuments historiques, maire
de St.-Maximin (Var).
Hanpez, imprimeur de l’Institut, membre du Conseil de
la Société française d'archéologie pour la conservation
des monuments, à Caen.
De Quarreraces $£, ancien professeur d'histoire na-
turelle à la Faculté de Toulouse, membre de l’Institut,
à Paris.
PaurriIN, ancien magistrat, membre de plusieurs Aca-
démies, à Paris, boulevard Beaumarchais, 6.
Manu , ancien préfet, membre de plusieurs Sociétés
savantes, à Carcassone.
Marquis Eugène pe Monrzaur %#, membre de plusieurs
Académies, à Moulins {Allier ).
L'abbé Boupanr, curé de Chantelle (Allier ).
Le PELLETIER-SAUTELET %, docteur-médecin, à Orléans.
Comte pe Vieneraz, président du Comice agricole, à
Ry (Orne). s
De BenacueO X#, Membre du Conseil général de l’agri-
culture, à Dampierre (Loiret) ; rue des pures, à
Paris.
Le Vor #, bibliothécaire de la Marine, à Brest,
L'abbé Ciro® pe LAVILLE, membre de l’Académie de
Bordeaux.
Comte Acawer p'Hémicourr 4k, membre de l’Académie
d'Arras. .
Baron pe Moxrreuiz %, ancien député, à Gisors.
Comte De NiewEnkERKE O € CK, directeur-général
des musées, à Paris,
XXII
MM.
LISTE
Quanrin, archiviste du département de l'Yonne, membre
de plusieurs Sociélés savantes, à Auxerre,
D'EsPAULART, président de la Société académique du
Mans, adjoint au maire de la même ville,
GomarT, membre de plusieurs Académies , secrétaire du
Comice agricole de St.-Quentin (Aisne).
De Verneuiz O X£, C X, membrede l’Institut de France,
à Paris. |
Baron James ne Roruscaizp C 3%, membre de plusieurs
Académies, à Paris,
Ricarp, secrétaire de la Société archéologique de Mont-
pellier. r
ARRONDEAU, M pedicii de l’Académie de Rennes, en
résidence à Vannes.
Du Bois O *#, de la Loire-Inférieure, inspecteur-général
de l’Université,
Comte De VauBLane #£, membre de plusiétrs Académies,
à Paris et à Munich (Bavière).
GayorT, ancien député, secrétaire de la Société d’agri-
culture, sciences et arts de l’Aube, à Troyes, (
L'abbé Tripon, inspecteur des monuments de l’Aube,
chanoine honoraire, à Troyes.
ALLuAUD ainé 3€, membre du Conseil général de l’agri-
culture, président des Sociétés savantes de Limoges.
MosseLmax, membre de plusieurs Sociétés savantes, à
Paris, passage Sendrié.
A. Rawé, inspecteur divisionnaire 1 monuments, à
Rennes. ss "
Vicomte Du Moxcez #£, membre de plusieurs Académies,
à Cäen. |
Pirseau, membre de plusieurs Sociétés savantes, à
Toulouse.
Bouer, membre de plusieurs Académies, à Caen.
Mg". ‘River %, évêque de Dijon, président de la XXI°,
session du Congrès scientifique de France,
MM
DES MÉMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES, XXIIL
Henri Beaupor, secrétaire-général de la même session, pré-
sident de la Commission archéologique de la Côte-d'Or.
Le marquis DE SAINT-SEINE, vice-président général de la
même session du Congrès,
De La Grèze %£ , chevalier de l’Étoile-Polaire de Suède
et de l'Ordre de Charles TT d’Espagne, conseiller à la
Cour impériale de Pau.
FranTin, membre de l'Académie de Dijon,
. Besnou X, ar UE en chef de la Marine, à Cher-
bourg. 4
Le vicomte DE Je, inspecteur divisionnaire de la
Société française d'archéologie pour la conservation
. des monuments, à Toulouse.
Comte pe PonrersaucT, membre de plusieurs Académies,
à Fontenay (Manche),
Denis aîné, membre de la Société française d'archéologie
pour la conservation des monuments, à Fontlaine-
Daniel (Mayenne ).
Gustave pe Lorière €, docteur en Droit , chevalier de
l'Ordre d'Isabelle-la-Catholique, au Mans et à Paris,
rue de l'Est, 7,
-CaLemMaRD De LarAyETTE, membre de plusieurs Acadé-
mies , au Puy (Haute-Loire).
_ Le Comte Georges De Soczrrair XX%, inspecteur des
monuments de l'Allier, membre du Conseil général de
la Nièvre, à Lyon.
Magie Ye, maire de Neufchâtel, inspecteur de l’Asso-
cialion normande , à Neufchâtel. :
Secvrer 4%, membre du Conseil général de la Marne,
. président de la Société d'agriculture, sciences et arts,
de Châlons. |
Le vicomte pe GENOGILRAC, membre de PAASIEUES Sociétés
savantes, à Rennes,
Albert ne Brives €, secrétaire-général de la XXII, ses-
XXIV
MM.
LISTE
sion du Congrès scientifique de France, président de
la Société d'agriculture, sciences et arts, au Puy.
Dumon, C XX, ancien ministre, rue de la Ferme-des-
Mathurins , à Paris. |
DE Bouts, D.-M. P., membre de plusieurs Académies, à
Paris.
Baron Doyen #£, membre de plusieurs Académies, re-
ceveur général de l’Aube, à Troyes.
Comte Van DER STRATEN Ponrxoz, membre de plu-
sieurs Académies, à Metz.
D'ALBIGNY DE VILLENEUVE, secrétaire-général de la Société
académique de St.-Étienne et inspecteur des monu-
ments de la Loire, à St.-Étienne.
E. pe BEAUREPAIRE, ancien élève de l’École des Chartes, à
Avranches.
Mg'. Lanprior, évêque de La Rochelle, président général
de la XXIITe, session du Congrès scientifique de France.
L'abbé Person, secrétaire-général adjoint de la XXIII°.
session du Congrès. |
Jouvix 3£, professeur de la Marine, à Rochefort.
Nau, architecte, inspecteur des monuments de la Loire-
Inférieure, à Nantes,
Vazère Marmix, D.-M., membre de plusieurs Académies,
à Cavaillon { Vaucluse ). | dr
CaiLLaub 4%, conservateur du musée d'histoire naturelle,
à Nantes.
De La Borperte, membre de plusieurs Sociétés savantes,
ancien élève de l’École des Chartes, à Nantes,
Semicmon, membre de plusieurs Académies et du Conseil
général de la Seine-Inférieure, à Neufchâtel.
De LonGuemar X, membre de plusieurs Académies, an-
cien capitaine d'état-major, à Poitiers.
Oruivier Ÿ£, ingénieur en curl des rider aie
à Caen.
MM
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XXV
BLavier %£, ingénieur en chef des mines, à Paris.
Campion, chef de division à la préfecture de Caen,
membre de plusieurs Académies.
L'abbé Jouve, chanoine, inspecteur des monuments, à
Valence (Drôme).
J. La BarTe 3K, membre de plusieurs Académies, à
Paris.
Albert Du Boys, secrétaire général de la XXIV<, session
du Congrès scientifique de France, à Grenoble.
Le comte pe Mary O SX, ancien pair de France,
inspecteur divisionnaire des monuments.
L'abbé Bargier pe MonrauzT, membre de plusieurs S0-
ciétés savantes, à Poitiers. ;
MazrTuère O %, médecin en chef. de la Marme, à
Rochefort,
:Aunoz O %%, ingénieur en chef des constructions
navales, à Rochefort,
Le baron pe Cuapezain pe Saint-Sauveur, membre de
plusieurs Académies, à Mende.
Picnon-PrémèLé #, maire de Séez, membre du Conseil
général de l'Orne.
Gatmarp O %#, ingénieur en chef, directeur des mines
en retraite, doyen honoraire de la Faculté des
sciences de Grenoble.
Lecapre Ÿ£, médecin en chef des Hospices, au Havre.
Le Harivez-pu-Rocuer , sculpteur, à Paris.
Dupuis, ancien président de la Société archéologique de
l'Orléanais, conseiller à la Cour impériale, à Orléans,
Pizzor, archiviste du département de l'Isère, à Gre-
- noble,
XXVI { LISTE
Membres Étrangors.
S. M. le ROI DE SAXE, président honoraire des Sociétés
académiques de Dresde et du Congrès archéologique
allemand.
MM. Lopez, C X, conservateur en chef du musée, à Parme.
Gazzera 3, secrétaire de l’Académie, à Turin.
Mg. Renou X, évêque d'Annecy. |
Marquis Parerro, G %, à Gènes.
Marquis De Ripozri , C >, ancien ministre, à Florence,
Pasteur Dury #£, à Genève.
Baron pe SeLis-Lonccaamp #£, à Liége,
WaewueL, professeur, à Cambridge.
James Iares, à Londres. |
SAN-QuiNTiINO XX, conservateur honoraire du musée,
à Turin. | |
Despines, C X, directeur-général des mines du Piémont,
à Turin.
WaRNKOENIG #£, professeur à l’Université de Tubinge,
Ban Y£, professeur à l’Université de Heidelberg.
Scnanow O %, directeur de l’École des beaux-arts, à
Dusseldorf,
Kurrer O %X, professeur de physique, à St.-Péters-
bourg. pe
Kerec DE Hocurezpex O Xk, ancien directeur des forti-
fications du grand-duché de Baden, à Baden.
De Brinckeu, conseiller d'État, à Brunswick.
D'Homazius-D'HazLoy C > , correspondant de l'Institut
de France, à Namur et à Paris, rue Mondovi, 6.
Maraviexa, professeur d'histoire naturelle, à Catare
(Sicile).
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XXVII
MM. Duc Serra 1 FaLco je, prince de Santo-Pietro, à Flo-
rence (Toscane) et à Palerme,
Baron pe Roisin 3%, au château de re près Trèves
( Prusse Rhénane).
Marquis DE SANTO-ANGELO GX, ministre de $. M, le Roi
des Deux-Siciles, à Naples.
Comte ne Fursremgere O >, chambellan de S. M. le
Roi de Prusse, à Stanheim, près Cologne,
Baron pe Quasr X, inspecteur-général des monuments
historiques de Prusse, chevalier de l'Ordre de St.-Jean
de Jérusalem, à Berlin,
Rouuez X, professeur d'archéologie à l'Université de
Gand.
Sismonpa >X, professeur de géologie à l’Université de
Turin, membre de l’Académie de la même ville,
Comte pe Sezmour O #, gentilhomme de la Chambre
du roi de Sardaigne, président de l'Association agricole
de Piémont.
Jacquemont O >%X >, membre du Sénat et président de
la Société académique de Chambéry.
Mg’, Murer, évêque de Munster,
ReicHENSPERGER, Conseiller à la Cour royale et membre
de plusieurs Académies, à Cologne, vice-président de
la Chambre législative de Berlin,
Mg". Geissez Y%, cardinal-archevêque de Cologne,
Borowsxki, ancien secrétaire de l’ambassade russe,
à Paris.
Comte pe La Marmora G >K, directeur de l'École de Ma-
_ rine, à Gênes.
DonaLsron, secrétaire de l’Institut des architectes, à
Londres. ;
Le MaISTRE-D'ANSTAING X, président de la Société archéo-
logique, à Tournay,
Quérecer O *&, secrétaire perpétuel de l’Académie royale
de Belgique, à Bruxelles,
XXVIII LISTE
MM. Jogaro %, membre de plusieurs Académies, à Bruxelles,
De Wicmoskr, chanoine de la cathédrale de Trèves, à
Trèves.
Tavrwan, membre de plusieurs Académies, à Porentruy.
Baron pe PLanokerT, docteur en Droit , membre de plu-
sieurs Académies, à Bruxelles.
Moremison, membre de la Société royale de Londres,
correspondant de l’Institut de France, à Londres.
Parker, membre de la Société des Antiquaires de
Londres, à Oxford.
Comte Ernest ne Beusr C K, directeur-général des mines
à Berlin,
Banurri %, professeur de géométrie à l’Université
de Turin.
Comte Avoyarno DE Quareeny C %X, professeur de phy- |
sique à l’Université de Turin.
Comte César Bazso GC >, député, ‘ex-président du
conseil des ministres, à Turin,
Cigrario C %k, sénateur de Piémont, professeur de
chimie à l’Université de Turin.
Racozinr Rocu, secrétaire perpétuel de l’Académie royale
d'agriculture de Turin.
Baron Joseph Manxo C %Xk, président fu Sénat du
royaume de Sardaigne et de la Cour d’appel de arenh
membre de l’Académie.
J. Morris X, sénateur du royaume de Sardaigne, pro-
fesseur de botanique à l’Université de Turin.
Professeur Canru %, sénateur du royaume de Sardaigne,
à Turin.
Le comte Joseph Tezexi G k, membre de l’Académie
impériale d'Autriche, à Szerach.
Joseph Arneru, directeur du cabinet impérial des Anti-
ques, à Vienne.
Davinson, membre de la Société. ss à Londres,
MM.
DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XXIX
D'Ozrers C %X, directeur-général des musées, comman-
deur de plusieurs ordres, à Berlin,
Le Rérv. Perir, membre de plusieurs Académies , à
Londres,
Taomsex C >, directeur du cabinet des Médailles, com-
mandeur de l’ordre de Danebroc, à Copenhague.
Baron Srizrrin, grand-maître des cérémonies du Palais,
commandeur de l’Aigle-Rouge, à Berlin,
Namur, secrétaire-général de la Société archéologique du
grand-duché de Luxembourg.
KERWIN DE LETTENHOWE , pe de plusieurs Académies
à Bruges.
Forster 3, professeur à l’Académie des beaux-arts de
Vienne, président de la 26°. classe du Jury inter-
national à l'Exposition universelle de Paris.
Le baron DE Mayenriscn % %X %, chambellan deS. M.
le Roi de Prusse et deS, A. R, le Prince de Holinzoltein-
Sigmaringen , à Sigmaringen,
Le Roy, professeur à l’Université de Liége.
Le docteur pe ViganprT, à Westlard ( Prusse ).
Fayper G %e > %, procureur général, à Bruxelles.
Mirtrer-Mayer XX >; laut à l'Université de Hei-
delberg.
Ducpériarx O ee, inspecteur-général des prisons, secré-
taire-général du Congrès de bienfaisance, à Bruxelles.
D'Ornerre Dr BOuvETTE, membre de plusieurs Acadé-
mies, à Liége,
SrEINGEL O X, officier supérieur en retraite, à Westlard
( Prusse ).
César Canru , membre de plusieurs Académies, à Milan,
es 2 Le ee —
| CONGRÈS
DES DÉLÉGUÉS DES SOCIÉTÉS SAVANTES
DES DÉPARTEMENTS,
SOUS LA DIRECTION DE L'INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
SESSION DE 1856.
Sr RP EE
SÉANCE GÉNÉRALE D'OUVERTURE.
(Présidence de M. pe CaAumonr , directeur de l'Institut
des provinces, )
La séance est ouverte à 2 heures 172, dans la grande
salle de la Société. d'encouragement Pape l'industrie na
tionale.
Sont appelés au bureau : MM. le vicomte DE Cussy, dé-
légué de la Société d'agriculture de Bayeux ; Albert ps
BRIVES , président de la Société du Puy; pE MONDÉSIR.,
colonel du Génie, en retraite, délégué de l’Académie”de
Chérbourg: ; DIDRON , anCien secrétaire du Comité des
monuments historiques : DE SOmEIROL , délégué dela
Société d'histoire naturelle de la Moselle ; le duc Dr
MAILLÉ , délégué de la Société d'agriculture du Cher ; le
marquis DE BALAINCOURT , délégué de la Société de
Vaucluse.
Secrétaires-généraux : MM. Raymond BORDEAUX ,
d'Évreux; Charles Gomarr, de Sf.-Quentin:; RAMÉ, de
2 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Rennes; DE Bouis , de Paris ; SELLIER, de. Chälons-sur-
Marne ; GAUGAIN, trésorier.
On remarque dans la salle un grand nombre de délé-
gués des Sociétés savantes des départements, savoir :
MM. |
Le comte pE COURCELLES, de Lille.
Le comte François VAN DER STRATEN , délégué de l’Aca-
démie de Metz.
MARCHAL, ingénieur des ponts-et-chaussées, délégué dé
Rouen et d’Avranches.
DE MonDésir; colonel de génie en retraite , délégué de
la Société académique de Cherbourg.
Le comte DE TOCQUEVILLE , délégué de la Société acadé-
mique de Cherbourg. |
Le marquis DE TANLAY, délégué de la Société d'agri-
culture de Tonnerre.
CHALLES, délégué de la Société d'agriculture ; sciences et
arts d'Auxerre.
MORTIMER T'EBNAUX , délégué de la Société d'agriculture
de Réthel.
Auguste BERNARD, délégué de la Société d'agriculture,
industrie, sciences , arts et belles-lettres de la Loire.
Lemarquis DE JESSÉ CHARLEVAL, délégué des Boughes-
du-Rhône.
Robert BEAUCHAMP ; Pépité de la Vienne, délégué de
Poitiers.
Nicias GAILLARD, président à la, Cour de cassation , délé-
gué de la Société des Antiquaires de l'Ouest et de la
Société académique de Poitiers.
DE SAINT-VENANT, ingénieur des ponts-et-chaussées en.
retraite, délégué de la Société d'agriculture de Vendôme.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 3
RAMÉ , délégué de la Société d'archéologie de Rennes et
de l'Association bretonne.
VARIN DE Russy, délégué de l’Association normande.
Léonce DE MARGUERIT DE ROCHEFORT, délégué de l’Asso-
_ €iation normande,
Le docteur BALLY, délégué de l’Académie impériale: de
médecine,
Dx Bouis , D'.-M., délégué de la Société d’horticulture
de la Seine.
PrILLIEUX , délégué du Comice agricole de Vendôme:
DE FERRÉ DES FERRIS , délégué de la Société d’agricul-
ture de Mortain.
DE CoussEMAKER , délégué du Comité flamand et de la
Société dunkerquoise.
Le vicomte pE Cussy, délégué de la Société des arts, scien-
ces et bellés-lettres de Bayeux.
Le GRAND, membre du Corps législatif, délégué de la
_ Société des sciences , agriculture et arts de Lille”
Le baron TRAVOT, délégué de la Société d'agriculture
d’Avianches.
Le vicomte DE GENOUILLAC , délégué de la Société d’agri-
culture et d'industrie et de la Société sarchéologique de
Rennes.
MAHUL, ancien préfet, délégué de la Seciété.des sciences
| etarts de Carcassonne.
Le marquis LE SENS DE MORSAN , ‘délégué de | Le
ciation normande, à Bernay.
PILLON , dôcteur-médecin , délégué de l'Association nor-
mande, à Forges (Seine-Inférieure ).
Le vicomte DE BORELLI, général de division.
BRUAND D'UZELLES, délégué'de la Société d'agriculture <
sciences naturelles et afts du Doubs,
U INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
PICHON PREMÊLÉ, maire de Séez, inspecteur de l’Asso-
ciation normande.
LE ROYER , délégué de la Société industrielle d'Angers.
Le marquis DE BriAs, ancien maire de Bordeaux.
GADEBLED , ancien chef de bureau au ministère de lIn-
térieur.
Le comte pu MANOIR: DE JUAYE , délégué de la Société
française d'archéologie. |
Le marquis DE BALAINCOURT, délégué de la Société d’agri-
culture et d’horticulture de Vaucluse.
Le comte D’ESTERNO, membre du Conseil général de l’agri-
culture , à Autun.
DEBACQ , délégué de la Société d’agriculture, sciences et
arts de la Marne.
Le comte pe BARREY, membre du Conseil général de
l'Eure, délégué du Comice de Verneuil.
Le vicomte Du MoxceL, délégué de la Société des-sciences
naturelles de Cherbourg. |
SEMICHON , membre du Conseil général de la Seine-In-
férieure, à Neufchâtel. |
Louarr , délégué du Comice agricole de St.-Quentin.
MossELMAN, membre de l’Institut des provinces, à
Paris , passage Cendrié.
Colonel HENNOQUE , membre du Corps législatif, délégué
de la Société d’histoire naturelle de Metz.
Albert DE BURE , Secrétaire-général et délégué. de Ja
Société d’émulation de l’Allier. |
Le comte ne MEeLLer, délégué de l’Académie de Reims
et de la Société d'agriculture, siences et arts de
Châlons.
Armand GUIBAL, délégué de la Société littéraire et scien-
tifique de Castres.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 5
Maurice DE BARREAU, vice-président et délégué de la
même Société.
LANÇON , conseiller général de Vaucluse, délégué de la
Société d'agriculture de Vaucluse.
Le baron CHAUBRY DE TRONCENOR, membre du Conseil
général et délégué de la Société d'agriculture de la
Marne.
Louis Paris, délégué de l’Académie de Reims.
THiac, membre du Conseil général et délégué de la So-
ciété d'agriculture de la Charente.
DE BRIVE, membre du Conseil général et + sa de la
Société d'agriculture du Puy.
A. DE KOMAROFF, colonel du corps des ingénieurs des
voies de communication de l'empire de Russie.
Le duc DE MAILLÉ, délégué de la Société d'agriculture du
“Cher.
DE VENDEUVRE , délégué de la Société d’agriculture ,
des sciences, arts et belles-lettres de l’Aube.
DE LA ROQUETTE , délégué de la Société de géographie.
MANTELLIER , délégué de la Société archéologique de
l’Orléanais.
_ Desvaux, délégué du Comice agricole de Vendôme.
PErROT, délégué du Comice d'Orléans.
Ernest BERTRAND , juge au tribunal de ia Seine , délégué
de- la Société académique de l’Aube. |
Gustave Huor , délégué de la même Société.
Le vicomte DE BonNEUIL, délégué de la Société française
d'archéologie {Seine-et-Marne).
SOLEIROL, délégué de la Société d'histoire no de la
Moselle.
LAFOND DE LURGY, délégué de la Société d’études diverses
du Havre.
6 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
OsWALD-VAN-DEN-BERGHE, délégué de l’Académie d’ar-
chéologie de Belgique.
Édouard Diprow , délégué de la Société française d’ar-
chéologie,
Le vicomte DE KERIDEC, délégué de la Société archéo-
logique du Morbihan. |
Émile GRÉGOIRE, ingénieur des ponts-et-chaussées, dé-
légué de la même Société.
Le comte D'ERCEVILLE , délégué de la Société française
d'archéologie (Seine-et-Marne).
Dupuis, délégué de la Société archéologique de lOr-
léanais. |
CHAZAUD , ancien représentant , délégué de la Société
d'agriculture, belles-lettres, sciences et arts de Poitiers.
PORIQUET , délégué de l’Association normande (orme
THIOLLET , officier d'artillerie, à Paris.
CARLIER , délégué de la Société de sphragistique de Paris,
de la Société dunkerquoise et du Comité flamand de
France.
ANISSON DuPERRON , délégué de la Société d'énbioditure
de l'Eure.
HoLL, délégué de la Société d'agriculture de Poitiers.
Gosse, délégué de la Société d’histoire et d’archéologie
de Genève.
Le comte p'HÉRICOURT , délégué de l’Académie d'Arras.
SELLIER, membre du Conseil général de la Marne, dé-
légué de la Société d'agriculture, commerce , sciences
et arts de la Marne.
Jules LABARTHE, membre de l’Institut des provinces.
Alfred de Roïrssy, délégué de Société de l'histoire de
France, :
Le comte pe BorsreNAUD , délégué de l'Allier,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 7
Duval DE FRAVILLE, ancien sous-préfet, délégué de
Chaumont , à Coudes, par Chaumont (Haute-Marne ).
Le comte D'ERNEMONT, membre du Conseil général et
inspecteur de l'Association normande, à Ernemont
(Seine-Inférieure }).
TAILLIAR , délégué de la Société d'agriculture, sciences et
arts de Douai.
ANCELON , md Ace EE membre de l'Académie de
Nancy.
Ferdinand Davip, député au.Corps législatif, délégué de
la Société de statistique des Deux-Sèvres.
CHAUVIN-DE LÉNARDIÈRE , député , délégué de la Société
de statistique des Deux-Sèvres.
Bizeuz, membre du Conseil.général et délégué de Kai.
à Blain.
JULLIOT, délégué de la Société archéologique de Sens.
D’ILLIERS , propriétaire , délégué du Loiret, à Orléans.
Paul DurAND, délégué de Chartres.
Le vicomte de POMEREU, délégué de la Société française.
d'archéologie (Seine-Inférieure).
CHANDON DE ROMONT , président du Comice agricole
d'Épernay.
Marius GARCIN, secrétaire de la rédaction de L’ami de la
religion, délégué'des Basses-Alpes.
Le comte DE Gourcy , de la Société ROPEAIe d'agricul-
ture de la Seine. |
Le come bE MAILLY , ancien pair de France, ne
divisionnaire de la Société française d'archéologie.
Le marquis DE GODEFROY DE MESNILGLAISE, délégué de
la Société des Antiquaires de la Morinie.
FOURNEYRON, délégué de la Société d'agriculture, in-
dustrie, sciences , arts et belles-lettres de St.-Étienne.
8 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Le comte DE CHALON, au château de la Davière( Sarthe).
Le vicomte BOuRBON LIGNIÈRES, au château de Lignières
(Cher).
Le comte DE CHABRILLAN , délégué du Comice agricole de
Æéthel.
Le marquis DE VOGuÉ , délégué de la Société d'agriculture
. du Cher.
Rossey , délégué de l'Association normande FRE de
l'Eure ).
DE SAINT-GERMAIN , député, délégué de la Société
d'agriculture d’Avranches.
Le marquis DE VIBRAYE, membre de l'Institut des pro-
vinces , délégué de Blois, à Court-Cheverny.
Le prince Albert DE BROGLIE, délégué de Association
normande ( division de l’Eure).
Clément Muzxær, délégué de la Société académique de
l'Aube.
Raymond BORDEAUX, secrétaire-général du Congrès.
Anatole DE: VENDEUVRE, péeué, de la Société acadé-
mique de Falaise.
HÉRON DE VILLEFOSSE , inspecteur des monuments his-
toriques.
PERNOT , délégué de.la Soclété historique et 1 héolbee
de Langres ( Haute-Marne ).
Le comte DE Bonpy , ancien pair de France, délégué de
la Société d'agriculture de Châteauroux.
MAURENQ , délégué de la même Société.
Le comte DE VIGNERAL , membre de l’Institut des pro-
vinces, délégué d'Amiens.
D'ALVIMARE , inspecteur des monuments d’Eure-et-
Loir.
MALLET, délégué de la Société d’agriculture de Bayeux.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 9
VINCENT, délégué de la Société des Antiquaires de la
Morinie.
Le.comte DE LA FERRIÈRE, délégoé de l'Académie de
Caen.
DE BEAUCOURT, délégué dé la Société française dar-
chéologie ( division de-l’Eure). |
Charles ROLAND, ancien représentant, délégué de l’Aca-
démie des.sciences, arts et belles-lettres et d’agricul-
ture de Mâcon.
Le marquis DE VERCLOS , député au Corps législatif, dé-
légué de la Société d’agriculture et d’horticulture du
Vaucluse. … |
Henry DE BONNAND, délégué de la Nièvre.
OLIVIER , délégué de la Société d'agriculture et d’histoire
du Vaucluse.
GIROU DE BUZARINGUES , député au Corps législatif, dé-
légué de la Société des lettres, sciences et arts de
l'Aveyron.
BiGanT, président à la Cour impériale de Douai,
Le comte DE SERAINCOURT, inspecteur de l’Association
normande.
PeZERIL, capitaine au corps du génie.
Le comte p’EsrAINTOT , inspecteur de l'Association nor-
mande, délégué d’'Yvetot ( Seine-Inférieure).
Léror, délégué de la Société des sciences et arts de
Bayeux.
Le général BARON PETIET, député au cr législatif, dé-
légué de la Nièvre. =
AVRIL DE LA VERGNÉE, délégué de la Société de statistique
de Niort.
Le marquis DE MONTLAUR , membre du Conseil général
et délégué de la Société d’Agricuture de Moulins..
40 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
PARKER , délégué de la Société des Antiquaires de Londres,
à Oxford.
Olivier pe Roissy , inspecteur de l’Association non:
D'OzouviLze, délégué de la Société’ de l’industrie de
Laval.
L'abbé BRULLÉE , délégué de la Société archéologique de
sens. |
PAQUERÉE , délégué de la Société Linnéenne.de Bordeaux.
Le comte Armand DE HERCÉ, délégué de la Mayenne à
au Château de Monguéré (Mayenne ).
JOURJOT DE SAINT-HYLAIRE , professeur d'histoire natu-
relle au lycée Charlemagne.
MARIONNEAU , délégué de la Société arcéologique de
Nantes et des Sociétés savantes de Bordeaux.
DRÉOLLE , délégué de Libourne.
Le marquis D'ANDELARE , député et délégué -de la So-
ciété d'agriculture de la Haute-Saône.
M. de Caumont ouvre la séance par un discours, dans
lequel il jette un coup-d’œil rapide sur le mouvement
académique en 1856.
Il indique, en terminant, les modifications qui ont élé
adoptées, pour la présente session, dans l’ordre des tra-
vaux. Chaque jour les rapports des délégués seront én-
tendus par une section spéciale, dont M. Sellier sera le
président , el qui se réunira à 4 heure. Mais il n’y aura
pas d’autres séances de section, comme les années précé-
dentes ; les discussions seront portées immédiatement en
séance générale, Celle-ci, qui s'ouvrira à 2 heures chaque
jeur, sera divisée en deux parties : l'une consacrée aux
sciences physiques et à l'agriculture ; Pautre consacrée à
l'archéologie et aux beaux-arts.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 11
M. de Caumont indique quels sont les avantages de
cette nouvelle combinaison.
Ce discours, écouté avec le plus vif intérêt, est accueilli
par d'unanimes applaudissements. |
M. le Président donne ensuite à l’Assemblée communica-
tion de la correspondance et des délégations faites par les
Sociétés savantes qui ont envoyé des membres au Congrès.
Le secrétaire de S. A. I. Monseigneur le Prince Napoléon
adresse à M. le Président du Congrès la lettre suivante :
u Palais-Royal, le 13 avril 4857.
« MONSIEUR LE PRÉSIDENT,
« S, À. I, Monseigneur le Prince Napoléon me charge
« de vous remercier, en son nom, de l'envoi que vous
« avez bien voulu lui faire de l'Annuaire de l’Institut des
« provinces et des autres publications qui accompagnaient
« votre lettre du 9 de ce mois.
« Le Prince apprécie toute l'importance et l'utilité de
« la Société que vous présidez , et il en lira le eompte-
« rendu avec beaucoup d'intérêt. Son Altesse Impériale
« regrette vivement que ses occupations ne lui permettent
« pas d'assister à l’une de vos séances. »
Le Secrétaire particulier ,
HUBAINE.
La Société d'agriculture et d’horticulture de Vaucluse
a délégué au Congrès M, le marquis de Balaincourt, mem-
bre du Conseil général de Vaucluse, et MM. Olivier et de
vecelas.
La Société industrielle d'Angers et du département de
Maine-et-Loire délègue au Congrès MM. G.-A, Leroyer
et de la Chauvinière:
La Société d'agriculture et des sciences naturelles du
12 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Doubs délègue, pour la représenter, M. Bruand, d’Uzelle,
La Société d'agriculture, commerce, sciences et arts
du département de la Marne, délègue au Congrès MM, de
Bacq, son secrétaire; le comte de Mellet ; Sellier, son
ancien président, et le baron Chaubry de Troncenord.
Le Comice de St.-Quentin délègue , pour le représen-
ter, MM. Charles Gomart, de St.-Quentin, son secrétaire-
génétal ; Malezieux du Petit-Fresnoy ; Monnot, de Pontru,
et Thery , de Grugier.
La Société départementale d’agriculture et d'industrie
de Rennes délègue M. le vicomte de Genouillac et M.
Alfred Ramé.
La Société impériale des sciences, de l’agriculture et
des arts deLille délègue M. Legrand, membre du Corps
législatif,
La Société impériale et académique de*Cherbourg dé-
lègue, pour la représenter au Congrès , MM. le comte de
Tocqueville et de Mondésir.
La Société littéraire-et scientifique de Castres (Tarn),
délègue au Congrès : MM. Maurice de Barreau et Arnaud
Guibal.
La Société archéologique du Morbihan, à Vannes, dé-
lègue : MM. de Keridec, inspecteur, pour le Morbihan, de
la Société française pour la conservation des monuments
historiques , et Grégoire (Émile } ingénieur des Hot
chaussées dans le Morbihan.
La Société Havraise d’études diverses ex M. La-
fond de Lureq. |
La Société d'agriculture des sciences, arts et belles-
lettres del’Aube, délègue M. Gabriel de Vendœuvre.
Le Comice agricole de l'arrondissement d'Orléans
délègue M. Alex. Perrot, président de cette association.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 13
La Société d'agriculture, sciences etarts du Puy (Haute-
Loire ) a délégué au Congrès M. Albert de Brives, son
ancien président.
La Société d'agriculture, arts et commerce du dépar-
tement de la Charente délègue MM. de La Trenchade ,
docteur en médecine à Paris, et Mathieu Bodet, avocat à
la Cour de cassation,
Le Comice agricole de Rethel ( Ardennes ) , délègue au
Congrès : MM.-Pauflin, son président ; Reberotte-Labesse,
vice-président ; Tisserant, trésorier ; Carré-Collet ; Sorlet-
Sorlet : Thiérion(Jules), membres du Bureau.
La Société départementale d'agriculture du département
de l'Yonne, à Auxerre, délègue M. Challe.
Le Comice de Vendôme délègue au Congrès MM. de
Saint-Venant, ancien professeur de l’Institut agronomique
de Versailles, Édouard Prilleux et Gustave Desvaux.
M. Ch. Denis, délégué du département de la Mayenne ;
M. “Georges de Soultrait, délégué de la Nièvre; M, le
docteur de Cisseville, délégué de l'Association normande ;
M. Répécaud, président de l Académie d'Arras et délégué
de cette association; M. de baron Chaillou-des-Barres,
délégué de la Société des sciences historiques naturelles
de l'Yonne ; M. Millet, délégué dû Comice horticole de
Maine-et-Loire , à Angers ; M. d’Albigny de Villeneuve,
délégué de St.-Étienne ; M. Le Carbonnier, délégué de
l'AsSociation norinande , s’excusent de ne pouvoir
prendre part aux travaux du Congrès.
Mme, la baronne de Montaran adresse au Congrès une
pièce de vers, intitulée : A mes amis de Paris. |
M. de La Chauviniêre, délégué de la Société industrielle
d'Angers, en priant le Congrès d’agréer ses excuses
de ne pouvoir assister à la réunion à cause de Ja maladie
1% INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
grave qui l’en empêche adresse un tableau contenant le
résnmé comparalif du recensement de la population
depuis 4816; il demande s’il ne serait pas à désirer qu’on
fit du déplacement de la population l’objet d’une question
à traiter dans le Congrès des Sociétés savantes.
M. le Président passe ensuite au dépouillement de nom-
breux ouvrages, offerts au Congrès, sur lesquels M. Sellier
est chargé de faire un rapport. Ces ouvrages sont:
Notice sur Charles-Louis-Auguste Foucquet, duc de
Belle-I1sle, avec un précis historique des travaux et des
embellissements exécutés dans la ville de Metz, de 1727
à 4761 ; par M. F.-M. Chaberts1 volume grand in-8°.
Metz, 1856.
Notes pour servir à l’histoire de l'h‘pital St.-Nicolas
de la ville de Metz; par M. Chabert ( Extrait des Annales
de la Charité ), brochure in-8°. Paris, 1856,
DÉCOUVERTE DE CONSTRUCTIONS ET SÉPULTURES GALLO-
ROMAINES, dans la commune de Menneval près Bernay
{ Eure }, le 28novembre 1856 ; par MM. Léon Mélayer et
Gardin fils (deuxième rapport) ; brochure in-4°.
Cartulaire etsarchives des communes de l’ancien
diocèse de l'arrondissement administratif de Carcas-
sonne ; par M. Mahul. Un vol in-4°. Paris.
Bulletin de la Société d'émulation du département
de l'Allier (sciences, arts.et belles-lettres), tome V
(octobre, novembre et décembre 1856).
Bulletin de la Société des sciences naturelles et des
arts de St.-Étienne | Loire }. 1856.
État actuel de l'agriculture dans le département
de Maine-et-Loire et de quelques moyens de lui venir
en aide ; par M. P.-A, Millet, Angers, 1856.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 45
Les Chroniques de la noble ville et cité de Metz ; par
Jean Le Châtelain ; réimprimées par M. Chabert. Metz,
1856:
Congrès archéologique de France, séances générales
tenues, en 1855, à Châlons-sur-Marne , à Aix. et à Avi-
gnon, par la Société française d'archéologie ; 4 vol. 1856.
Mémoires et documents publiés par la Société d’his- ”
toire et d’archéologie de Genève; tome 3°, Paris, 18/4.
Bulletin de la Société industrielle d'Angers et du
département de Maine-et-Loire. XXVII*, année. Angers,
1856.
Le prince de Ligré ou un écrivain, grand seigneur
àla fin du XVIII°. siècle ; par M. Peetermans. Liége,
1856.
Journal du siége de Metz, en 1552, recueilli et pu-
blié par M. F.-M. Chabert ; un vol, in-4°. Metz , 1856.
Fables; par C. Brisson , ancien secrétaire de la mairie
de La Rochelle, un vol. sin-8°. La Rochelle , 1856.
Mémoires de la Société Linnéenne de Normandie
(années 1854-55 ); X°, vol., in-4°. Paris, 1856.
Publication de la Société pour la recherche et la
conservation des monuments historiques, dans le grand-
duché de Luxembourg ; ; un Ne: in-4°. Luxembourg,
1856.
Les Chants du soir : par Chéri Pauflin; un vol. in-$°.
Paris, 4856. \
Catalogue de la bibliothèque de l’Athenée royÿät;
( grand-duché de Luxembourg), précédé d’une notice
historique sur cet établissement ; par M. le professeur
A. Namur. 4 vol. in-8. Luxembourg, 1855.
Mémoires de l'Académie d'Arras, tomes XXVII°.-
XXVILE,,-XXIX®,, 3 vol. in-8°. Arras, 1854, 4855, 1857.
16 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Bulletin agricole, publié par la Société d’agricul-
ture du département du Pas-de-Calais. Arras, 1857.
Chronique d’Arthois; par François Bauduin, né à Arras
en 1520, publié par l’Académie d’Arras; un vol. in-
8°. Arras, 1856.
Journal de dom Gerard Robert, religieux de l’ab-
baye de St.-Vast d'Arras, publié-par l’Académie 7 che
un vol. in-8°. 1852.
Discours d'ouverture , prononcé par M. le colonel
Répécaud, à l’Académie d'Arras, le 27 août 1855 ;
brochure in-8°, «Arras , avril 4857.
Origines chrétiennes de la Gaule; supplément aux
Lettres du R. P. dom Paul Piolin, religieux, en réponsé
aux objections contre l'introduction du christianisme
dans les Gaules ; par M. Dozouville; brochure in-8°. Paris.
Explication, faisant suite aux précédentes notices,
sur l'attribution à Charlemagne de quelques types
monétaires ; par ile: Costet ; brochure in-8°. Bruxel-
les, 1857.
Marché fait avec des maçons, pour la construction
de certaines parties du château de Chambord, annoté
et publié par André Salmon ; brochure in-8°. Paris, 4856.
Statuts de la Société impériale d'agriculture ,
industrie, sciences, arts et belles-lettres du départe-
ment de la Loire; brochure in-8°. St-Etienne.
Société des monuments historiques d'Orléans ; bro-
chure in-8°. #
Discours.prononcé le 5 novembre 4855, à l'audience
solennelle de rentrée de la Cour impériale de Poitiers;
par M. Jules de La Marsonnière ; brochure in-8°. Poi-
tiers , 1855. |
Rapport sur les monuments historiques, présenté
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 17
au Conseil général du département de la Marne, dans sa
session de 4856; par M. le baron Chaubry de Troncenord.
Recherches sur les peintres-verriers Ghampenois ;
par M. Chaubry, baron de Troncenord ; brochure in-8°.
Châlons, 1857.
Travaux du Comice horticole de Maine-et-Loire,
3°. volume, n°. 43, in-8°. Angers, 1857.
Pomologie de Maine-et-Loire, L°. livraison. Angers,
1857. |
Réflexions sur les ia philosophiques de Lamar-
tine; par Ferd, Loise, de Tongres. Liége, 1857.
Impressions d’un touriste dans le monde moral ;
par Alb. d’Otreppe de Bouvette (Janvier 1857, 49°, livrai-
son). Liége , 1857.
Evocation, promesse d'avenir à la Société libre
d'émulation de Liége; par Alb. d’Otreppe de Bouvette,
(20°. livraison, février 4857). Liége, 1857.
Abnégation. et dévouement, hommage au Conseil
d'administration de la Société libre d’émulation de Liége,
par M. Alb. d’Otreppe de Bouvette is 1856),
Liège, 1856.
Statuts et réglement de la Société alimentaire de
St.-Quentin (Aisne), in-8°. 1856.
Procès-verbal de la séance annuelle de la Société
alimentaire de St.-Quentin. St.-Quentin, 148 mars 1857.
Bulletin du Comice agricole de St.-Quentin, tome
V°, 1856, in-8°.
Note sur le camp romain de Vermand (Aisne),
(extraite du Bulletin monumental) ; par M. Ch. Gomart,
membre de l’Institut des provinces, in-8°, Caen, 1856.
Exposé d’uneinstitution financière; par J.-A, Pichot,
in-8°. Mars 1857.
48 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Rapport sur la situation de la Société d'horticulture
ae la Moselle; par M. Chabert, in-8°. Metz, 1856.
Culture du Lupin à fleurs jaunes; par M. le comte
Conrad de Gourcy. in-8°.
De la statistique des subsistances et des Comices
agricoles, tomes I et II ; par M. A. Bertin.
Kéforme agricole, moyens de faire cesser l’infériorité
de la France en agriculture ; par M. Bertin.
M. le Président donne successivement lecture des dif-
férentes questions portées au programme du Congrès de
1857, en invitant les membres à se faire inscrire pour
parler sur les sujets qu'ils désirent traiter. Les membres
se font inscrire et des jours sont désignés pour la discus-
sion des différentes questions :
AGRICULTURE, SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLEX.
PROGRÈS DES SCIENCES PHYSIQUES EN 4856.
M. Du Moncel n'ayant pu achever le travail qu'il avait
projeté sur les progrès des sciences physiques en 1856,
donne en échange quelques détails sur.les moyens de
reproduction des œuvres graphiques. Voici le résumé de
cette communication fait par l’auteur lui-même:
Gravure paniconographique de M. Gillot.
Les ressources immenses que présentent les gravures
sur bois, pour l'intelligence des travaux scientifiques, et
même l'agrément qu'elles procurent au lecteur quand
elles accompagnent une œuvre littéraire , une relation de
voyage, une description quelconque , les ont fait re-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 19
chercher dès l'origine de la typographie, alors même
qu’elles étaient dans un état d’imperfection notoire. Il n’y
a pas long-temps encore, cêt art, ou plutôt l’art de les
imprimer, était dans un tel état d'enfance, que c'était
tout au plus si on pouvait distinguer les sujets qui se
trouvaient ainsi représentés. C’est ce dont on peut se
convaincre, quand on se reporte aux premiers volumes
du Musée des familles, la première publication pério-
dique qui les ait introduites, à titre d'agrément ou d’or-
nementation typographique. Depuis cette époque, les
progrès des moyens typographiques, l'amélioration des
encres d'impression, et surtout la découverte de la mise
en train des gravures-sur bois, au moyen de hausses et
de découpures, disposées de manière à empêcher les em-
pâtements des parties légères et fines de ces gravures,
ont permis de donner à leurs impressions tout le brillant
et la netteté des gravures en taille-douce.
Dès-lors, cette branche de l’art, jusque-là peu exploitée,
prit une telle extension que, dans un moment, il n'y
avait pas un ouvrage littéraire ou scientifique+ qui ne
voulût être illustré : tel était le nom qui fut donné alors
aux ouvrages ainsi ornés de gravures sur bois, nom qui
devint le titre d’un recueil important que nous connais-
sons tous.
Les avantages immenses que présentent les gravures en
relief, lesquelles peuvent être faites de plusieurs ma-
nières, comme nous le verrons plus tard, sont principa-
lement l'économie immense qu’elles réalisent dans le
tirage et la possibilité qu’elles donnent de les intercaler
dans le texte d’un ouvrage ; ce dernier avantage, tout en
donnant au livre plus de coup-d'œil, évite au lecteur le
soin d’une recherche qui peut lui faire perdre le sens
20 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de sa lecture. Malheureusement les gravures sur bois sont
très-dispendieuses. 11 faut d'abord qu’on en fasse le
dessin directement sur le boïs et qu’on le confie ensuite
aux soins du graveur , ce qui nécessite l'intervention de
deux artistes de talent. Les gravures de cette espèce sont
d’ailleurs longues à exécuter et exigent des soins très-
minutieux, quand il s’agit de dessins de précision, puis-
qu’on ne peut employer ni la règle ni le compas. Il en
résulte que certains genres de dessin, tels que les figures
géométriques de machines, d’engrenages, de travaux
d'art, etc., ne peuvent jamaisêtre parfaitement rendus.
Ce n’est guère que dans les dessins pittoresques, des
vues perspectives , des dessins ou figures à l'effet, que la
gravure sur bois présente intrinsèquement des avan-
tages incontestables. Il était donc à désirer qu’on pût
trouver un procédé qui permît de vaincre ces inconvé-
nients , et c’est précisément ce procédé qu’a découvert
M. Gillot, dans son système de gravure paniconogra-
phique.
Avec.ce système, toute P HRe de dessin quelconque,
pourvu qu’il puisse fournir une épreuve faite avec de
encre grasse, peut donner lieu à un cliché en relief
susceptible d’être imprimé typographiquement. Ainsi les
lithographies au crayon ou à la plume, les gravures sur
pierre, sur cuivre et sur acier, et même la gravure litho-
graphique peuvent ,; sans aucune retouche de graveur,
être reproduites par le moyen des presses typographiques.
Or, si l’on considère que le dessin sur pierre n’exige pas
un soin plus grand que celui qu’on est obligé de prendre
pour dessiner sur le bois ; que, dans certains cas , ce soin
est peut-être encore moins grand ; que, par ce procédé,
la dépense des bois, qui est si considérable pour les gra-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 24
vures un peu grandes, devient nulle avec le procédé dont
nous parlons ; que l’on peut extraire d’une planche gra-
vée telle ou telle figure qu'il convient et avoir par ce
moyen, des"clichés de machines parfaitement rendus avec
toute la pureté de la gravure en taiïlle-douce, on com.
prendra immédiatement les avantages immenses que le
procédé de M. Gillot met entre les mains de tous ceux
qui ont des ouvrages à publier. |
Le principe du procédé de M. Gillot est dans sim-
plicité extrême; mais l'exécution en est assez délicate
et exigeait bien des recherches avant de pouvoir
parvenir aux résultats dont nous venons de parler.
Quelques mots sufliront pour faire comprendre ce
principe: » |
Qu’on suppose encré, avec une encre suffisamment
grasse, le dessin lithographié , ou gravé, qu’il s’agit de
reproduire en relief. Rien ne sera plus facile que d’en
prendre une épreuve sur du papier à report ; et cette
épreuve , ainsi préparée, étant appliquée avant d’être
bien séchée sur une planche de zinc, bien poncée , bien
polie , pourra fournir, sur ce métal , une contre-épreuve
aussi pure que le dessin sur pierre. Pour obtenir ce
dessin en relief, il s'agira donc de faire mordre toutes
les parties du zinc qui n’auront pas été recouvertes par
l'encre de la contre-épreuve. -Or, c’est précisément dans
cette opération que git toute la difficulté; car l'encre
d'imprimerie , par elle-même n'offre que bien peu de
résistance à l’action des acides, et surtout d’acides assez
énergiques pour fournir les reliefs nécessaires pour l’im-
pression typographique. On pourrait croire qu’en ména-
geant les morsures et en les faisant successivement, on
pourrait, jusqu’à un certain point, résoudre cette difficulté ;
22 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
mais le problème est infiniment plus complexe, car
le degré de ces morsures devant être différent, suivant
les teintes du dessin il faut nécessairement mettre à
l'abri les parties suffisamment préparées après chaque
opération. Voici comment s’y prend M. Gillot, pour
obtenir ce résultat :
D'abord, pour donner plus de résistance à l'encre du
report, il saupoudre sa planche de fleur de résine qu’il
étend délicatement sur le dessin avec un blaireau ; après
quoi , il place la planche dans la cuve de gutta-percha où
doit se faire le mordançage.
Cette cuve doit avoir une disposition particulière en
raison du mouvement continuel qu’on est obligé de don-
ner au liquide acidulé, pour empêcher la stagnation des
sels formés par l'acide et le zinc,et pour qu’il puisse réagir
d’une manière nette et uniforme sur la planche. Cette
cuve est disposée en bascule et pivote sur deux coussinets
fixés sur le bâtis qui la supporte.
Le liquide acidulé qu’emploie M. Gillot n'est autre
chose que de l’eau acidulée avec de Pacide nitrique. Ce
liquide doit être essayé, à chaque opération , au moyen
d’une pierre lithographique sur laquelle on en jette
quelques gouttes. Par le dégagement, plus. ou moins
rapide, des bulles de gaz acide carbonique. qui se trouvent
alors formées, il est facile de juger du degré de force du
liquide.
On commence d’abord par une morsure très-légère , et
cette morsure est destinée à attaquer seulement les pe-
tites parties blanches qui existent dans les teintes les
plus foncées. Pour la faire , on fait basculer successive-
ment la euve pendant un temps plus ou moins long ,et
on achève l'extraction des sels formés par l’action de
CONGRÈS DES ACADÉMIES. | 23
l'acide au moyen d’un blaireau. Ordinairement cette pre-
mière morsure exige un quart d'heure environ. Quand on
a jugé la morsure de ces parties claires des teintes fon-
cées suffisantes , on retire la planche de-la cuve , on l’es-
suie, puis on la sèche et on la place au-dessus d'un gril
échauffé en-dessous, au moyen de poussier de charbon en-
flammé , qu’on a soin de répartir également sous de la
cendre chaude. Sous l'influence de cet échauffement , la
légère couchede résine répandue sur le dessin, se fond
doucement, ainsi que l’encre, et se divise dans toutes les
petites cavités formées par cette première morsure. Toute-
fois, comme cette couche n’est un peu épaisse que sur les
noirs vifs et les teintes très-foncées, ce premier échauffe-
ment ne bouche que les petites fentes claires qui se trou-
vent au milieu de ces teintes. Aussitôt que cet effet est
produit , la planche est retirée de dessus le gril et re-
froidie à l’air libre; après quoi, on l'encre fortement avec
le rouleau lithographique; comme si on devait en tirer
une épreuve. On recommence ensuite à la saupoudrer ‘de
fleur de soufre pour la mettre ‘en état de subir une nou-
velle préparation,
. Cette nouvelle préparation doit attaquer les teintes
un peu moins foncées du dessin , et en conséquence elle
doit être un peu plus énergique. L'opération d’ailleurs se
conduit exactement comme la première fois: seulement
le degré d’échauffément de la plaque, quand elle est placée
sur le gril, doit être un peu plus élevé ; et, comme le des-
sin Jui-même est plus chargé d'encre et «de résine , la
fusion de la couche s’étend davantage , ce qui bouche: db
cavités ménagées dans la première opération.
Après avoir de nouveau. encré le dessin et l'avoir sau-
poudré pour la_troisième fois de fleur de résine, on
21 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
commence la troisième morsure qui provoque un nouvel}
échauffement de la plaque, puis une nouvelle fusion de
la couche protectrice , et on recommence de la même
manière quatre, cinq, Six, sept morsures, jusqu’à ce
que le dessin ne présente plus qu’une masse noire
uniforme sans distinction de demi-teintes (4). Alors
on prépare la planche avec de l’eau acidulée très-forte-
ment (1 partie d’acide sur 12 d’eau) qui creuse défini-
tivement les parties complètement blanches. Cette der-
nière préparation se fait toute seule et Eee trois quarts
d'heure.
Quand Les blancs occupent sur le dessin une surface
un peu large, on les recouvre de gomme-laque liquide,
avant la première opération , afin de maintenir davan-
tage la force de l'acide et de donner du soutien au
rouleau lithographique, lorsqu'on encre la planche après
chaque morsure. On découpe ensuite ces parties à la
scie, avant que d'appliquer sur bois la plaque de zinc qui
est devenue un cliché.
Maintenant on comprendra quel soin il faut sm à
l’action du mordant pour que toutes leslignes délicates, les
teintes faibles et les parties fines d’un dessin soient suffi-
samment menagées , et c’esten cela surtout que M. Gillot
a fait preuve d’une habileté rare qui éloignera de lui d'ici
à long-temps les contrefacteurs.
Aujourd’hui, le système de gravure paniconographi-
que n’est plus-à l’état de simple innovation, il constitue
une véritable-branche d’industrie à laquelle ont recours
(1) Cet étatde la planche est le résultat des fusions successi-
ves de la couche d'encre et de résine qui a rempli successivement
toutes lescavités laissées par les parties blanches du ‘dessin.
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 25
plusieurs publications françaises et anglaises, entre autres
le Diogène, le Journal amusant, la Revue anglo-
française, elc. , etc. Mais une chose curieuse à consta-
ter, c'estque c'esten Angleterre que ce procédé est le
plus connu et le plus recherché, Dans l’origine, M. Gillot
n’a reçu aucun encouragement , et l’on peut reconnaître
en celà, une fois.de plus , la triste prévention qui existe
en France contre les inventeurs et qui fait que la plupart
des invéntions françaises sont obligées d’aller demander
à l'étranger leur brevet de vitalité.
Les ‘avantages de là paniconographie que noüs avons
énumérés ne soht pas les seuls. On peut , par son moyen,
obtenir des planches avec descorrections ou des additions
que l’on ne voudrait pas faire intervenir dans la planche-
- mère. Bien plus,.on a pu faire revivre des gravures dont
les planches étaient usées en refoulant celles-ci et en en-
graissant convenablement l'épreuve de report, D’un autre
côté, on a pu reproduire les types de la chromoitho-
graphie, de manière à reproduire typographiquement
des dessins coloriés. M. Desjardins, qui est parvenu à
reproduire, à s’y méprendre , les aquarelles et les dessins
des artistes en renom , compte bien tirer parti de la
paniconographie pour rendre son procédé moinsedispen-
“dieux, et en faire profiter le public.
Enfin , il, n’est pas jusqu’à la reproduction des auto-
graphes, des modèles d’écrituré et des cârtes géogra-
phiques qui ne.puissent profiter avantageusement de cet
art nouveau.
7 ii da bS
Système de gravure électrique de M, Salmon.
Le procédé de M. Salmon, de Chartres, s'applique prin-
cipalement à la reproduction des dessins, des gravures et
>
26 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
des photographies ; il est assez simple pour que toute
personne, complètement étrangère à l’art du dessin et de
la gravure, puisse le mettre à exécution. |
Pour lareproduction des dessins, il faut, autant que pos-
sible, que ces dessins soient faits sur du papier préparé à
la gélatine et au blanc de zinc avec un crayon de zinc. Cette
manière de dessiner, d’ailleurs ,-ne: présente pas plus
de difficulté que le dessin à la mine de plomb ordinaire.
Ces précautions ayant été une fois prises, on expose la
feuille dessinée à la vapeur d’iode, absolument comme
quand on iodure une plaque daguerri ienne , et, afin d’éga-
liser le dégagement des vapeurs d'inde, on méle à
cette substance de la magnésie. Sous’l’influence de
cette vaporisation, les particules de zinc, qui sont laissées
par le crayon sur le papier préparé, forment un iodure
de zinc, de sorte que le dessin, de noir qu’il était, passe
au rouge. Immédiatement après cette préparation , on
applique la feuille sur une planche de cuivre jaune, et
on la soumet, ‘au moyen d’une presse lithographique,
à une pression très-rapide qui fixe l’iodure de zinc sur le
cuivre. Toutefois, lexdessin n’est pas dans cet état visible
sur la planche du cuivre, et , pour le faire apparaître, il
est nécessaire de frotter cette planche avec un tampon
de coton légèrement imprégné de mercure; il faut
même que celte opération suive immédiatement et le
plus rapidement possible l’impression du dessin sur
la planche,;-afin que l’iodure de zinc nes’évapore pas.
Après celte opération , le dessin apparaît en blanc sur
un fond jaune. Alors, avec un rouleau d'impression li-
thographique imprégné d'encre typographique", on re-
couvre de noir toute la planche de cuivre, et il n‘y a que
les parties ‘qui ont été recouvertes de mercure qui ne
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 97
prennent pas l'encre. Après que cette couche d'encre a
été séchée, et que le mercure recouvrant le cuivre a été
enlevé, au moyen d’une simple évaporation ou d’un lavage
au nitrate d'argent ou à l'acide nitrique, la planche est
soumise à l’action électrique , en servant d’électrode so-
Juble à un bain de sulfate de cuivre traversé par un
courant. Pour cela, ilsuffit que cette planche soit attachée
au pôle positifde la pile qui doit agir sur le bain de sulfate
de-cuivre. Il arrive alors que les portions dénudées de
la planche se trouvent attaquées et se creusent sous
l'influence «du courant, tandis que les autres parties se
trouvent ménagées par l'enveloppe isolante dont elles
sont recouvertes.
On pourrait, avec ce procédés se passer de l’action
électrique en faisant mordre la planche avec.de l’eau-
forte, comme pour les gravures ordinaires.
Le même procédé peut être employé pour la repro-
duction des gravures ; seulement, on est obligé de gé-
latiniser le papier sur lequel elles sont imprimées, ce
que l’on fait facilement en l’imprégnant par derrière de
gélatine très-claire, Comme l'encre grasse est facilement
attaquée par l'iode, les traits de la gravure se trouvent
exactement dans le même cas que les’traits laissés par le
crayon de zinc, et le reste de l'opération se conduit
comme nous l’avons expliqué précédemment,
Au lieu de faire creusér le dessin par l’action de la pile,
on pourrait, par le même moyen, mais en intervertissant
la disposition des pôles de la pile et en prenant un bain
convenable, faire déposer sur les parties dénudées de la
planche de cuivre une légère couche de fer. Alors, après
avoir enlevé l'encre grasse dont cette planche est recou-
verte et avoir imprégné de mercure toutes les parties
28 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
non recouvertes de fer, ce qui est facile puisque le mer-
cure n’attaque pas ce dernier métal, on peut imprimer le
dessin à la manière des lithographies, puisque alors
l'encre ne s'attache qu'aux parties ferrées de la planche.
Pour la reproduction des photographies, le procédé
est un peu plus compliqué. 11 faut d’abord prendre un
positif de ces photographies sur verre, et polir la plaque
de cuivre destinée à recevoir la gravure ‘comme une vé-
ritable plaque daguerrienne. On iodure cette plaque
comme s’il s'agissait de faire une épreuve au daguerréo-
type, puis on place au-dessus le positif, eton expose le
tout à une lumière assez vive. Au bout du temps qu'on
a jugé nécessaire pour l'opération, et qui est, en général,
assez long , on frotte de mercure la plaque de cuivre .
Alors, les parties attaquées par la lumière sont les seules
qui ne prennent pas le mercure ; par conséquent , ce sont
celles qui se trouvent recouvertes d'encre et qui ne
sont pas attaquées par la morsure de la planche. Tout
le reste de l'opération s'effectue exactement commé pour
la reproduction des dessins. |
Les autres procédés que nous allons étudier sont dus
à MM. Devincenzi, Poitevin, E. Rousseau, E. Bastien.
Autres procédés. .
Avec le procédé de M. Devintenzi, le dessin doit être
préalablement lithographié sur une planche de zinc pré-
parée en conséquence, et c’est par l’action du courant
électrique que la planche de zinc se trouve creusée de
manière à fournir le dessin en relief, Il paraîtrait que
cette tranformation n’exige pas, pour se faire, plus de
six minutes.
Le procédé Poitevin s'applique principalement à la
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 29
gravure des photographies. Il consiste à couler une couche
uniforme de gélatine sur la planche à graver , à trem-
per celle-ci dans une dissolution de bi-chromate de po-
tasse, quand la couche de gélatine a pris une consistance
suffisante , et à l’exposer à l’action de la lumière, soit à
l’intérieur de la chambre obscure , si on veut opérer
directement d’après nature, soit derrière le négatif trans-
parent qu’il s’agit de reproduire. Après cette exposition,
la plaque est plongée dans l’eau , et toutes les parties
qui n'ont pas subi l’action de la lumière s’imprègnent
d’eau, segonflent et produisent des reliefs sensibles à
la surface de la plaque ; tandis que les parties frappées
par la lumière s’humectent à peine, ne se soulèvent pas,
et constituent relativement des creux. Les reliefs, par
céla même, correspondent aux noirs du dessin, el les
creux aux blancs , de sorte qu’il suffit de mouler cette
planche comme on le fait pour les clichés des gravures
sur bois, pour obtenir la gravure en relief du dessin ou de
la vue que l’on veut reproduire, En prenant pour épreuve
type"un positif, au lieu d’un négatif, on aurait la gravure
reproduite en creuxet susceptible d’être imprimée comme
les gravures ‘en taille-douce.
Par. un autre procédé aussi simple, M. Poitevin est
parvenu à se: passer de moulage et à fixer directement,
sur la planche, le dessin qu’il s’agit de reproduire ; dans
des conditions telles qu'il peut être imprimé comme une
* planche lithographique, Ce deuxième procédé consiste à
appliquer sur une pierre lithographique , une ou plu-
sieurs coüches, à volumes égaux, d’une dissolution con-
ceñtrée d’ün chromate ou de bi-chromate à base alcaline
terreuse ou métallique, Après dessiccation de cette couche,
on soumet la planche à la lumière , et, quand elle est
30 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
suffisamment impressionnée , on passe au-dessus le rou-
leau à encre lithographique qui la recouvre d’encre,
puis on lave à grande eau. Il arrive alors que l’encre se
détache de toutes les parties qui n’ont pas reçu l’action
de la lumière , et le dessin reste parfaitement tracé sur
la pierre. 11 ne s’agit plus alors que de l'encrer , comme
on le fait d’un dessin lithographique ordinaire , pour em
tirer tel nombre d'exemplaires qu’il convient.
Le procédé de MM. Émile Rousseau et Masson a une
grande analogie avec celui de M. Poitevin. Il consiste à
étendre sur la planche d’acier une couche de gélatine ,
et puis, lorsqu'elle est sèche, à la recouvrir d’une so-
lution de bi-chromale d’ammoniaque et de gélatine, Après.
l'exposition à la lumière, on enlève le bi-chromate non at-
taqué, on passe rapidement une solution d’acide gallique,
et on lave encore rapidement ; on laisse sécher, on borde
la plaque avec de la cire molle pour qu’elle puisse re-
tenir une couche de liquide ; on verse à la surface une
solution assez faible de nitrate de cuivre légèrement acide
cette fois ; au bout de quelques instants, le dessin se
recouvre d’une couche de cuivre tr ès-uniforme, le reste
de la plaque se maintenant à nu; dès queéelte couche
de cuivre a acquis assez d'épaisseur, et qu’elle tend: à de-
venir moins nette, on enlève la solution de cuivre; on
lave et on dépouille la plaque ; le dessin est alors r'epro-
duit en creux sur l’acier. *
Nous ne parlerons pas du procédé de transport litho-
graphique de MM. E. Rousseau et Masson, car il ne diffère
de celui de M. Poitevin que par l'addition d’une prépa-
ration au savon qui ne constitue certainement pas un per-
fectionnement.
Le but que s’est proposé M. E, Bastien, est de permettre
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 31
à un artiste d'obtenir, autant de fois qu’il le désire, la re-
production d'un dessin. Pour cela, M. Bastien étend sur
une plaque de verre une mince couche de blanc de
plomb sur laquelle il trace avec une pointe, ou au burin,
le dessin qu'il veut reproduire. La pointe enlevant le
blanc de plomb et mettant ainsi le verre à nu partout où
elle passe, chaque trait ressort en noir, si on a eu soin de
placer un morceau d’étoffe de cette couleur sous la plaque
de verre. Le dessin achevé, on pose la plaque de verre à
plat dans un tamis qu’on plonge dans un bain de sulfure
de potassium dissous dans l’eau. Ce réactif noircit le
blanc de plomb, en quelques secondes et on obtient ainsi
un véritable cliché dont on peut tirer des épreuves par
les procédés ordinaires de la photographie, Pour fixer
le cliché et lui permettre de résister au tirage d’un grand
nombre d'épreuves, M. Bastien le recouvre d’un vernis
dur et transparent. »
Parmi les nouveaux procédés de reproduction des
Œuvres graphiques, , nous ne devons pas oublier le sys-
tème de M. Lachane, au moyen duquelon peut transporter
Æt décalquer les écritures nouvelles et anciennes, ce qui
permet la multiplication des authographes précieux, que
lon peus ainsi reproduire sans les endommager en-aucune
manière.
Cette apr est accueillie par d’unanimes ap-
plaudissements.
M. Ch. de Bacq lit un rapport sur une nouvelle théorie
de la physique, par M. Grove.
MESSIEURS,
Il n’est peut-être pas très-facile d’assigner les progrès
32 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
qu’une science a faits dans une année, parce que rien
ne reste détaché dans le faisceau immense des connais-
sances humaines, auquel chaque époque apporte son
contingent. Cependant, pour apporter mon mot à la ré-
ponse d’une des questions dé votre programme, je vous
parlerai des vues profondes que les temps ont préparées,
qu'un physicien anglais, M, Grove, émettail dans une
leçon faite à l'Institution de Londres, en janvier 4842 :
qu’il a développées plus complètement dans une série de
lectures sur le même sujet, en 1843, et qu’il à fait im-
primer depuis, Une deuxième édition suivit promptement
la première. Une troisième édition, considérablement aug-
mentée, a paru dans ces derniers temps. Enfin, en 1856,
une traduction française a répandu dans notre pays cette
conception nouvelle. Les savants français paraissent adop-
ter cette théorie , d’une grande simplicité. Nous pouvons
donc prendre la date de la traduction , des Corrélations
des forces physiques, par M. Grove, comme celle d’un
grand progrès dans les sciences physiques. C’est en
considérant la question à ce point de vue que je rap-
pellerai, le plus sommairement possible , le principe
posé par le savant membre de la Société royale de Lon-
dres,
Malgré la réserve de l’auteur, ses vues ne tendent à
rien moins qu’à changer toute la théorie de la physique.
Si quelques personnes trouvent bien hardi de tenter une
subversion dans une science aussi étendue et aussi avan-
cée que Ja physique, je leur répondrai tout d’abord que
c’est précisément l’état avancé de la science qui a amené
ces vues nouvelles et présentées d’ailleurs en leur temps,
et trouvant dans cette dernière considération l’une des
causes d’un succès bien prochain, sinon déjà accompli.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 33
On sait que l'homme, quand il commence à étudier
une science, ÿ voit une foule de phénomènes divers, qui,
ordinairement, par leur multiplicité ; jettent la confusion
dans l'esprit. A mesure que: esprit répand la lumière,
les phénomènes se simplifient, se ramènent les uns aux
autres, jusqu’à ce qu'enfin la lumière s'étant complè-
tement tfaite, lesprit s'étonne de trouver l'unité là où il
avait cru voir d’abord une effrayante multiplicité.
Ce qui se passe dans la conception d’un homme,-se
passe aussi dans l’ensemble des travaux des généra-
tions, La physique, la science d’observalion de beaucoup
la plus avancée, est composée de plusieurs branches :
la mécanique, la chaleur, l’acoustique, l'optique, l’élec-
tricité, le magnétisme, Ces différentes parties ne se sont
enrichies considérablement, ou même n'ont élé connues
que dans ces derniers temps. Ainsi l'optique se divise en
optique ancienne et optique moderne. Ainsi le magné-
tisme est nouveau ; car il ne faut pas arguer, de ce que fa
boussole était connue en 1200 que le magnétisme était
alors une branche de la physique ; pas plus que l’élec-
tricité, qui doit tant à Ampère , aura été connue des an-
ciens, parce qu'ils savaient que l’ambre frotté attirait les
corps légers. On comprend dès-lors que, même dans ces
derniers temps, les savants ont dà réunir un grand nom-
bre de faits. de
Le faisceau de tant de matériaux n'a pas plutôt été
composé, que des explications heureuses ont constitué
une théorie dans chaque branche. Mais chaque ordre de
phénomènes était encore complètement détaché des au-
tres, Cependant on a bientôt entrevu que les phénomènes
de la chaleur se rapprochaient de ceux de la lumière, On
disait que l'électricité et la lumière avaient une certaine
34 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
connexion, Le magnétisme , d’abord complètement dis-
tinct de l'électricité, a bientôt été considéré comme pro-
venant de celle-ci, soumise à des mouvements réguliers.
Si le mouvement restait encore complètement séparé des
autres branches de la physique ; si la production-du son
était due.à un mouvement particulier de la matière; si
l'optique, l'électricité , le magnétisme étaient considérés
comme provenant de mouvements dans un milieu maté-
riel, quoique dépourvu d’une des propriétés qui nous
paraissent complètement inhérentes à la matière, la
pesanteur; si la chaleur était aussi un agent impondé-
rable ; cependant l’unité semblait déjà se faire dans la
théorie générale, et par les rapprochements que je citais
tout-à-l'heure, et parce que la chaleur était souvent con-
sidérée comme une force, et parce que les autres'agents
impondérables, qu’on n’osait peut-être pas encore ap-
peler forces, étaient cependant regardés comme nés d’un
mouvement invisible et capable d’en produire un qui soit
palpable.
Aujourd’hui, d’après M. Grove, la force serait la cause
première de tout phénomène physique. La force qui
produit le mouvement , produirait tous les phénomènes
de chaleur, de lumière, d'électricité, etc. Ce qui fait que
le livre du savant anglais présente une idée neuve, et
ramène toute la théorie physique à l'unité, c’est qu’il
fait voir que la force qui produit le mouvement et celle
qui produit un son, de la lumière , de la chaleur; qui
rend aimanté un barreau d’acier ordinaire, ete. , sont
identiquement les mêmes.
Cependant M. Grove,réservé comme les esprits qui ne
courent pas après une réputation éphémère , réservé
comme les esprits ardents à la poursuite de la vérité,
profond comme les esprits d'élite, n'ose pas trancher la
CONGRÈS DES ACADÉMIES … - 35
question qu’il discute avec beaucoup de lucidité: « Je suis
« très-fortement enclin, dit-il, à croire que les autres
« affections de la matière que j'ai énumérées ci-dessus,
« sont et seront finalement résolues en un mode de
« mouvement; mais ce serait aller trop loin , pour le
« moment, que d'affirmer leur identité avec des formes
« de mouvement. » Ne voulant pas s’aventurer, M. Grove
suit son idée sur l'unité, mais toujours en posant des
faits. Veut-il faire voir que le mouvement peut $e
transformer en chaleur, il constate que si le mouvement
d’un corps se trouve arrêté, il naît une force nouvelle,
ou plutôt un effet nouveau de la force. Au lieu de
mouvement visible, il y a production de chaleur : « Je
« me hasarde, dit le savant anglais, à regarder la
« chaleur qui naît du frottement ou de la percussion
« comme une continuation de la force associée d’abord
« avec le corps en mouvement, lequel avec le choc cesse
« d’exister comme mouvement grossier et palpable, mais
« continue d'exister comme chaleur. »
Il est remarquable que, dans le choc de deux corps
donnés, l’un au repos, l’autre tombant. d’une hauteur
* conStante, la même quantité de chaleur est toujours dé-
veloppée. —+ Dans le frottement, si les corps frottés sont
de même nature, il ne se produit que de la chaleur ; s'ils
sont de nature différente, il y a de l'électricité.
Le mouvement produit donc immédiatement la chaleur
et l'électricité ; el l'électricité, produite par le mouve-
ment, engendre le magnétisme, force qui est toujours
développée par les courants électriques perpendiculaire-
ment à la direction de ces courants, La lumière aussi est
facilement produite par le mouvement, soit directement
comme lorsqu'elle accompagne la chaleur, née du frot-
56 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE:
tement, soit médiatement par l'électricité résultant du
mouvement, comme dans l’étincelle électrique qui possède
beaucoup des attributs de da lumière solaire. Enfin le
mouvement peut, à son tour, être produit par les forces
qui émanent du frottement. Ainsi la divergence des
_pailles de l’électromètre, la déviation de l'aiguille magné-
tique sont des mouvements. La chaleur peut aussi pro-
duire tous les autres modes de force. Car nous la voyons
dans la machine à vapeur produire de mouvement ; et, si
on ne savait pas que, dans bien d’autres circonstances, elle
produit les autres modes, au moins nous accepterions
que, puisqu'elle produit le mouvement, elle produit
médiatement les autres modes. Mais la chaleur ne produit-
elle pas l’électricité comme le constate l'appareil de
M. Melloni? N’est-il pas à la connaissance de tout le
monde qu’elle produit Ja lumière ?
Les exemples et de très-belles expériences ne manquent
pas à M. Grove, pour constater la tranformation successive-
ment de l’un quelconque des modes entre tous les autres.
Il y a donc lieu à accepter, l’un des modes naissant suc-
cessivement des autres, que l’un n’est qu’une transfor-
mation d’un autre, etque le mouvement, l'effet de laforce,
la chaleur , la lumière, l'électricité seraient des effets
de ja force. Mais, alors la lumière, étant un mode de
la matière palpable, ne serait pas produite, pas plus que
l'électricité, le magnétisme, par des mouvements dans
une matière impondérable, l’èther et les fluides magné-
tiques, Mais la lumière qui nous vient du soleil, des
éloïles, pour être un mouvement de la matière, exige
qu’il y ait de la matière pondérable entre nous et le soleil
et les étoiles. M, Grove ne recule pas devant cette hypo-
thèse, et je ne vois pas de raison pour la refuser. Celte
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 37
matière pondérable serait très-rare mais elle existerait
partout, Les mouvements palpables se transformeraient
en mouvements vibratoires dans le sens des ondes,quand
un mouvement palpable se transformerait en un sôn;.en
mouvements vibratoires perpendiculaires à la direction
. des ondes, quand le mouvement palpable se trausforme-
“ rait en lumière. On conçoit très-bien des transformations
analogues, quand il s’agirait d'électricité, de magnétisme,
d’affinité chimique.
M. Grove eskun homme op sérieux pour avoir jeté
toute une théorie du premier jet sur lewpapier. Il ne
s'ayance qu'avec mesure, Aussi son livre, quoiqu’à la
troisième édilion , est-il intitulé : Corrélation des forces
Physiques , et non : Nouvelle théorie de la physique.
Mais, plus il y a de mesure de la part de l’auteur, et plus
ses idées acquièrent de force. Plusieurs comptes-rendus
de cette traduction ont déjà paru. L’un.d’eux , inséré dans
une des revues scientifiques les plus sérieuses , contient
les lignes suivantes : « Partout le même esprit phi-
« losophique dans ces pages si "concises, si pleines
« «de vérité. Partout domine lidée.de corrélation, et
€ «par suite celle de la réduction des causes à l'unité ;
« partout encore se retrouve ce désir de bannir de la
« science’ les hypothèses inutiles, les conceptions abs-
« traites, les entités subtiles ou occultes. Le sujet que
« M, Grove a traité est, sans contredit, l’un des plus
« élevés qu’on puisse se proposer ; mais il esi aussi
« l’un des plus difficiles etides plus périlleux. M. Grove
« ètait à la hauteur de sa tâche: si la plupart de ses con-
« clusions nous paraissent sans réplique, on nous per-
« mettra d’avouer que d’autres ont laissé des doutes dans
« notre esprit, Il était difficile, au reste, qu'il en fût
53 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« autrement; mis en présence d’un système embrassant
« tous les phénomènes du monde matériel, bien que ré-
« sumé dans un petit nombre de pages, comment au-
« rions-nous pu prétendre saisir,jusque dans ses moindres
« détails, une œuvre née d’une vie entière de réflexion
«et de travail ? » |
Reconnaissons donc, Messieurs, que, si cette théorie
nouvelle n’est pas encore faite, ou plutôt n’est pas encore
acceptée , elle puise sa source dans des idées trop saines,
pour qu’on ne sente pas qu’une très-grande somme de
probabilités est en sa faveur. Cette théorie, qui ramènerait
tous les phénomènes à une cause unique, la force, serait
un merveilleux progrès, et nous permettrait de répéter
cette parole de l'abbé Haüy, qui m'a frappé, il y a 27
ans, lorsque mon professeur de physique nous la*eitait à
propos de la seule cristallographie : « On reconnait ici
« que nous pourrions appeler devise familière de la na-
« ture: Économie et simplicité dans les moyens, ri-
« chesse et variété inépuisables dans les effets. »
M. Des Ferris donne quelques détails sur le nouveau
procédé de pralinage des grains de M. d’Illier, d'Orléans ,
qui a pris de grands développements en 1856.Ce procédé,
très-simple, consiste à enduire le grain de blé de matières
animalisées, comme poudrette , guano, cornes , colle on
autres matières non fermentescibles, de manière à fournir
au grain la substance nécessaire à son développement.
M. Perrot, président du Comice d'Orléans, dit que ce
procédé, qui parait avoir un grand intérêt pour l’agricul-
ture, est en voie d’expérimentation dans le Comice d’Or-
léans ; la question est à l’étude ; des commissaires ont été
nommés , tout fait présumer un résultat favorable ; mais
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 39
le Comice d'Orléans ne donnera pas sa sanction avant
que les résultats n'aient pu être constatés PAR des expé-
riences officielles.
Après une discussion à laquelle prennent part MM.
Dréolle et le comte de Gourcy, la suite de la discussion est
renvoyée à la séance du 14, dans laquelle M. d’Illier, d'Or.
léans, viendra donner lui-même des détails sur son pro-
cédé,
La séance est terminée par la lecture d’une pièce de
vers de M"°, la baronne de Montaran.
SÉANCE DU 14 AVRIL.
(Présidence de M. DE GENOUILLAC. )
Siégent au bureau : MM. DE CAUMONT, le baron Tra-
VAUX, délégué d’Avranches, G.-A. LEROYER, délégué
d'Angers, le comte DE TOCQUEVILLE, DESFERRIS, le comte
D'ESTERNO , délégué d’Autun,
M. G. Desvaux remplit les fonctions de secrétaire.
M. de Caumont lit plusieurs lettres de personnes qui
s’excusent de ne pouvoir assister aux séances du Con-
grès, ou qui font hommage de: différentsouvrages. 1]
en lit ensuite une de M. Albert du Boys, qui annonce,
pour le 3 septembre prochain, l'ouverture de la 24°.
session du Congrès scientifique, à Grenoble, et qui prie
les membres du Congrès actuel de vouloir bien solliciter,
auprès de M. Gustave Réal, secrétaire-général du chemin
de fer de Paris à Lyon, une diminution de moitié dans le
prix des places pour les membres qui auraient donné leur
adhésion; puis auprès de M. le duc de Valmy, pour l’em-
branchement du chemin de fer deSt,-Rambert à Grenoble.
0 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
On propose de nommer une commission à ce sujet.
M. de Caumont lit enfin une lettre de M. le comte
d'Héricourt, qui annonce une communication importante,
de M. le bäron d'Herlincourt, sur le système Kennedy
qu’il à appliqué en grand auprès d’Arras,et dont il a
obtenu les meilleurs résultats.
M. Mirleau d’Illier vient au Congrès compléter une com-
munication qui avait été commencée la veille, en son nom,
par M. Des Ferris, sur les semences pralinées : il a
monté à Orléans une usine à vapeur pour le pralinage.
Il avait d’abord opéré avec du noir-animal et de Ja
colle de gélatine, puis il a ajouté du sulfate de potasse,
de la dolomie, du guano, etc, , etc., en quantités cal-
culées de manière à ne pas brûler le germe de la
plante. On a obtenu du succès ; le blé a un beau chevelu,
el les tiges sont en raison directe des racines.
M. Mirleau annonce un rendement plus fort d’un Liers:
ainsi 2% hectolitres de blé à l’hectare, au lieu de 43
récoltés sur un froment cultivé à côté par la méthode
ordinaire.
Il fait appel aux chimistes, pour composer un mélange
qui fournisse tous les éléments du froment. Ses capsules
ont trois fois le poids du grain de blé. Dans une expé-
rience , après trois mois, les substances avaient disparu
et se retrouvaient, en partie, disséminées sur les ra-
cines. ?
Si on met trop de matières fertilisantes, les jeunes
plantes peuvent être brülées. Ainsi de la graine de rave,
chargée de trois fois son poids d'engrais, n’a pas levé.
Avec de la gélatine, on peut être exposé à voir les
germes détruits par la fermentation acide, si la prépa-
ration n’est pas bien séchée, Maintenant M. Mirleau
CONGRÈS DES ACADÉMIES. LA
emploie de la corne, des poils, des cheveux, dissous
dans la potasse rendue caustique par la chaux vive. Les
capsules sont faites de manière à être facilement désa-
grégées par l’humidité du sol,
L'emploi de cet engrais présente une grande économie
sur celui du noir, qui vaut 30 fr. les 100 kilog., et
sur celui des autres fumures. En effet, le blé tallant
beaucoup plus, il suffit de 4 hectolitre de grain à l’hec-
tare, et on dépense , pour le praliner , 30 fr. de noir
et 5 fr. de main-d'œuvre.
Avec les bi-phosphates fossiles , on a trouvé encore
une plus grande économie.
Le Congrès recoit cette communication avec intérêt; il
désire que les expériences annoncées par M. Perrot et qui
sont faites par le Comice d'Orléâns, viennent fixer” les
idées sur la valeur absolue du procédé. |
«M. Dréolle cite un jardinier, de St.-Quentin , qui ar-
rosait ses jeunes plants avec de la gélatine ; M. de Bouis
ajoute que, depuis bientôt vingt ans, l’horticulture de
Paris se sert souvent de dissolution de gélatine pour
ses arrosages.
M. Gomart demande si on a praliné la graine de bet-
terave , ce qui serait une très-bonne chose pour activer
sa première végétation.
On lui répond que les graines ne l'ont pas été, mais
bien les racines. On cile M. de Crombecque qui, dans
un mauvais sol, défoncé à l’avance, a obtenu de très-
bons résultats de betteraves repiquées®
M. de Gourcy cite, en Silésie, le baron Croppy qui
fabrique spécialement de la graine et du plant, et il
dit que les betteraves, repiquées ont donné 17 d
sucre de plus que les autres,
L2 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M. Kœklin emploie cette méthode, et fait son plant
sur couche , il fait de même pour le tabac qui a besoin
d’être repiqué de bonne heure. Si le tempsest contraire,
on peut couvrir les couches avec des paillassons.
Le même procédé peut être employé pour les ruta-
bagas.
M. Perrot signale l'opinion , émise par plusieurs pro-
priétaires agriculteurs distingués"des environs de Salbris,
que les seigles de semence , venus sur noir-animal", sont
moins bons. M. d’Illier dit qu’il a vu le contraire, et que
les blés pralinés sont encore plus beaux.
M. de Vogué a obtenu, sur 100 hectares ensemencés
avec du noir-animal, des seigles aussi bons et se repro-
duisant aussi bien que les blés sur fumier de ferme.
Le procédé de M. Mirleau est exploité maintenant
par une Compagnie. Il a été vendu , en Angleterre , à la
maison Barker et Gibson, pour 20,000 livres sterling.
Un.membre demande à M. Mirleau si chaque fermier
pourrait préparer son blé avec les substances fournies par
ses formules. L’opération est simple en elle-même , puis-
qu’il suffit d’avoir un cylindre ouvert à ses deux extré-
mités, suspendu sur deux courroies, et de verser d’un
côté le liquide et la matière pulvérulente qui doit en-
velopper le blé, Mais le grain mouillé présente une si
grande résistance qu'il est presqu'impossible de se
servir de machines à la main, et qu’on doit avoir
recours à la vapeur ou à tout autre moteur ina-
nimé. A l’usine d'Orléans, il faut 3 heures pour faire l’o-
pération avec des cylindres d’une capacité de 3 hectolitres,
M. d’Esterno demande si le pralinage est fait avec suc-
cès sur des pois et des haricots. M. Mirleau répond que
oui, surlout en employant des écailles d’huitres ré-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 43
duites.en poudre. La chaux n’a pas produit les mêmes
effets. ,
Enfin le grand avantage de ce procedé , c’est qu'on
peut employer des substances azotées ou des phos-
phates , soit qu’on veuille obtenir de la paille ou du grain,
et qu’on peut modifier la composition de la préparation
de telle ou telle manière , suivant le but on se propose
d'atteindre. :
M. de Gourey prend ensuite la dates pour rendre
compte des améliorations agricoles opérées pendant l‘an-
née 1856 , et des observations qu’il a recueillies pendant
son dix-huitième voyagé agricole dans l'Est de la France
et en Allemagne.
Il remet sur le bureau une e noté indiquant des expé-
riences de fumure pour betteraves, faites par M. Caird ,
excellent cultivateur Écossais.
50 mètres cubes de fumier
500 k. guano ont produit par hectare 75,000 k.
650 k. sel de Salaison CR
La même fumure , sans sel, n’a donné que, , , 59,000 k.
400 mètres cubes de fumier coûtant 460 fr.” ,. , 52,000 k,
466 k, guano
166 k, super-phosphate
466 k, nitra-phosphate
166 k. sel de salaison
M: de Gourcy indique ensuite un remède contre les
altises'ou pucerons des crucifères.—L'Oleum spicæ des
pharmaciens, versé par gouttes sur la graine et remué
de manière à bien l’enduire , empêchera l’insecte de
dévaster les jeunes plantes. Il annonce que, d’après
M. Stockhaerdt, célèbre professeur de chimie agricole
de Dresde, les betteraves repiquées donnent plus de
coûtant 120 fr. , , 48,500 k,
Lh INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
sucre et de parties nutritives que celles semées en’ place.
Les premières donnent 10,33 %, et 17,57 de: parties
nutritives ; les secondes donnnent 9,20 ‘> et 46,64.
D'après le même savant , les betteraves venues sur térres
bien fumées donnent au moins autant de sucre que celles
peu ou pas fumées, pourvu qu’ondles tienne serrées dans
les Lrirts afin de les empêcher de devenir Brasses,
0
Le Secr étaire, >
G. DESVAUX.
SÉANCE DU 15 AVRIL,
(Présidence de M. le marquis pe VigrAye, membre de
l'Institut des provinces. )
La séance s'ouvre à 2 heures.
Sont appelés à siéger au bureau : MM. .É comte DE
BONDY , MARCHAL, MAURENQ , DE BRIVES et CHALLES.
M. SELLIER remplit les fonctions de secrétaire.
M. de Caumont donne communication au Congrès des
diverses lettres qu’il a reçues depuis la séance d’hier.
M. Kervyn, de Lettenhowe , regrette que des obstacles
imprévus ne lui permettent pas d'assister aux séances du
Congrès ; les mêmes regrets sont exprimés par M. de
Fontenay, de la Société Éduenne; par M. C. de Baulny,
qui vient d’éprouver une perte de famille; par M. l’abbé
Jouve, qu'une maladie très-sérieuse de Mg”, l Évèque de
Valence retient dans cette ville.
M. l'abbé Jouve envoie un sommaire des travaux de
ses compatriotes de la Drôme. Cette analyse trouvera
CONGRÈS DES ACADÉMIES. L5
sa place dans le rapport général qui sera inséré dans
l'Annuaire.
Ilaé été fait hommage au Congrès des publications sui-
vantes ; Savoir :
Publications de la Société pour la. rechetie et la con-
servation des monuments Historiques dans le grand-
duché de Luxembourg.
Essai sur le système défensif des Mhains dans le
pays Éduen ÿ : par M: J.-G. Bulliot.
Poésies de Charles-Auguste Grérot, de Châteauneuf-
sur-Loire. s:
Odorane, de Sens, écrivain et artiste du XI°, siècle;
par M. Challe, membre de l’Institut des provinces.
Notice historique sur la Compagnie des archers ou
arbalétriers , et ensuite des arquebusiers de La ville de
Chälons-sur-Marne, et sur la fête donnée par elle en
1754; par M. Sellier, de l’Institut des provinces, l’un
des secrétaires-généraux du Congrès.
De l'enseignement primaire dans les campagnes,
— l’armée ; par M. le comte de Vigneral, de l’Institut des
provinces.
Wean-le-Victorieux , duc de” Brabant ; étude his-
tonique par M. Oswald Van-der-Berghe, membre de
l'Académie archéologique de Belgique.
Histoire, des congrégations religieuses , d’origine
poilevine ; “par M. Ch. de Chergé, membre de la Gommis-
sion archéologique diocésaine de Poiliers.
Les Wies des saints du Poitou; par le Même.
Histoire de sainte Radégonde, reine de France et
patronne de Poitiers ; par le Même.
Études sur Part de dessécher ; par M. le marquis de
Bryas, |
A6 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Instruction simplifiée pour l'essai et le choit des
eaux d'irrigation ; par le Professeur d’agriculture
chargé de linspection agricole du Merartemeis de la
Gironde.
Collection du Journal d'agriculture pratique, publié
par la Société d'agriculture et d'industrie du département
d’Ille-et-Vilaine.s
Compte-rendu des travaux et concours agricoles du
Comice de l'arrondissement de Dinan
Modifications à la législation sur le cheptel, pro-
posées par le Conseil général de Saône-et-Loire , sur le
rapport de M. d’Esterno, membre du Conseil général
d'agriculture.
Ordonnance de Philippe-le-Long contre les lépreux ;
par M. H. Duplès-Ogier (Extrait de la bibliothèque de
l'École des chartes).
Le castellum gallo-romain de Larçay, près de Tours;
par M. de Caumont.
Note sur les murs gallo-romains de Dax ; par le
Même.
Projet d’une mesure morale et financière devant
produire annuellement au Trésor au moins 40 mit-
lions ; par Auguste Pichat, de Poitiers.
Du véritable impôt applicable aux valeurs 2
‘tières ; par le Même.
Circulaire des membres de la Commission ent
d'organisation du Congrès scientifique de France, qui
doit s'ouvrir, à Grenoble, le 3 septembre 1857.
M. Marchal a la parole sur les-6°. et 7°, questions du
programme ; il s'exprime ainsi : 5
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 47
MESSIEURS,
: Quou'inscrit pour parler sur le système Kennedy,
je vous demande la permission de dire d’abord quelques
mots de la 6°, question, ainsi conçue :
« Quels sont les moyens les plus efficaces pour aug-
« menter le capital intellectuel en agriculture? A-t-on
« employé jusqu'ici tous les moyens qui peuvent sé
« duire cet accroissement, si désirable ? »
Non certes, on n’a pas employé jusqu'ici ‘tous les
moyens qui peuvent produire l’accroissement: désirable
du capital intellectuel en agriculture, car nos cultivateurs
sont en général d’une ignorance extrême, et leur art, si
noble et si utile, se réduit le plus souvent à une pratique
qui, mal éclairée, doit s’appeler routine, tandis que, gui-
dée par l'intelligence, elle serait de l'expérience.
Les statistiques du recrutement nous fournissent quel-
ques données sur l’état de l'instruction des classes
ouvrières et spécialement des ouvriers ruraux , qui
forment plus particulièrement le contingent annuel de
l’armée, Ce document prouve qüe près de moitié des
cultivateurs n’ont pas encore les premières “notions
d'instruction primaire.
La première chose à désirer, c’est que l'instruction
élémentaire se répande plus vîte et plus complètement
dans les campagnes, car l'instruction élémentaire est la
première-base du progrès. -
Mais le cultivateur, sût-il lire, écrire et compter, ce
serait encore peu de chose pour le développement pro-
gressif de la culture. Pour réaliser des progrès , il faut
pouvoir comparer ce qui se fait dans une contrée avec ce
LL
L8 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
quise pratique dans une autre, et appliquer les décou-+
vertes et les bonnes méthodes, en leur faisant subir les
modifications que le sol, le climat, les habitudes et sur-
tout Les ressources rendent nécessaires. Or, le cultivateur
ne peut pas entreprendre des voyages d'étude, c’est pour-
quoi les progrès restent trop souvent confinés dans un
petit cercle. Combien y a-t-il dé départéments encore en
France et dans chaque département,même les plus éclairés,
combien y a-t-il de cantons et de communes où le drai-
nage, malgré les encouragements officiels et officieux ,
est encore un mot vague , parce que les habitants n’ont
pas vu la chose ?
Eh bien ! Messieurs, pour arcrottre le capital intellec-
tuel de l’agriculture, je ne vois qu’un moyen réellement
efficace, moyen déjà pratiqué, quoique timidement, dans
quelques départements éclairés, c’est de porter aux
cultivateurs la science qu’ils ne peuvent aller chercher .
et que des lectures ne suffiraient pas à leur donner, et,
pour cela, il faut et il suffit de créer des cours nomades
d'agriculture sur une vaste échelle.
Loin de moi la pensée d'établir un antagonisme entre
l'industrie manufacturière et l’agriculture , ces deux
branches de la production sont aussi indispensables l'une
que l’autre : si l’une des deux cherchait à nuire à l’autre,
il faudrait lui répéter l’apologue de Menenius Agrippa,
Mais on ne peut disconvenir cependant que l'industrie
manufacturière a reçu jusqu’à présent des faveurs que
n'obtient pas l’agriculture. Aussi, pour rester strictement
renfermé dans la question, je ferai observer que , dans
toutes les villes industrielles, il existe de nombreux cours
publics et gratuits d'application de la science aux arts.
Ces cours sont à la portée des ouvriers et des manufac-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. h9
turiers qui peuvent chaque jour faire ou tenter l’applica-
tion, dans leurs usines ou leurs laboratoires, des leçons du
professeur. Il n’y a rien de semblable pour l’agriculture.
Dans quelques départements cependant, dans la Seine-
Inférieure , le Calvados, le Doubs, la Manche, des profes-
seurs nomades soit bénévoles, soit institués par les con-
seils généraux, vont, pendant un mois ou deux, faire des
leçons publiques pour les cultivateurs. Ces essais, trop
rares encore, montrent que le besoin de ces cours s’est
fait sentir et prouvent que la thèse Le je soutiens n’est
pas une théorie vague,
Aujourd’hui les cultivateurs orale nient lPutilité
de la science, comme un aveugle nierait la lumière ;
or, ilest d'observation que, plus on sait, plus on éprouve
le besoin de savoir ; moins on sait, moins on croit utile
d'apprendre. Les cultivateurs rechercheraïent donc la
science avec d'autant plus d’avidité qu’ils en auraient
d’abord reçu les premiers éléments.
Je ne m'étendrai pas davantage sur cette question, je
passe à l’application du système Kennedy.
11 y a deux manières de concevoir l'application du
système Kennedy, c’est-à-dire de l’engraissement des
terres au moyen d’un liquide fertilisant, circulant dans
des conduits Souterrains et répandus en arrosage.
L'une de ces applications est celle qui est réalisée déjà
sur un assez grand nombre de fermes en Angleterre, Elle
consiste à transformer en liquide tous, ou presque tous
les engrais de la ferme, à réunir ces liquides dans des
citernes, puis à fouler, au moyen d’une machine à vapeur,
ces engrais dans des tuyaux et à les répandre à la lance
sur les terres en culture, à différentes périodes de la
végétation.
3
50 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
- L'autre application, qui n’est autre chose que le système
tubulaire d'écoulement des engrais des villes, est indé-
pendant des fermes et ne peut se faire que par des ad-
ministrations municipales ou des compagnies conces-
sionnaires.
. Le premier mode a été jusqu'ici fort peu imité en
France, et je ne le crois pas susceptible d’ici à long-temps
de nombreuses applications, malgré les avantages qu'il
paraît présenter. Les obstacles sont les suivants: |
Le morcellement du sol, la cherté de la force motrice,
les frais considérables de premier établissement et l’in-
certitude des résultats.
Le morcellement, — En signalant cet obstacle, ne
croyez pas que je conclue contre la division de la
propriété, et que je regrette les substitutions et le droit
d’aînesse , seules bases de la conservation des grands
héritages.
Le morcellement est entré profondément dans nos
mœurs et dans nos besoins sociaux. S'il fait obstacle à
l'application de certains systèmes de culture dispendieux,
il a, d’un autre côté, de si grands avantages que leur
somme l'emporte de beaucoup sur les inconvénients.
Ainsi, en multipliant les propriétaires, il multiplie le
nombre de gens intéressés à l’ordre et à la stabilité. I]
fait obstacle à Paccroissement trop rapide des villes au
détriment des campagnes. Ainsi, malgré la propension,
constatée par les derniers recensements, des populations
ouvrières à affluer dans les grandes cités , la population
rurale forme , en France, les deux tiers de la population
totale : c’est le contraire en Angleterre. Les petites et
moyennes exploitations, si elles ne donnent pas la plus
grande somme de produit net, donnent certainement la
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 51
plus grande somme de produit brut. Le propriétaire d’un
domaine qu’il exploite lui-même, y donne certainement
plus de soins et plus de travail que le simple fermier, et
à plus forte raison le métayer.
Mais comme toute chose humaine a ses inconvénients
à côté de ses avantages, nous devons à la vérité de dire
que le morcellement est et sera long-temps encore un
obstacle à l'application, dans les fermes , du sytème Ken-
nedy , et cet obstacle subsistera tant que l'association
n’aura pas reçu, dans la culture, des applications sem-
blables à celle que nous lui voyons dans lindustrie, et
qui font enfanter à cette dernière de si étonnantes mer-
veilles. Lire |
Le second obstacle est la cherté de la force motrice.
La France n’a pas le bonheur de posséder d’inépuisables
mines de houille ; les bois se défrichent tous les jours,
et la cherté du combustible ira croissant avec le déve-
loppement de l’emploi des machines.
Le troisième obstacle est l’énormité des frais. M. Moil,
dans le relevé qu'il a fait du coût des machines, tuyaux,
et citernes nécessaires à l’application du système, montre
que , pour une ferme de 60 hectares , qui est déjà bien
au-dessus de la moyenne , en France, la dépense a été
de 75,000 fr. ; tandis que, pour une ferme de 200 hec-
tares, le prix de revient, par hectare, s’est abaissé à
moins de 200 fr. Or, les fermes de 200 hectares sont une
très-rare exception chez nous. Il faut aussi tenir compte
du prix plus élevé, en France, de la fonte et des ma-
chines; la différence est d’au moins 30 p. 070. Puis, pour
conduire la machine à vapeur, il faut un homme spécial,
un mécanicien ; le nombre en est excessivement li-
mité et conséquemment leur salaire fort élevé.
52 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Toutes ces considérations me font donc conclure que
ce progrès agricole , encore incertain dans ses résultats,
non pas comme produit brut , mais comme produit net,
appartient, à très-peu d’exceptions près, à un avenir fort
éloigné.
Mais iln’en est pas de même du second mode d’appli-
cation que je crois au contraire très-immédiatement réa-
lisable.
Les villes fournissent de grandes quantités d’engrais,
dont les habitants ont hâte de se débarrasser, et dans
leur empressement à éloigner ces foyers d'infection, ils
en jettent une grande partie dans les fleuves, rivières et
ruisseaux , au grand détriment de la culture , de la pu-
reté des eaux et souvent avec de grandes dépenses.
Ces engrais sont de trois sortes ; les balayures des
rues, les eaux d’égoût et les vidanges,
Autour de toutes les grandes villes, il existe une zône
de culture perfectionnée, presque toujours culture ma-
raîchère, qui s’est formée naturellement par les besoins ,
qu'ont les habitants, de légumes etde fruits, pour leur con-
sommation, et par la facilité qu'ont les cultivateurs à se
procurer les engrais pour les produire.
Autour de Paris, dans la plaine de St.-Denis , sur les
plateaux sablonneux et graveleux de Nanterre et de Go-
lombes , dans les plaines de Vanvres , Clamart et Issy,
ce genre de culture a pris un grand développément et
donne de magnifiques résultats ; cependant, on n’y
emploie à peu près exclusivement. que les boues et im-
mondices ramassées dans les rues. Ces abominables tom-
bereaux, que nous.voyons chaque matin circuler dans nos
rues, se dirigent tous , entre 40 et 2 heures, dans les
plaines que je viens de citer ; leur contenu est déposé le
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 03
long des routes et chemins de la banlieue ; il reste en
fermentation pendant deux ou trois mois , puis est ré-
pandu sur les terres et se transforme en excellent lait,
en fraises, en asperges, fleurs et fruits. L'utilisation
de ces immondices est à peu près aussi complète que
possible ; mais, ce qui reste à désirer, c’est que leur en-
Fèvement soit moins hideux , et surtout que la fermenta-
tion puisse s’opérer de manière à ne pas produire ces
odeurs aigres et mauséabondes qui font fuir les lieux
où on les emploie. Certainement l'odeur des vidanges
est désagréable ; toute espèce de fumier répugne, mais je
ne connais pas d’odeur plus insupportable que celle des
immondices des rues en fermentation ; de plus, je crois
cette odeur très-malsaine par ce motif d'observation hy-
giénique et physiologique , que la putréfaction des ma-
tières végétales est beaucoup plus insalubre que celle des
matières animales ; or, dans les immondices des grandes
villes, appelées improprement gadoues par les marai-
chers de la banlieue, les matières végétales dominent.
Les odeurs constatent des pertes de substances qui pour-
raient être utilisées. Leur neutralisation par l’acide sul-
furique ou la couperose serait à la fois une opération
sanitaire et utile.
D’après les notes que j'ai recueillies auprès de plu-
sieurs cultivateurs, on emploie habituellement 10 m, cub.
pour fumer un hectare à chaque récolte : or, dans les
cultures maraîchères , on fait en moyenne trois récoltes,
soit donc 30 m. cub. par hectare ; c’est la même propor-
tion que le fumier employé aux cultures ordinaires ; mais,
comme les cultures maraïchères sont forcées , il faut un
engrais beaucoup plus énergique ; les boues des villes
sont donc un engrais plus puissant que le fumier de
5/1 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ferme , mais il paraît que son action est peu durable, Les
fermiers n’emploient jamais la chaux avec ces fumiers :
c'est, je crois, un tort.
Les eaux d'égoût , envisagées comme engrais , ont fait
l’objet d’une note fort intéressante insérée par M. l’ingé-
nieur Mangon dans la chronique des Annales des ponts-
el-chaussées.
M. Mangon rapporte ce qu'il a vu pratiquer à Leicester,
où une fabrique élevée par M. Wicksteed a pour objet de
neutraliser , avec de la chaux , les eaux d’égoût, de leur
enlever toute odeur et toute insalubrité, et d’en extraire,
sous forme solide, un engrais particulièrement appli-
cable aux terres argileuses. |
Ce procédé, sur lequel l'expérience ne s’est pas en-
core: suffisamment prononcée, me paraît ne pouvoir être
appliqué avec succès , en France, par les motifs suivants:
Les eaux d’égoût renferment déjà assez peu d’azote.
Les analyses de M. Mangon n'ont constaté que. 0 gr.
057 par litre. Or, la chaux, à l’état caustique ,
laisse à. Pétat libre tout l’azote de l’ammoniaque, et
ne précipite que la faible proportion d’azote à l’état de
sel acide, qui ne forme que le tiers de l'azote contenu
primitivement dans les eaux. Ainsi les briquettes , obte-
nues par ce procédé, n’ont pu prendre aux eaux dégoût
que 0 gr. 018 par litre d’azote ; elles ne renferment elles-
mêmes que 4,47 p. 070 d'azote. L'efficacité agricole de ce
produit est inférieure à celle du fumier de ferme.
Or, pour arriver à fabriquer ce produit, si peu efficace,
il faut : 1°, élever les eaux à une certaine hauteur; 2°. les
mélanger avec de la chaux préalablement dissoute ; 3°. dé-
canter la liqueur ; 4°. faire sécher le produit ; 5°. mou-
ler les briques; 6°. enfin les faire sécher: toutes manipu-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 55
lations dispendieuses , surtout dans une contrée où,
comme chez nous, la force motrice est chère.
M. Mangon établit avec raison que les eaux dégoût
sont trop peu riches en matière azotée pour être em-
ployées directement à la culture. Faut-il d’après cela
conclure qu’il n’y a rien à faire qu’à se débarrasser le
plus vite possible, dans les rivières, de toutes les eaux
d'égoût et renoncer à utiliser les 1,204,500 k. d'azote
que renferment les eaux déversées annuellement par les
égoûts de Paris ? Je ne le pense pas. L'utilisation des eaux
d’égoût se lie intimement avec celles des produits des
fosses d’aisances dont il me reste à vous entretenir.
Ces produits sont de deux sortes, les liquides et les
solides : les liquides representent pour Paris un cube
journalier de 700 mètres, soit par an 255,500 mètres,
ou de quoi fumer complètement 15,330 hectares; les
solides représentent 150 m. cub. par jour, ou 54,750 m.
cub. par an ou de quoi fumer 27,375 hectares.
Ces matières sont aujourd’hui à peu près complètement
perdues , car la fabrication de la poudrette est si barbare,
et ce produit se vend si mal qu’il n’y a presque pas à
en tenir compte ; les liquides entièrement perdus dans la
Seine (ils suivent la rigole de la plaine St-Denis, de Bondy
àSt.-Denis) infectent cette plaine et les eaux de la Seine.
Malgré les puissants encouragements offerts par la
ville de Paris aux cultivateurs , ceux-ci , l’année dernière,
n’ont employé que 5,947 m. cub, d'engrais, soit moins
de 2 p.: 070. |
Des tentatives ont été faites, l’année dernière , auprès
des compagnies de chemins de fer et des cultivateurs
éloignés de Paris pour déterminer les premières à faire
des réductions de tarifs pour le transport de ces engrais;
26 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
les seconds à en faire usage. Deux compagnies de chemins
de fer, celles d'Orléans et de l'Est, se sont montrées
pleines de bon vouloir et vraiment éclairées ; les autres
ont fait la sourde oreille où ont opposé un refus absolu,
et parmi ces dernières, nous avons le regret de compter
celle de l'Ouest, dont le réseau traverse l’une des con-
trées de la France qui a le plus besoin de voir développer
sa prospérité agricole, nous voulons parler de la Bretagne.
Ce refus a empêché un grand propriétaire d'employer,
d’un seul coup, 200 m. cub. de matière fécale.
L'expérience à d’ailleurs prouvé que les appréhensions
que l’on pouvait concevoir à priori sur l’incommodité
de ces matières , sont nulles, car les compagnies d’Or-
léans et de l'Est ontfait , à plusieurs reprises , des trans-
ports de ce genre, sans que les voyageurs s’en soient
doutés, et sans encombrement d'aucune espèce.
Voici donc la solution agricole du problème de la voi-
rie que j'ai l'honneur de vous soumettre :
1°, Faire converger en un même point les eaux d’égoût
et les liquides de voirie , les premières étant trop faibles
et les seconds trop forts ; leur mélange, convenable-
ment réglé, permettra d'obtenir un liquide propre à être
employé immédiatement sur la culture. Ce liquide serait
élevé au moyen d’une pompe, et foulé dans un vaste
tuyau, ou une série de tuyaux disposés en éventail , aux-
quels on donnerait un développement suffisant pour at-
teindre les points où le liquide serait utilement employé.
Sur ces conduits il serait fait des concessions au moyen
d’embranchements, comme les prises d’eau et de gaz dans
les villes. Ce serait une application du système Kennedy
qui se concilierait parfaitement avec le morcellement du
sol et le peu d’aisance des agriculteurs. Il faudrait qu'une
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 57 :
Compagnie , plus ou moins snbventionnée pendant quel-
ques années , se chargeât de la gestion et de la distribu-
tion de cet engrais ;
2°, Obtenir des Compagnies de CHonins de fer qu’elles
opèrent le transport à prix réduit (2 à 5 €. par tonne et kil.)
des matières fécales solides, sous la condition que ces
matières seraient renfermées dans des vases hermétique-
ment clos ; il faudrait disposer des appareils spéciaux fa-
ciles à employer, à vider et à laver. La même Compagnie,
ou une autre Compagnie, se chargerait de {a distribution
de*ces engrais solides. Une instruction courte, claire,
répandue à profusion, ferait connaître aux cultivateurs
les différents modes d'emploi de l’un et l’autre engrais ;
par ce moyen on supprimerait ce hideux établissement de
la voirie; on donnerait à l'agriculture un puissant engrais
qui lui manque , et on épargnerait une grande partie du
parcours des vidanges dans les villes, car les liquides
pourraient être jetés dans les égoûts , soit directement,
soit dans des conduits parallèles, puisque ces liquides
doivent aboutir au même point. Le transport au moyen de
haquets dans -les rues , réduit aux matières solides , ne
serait que le cinquième de ce qu’il est aujourd’hui comme
quantité, etmoindre comme parcours.
Chaque quartier enverrait ses vidanges solides à la
gare la plus voisine , au lieu de faire tout converger à la
barrière de Pantin, en faisant traverser toute la ville aux
vidanges des quartiers éloignés.
En résumé , Messieurs, je crois que ce serait nous
bercer d’une chimère que d'espérer une vaste et pro-
chaine vulgarisation du système Kennedy dans les fermes,
mais que nous pouvons-espérer voir appliquer d’une ma-
nière rationnelle à la culture les engrais des villes ac-
08 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
tuellement perdus ; j’ensai pour garants la multitude
d’études qui se font tant en Angleterre qu’en France sur
ce sujet , et les résultats déjà obtenus. 11 y a sans doute
encore des difficultés à vaincre , mais une volonté ferme,
la grandeur du but et l'intérêt si légitime qu’inspirent à
toutes les classes de la Société les progrès de l’agricul-
ture, feront certainement triompher de tous les obstacles.
M. de Caumont demande si, en France, des essais
ont déjà été faits du système énoncé par M. Marchal.
Celui-ci répond que M. Daru a commencé , mais qu’il
n’a pas encore obtenu de résultats, M. de Caumont ajoute
que M. le comte de Seraincourt fait exécuter de grands
travaux dans le même but, à Lonray, département de
l'Orne, et que le général Morin, de l’Institut ; en a fait
exécuter dans le Bas-Rhin.
M. le docteur de Bouis annonce au congrès qu'un
ancien élève de l’école polytechnique, M. Bataillier, a,
depuis long-temps déjà, disposé à Nogent-sur-Vernisson
un moulin à vent à l’aide duquel il mélange les vi-
danges. Les travaux de M. Bataillier sont antérieurs
à ceux des Anglais ; c’est un fait qu’il est bon de con-
staler, car il n'est pas rare qu’on s’attribue à l’étran-
ger des inventions faites en France et dont les avan-
tages ne reviennent pas à leurs auteurs.
M. Bataillier, dit M. Marchal, employait les engrais
liquides, mais les faisait circuler dans des rigoles, et
son procédé n'était applicable qu'aux prairies : ce
n’était donc pas le système Kennedy.
M. Perrot pense que l’exemple de M. Bataillier pourrait
être suivi partout où existent un sous-sol argileux et une
couche supérieure perméable et d’une assez faible épais-
seur pour ne pas s'opposer aux effets de la capillarité.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 59
En réponse à une question qui lui est adressée, M.
Marchal donne de nouvelles explications. Le produit
brut du système Kennedy est considérable en Angle-
terre et il serait le même en France, là où l'application
pourrait en être faite; mais il serait impossible d’en
connaître le produit net dans notre pays, où 268 dépenses
pour l’établir seraient énormes.
— Mais ne pourrait-on pas, demande M. de Caumont ,
l’'employer au moins dans certaines limites ? — Cela
serait possible, répond M. Marchal : l'emploi du liquide
ne se ferait plus cependant alors au moyen de larrosage.
Ainsi, dans les terrains où il y aurait de la pente, on
l’amènerait bien dans une mare, comme on a distribué
du guano liquide à l’aide de conduits établis sur des
versants de coteaux , mais il faudrait encore le retirer
de la mare et le distribuer, et c’est là que se trouve la
plus grande difficulté et que doivent être faits les plus
grands frais. Il semble à M. Perrot qu’à part la question
de dépense qui resterait à examiner, le liquide pourrait
être avantageusement employé pour le jardinage.
M. de Bouis parlage cel avis, mais, selon lui, si
l'avantage peut exister pour certains légumes, il faudrait,
à cause de l’odeur, se garder de recourir au même moyen
de fructification pour d’autres légumes, tels, par exemple,
que la salade.
M. Maurenq examine la question au point 4 vue de
l'efficacité de l'emploi. Si l’on ne peut, en France, appli-
quer le système des tuyaux , on peutau moins arriver à
la désinfeclion des matières et obtenir des adminis-
trations de chemins de fer qu’elles en fassent le trans-
port à prix réduil. En Belgique, c’est surtout à l’aide
des fosses à purin qu'on utilise ces sortes de matières :
60 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
dans quelques endroits on en compose un purin spécial.
M. Moll, professeur au Conservatoire des arts et
métiers, prend la parole sur linvitation qui lui est
adressée par M. le président.
On a parlé, dit-il, de dépenses excessives. Si cependant,
on.va au fond des choses, on remarque que l’appli-
cation des matières dont il s’agit à l'amélioration du
sol n’est pas aussi extraordinaire ni aussi opposée qu’on
le croit aux habitudes de l’agriculture. En Angleterre,
Pemploi qu'on en fait coûte même moins cher que le
drainage, car la dépense par hectare ne s'élève pas à
plus”de 200 francs, tandis que la moyenne de celle
qu’entraîne le drainage ne monte pas à moins de 250
francs. En France, le même emploi serait beaucoup
plus dispendieux. Des essais ont été faits en Bavière,
où l’on se sert d’une roue hydraulique , et, au lieu de
tuyaux en fonte, de tuyaux en bois qui sont même d'un
prix plus élevé; la dépense y est de 400 francs par
hectare, mais la fumure coûte cela quelquefois.
Dans un voyage que l’honorable professeur fit dans
le Nord l’an dernier, il a remarqué que Pemploi de
l’engrais liquide par le système flamand entrainait des
frais énormes, surtout à cause de la nécessité où l’on
est de l’étendre de beaucoup d’eau. Lorsqu'il s’agit, par
exemple, d’arroser un champ de betteraves, et, par
conséquent de déposer le liquide sur chaque pied, la
main-d'œuvre est très-coûteuse, car il ne s’agit de rien
moins que de transporter à bras , parfois jusqu’à la dis-
tance de 500 mètres, des cuviers contenant 50 à 60 litres.
C’est ce qu’il a vu dans une propriété importante , celle
de M. de Mesmay, Le système Kennedy est préférable
pour la grande culture, mais non pour la petite, qui
- ttes
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 61
doit éviter des dépenses trop considérables; toutefois,
l'emploi du système flamand est plus facile sur une terre
nue ou dans une prairie, puisque le tonneau peut être
transporté, à l’aide de voitures, dans toute l'étendue du
champ.
Quant à l’effet des matières vertes ou fécales sur les
plantes, il n’en résulte aucun mauvais goût. Des véri-
fications ont été faites à ce sujet sur les épinards, les”
artichauds , les fraises, et l’on n’a remarqué aucune,
différence de qualité ou de saveur.
M. Maurenq expose qu’en parlant des purins, il n’a
fait qu’indiquer l’un des usages de l’engrais liquide.
On pourrait recommander spécialement de rendre ces
matières solides et inodores, pour qu’elles puissent être
ainsi à la portée des cultivateurs; c’est en cela qu'il y
aurait avantage. L’opinant: désire surtout que l’on
ait recours aux moyens économiques.
M. Moll répond qu'aujourd'hui on ne peut cie songer
à la solidification des matières, car c’est cet ancien sys-
ième qui faisait tout perdre: A Paris, on peut évaluer la
quantité annuelle de ces sortes de matières à 4 million de
mètres cubes. Sur cette quantité, une forte partie dispa-
raît par suite de ce que l’on appelle le coulage; il en
résulte un grave inconvénient, car le liquide qui s'échappe
ainsi se mêle aux égoûts et contribue à gâter les eaux de
la Seine. On n’envoie annuellement à Bondy que 300,000
mètres cubes. Là, les matières sont séchées , et, quoi
qu’en disent les intéressés , on les mélange avec de la
tourbe, ce qui en diminue évidemment la qualité. Le ré-
sultat définitif ne consiste que dans 5,000 tonnes environ
qui, d’après les données de la chimie et de la pratique,
ne peuvent fumer que 7 à 800 hectares.
_
62 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Si, au contraire, on faisait usage des matières vertes,
à raison de 20 mètres cubes par hectare, on pourrait
fumer, dans le même espace de temps, 50,000 hectares.
Les matières liquides ont, en effet, beaucoup plus de
vertu que les matières solides.
M, le marquis de Bryas, dans un voyage récent fait en
Angleterre, s’est convaincu qu’en utilisant les engrais hu-
mains, on peut arriver à produire 2 472 au lieu d’un; il
recommande surtout l'emploi des purins.
M. Marchal dit qu’il n’y a réellement de question que
sur les moyens pratiques. L'expérience prouve que les
engrais humains ne communiquent aucun mauvais goût
aux plantes. L’opinant appelle cependant les observations
des personnes qui ont pu faire des remarques, et les invite
à citer les plantes sur lesquelles l'effet aurait été désavan-
tageux.
Revenant à l'application du système Kennedy, M. Mar-
chal répète que cette application, avantageuse pour la
grande culture , ne peut être faite à la petite , qui est la
plus considérable en France. Le drainage est moins cher
sur une grande échelle que sur une petite. Si l’on ne
draine , par exemple, qu’un hectare, on pourra dépenser
600 fr. , tandis que, si l’on en draine 50, la dépense ne
sera que de 200 fr,, en moyenne, pour une pareille quan-
tité de terrain; mais le système Kennedy, en le suppo-
sant appliqué à un hectare , coûterait presque autant que
pour un terrain beaucoup plus étendu. |
Suivant l'opinion de M. Moll, on devrait mor va
matières mélangées; mais M. Marchal trouve le chiffre de
20 mètres cubes trop élevé pour un hectare ; la quantité
d’azote fournie par cet engrais est telle que la fumure
d’un hectare pourrait être faite avec 2 ou 3,000 kilo-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 63
grammes au plus de matières stercorales ; car il est re-
connu que 45 à 1,800 kilog. de bonne poudrette sont suf-
fisants pour celte contenance de terrain. Les urines pour-
raient être réunies aux eaux d’égoût avant d’arriver à la
Seine, et l'emploi en serait avantageux. On pourrait,
pour cela, opérer, dans la cour même , la séparation des
liquides et des solides.
M. Moll est d’avis de cette séparation dans l'intérêt des
villes. Si un système adopté en Angleterre, recommandé
récemment par M. le Préfet de la Seine, et dont l’objet
est d’expulser immédiatement les matières solides, pou-
vait être accueilli, il y aurait avantage à opérer cette sépa-
ration ; mais, en France, le mélange se fait dans la fosse
d’aisance même ; au moyen de l’eau qu’on y jette, on
produit un liquide qui coule très-bien , et la partie la
moins dense s'échappe par les égoûüts. Dans la conduite
de Bondy, le surplus des matières est refoulé et employé
dans l’état où il se trouve; il sort bien par l’orifice de la
lance, quoiqu’elle n’ait que 2 à 3 centimètres de dia-
mètre. 20 mètres cubes feraient une forte fumure; cette
quantité cependant paraît nécessaire , car, dans les ma-
tières de Paris, on n’a pas trouvé plus d’azote que dans
le fumier d’étable ; c'est-à-dire quatre millièmes seule-
ment, au lieu de près de quarante qui existent dans les ma-
tières fraîches. C’est ce qui a été vérifié dans plusieurs la-
boratoires , notamment dans ceux de MM. Boussingault
et Mangon. M. Moll invoque, à cet égard, non sa propre
expérience, mais celle des cultivateurs flamands. Dans
ce pays , 4 mètre cube de matières est considéré comme
l'équivalent de 3,000 kilog. de fumier.
M. le comte de Gourcy, à propos de l'effet de l'odeur
sur les plantes, annonce au Congrès que deux sociétés
64 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
exploitent en grand, à Londres, le système Kennedy pour
les jardins, et que les maraîchers se félicitent de cet ar-
rosement. Quant aux résultats du système, ils existent
même pour le produit net ; en effet , dans la propriété de
M. Teller , il a vu que 48 vaches étaient nourries exclu-
sivement avec le produit brut de 10 hectares arrosés, Le
beurre de chaque vache donne, par an, un produit de
250 fr. C’est assez dire que ce produit compense large-
ment les frais d'établissement et d’entretien du système.
M. le duc de Maillé désire savoir quels sont la valeur
et l'avantage comparatifs de l'emploi liquide et de l’em-
ploi solide, car, suivant le système Kennedy, tout se con-
verlit en engrais. |
M. Moll répond qu'il est reconnu , notamment en
Suisse, que le purin a beaucoup plus d’efficacité que l’en-
grais ordinaire. On y convertit tout l’engrais solide en
engrais liquide. Ce dernier engrais est, en effet, dans
les conditions les meilleures pour que les plantes puissent
en profiter , car elles ne peuvent absorber que les ma-
tières liquides; il faut donc, si l’on emploie les matières
à l'étatde solidité, qu’elles se transforment, et les plantes
ne peuvent pas en profiter immédiatement. En Angle-
terre, le mêmé fait a été reconnu; on pense que l’engrais,
sous la forme liquide, produit quatre fois plus d’effet que
sous la forme solide : peut-être y a-t-il exagération,
mais l’effet ne serait-il que doublé, que l'avantage serait
encore considérable. On conçoit bien que la rapidité
d'action diminue la déperdition.
La séance est levée à 4 heures.
Le Secrétaire,
SELLIER,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 65
SÉANCE DU 16 AVRIL.
(Présidence de M. Albert ne Beaives, membre de l’Institut
des provinces, au Puy.)
MM. DE CAUMONT, le comte D'HERLINGOURT , le comte
ANISSON DU PERRON, le vicomte DE POMMEREU, le comte
D'HÉRICOURT, siégent au bureau.
M. De Bouis remplit les fonctions de secrétaire.
MM. Gomart, Sellier, Desvaux, lisent les procès-
verbaux des séances précédentes,
M. d’Herlincourt regrette de n'avoir pu donner à
la séance précédente quelques explications sur le système
Kennedy, qui auraient pu répondre à quelques-unes des
questions qui ont été adressées à l’auteur de la communi-
cation. Il a employé le système Kennedy dans sa propriété
et il peut dire quel a été le prix de revient de son appli-
cation : par hectare il a dépensé 754 francs, 200 francs
pour les tuyaux, 554 pour les regards, Cette dépense
première des tuyaux est assez considérable; mais si
on à soin de:les vider dans la saison rigoureuse, à
l’époque où lon doit craindre que la gelée ne les fasse
crever, la dépense d'entretien est fort minime, de sorte
qu’en calculant sur un capital de 754 francs, et évaluant
l'intérêt et l'amortissement à 40 p.070, si on pratique ,
comme il l’a fait, 6 arrosages dans le cours de l’année,
chacun d’eux , en y ajoutant les menus frais accessoires,
ne doit pas être évalué à plus de 14 francs. Ce qu'il
importe surtout de mettre en première ligne dans
l'application de ce système, c’est la proportion des
réservoirs à l'étendue de la superficie à arroser comme
à la quantité de purin dont on peut disposer. Générale-
66 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
ment on porte beaucoup trop haut la quantité de purin
pour un hectare, en disant qu’il faut 30 mètres cubes
de purin pur; M. d'Herlincourt a obtenu d'excellents
résultats en n’employant que le dixième, c’est-à-dire
3 mètres de purin. Ce précieux engrais, quand il est pur,
contient assez d’azote pour être étendu de neuf fois autant
d’eau. Ainsi pour les 6 arrosages annuels il faut 18
mètres cubes de purin, pour chaque hectare , voilà une
première base; une seconde se trouve dans la quantité
rendue par les différents bestiaux élevés dans l’exploi-
tation. Une vache fournit une quantité annuelle de
purin nécessaire pour l’arrosement répété 6 fois sur
h hectares; 3 chevaux, 7 porcs , 21 moutons donnent :
des quantités équivalentes. Tels sont les résultats prati-
ques sur lesquels on peut combiner les opérations.
Les tuyaux dont s’est servi M. le comte d’Herlincourt ont
un diamètre intérieur de 3 à 4 centimètres. Le système
Kennedy lui paraît résoudre la question de l’arrosage
fertilisant à bon marché, car chaque arrosage, dans le
système du transport et de l’arrosement par tonneaux
iraînés par des chevaux, ne coûte pas moin$ide 20 francs
par hectare ; parfois il s'élève même jusqu'à 50 francs,
même en n’y comprenant pas les réparations indispensa-
bles des tonneaux, des harnais, etc. Quand l’arrosage se
fait à l’aide de bras versant l’engrais à l’aide de cuillères,
c'est un minimum de 60 francs de dépense par hectare
qu'il faut compter. M. le comte d’Herlincourt n’a pas
compris dans le prix de revient la citerne à purin, ni
la pompe , qu’il suppose exister dans toutes les fermes.
Seulement il faut avoir soin de placer en élévation
suffisante le réservoir qui doit alimenter les tuyaux d'ir-
rigation destinés à transporter partout l’engrais liquide.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 67
M. le marquis de Vogué commence par faire remarquer
qu’en présentant quelques observations au précédent
orateur, il n’a pas d'opinion arrêtée contre le système
Kennedy , ni contre toute autre amélioration ; seulement
avant de penser à les appliquer en bon agriculteur, il faut
prévoir par le calcul et les chiffres quelles peuvent
ètre les conséquences de lopération. Contrairement
à ce qui a été dit hier sur les évaluations approxi-
matives du prix du drainage en grand ou en petit, il
pense qu’il faut toujours partir de ce principe : que la
dépense doit être proportionnelle à la quantité de
travail, de matériaux employés. Dans la communication
qui vient d’être faite, on a signalé combien il était
important de placer le réservoir en élévation ou de
suppléer à la différence de hauteur par une machine
propulsive, une pompe foulante et aspirante. Une
autre condition qui doit influer sur le prix de revient,
c'est l’agglomération des terres autour des bâtiments
de l'exploitation ou leur disgrégation , leur éloignement
qui nécessiterait des conduits plus multipliés et plus
longs. Avant d'entreprendre une opération de ce
genre, il faut se rendre compte de toutes les difficultés ;
il prie donc l’honorable auteur de la communication
d'ajouter quelques détails sur’ la situation de ses
cultures et sur les conditions topographiques où il
se trouvait placé. Le nombre de six arrosages est-il
adopté par tous ? Arrose-t-on toutes les ae
céréales, fourrages, racines ? |
M. d’Herlincourt répond que la ferme, sur laquelle
il a appliqué le système, étant située en contre-bas des
terres qu’il cultive et placée même au-dessous d’un
cours d’eau, il a dû élever son réservoir à purin de
68 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
7 mètres au-dessus du sol; la pompe dont il se sert
pour y faire parvenir les liquides fertilisants est mise
en mouvement par une roue hydraulique placée sur
une dérivation du cours d’eau précédemment indiqué
et, dans les moments perdus de cette force motrice ,
l'interruption des travaux de l’usine voisine permet de
s’en servir, la nuit par exemple et les jours de chômage.
Les terres sont assez réunies autour des bâtiments ,
cependant la présence de bois qui ne lui appartiennent
pas a obligé M. d’Herlincourt à faire parcourir un assez
long circuit à ses tuyaux ; cela n’a pas augmenté sensi-
blement les dépenses. Il est d'usage dans la contrée de
se servir de purin pour arroser toutes les récoltes,
céréales , racines, etc. Le nombre de six arrosages pour
l’année est une donnée qu’on peut prendre comme pra-
tique et rationnelle. |
M. Jourdier prend la parole pour développer son opi-
nion sur les progrès de la mécanique agricole en 1856.
1 passe en revue les diverses machines relatives aux
opérations de l’agriculture d’origine française ou impor-
tées d'Angleterre.
Il me semble vrai d'admettre que l’exposition univer-
selle de Londres en 1851 à marqué un point de départ
dont Paris en 1855 a été la première étape, et le concours
universel de 4856 la seconde.
A mon sens, nous avons beaucoup progressé par Com-
paraison et par circonstances. Un fait qui m'a frappé et
sur lequel jé fonde particulièrement de grandes espéran-
ces, c’est que de vrais mécaniciens, voyant où on en arrivait
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 69
en Angleterre , ont compris qu'il y avait pour eux un bel
avenir à entrer dans la voie qui leur était tracée, Je ne
citerai pas de noms propres , car cela froisserait inutile-
ment bon nombre de ceux qui ont fait de la mécanique
agricole , sans savoir ni la mécanique ni les besoins de
l'agriculture. Ils avaient d’ailleurs sans aucun doute de
bonnes intentions, et on doit leur en tenir compte.
Afin de ne pas sortir du programme que vous avez posé,
je vais vous demander à citer successivement les parties
du matériel agricole qui, à mon avis, peuvent être con-
sidérées comme un progrès où un commencement notable
de progrès, qu’il s'agisse de machine française pure ou
importée. Je remonterai peut-être quelquefois au-delà
de 1856 ; mais ce sera dans le cas où il m’aura semblé que
ce n'est guère que cette année-là (1856) qu’une chose
d'existence antérieure aura été adoptée définitivement,
ou comprise ou goûtée par le public agricole.
Charrue à vapeur de Frowler. — C'est là un grand
problème que je crois très-près d’être résolu: Chacun peut
voir cette charrue à l’œuvre aujourd’hui sur les terres de
la ferme de Villeroy , près Meaux. On y travaille à tâche
à raison de 20 et quelques francs l’hectare.
La charrue est la même que celle qui a fonctionné
l’année dernière à Villers. Elle a seulement été perfection-
née.
Pour l'Algérie et la Russie , cette charrue peut et doit
être extrêmement précieuse. Elle est en France, c’est déjà :
quelque chose. —.Dix-sept de ces charrues marchent
regulièrement en Angleterre.
Piocheuse Barrat. — Vous: avez appris qu'il y avait
aussi quelque chose à espérer de la piocheuse Barrat,
beaucoup même, Une nouvelle va être mise en construc-
70 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
tion , sur la commande de l'Empereur ; il y a tout lieu de
croire qu’elle sera bien plus convenable que la précé-
dente, qui, néanmoins, a, en définitive, suffi à la démons-
tration. Shan
Draineuse à vapeur. — Cette machine, du même
inventeur, est également en France. Elle fonctionne pra-
tiquement. Si la question économique est résolue favo-
rablement, il pourra y avoir beaucoup à espérer de cette
application de la mécanique à vapeur aux travaux souter-
rains du sol.
Charrues. — Comme détail, je considère personnel-
lement comme un réel progrès, l'adoption de létrier
américain, qui exempte les pièces de bois auxquelles on
ajoutait les coutelières, des perforations qu’on était obligé
d’y pratiquer pour le passage des boulons; avec l’étrier,
une pièce de bois conserve toute sa force , ceci est fort
important. |
J'estime fort aussi l'adoption de la rasette, sorte de
petite charrue qui se met, comme un coutre, en avant
de celui-ci, et lui trace préalablement un petit chemin
qui empêche l’appareil de bourrer, soit quand on en-
fouit du fumier, soit quand on défriche.
Afin d’abréger, je vous demande la permission de me
borner , dès à présent, à énumérer les objets, qu’à
moins d'erreur ou d’omission je pense qu’il serait bon
de noter.
Aräire Parquin à pointe de soc mobile. — Le corps
de l’araire Parquin me semble parfait, maintenant que
l'application réellement précieuse , quoique très-an-
cienne de la pointe de soc mobile y est faite ; on a une
machine très-approchée de la perfection. Dans les sols
pierreux, partout où la pointe du soc s’use vite ou se
brise, cette charrue rendra de grands services.
‘
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 74
Bien que je ne considère pas l’avant-train de ce con-
structeur comme parfait, il s’en‘faut, j'estime très-fort
l’usage qu’il y fait des roues montées à demi-patent,
de telle façon qu’on peut les graisser comme les roues
des diligences sans les démonter. De PB la Poire
fait bien moins obstacle. .
. Fouilleuses. — L'adoption de ces indispensables
charrues doit être notée. On ne peut plus s’en passer
pour les cultures, racines et fourragères.
Charrue tourne-oreille, — Avec la pratique du
drainage, cette charrue est celle qui doit dominer un
jour. Je n’en connais pas encore une seule qui soit
parfaite ; il y a beaucoup à faire ; je crois utile d'appeler
l'attention sur ce point. En attendant mieux, on peut
se servir assez avantageusement des Brabant doubles.
Une fois qu’on sait les.manier , et ce n’est pas difficile ,
on en tire un bon parti.
Déchaumeurs. — Le déchaumeur Dray, pouvant au
besoin servir de défonceur, est une précieuse machine
importée d'Angleterre. Son usage se répandra rapide-
ment, je pense. ,
Extirpaleurs. — scarificateurs. — Comme en Angle-
terre , nous arrivons en France à employer des pièces
de rechange pour avoir ces deux indispensables ma-
chines. Jusqu'à présent, la grosse difficulté du service
était l’engorgement, Le système de MM. Depoix et
d’Hérissard y remédie; il suffit maintenant d’appuyer
sur les mancherons pour dégorger les dents , sans arré-
ter la marche des chevaux.
Herse à couperets. — Après un AE NRELS on
avait beaucoup de peine à réduire les copeaux de
terre détachés en gros rubans. La herse ordinaire écor-
72 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
chait, retournait. Avec la herse importée de Belgique
par M. Decrombecque , on parvient à hacher le sol en
procédant comme le font en petit les charcutiers pour
préparer la chair à saucisse,
Herses parallélogrammes accouplées. — J'espère
qu’un jour prochain on ne connaîtra pas d’autres herses
en France. En Angleterre , elles sont exclusivement em-
ployées. C’est le meilleur appareil qu’on puisse désirer
pour herser régulièrement, complètement, sans double
emploi ni perte de force ou de temps.
Rouleaux brise-mottes. — Celui de Crosskill est en-
core très-bon, surtout quand les fusées des roues sont
coudées. Quand elles ne le sont pas, il suffit de faire un
plan incliné avec une planche et une pierre pour éviter
de creuser des trous en terre.
Le rouleau Cambridge n’a pu détrôner le Crosskill;
le Patterson y aurait réussi, parce qu’il se nettoyait
mieux lui-même. Aujourd’hui se présente un nouveau
Cambridge, qui semble devoir l'emporter. Les lumières,
au lieu d’être circulaires, sont triangulaires, à angles
arrondis ; de cette façon, quand l’appareil est en marche,
il s’opère une remarquable dislocation, qui fait que les …
disques sont toujours nettoyés les uns par les autres.
Semoirs. — En attendant un semoir compteur qui est
en-bonne construction commerciale, on se sert momen-
tanément des semoirs Lemaire Maxime, Saïint-Joannis,
Jacquet Robillard, et de tous les modèles anglais. C’est
là un grand progrès.
Semoirs à engrais liquides. — Celui de Chanler est
une conquête. Il verse, en même temps que la graine,
une dose d’eau pure ou contenant de l’engrais en quantité
suffisante pour qu’on n’ait plus à.craindre une de ces
(CONGRÈS DES ACADÉMIES. 79
funestes sécheresses qui obligent à tout recommencer,
compromettent une récolte , ou tout au moins mettent
de beaucoup en retard et en déficit pour les rende-
ments. |
Land-presser. — Nous ne mettons pas en doute que
cet appareil ne détrône un jour presque tous les semoirs.
C’est tout simplement une série de sortes de roues de
brouette qui, promenées sur le sol à emblaver, y mar-
quent des sillons de la forme d’un V, dont la pointe
serait tronquée.
La pièce étant prête on sème à la volée très-clair,
on herse ensuite en iravers, el on a un blé hors ligne,
dont chaque grain est dans ce sol ferme qu’il aime tant
et que les animaux nuisibles pénètrent beaucoup moins.
Je suis convaincu qu’une fois répandu, ce rouleau-
rayonneur-presseur rendra de très-notables services et
se répandra plus facilement que les semoirs.
Planioirs. — Celui de M. Ledocte a rendu et rendra
de très-bons services. La brouette à pièces de rechange
est excellente.
Semoirs à petites graines. — En Angleterre, en
_ Allemagne, partout, ces semoirs rendent de: grands
| services. Il n’y en a que peu en France. Ils méritent
_. d'être propagés.
: Semoirs à poudrette. — Il est très-difficile de faire
semer la poudrette et le guano par les ouvriers. Au
fait, c’est très-pénible. On vient d'importer le semoir
Holmes, que je considère comme parfait. Il est fort à
__ désirer qu'il se propage rapidement, car les engrais
pulvérulents sont bien mal répandus par la main de
l’homme, qui met d’ailleurs , dans l’accomplissement de
cette tâche , en général, une très-mauvaise volonté.
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CONGRÈS DES ACADÉMIES, 75
Houe à cheval circulaire de Hucknale, — Cette pré-
cieuse petite machine sarcle en long et en travers. Elle
éclaircit, par conséquent, les racines. Je la crois mal-
* heureusement peu répandue.
“Faucheuses-moissonneuses. — On croit à ces machi-
nes, c’est déjà beaucoup. L'année 1855-56 a singuliè-
rement été favorable à la vérité prochaine de la substi-
tution possible de la machine à l’homme, pour la récolte
. des fourrages et des céréales.
De toutes les moissonneuses que je connais, aucune
ne remplit les conditions qu'on recherche, cependant
les trois principales peuvent déjà rendre des services
en France, et. en Algérie notamment. Je place en
tête la machine système Hussey , bonifiée ‘par le système
Polmer, puis celle dite de Amaury, et enfin celle de
Mac-Cormick.
Nous Croyons pouvoir annoncer qu'avant peu nous
verrons fonctionner une moissonneuse conçue par M. le
docteur Trousseau et son fils, et exécutée par Le
Moythieu. On la dit très-supérieure aux précédentes.
Faneuses. — Celles que nous avons remplissent avec
“une satisfaction à peu près entière le but qu’on veut
atteindre. Quand on peut prévenir le pelotonnement du
fanage autour du moyeu, elles ne laissent alors plus
guère à désirer. La faneuse est non-seulement un pro-
grès pour nous ,.mais c’est encore une conquête des
plus précieuses. |
Râteau à cheval. — Le râteau à cheval est dans le
même cas. "Il ne reste qu’à désirer qu’il soit d’un prix
un peu plus abordable, :. FRS % Ne
76 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
RATEAU A CHEVAL DE HOWARD,
Machines à battre, — Jusqu'à présent se plaçaïent
sur la même ligne celles de MM. Duvoir, Cumming ,
et Graitot, toutes trois dérivées de celles de Winther :
toutes trois brisaient le grain, quand on voulait forcer
la besogne. Actuellement celle de M. Cumming se
place en têle, à mon avis, à cause d’un contre-batteur
nouveau, à surface boutonnée, qui permet au grain de se
mettre à l'abri, de fuir dans les rigoles à angles divers,
que forment ses lignes de boutons.
Locomobiles, — Celles de M. Rousset sont une véri-
table conquête pour l’agriculture. Formé à l’école de
M. le baron Seguier, ce constructeur est le plus habile
que je connaisse.
Il y a d’autres machines de ce genre qui sont très-
estimables ; aussi je crois qu’on peut les placer, sans
conteste, dans la catégorie dont il s’agit ici. ”
Tricurs de graines. — Gelui de M. Pernolet remplit
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 77
bien ce qu’il promet. Je le place sur le même rang que
la faneuse et le râteau à cheval.
Moulins agricoles. — Celui de M. Bouchon, mu par
manège surtout, atteint parfaitement le but,
Pompes à purin. — La pompe dite arabe est parfaite
pour cet usage ; c’est une bonne acquisition que nous
avons faite pour le traitement de nos fumiers.
Hache-paille , Goupe-racines. — Bien que cès ma-
2 s te
VUE D'UN HACHE-PAILLE.
- chines ne soient pas nouvelles, je pense qu’on‘doit les
78 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
considérer comme n'étant entrées en grand dans la
pratique que depuis peu.
Écorche-racines-Philipps. — Cette séniute machine
est encore peu connue, mais elle mérite de l'être. Au
lieu de couper la racine à vif, elle l’écharpe comme on
le ferait avec une râpe à longues dents. Les morceaux,
mêlés avec des tourteaux ou de la paille hachée,
entrent bien plus tôt en fermentation que les autres ;
on doit donc les préférer,
Teilleuse mécanique. —Si le teillage a fait un impor-
tant progrès qu'il est bon d'enregistrer, je trouve qu'il
serait bon qu’on püt aussi avoir de petites machines
à bras pour remplacer celles dont on se sert avec si
peu d'avantage dans nos campagnes. J’appellerai, si on
veut bien le permettre, l’attention de MM. les délégués
sur ce point, en raison du besoin que je sais qu’on a
de ces petites machines qui, si elles existent, sont peu
connues et surtout trop peu répandues.
M, de Caumont annonce que M. Jourdier a bien voulu
s'entendre avec lui pour montrer à MM. les délégués la
plupart des instruments dont il vient d'être parlé ; que
mardi prochain, à 11 heures et demie , M. Jourdier les
recevra avec plaisir dans l’établissement du matériel
“agricole perfectionné, 35 , rue de Lafayette, et que MM.
les membres du Congrès pourront voir fonctionner
plusieurs de ces machines.
M. Maurenq voudrait que l’établissement , | diriéé par
M. Jourdier, pût avoir des dépôts dans les départements
qui propageraient la connaissance des machines et des
outils perfectionnés.
M, Jourdier répond que la demande qui vient d’être
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 79
faite , entraînerait l'entreprise dans des frais et qu’il lui
_ faudrait un capital mort considérable ; que jusqu'à ce
jour il n’est pas possible de songer à rien de semblable,
On prépare un Album , représentant les instruments, qui
sera distribué partout. On enverra sur une feuille à part,
et timbrée, le prix correspondant à chaque numéro de
L'Album : cela peut suffire pourdes personnes instruites ;
pour celles qu'il s’agit d’enséigner d’une manière plus
directe, il y a un moyen à la disposition des Comices
agricoles , c’est de demander lenvoi , à leurs frais , des
instruments ; s’ils ne les gardent pas, ils peuvent les
renvoyer.
M. le docteur Bally lit une note sur les progrès de
la botanique en 1856. 11 s'attache surtout à prouver les
applications utiles d’une plante négligée jusqu'ici, le T'yfa
latifolia ; qui peut servir à fabriquer des vêtements,
des chaussures, etc.
M. Albert de Brives appelle l'attention du Con-
grès sur une application utile du drainage exécutée par
M. Chouvois, directeur de la ferme-école de Nolhoe
{ département de la Haute-Loire }, et s’exprime ainsi :
« Je crois devoir appeler l'attention du Congrès sur une
application utile des cours d’eau de drainage à l'irrigation,
faite dans le département de la Haute-Loire pendant ces
dernières années.
« Le problème à résoudre était celui-ci : Enlever les
eaux surabondantes du sous-sol pour les ramener à la
surface et les employer à l'irrigation. On sait que les eaux
produites par le drainage ont des qualités fertilisantes
qui manquent aux eaux ordinaires. L’expérience et la
science sont d’accord sur ce fait.
« M, Chouvois, l'honorable directeur de la ferme-école
DA) INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de Nolhoe , et membre de la Société d'agriculture du Puy,
ayant à drainer une prairie qui offrait une pente assez
considérable, eut la pensée d'utiliser les eaux du fonds
de cette prairie pour en arroser la surface, Il est arrivé
à ce but par les moyens suivants :
« La prairie représentait un quadrilatère allongé ; la
pente était dans la lofñgueur, Après les opérations de
nivellement ordinaire , il a divisé sa pente en 5 ou 6
sections. Il à établi les drains de la 1", section dans
le sens de la plus grande pente, suivant l'usage , et en
a réuni les eaux dans un collecteur placé dans la partie
la plus basse, aboutissant sur un point central. Vers ce
point un conduit éimenté, et à pente réduite, s'empare
des eaux , et les ramène sans effort, à la superficie, sur
une partie de la 2°, section de la prairie, dont le point
dépend de la pente générale, et d’où elle est dirigée, sui-
vant les besoins, par des canaux ordinaires.
« La 2°, section est drainée comme la 4°, , et ses eaux
ramenécs à la surface sur un point quelconque de la
3°. section , et ainsi de suite jusqu’au bout.
« Ce moyen très-simple , d’ailleurs, a produit les meil-
leurs résultats, et d’une prairie donnant un herbage rare
et de la plus mauvaise qualité, a fait un pré de 1"°, classe
qui étonne tous les jours les visiteurs par sa fécondité.
« Ce genre de drainage a, aux yeux de quelques per-
sonnes, l'inconvénient de ramener constamment à la
surface les eaux de drainage , qui peuvent être nuisibles
dans les temps pluvieux en entretenant une humidité
trop persistante.
«Un autre membre de la même Société d'agriculture,
M. Nicolas, ancien élève de la Saulsaie, directeur du drai-
nage dans la Haute-Loire, a imaginé un autre procédé qui
CONGRÈS DES ACADÉMIES: 81
_ conduit au même résultat sans avoir le mêmeinconvénient.
Soit donnée la même prairie, Il établit dans le centre,
et sur toute la longueur, un collecteur sur lequel viennent
s’embrancher successivement, à droite et à gauche, les
drains ordinaires, à certaines distances qu'il détermine ,
suivant la pente et suivant le besoin d'irrigation; il
coupe son collecteur par une petite caisse formée de
quatre planches ayant la longueur nécessaire pour réunir
le fond à la superficie. Cette caisse qui doit servir de con-
duit à l’eau était coupée à quelques centimètres au-
dessus du fond par une paroi horizontale percée et des-
tinée à recevoir la bonde qui est le principal agent du
mouvement ascensionnel des eaux. Dans ce système, les
eaux arrivent dans la caisse par un trou supérieur à la
paroi , traversent cette paroi lorsque la bonde n’est pas
placée, et reprennent leur cours dans le drain inférieur
par une seconde issue pratiquée dans la caisse un peu
au-dessous de la paroi horizontale,
« Mais, lorsque la bonde est placée, on conçoit que les
eaux, n'ayant plus d’issues par les drains, s'élèvent
dans la caisse et viennent jaillir à la surperficie, Une
partie de ces eaux est également refoulée par la loi du
niveau dans les drains supérieurs; mais l'expérience a
prouvé que c'était sans inconvénient. Si la bonde reste
long-temps fermée , l'effet naturel est un arrosement
de la partie supérieure de, la prairie par imprégnation,
qui ne présente aucun danger , puisque , par l’enlève-
ment de la bonde , on peut à volonté rendre aux eaux
surabondantes leur cours naturel par le collecteur,
« M. Nicolas a tout récemment apporté une amélioration
à la forme de sa caisse qu’il appelle une fontaine, L’éta-
blissement de la paroi horizontale, destinée au place-
82 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ment de la bonde , avait l'inconvénient de procurer un
ressaut dans la ligne du collecteur et de faire perdre
une partie de la pente. Il a voulu remédier à cet
inconvénient et il à imaginé , à cet effet, une paroi
coudée qui n’occupe qu’une moitié de la caisse. L'eau
arrive dans la partie de la caisse où n’aboutit pas la
paroi et au-dessous dusniveau de la partie supérieure
de la paroi où se trouve l’orifice. L'eau, arrivée dans la
caisse, s’élève jusqu’au-dessus de la paroi, redescend
par l’orifice et s’échappe par le collecteur qui vient abou-
tir au même niveau que l’orifice d’arrivée.
«Ce moyen, également appliqué, a produit les meil-
leurs résultats ; mais ce dernier exige une plus grande
quantité d’eau, La déperdition qui s’opère nécessairement
par le remous des eaux forcées dans des conduits qui ne
sont point étanches, peut nuire à l'effet de la fontaine
en ne laissant pas, pour l'irrigation de la surface , une
quantité d’eau suffisante ; du reste ce moyen a l'avantage
de donner ou d’enlever à volonté les eaux suivant le
besoin.
« Ces deux modes me paraissent donc présenter des
avantages ou des inconvénients relatifs et qui feront don-
ner la préférence à chacun d’eux, suivant les différentes
circonstances dans lesquelles se trouveront les terrains
soumis à cette opération.
« Mais ils m'ont paru l’un et l’autre ingénieux , d’une
application utile en principe, et dignes, en conséquence ,
d'être soumis à votre appréciation. »
M. d’Esterno ne croit pas l’idée de se servir des eaux
obtenues par le drainage, pour larrosement de la super-
ficie , aussi nouvelle que les draineurs de la Haute-Loire
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 88
l'ont pensé. M. Rayrol a publié un système qui a beau-
coup de rapport avec ceux dont on vient d'entretenir
l'Assemblée. ; |
M. Perrot pense que ces inventions diverses sont
propres à répondre aux objections de ceux qui disaient :
« Le drainage est nuisible parce qu’il enlève des eaux
. chargées de principes azotés » , puisqu’ainsi on les re-
verse et on les utilise à la surface des prés,
M. Maurenq ne voudrait pas qu’on se laissât séduire
par des applications de ce genre. Selon lui, on aura
dans la saison pluvieuse beaucoup d’eau à verser sur le
sol déjà trop humide, puisqu’on a cru utile de le drainer ;
on n’aura rien à lui donner dans les moments de séche-
resse, alors que cela serait utile, Il faudrait, pour com-
pléter ce système , établir des réservoirs qui seraient
mis à contribution dans la saison de sécheresse.
M. de Brives répond qu'il serait toujours facile de
ne pas verser l’eau à la superficie, si cela n’était pas
utile; le système permet seulement de s’en servir au
besoin.
Le Secrétaire-général ,
DE Bouis.
SÉANCE DU 17 AVRIL.
(Présidence de M. le comte pe VicnErAL, )
Sont appelés au bureau, par M. de Caumont : MM. Dx
Gourcyx, MAHUL , OLIVIER , de Vaucluse ; A, de BURE, se-
crétaire de la Société de l'Allier. M. Desvaux, secrétaire,
M. le marquis de Bryas communique au Congrès plu-
8h INSTITUT DES PROVINCÉS DÉ FRANCE.
sieurs volumes du Herd-Book anglais, et. témoigne le
désir que nos bonnes races be dt aient également
leur généalogie.
La discussion est continuée sur les progrès de la phy-
sique en 1856. M. André Poëy s'occupe depuis long-temps
de recueillir les effets curieux produits par la foudre , et
invite les membres du Congrès à lui communiquer tous
ceux qu'ils auraient observés.
Selon. lui, la foudre produit des effets pathologiques
et thérapeutiques. M. Poey cite encore des phénomènes
photographiques très-surprenants.
M. de Bouis ne nie pas les effets thérapeutiques de
l'électricité, mais il observe qu’on doit mettre beaucoup
de réserve dans l'emploi de ce fluide, parce qu’on ne
sait pas encore le doser.
M. Du Moncel parle des bons effets sedits par Pélec-
tricité dans les cas d’asphyxie par le chloroforme.
il parle d'images électriques à travers des corps isolants,
Un membre demande comment des images photogra-
phiques peuvent se produire à travers des habits et
autres corps opaques ?
M, Du Moncel répond que l'expression d'images pho- |
tographiques est impropre , parce que, dans ces phéno- :
mènes, ce n’est pas la lumière, mais bien l'électricité qui .
agit.
M. Du Moncel fait ensuite au Congrès une communica- |
tion très-intéressante sur la télégraphie électrique. Il Pr |
sente et fait fonctionner trois appareils.
D'abord le télégraphe écrivant de Morse (1838), qui
n’a qu’un fil à la ligne au lieu de deux fils employés en
Allemagne. On conserve la prete écrite en lettres
ineffaçables,
%
4
|
: CONGRÈS DES ACADÉMIES. 85
ce télégräphe a été perfectionné par M. Mouilleron.
2, Celuide M. John Thomas, hongrois, qui présente un
avantage pour les transmissions transatlantiques. M. Var-
ley en a posé un de Londres à Ostende qui permet d'éviter
les inconvénients de la condensation des fluides dans les
lignes sous-marines.
3°. Un télégraphe Morse transcrivant la dépêche par
réaction électro- chimique. La bande de papier est pré-
parée avec une dissolution de cyanoferrure de potassium,
en prenant une pointe en fer ou en acier pour imprimer
le papier, l’action M qe trace les caractères en bleu
de Prusse.
Ce télégraphe , comme le premier système, nécessite
l'emploi de relais.
M. Du Moncel parle ensuite des appareils accessoires
des parafoudres qui préservent les employés des acci-
dents occasionnés par les orages; des horloges.électriques
de M. Robert-Houdin, qui peuvent marcher pendant six
mois de suite ; de l'emploi de l'électricité pour l'explosion
des mines. A Cherbourg, on faisait sauter simultanément
46,000 kilog. de poudre enfouis dans huit puits de 45 *.
de profondeur et qui soulèvent le rocher sur une surface
d’un hectare. -
Le même procédé est employé pour creuser le nou-
veau port de Marseille.
M. Du Moncel cite enfin l’utile application de l’électri-
citépour la télégraphie nautique. Les signaux se donnent
ordinairement au moyen de lanternes superposées qu’on
allume dans un ordre déterminé à l’avance. On perd
beaucoup de temps lorsqu'il faut déplacer ces différentes
_ lanternes, tandis qu'il est très-facile, avec des appa-
reils très-simples et en tournant seulement des robinets,
86 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de faire arriver des gazs inflammables dans telle ou telle
lanterne et de les allumer au moyen d’un courant élec-
trique. On peut opérer ainsi avec la plus grande ra-
pidité.
Le Congrès vote des remerciments à M. DuMoncel pour
ses importantes communications et pour la belle exposi-
tion d'instruments de physique qu’il a fait déposer dans
la salle. Plusieurs de ces instruments ont été inventés ou
perfectionnés par M. Du Moncel qui ainsi a doublement
mérité de la science.
Le Secrétaire,
G. DESVAUX.
SÉANCE DU 18 AVRIL.
(Présidence de M. le vicomte ne Cussy, membre de l'Institut
des proyinces. )
La séance est ouverte à 2 heures.
MM. DE CAUMONT, le comte DE Bonpy, le comte
D'ESTERNO , DE ROISSY, DE MONTREUIL, DE MARGUERIT
DE ROCHEFORT , DRÉOLLE et OLIVIER siégent au bureau.
M. SELLIER , l’un des secrétaires-généraux , tient Ja
plume.
M. de Caumont annonce que M. Geoffroy Saint-
Hilaire attendra le Congrès demain dimanche, #une
heure, pour: lui faire part des importations ou accli-
malations nouvelles faites au Jardin-des-Plantes.
Le Congrès est invité, par M. le Directeur , à se réunir :
à midi moins un quart à Notre-Dame, à l'effet d'exa-
miner les travaux qui ont été récemment faits, et de
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 87
se transporter ensuite en corps au rendez-vous donné
* par M, Geoffroy Saint-Hilaire.
M. Barrande exprime le regret de n’avoir pu assister
aux réunions du Congrès , si ce n’est mercredi dernier,
jour où l’on ne devait pas s’occuper de géologie. .
M. Ami Boué a envoyé à M. le Directeur un
aperçu sur la géologie dans l'univers entier. Sa leitre
est analysée par M. de Caumont, et trouvera place dans
l'Annuaire de l’Institut. 1len résulte notamment qu’on
s’est occupé beaucoup de géologie partout en 1856, et
que d'importants travaux se préparent dans les deux
hémisphères. ;
M. de Caumont expose que les fouilles opérées pour
la construction des chemins de fer ont amené des
découvertes. intéressant la géologie; il importerait par-
tout où des chemins de fer ont été établis, de faire
le relevé graphique des coupes mises à nu dans les
déblais.
MM. les Ingénieurs des mines consentiront , à n’en
pas douter, à faire faire cette constatation. Dans quel-
ques années, il serait trop tard pour se livrer à un pareil
travail qui deviendrait alors impossible. M. le Directeur
de l’Institut propose au Congrès d'émettre à ce sujet un
vœu qui est unanimement accueilli.
Revenant sur une discussion qui a eu lieu dans la
séance du 16 dece mois, à l’occasion de la connais-
sance donnée au Congrès, par M. Albert de Brives, de
l'application qui a élé faite, dans la Haute-Loire, des
eaux du drainage à l'irrigation, M. le duc de Maillé
présente deux observations; il lui semble que, dans les
temps pluvieux, l'opération qui consiste à ‘ramener
88 INSTITUT DES PROVYINCES DE FRANCE.
les eaux du drainage à la surface du sol ne présente
aucune utilité, et qu’en temps de sécheresse, Peau
manquerait ét ne pourrait par conséquent être ramenée
sur le sol. ÿ
M. le comte d’Esterno répond qu'il a fait beaucoup
d'irrigation et que l'expérience lui a démontré que les
cultures ont besoin d'étre irriguées même en temps
de pluie, et que, notamment pour les prairies, l’eau
du ciel est loin d’être suffisante ; suivant lui, la pluie
mouille et n’arrose pas, et celle qui tombe sur dix
hectares pourrait à peine en arroser un d’une manière
complète. Le drainage, avant d’être perfectionné, existait
autrefois, sinon avec sa destination actuelle, au moins
comme irrigation, et il importe beaucoup de lutiliser
encore pour celte destination. Au moyen du drainage,
en effet, les eaux sont rassemblées et il ne s’agit que
de les ramener à la surface du sol. L'observation a
démontré que le terrain étant sec, si l’on établit une
galerie horizontale , on trouve de l’eau, et que, si l’on
creusait une suite de puits verticaux, avec des galeries
horizontales, il sortirait de l’eau de toutes les galeries.
* Une objection a été faite, c'est qu'il est nécessaire
d'établir un point d’arrêt pour faire remonter l’eau , ce
qui semble devoir neutraliser les effets du drainage; mais
il faut remarquer que c’est seulement à une distance
minime que le refluement a lieu, ce qui n’entraine pas
d’inconvénients : on rétablit d’ailleurs, quand cela
devient nécessaire, la circulation dans le sous-sol et
le mal n'aurait lieu que si l'interruption se faisait
au moment d’une grande pluie , lorsque l’eau dort sur
le terrain.
M. le marquis de Bryas affirme qu'on ne doit pas
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 89
drainer indifféremment, soit qu’il y ait, soit qu'il n'y ait
pas d’eau souterraine. Le drainage est inutile quand il
n’y à pas surabondance. :
L'ordre du jour appelle l'examen de la 40°, question du
programme, ainsi CONÇUE :
« Quels sont les moyens pratiques d’obvier à la déper-
« ‘dition des matières fécales et des purins dans les cam-
« pagnes ? »
M. de Caumont fait connaître au Congrès un moyen in-
diqué par M. Girardin, de Rouen. Ce moyen consiste à
établir, sur le fumier, une espèce de guérite à l’usage
des gens de la ferme ; mais parviendrait-on à obtenir
d’eux qu'ils dérogeassent ainsi à leurs habitudes? il est
permis d’en douter ; l'essai en tout cas est facile.
M. le comte de Vigneral a vu , dans certaines exploita-
tions, pratiquer, à RSFTÉRES des étables, 1e petits com-
vriers. Une petite cellule peut également être établie
auprès des fosses à purin. A un autre point de vue, le
même membre voudrait qu’on rapportât de la terre dans
les étables , pour y absorber les engrais liquides produits
par les bestiaux. Le renouvellement en serait fait tous les
huit à dix jours, ce qui, surtout avec la stabulation per-
manente , serait d’un immense avantage.
M. le cômte de Gourcy parle d’une amende de cinq
centimes établie par un propriétaire contre ceux de ses
gens qui ne se rendraient pas au lieu indiqué par lui dans
le même but.
Un autre membre propose de jeter de la glaise calcipée
sur le fumier, AE « 49
M. le comte de Gourey expose que, chez M. Crespel,
90 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de Lisse, on jette aussi sur le fumier de la terre argi-
leuse qu’on ramène à la ferme pendant la belle saison , à
temps perdu, et qu’on remise sous des hangars , en at-
tendant qu’on l’emploie. Rien ne s'empare de l’ammo-
niaque comme la terre argileuse sèche.
M. le marquis de Caligny dit avoir inventé une pompe
à purin, dont il trace le modèle. Cette pompe est très-
simple, sans piston ni soupape ; elle est en zinc et ne
coûte pas plus de 20 à 30 fr. La partie inférieure , qui est
conique, est plongée dans le purin; le mouvement de va
et vient s'établit verticalement de bas en haut; sa hau-
teur est de 2 à 3 mètres. L’inventeur recommande cette
pompe , parce qu’elle enlève tout ce qui se trouve dans la
citerne , et, par conséquent, le meilleur engrais qui oc-
cupe le fond. On l’a employée pour faire une lessive , et
il en est résulté l’inconvénient de retirer les ordures qui
s'étaient déposées dans la partie inférieure, de la fosse ;
mais, dans lapplication faite à l'extraction du purin, ce
qui était un inconvénient devient un avantage. Il est à
regretter que cette pompe , que M. Carreau, ingénieur,
se propose de faire exécuter, n’ait pas encore été expéri-
mentée. u
M. le vicomte Du Moncel sait qu’il existe une pompe sans
piston ni soupape, employée utilement par un maraîcher
de Versailles ; mais, parmi celles qui sont en usage, la
meilleure est, sans contredit, la pompe Perrot, du prix
de 120 fr. La Société d'encouragement pour l’industrie
l’a trouvée excellente; elle est aussi sans soupape. On Pa
employée pour les locomotives.
M, le duc de Maillé demande à M. de Caligny à quelle
profondeur , avec sa pompe, on va chercher l’eau , et si,
en sortant, elle a une certaine force d'expansion. La ré-
© CONGRÈS DES ACADÉMIES. 9
ponse est que l’eau peut être élevée à une hauteur égale à
deux fois et demie la profondeur.
On passe à la 11°. question :
« Y a-t-il lieu d'établir une amende municipale dont
« seraient passibles tous ceux qui laisseraient le purin
« s’écouler sur la voie publique, comme cela a lieu en
« temps de pluie, dans toutes nos campagnes ? »
M. le comte d’Esterno pense que la question doit être
résolue négativement ; il faut éviter d'établir législative-
ment des pénalités contre les propriétaires , par la seule
raison qu’il ne leur conviendrait pas de profiter de lavan-
tage que leur procurerait l'emploi du purin.
M. de Caumont répond qu’il ne s’agit pas d'établir des
pénalités nouvelles, mais simplement d’obtenir que l’au-
torité administrative | prenne des mesures pour que, dans
l'intérêt de la salubrité publique, l'écoulement du purin
hors des mäisons soif interdit, ce qui n’empêcherait pas
les propriétaires “défperdre leur purin chez eux, s'ils
refusaient de l'employer : il est évident pour lui qu'ils
n’ont pas le droit de Île rejeter sur la voie publique.
M. Sellier ajoute à ces observations qu’il ne s’agit
pas, en effet, d’une pénalité directe à appliquer aux pro-
priétaires qui laisseraient perdre leur purin ; mais qu’il
est possible d’arriver indirectement au but que l’on se
propose d’atteindre , au moyen d’arrêtés qui seraient pris
par les maires, en vertu des pouvoirs qui leur sont con-
férés par la loi pour sauvegarder les intérêts de la salu-
brité publique. Ces pouvoirs sont, en effet, fort étendus,
et l'intervention de MM. les Préfets pourrait déterminer
l'autorité municipale à en user.
Un membre observe que , la loi existant, il sut de
92 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la faire exécuter, M. Sellier répond qu'il n'existe pas de
loi qui prononce directement de pénalité pour le cas
prévu. La loi donne seulement aux maires le droit de
prendre des arrêtés, et c’est l'infraction à ces arrêtés
que la loi punit d’une amende de simple police.
M. le comte de Vigneral exprime l'avis qu’il faut in-
struire avant de punir : Donnez, dit-il, au propriétaire
l'instruction agricole et soyez sûr que, quand il laura
reçue, il ne laissera plus perdre son purin. Toute pé-
nalité serait donc inutile.
* M. Tailliar annonce que la question a été examinée
dans le sein de la Société impériale et centrale d’agricul-
ture, sciences et arts de Douai. La délibération de cette
Société a été adressée à ce sujet au préfet, pour l’engager
à prendre, en vertu de la loi de 1837, un arrêté qui
tiendrait lieu de ceux que les maires négligent de prendre.
M. le duc de Maillé proteste contre la fâcheuse manie
de vouloir tout réglementer aujourd’hui; il faut que ceux
qui s'intéressent aux améliorations agricoles, donnent
l'exemple , et les lois deviendront inutiles: il serait re-
grettable d’ailleurs qu’on songeât à menacer les pro-
priétaires de l’application de nouvelles lois pénales.
Si l’on adoptait les objections qui viennent d’être faites,
dit M. de Caumont , il faudrait donc ne pas exiger des
propriétaires qu’ils fassent balayer les rues devant
leurs maisons.
M. le comte d’Esterno fait remarquer, que la loi auto-
risant ce qui est demandé, et toute législation nouvelle
étant ainsi inutile , la question perd de son intérêt.
M. Tailliar prend de nouveau la parole : Au point de
vue doctrinal, dit-il, le Congrès peut agir par des con-
seils. Sous le rapport légal, la loi de 4790 donne le
CPC PR
a.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 93
droit aux maires de prendre des arrêtés applicables à
leurs communes. Si l’autorité municipale n’agit pas, le
préfet peut prendre un arrêté exécutoire dans tout le
département.
M. Boülatignier, conseiller d'État, ne voudrait pas que
le Congrès résolüt la question,sans certaines restrictions.
La loi de 1837 a donné aux maires un pouvoir plus étendu
encore que la loi de 1790, car ils peuvent prendre, sur tou-
tes les matières se rattachant à la police municipale, des
arrêtés permanents qui deviennent de plein droit exécu-
toires après l’expiration du délai d’un mois, si, dans cet
intervalle, ils n’ont pas été réformés par l'autorité supé-
rieure. Les préfets ont droit aussi, aux termes de la loi du
29 décembre 1789 — 8 janvier 1790, de pourvoir, par des
arrêtés , au maintien de, la salubrité publique. M. Boula-
“lignier pense même que, si, ce qu'il est impossible d'ad-
mettre, cette haute intervention devenait nécessaire,
l'Empereur pourrait, en Conseil d’État, assurer, par un
décret réglementaire, l'effet de la mesure demandée.
L'opinant propose, en conséquence, que le Congrès,
considérant que la mesure intéresse la salubrité géné-
rale, émette le vœu que les maires prennent des arrêtés
pour empêcher l'écoulement du purin sur la voie pu-
blique. II lui semble utile en outre que les préfets fassent
sentir aux maires que la mesure se rattache essentielle-
ment aux intérêts de l’agriculture.
M. le comte de Vignerai exprime l'avis qu si ne serait
pas indigne de la sollicitude de l'Empereur de rendre, en
Conseil d’État, un décret réglementaire qui aurait pour
résultat de dispenser les agriculteurs d’une foule de dis-
positions et d’entraves administratives. |
M. le comte d’Esternorepousse l'intervention de l’admi-
94 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
nistration dans les intérêts privés. Cette intervention doit
s'arrêter aux mesures de police et ne doit pas aller plus loin.
M. Boulatignier ne veut pas non plus de l'intervention
de l'administration en-dehors de son pouvoir légitime ;
mais il faut reconnaître que beaucoup d’administrations
municipales restent au-dessous de leur mission. Ce ne
sont pas les institutions qui manquent aux maires, mais
les maires qui manquent aux institutions. 11 faut donc
que l'autorité supérieure agisse sur les fonctionnaires
municipaux par l'influence de ses conseils, ou qu’elle sup-
plée à leur insuffisance par les mesures qui sont dans ses
attributions.
M. le duc de Maillé insiste pour dire qu’il ne veut pas
que l’on protège les populations contre leur ‘paresse ; on
doit repousser cette multitude d’arrêtés qui rendent im-
possible l'administration municipale. ,
La clôture de la discussion étant demandée et pronon-
cée, le Bureau propose, pour l'émission d’un vœu, une ré-
daction contre laquelle sont faites diverses objections. La
discussion déjà close paraissant devoir se renouveler à ce
sujet, M. le Directeur de l’Institut pense que la discussion
qui a eu lieu, et dont les détails seront consignés dans le
procès-verbal , suflira pour attirer l'attention de l’admi-
nistration, et qu’ainsi il serait inutile de formuler un
2
vœu.
La séance est levée à 4 heures.
Le Secrétaire-général ,
SELLIER.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 95
DIMANCHE 19 AVRIL.
Le dimanche 19 avril, le Congrès n’a pas tenu de
séances, mais il a été reçu au Jardin-des-Plantes par
M. Geoffroy Saint-Hilaire, membre de l'Institut, profes-
seur au Muséum d'histoire naturelle et président de la
Société impériale d’acclimatation. Après s’être entretenu
quelque temps dans ses salons avec les membres du Con-
grès, M. Geoffroy, sur l'invitation de M. de Caumont, a,
dans une brillante improvisation, indiqué les expériences
tentées depuis peu pour l’acclimatation de nouvelles es-
pèces animales et végétales : il a rendu compte des résul-
tats obtenüs pendant le cours de l’année 1856 , puis il a.
invité le Congrès à visiter avec lui les galeries du Muséum.
Les yacks , les hémiones et les autres animaux nouvelle-
ment importés ont été examinés avec soin, ainsi que les
hippopotames et tout ce que le Jardin renferme de
curieux.en Zoologie, Le Congrès s’est retiré après avoir
remercié M. Geoffroy de sa complaisance et de sa cordiale
réception.
Le soir, M. de Caumont a reçu les membres du Con-
grès dans les salons du restaurant Douix, au Palais-Royal.
sp
SÉANCE DU 20 AVRIL,
(Présidence de M.-Manuz, membre de l’Institut des provinces,
délégué de l'Aude. )
Siégent au bureau : MM. DE CAUMONT, directeur du
Congrès ; PASQUERÉE , délégué de la Gironde ; l'abbé
|
#
96 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
BRULLÉE , de Sens ; ANCELON, délégué de la Meurthe ; le
comte Du MANoïr ; du Calvados,
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. de Caumont rend compte de la correspondance. Il
lit une lettre de M. le marquis de Bryas qui a été obligé
de partir pour Vienne (Autriche), et qui se trouve privé
de suivre les dernières séances du Congrès,
M. le Directeur fait observer que l’ordre du jour est la
question portée au programme sous le n°. 44, qui a pour
but de faire connaître les emprunts faits par l’architec-
ture rurale aux constructions des chemins de fer et quels
emprunts. on peut encore lui faire. Il cite des imitations
très-heureuses , notamment chez M. le comte de Serain-
court, à Lonray, près d'Alençon, et pense qu’on ne peut
“trop engager l’agriculture à entrer dans cette voie.
M. Perrot fait remarquer que le progrès a eu lieu sur-
tout parce que les ouvriers ont appris, dans les ateliers
où les nouvelles entreprises de chemins de fer les avaient
appelés, denouveaux systèmes de construction qu'ils n’au-
raient jamais appris ailleurs; parce que, dans les provin-
ces,on se bornait à continuer constamment de bâtir comme
avaient fait nos pères : il fallait l’expérience des archi-
tectes pour apprendre à ménager les matériaux et à con-
struire d’une façon plus élégante et moins coûteuse.
M. Maurenq croit que c'est surtout dans le système de
charpente des couvertures beaucoup plus légères, qui est
adopté maintenant dans beaucoup des constructions ru-
rales de nos départements , que consistent les emprunts
faits et le progrès réalisé. On a pu voir dans les gares ces
systèmes de charpente plus légère , et par suite on est
arrivé à les exécuter ou à les imiter dans les campagnes
voisines.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 97
M. Gomart signale, parmi les améliorations acquises ,
l'introduction des charpentes plus légères qui ont rem-
placé le chêne et les autres bois dont lé prix va sans cesse
croissant , et augmentait d’une manière si considérable le
coût des constructions rurales. On le prodiguait vérita-
blement : les charpentes, aujourd’hui maintenues par des
tiges de fer boulonnées, ont fourni partout des couvertures
légères , solides et d’une économie notable.
M. Boulatignier voudrait qu’on maintint la question sur
ke programme et qu'on s’altachât davantage, dans les
années suivantes, à préciser les prix de revient,
M. de Gourcy sait que M. de Glaville a pu faire con-
struire chez lui de vastes hangars pour abriter ses ré-
coltes et au-dessous d’elles les instruments aratoires , à
. raison de 5 fr. par mètre de superficie couverte. Il emploie
les couvertures en papier enduit de bitume de gaz.
M. Gomart estime que l'emploi du carton bituminé,
comme couverture, aura de la peine à être adopté dans
_ les campagnes. C’est une matière très-combustible qui
présente de graves inconvénients. On sait combien la
malveillance s'attaque aux hommes de progrès , et com-
bien ils ont à lutter contre le vagabondage et, en géné-
ral, contre les mauvais instincts de ceux qui attribuent
la situation précaire où ils peuvent se trouver à des
_ changements dans les usages des agriculteurs, soit par
_l’élévation du prix des fermages des terres, soit par
l'adoption de machines qui suppriment la main-d’œu-
vre, etc.
La question n'étant pas épuisée sera maintenue sur le
programme des questions à discuter ki le NS ne
Congrès.
M. Olivier demande à présenter un projet d'utilisation
5
98 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
des engrais humains et autres des villes. Son absence au
moment où le système Kénnedy a été exposé dans le
Congrès , l’a privé de l’occasion de développer ses idées
sur ce point, Elles peuvent Se résumer dans la création de
réservoirs én-dehors des villes;ravec adjonction de ma-
chines et de canaux de distribution.
NOTE DE M. OLIVIER.
« Quel parti pourrait-on tirer, pour l’agriculture, d’une
« multitude d’immondices qui se perdent sous les égouts
« pour aller ensuite salir , infecter et encombrer le cours
« des rivières dans leur trajet au centre des villes ? »
Je»crois qu’on ne peut pas faire à cette question
d'autre réponse que celle-ci : Recevoir toutes ces ma-
tières dans des réservoirs, employer les liquides à
l’engraissement des terres et surtout des prairies, et
répandre les matières solides sur les terres labourables ;
cette réponse avec celte nudité peut paraître par trop
naïve ; mais n’en ayant pas d'autre jusqu’à présent et
cette solution pouvantremplhir le but qu’on se propose,
elle mérite au moins d’être examinée et étudiée dans ce
qu’elle peut avoir de pratique etde réalisable; c’est ce que
je vais tâcher de faire brièvement. À priori, dans cet ordre
d'idées rien n’est impossible avec plus ou moins d'argent ;
mais, comme nous l’a fort bien dit plusieurs fois l’hono-
rable marquis de Bryas, il ne faut pas faire de l’agriculture
à tout prix, ou autrement il ne faut me faire de petits écus
avec de gros écus,.
Examinons donc si la question FR peul per-
mettre de réaliser le désir de la Société d'utiliser les eaux :
des égouts et d’en débarrasser les rivières.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 99
Je dois commencer par ‘expliquer ma pensée et les
moyens de la réaliser ; puis avec quelques chiffres chacun
pourra juger, pour les localités qu’il connaît, de l'impos-
sibilité, de la possibilité ou de la probabilité de la réussite
de ce que je propose ; voici ce que je voudrais :
Avoir , à la sortie de la ville, un réservoir assez grand
pour recevoir toute l'eau qui s'écoule par les égouts en
24 heures.
Sur ce réservoir placer une pompe foulante mue par
une machine à vapeur, et beaucoup mieux par un cours
d’eau , si la chose est possible. |
Au moyen de la pompe et de tuyaux souterrains, con-
duire les eaux à 1, 2 ou 8 kilomètres de la ville.
Ce réservoir devrait être assez élevé pour permettre
l'irrigation , par pente naturelle, d’une suffisante quan-
tité de terrains; quant aux parties solides d’un trop gros
volume pour être lancées par les tuyaux dans le second
réservoir , elles seraient retenues par un grillage dans le
premier réservoir et enlevées de temps en temps dans des
tombereaux, pour être enfouies comme fumier.
Telles seraient à peu près les dispositions générales
que je proposerais ; je dois maintenant étudier la possi-
bilité de l'exécution, les difficultés et les chances de
réussite, *
Mais je dois prévenir tout d’abord que, n’ayant pas
étudié la question pour une localité spéciale, j'ai dû ad-
mettre plusieurs suppositions qui seront vraies pour telle
ville’, et fausses pour telle autre ; de sorte que plusieurs
des chiffres que je vais poser sont plus ou moins discu-
tables : chacun peut les veftiier , ou modifier, suivant
son appréciation,
Voici le calcul que je fais:
400 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Je suppose que l’expériencewse fait sur une ville de
10,000 âmes.
Je suppose que chaque habitant laisse écouler par les
égouts 30 litres d’eau par 24 heures,
Je suppose qu’il suffira de placer le second réservoir à
2,000 mètres de la ville.
Je suppose qu’à cette distance et sur la route on trou-
vera 200 hectares à arroser.
Je suppose encore que, pour les arroser, il faudra élever
les eaux à 20 mètres au-dessus de la ville.
Voici Messieurs, bien des suppositions que je vous prie
de m’accorder ; ceci étant, je pense en déduire les consé-
quences suivantes:
En 24 heures, il s’écoulera par les égouts de la ville,
300,000 litres où 300 mètres cubes. Il faudra donc deux
réservoirs de 300 mètres cubes chaque ; en théorie, un
seul pourrait suflire, on pourrait même s'en passer en
faisant fonctionner constamment la pompe et arrosant
constamment ; mais je prévois qu’il y aurait trop de diffi-
cultés à agir ainsi ; j'admets donc deux réservoirs de 300
mètres cubes, ces réservoirs en bon béton coûteront 3,000
francs. Pour élever à 20 mètres de hauteur les 300
mètres cubes, il faudra une machine à vapeur de deux
chevaux, travaillant 40 à 42 heures seulement; elle em-
ploiera dans ce temps 200 kilog. de charbon, que je compte
très-cher à 5 fr. ; un mécanicien , surveillant , chauffeur
à 5 fr., en tout, pour frais journaliers de machine, 15 fr, ;
pendant 365 jours, cette dépense sera de 5,475 fr.
Cette dépense pourrait être considérablement réduite ,
si l’on pouvait utiliser une petite chute d’eau, en rempla-
cement de la machine à vapeur. |
La plus grosse dépense sera celle des 2,000 mètres de
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 401
tuyaux : en les comptanttout posés à 5 fr. le mètre cou-
rant, on arrive au chiffre de 10,000 fr. |
En résumant et additionnant les dépenses, nous aurons
pour frais d'établissement :
TOR En. © Je US SO Ir
S'RéseRTOirs. «141 Lie 40e 3,000
A Mächine. 5 core on 1,000
POMPES M ÉSSNRUIES an. 1,000
Batiment: 45% .:; ef, 1,500
16,500 fr.
FRAIS ANNUELS.
Intérêt à 10 7, sur 16,500 fr. . 1,650 fr.
Charbon ; mécanicien, . . . 5,475
Réparations imprévues. +. . 975
8,000 fr.
Voilà donc une dépense annuelle de 8,000 fr. qui,
répartis sur 200 hectares, produira pour chacun une dé-
pense de 40 fr, Qu’obtiendra-t-on pour cela ? Six arrosages
par an, à raison de 90,000 litres chaque hectare ou
540,000 litres pour les six; or, un arrosage de 90,000
litres est un très-bon arrosage, s’il est bien réparti.
M. d'Herlincourt ne compte par hectare que 30,000 litres
contenant 4710 de purin; cette quantité de liquide peut
suffire pour mouiller passablement un champ, mais elle
est assez petite pour qu’on soit obligé de faire l'opération
avec beaucoup de soin , si l’on veut que toutes les parties
soient arrosées.
109 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Les eaux d’égouts, dont nous nous occupons, sont
chargées d’une assez faible quantité de matières fertili-
santes, pour qu’il soit utile de remplacer la qualité par la
quantité, si l’on veut obtenir de beaux résultats ; c’est
pour cela que je croirais convenable de porter chaque
arrosage à 90,000: litres : avec ces quantités, les eaux
d’égouts, fussent-elles de l’eau pure, produiraient déjà
un très-bon effet comme arrosage seulement; en les con-
sidérant comme telles, on obtiendrait donc, moyennant
40 fr. par an, six bons arrosages. Dans le midi, dans les
environs d'Avignon, où beaucoup de terres sont arrosées
par des canaux alimentés par la Durance ou par la fontaine
de Vaucluse, il en coûte; par abonnement, 23 fr. par hec-
tare et l’on n’a que de l’eau pure: la différence de prix de
23 fr. à 40 fr, doit, je pence, se trouver très-largement
compensée par les matières fertilisantes qui se trouveront
dans les eaux d’égouts. Il y a donc tout lieu d'espérer
qu’on trouvera facilement assez d'abonnements à Parro-
sage pour couvrir les frais de l’entreprise; d’ailleurs, il
serait toujours prudent de s'assurer les abonnements
nécessaires avant de commencer les travaux.
La question ainsi posée, il n’est donc pas impossible de
réaliser d’une manière lucrative et peut-être irès-lucrative
l’utilisation des eaux des égouts dans la plupart des
villes.
Gette pensée pourrait avoir une grande portée si un
jour une ville, prenant l'initiative, venait, par un exemple
heureux, prouver qu’il y a dans l’utilisation des eaux des
égouts, motif à de brillantes spéculations.
Il se présentéra sans doute à vos esprits encore bien
des objections et des difficultés que n’ai pas eu la pré-
tention de résoudre toutes dans cette petite note im-
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 103
promptu : ainsi, On aura souvent de’la peine à obtenir
d’une petite ville qu’elle fasse les frais de ruisseaux
ou égouts convenables se rendant dans un réservoir
commun. |
Dans certaines villes , il y a des industries qui rejettent
d'énormes quantités d’eaux , pour lesquelles les moyens
dont nous avons parlé ne suffiraient plus. |
D’autres fois, et peut-être même souvent, les terres ne
seront pas disposées à recevoir les arrosages. Dans ce cas,
on en serait quitte pour laisser couler momentanément
les eaux à la rivière jusqu’à ce qu’on puisse les utiliser ;
la pratique , d’ailleurs, apprendra bientôt à faire ce qu’il
y a de plus convenable et j'espère qu’un jour la réalisation
du désir que vous exprimez viendra récompenser votre
sollicitude pour le bien général.
Maintenant, Messieurs, permettez-moi de vous entre-
tenir, encore un instant, d’une question qui paraît d’abord
sortir du sujet, mais qui s’y rattache directement. Je veux
parler de la fabrication du béton. ;
Pour recevoir les eaux des égouts, ainsi que tous les
purins, dans les campagnes , il est nécessaire de faire de
grands réservoirs; le moyen le meilleur et le plus écono-
mique est sans contredit l'emploi du béton; mais pour
cela il y a deux conditions à remplir, c’est de faire du
béton bon et à bon marché.
Sans doute, parmi vous, il en est plusieurs qui ont fait
construire des réservoirs avec du béton el probablement
plusieurs ont éprouvé un inconvénient qui se présente
assez souvent, c’est celui des dégâts causés par la gelée
qui détériore considérablement ces genres de construc-
tions, surtout lorsqu'on à employé de la chaux grasse,
Eh bien ! il existe un moyen très-simple de parer à cet
40 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
inconvénient, quand bien même on emploierait la plus
mauvaise chaux : ce moyen consiste à mêler au gravier
474 ou 475 de son volume, de scories ou mâchefer,
provenant de la combustion de la houille dans les four-
neaux; il faut avoir soin de piler préalablement ces mà-
chefer et on réussira d’autant mieux que la poudre sera
plus fine; grâce à cette petite addition de matière siliceuse,
à un état particulier, le béton peut impunément rester
exposé à la gelée et au dégel. Voilà pour la qualité.
Quant au bon marché, si l'on a à exécuter des travaux
d’une assez grande importance, il faut faire le béton avec
un manège ; de prime abord , l’idée ne paraît pas neuve,
et pourtant elle l’est par la manière dont l’opération est
faite.
Jusqu'à présent on n’a pas fait le béton entièrement au
manège , pas même dans les chantiers où l’on a employé
les plus grandes quantités, comme, par exemple, au port
de la Joliette, à Marseille. On a toujours commencé par
faire du mortier avec du sable fin et de la chaux, et exé-
cuté le mélange soit avec un manège, soit avec un
tonneau vertical que tout le monde connaît; puis le mé-
ange du mortier et des gros graviers ou pierres cassées
s’est toujours exécuté assez mal à bras d'hommes, parce
que le manège et le tonneau font encore plus mal le travail
avec les dispositions qu'ont ces outils actuellement.
Me trouvant dans la nécessité de faire, toutes les années,
fabriquer de grandes quantités de béton, j'ai fini par
arriver à disposer un meuleton assez bien pour fabriquer
économiquement, d’une manière parfaite et très-rapide,
tout le béton dont j'ai besoin: par ce moyen j'ai réduit
de 50 sous à 20 les frais de fabrication de 4 mètre cube
de béton.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 405
M. Maurenq a attaqué, au point de vue pratique, les
procédés et les calculs établis par la note communiquée
par M. Olivier.
En pratique, M. Maurenq ne croit pas possible d’appli-
quer les eaux des égouts des villes à l’agriculture par
irrigation. Il cite pour exemple une ville donnant 300,000
litres par 24 heures, envoyés dans un premier réservoir
d’un contenu de 30,000 mètres, de là dans un deuxième,
de même capacité, placé en contre-haut du premier à
2,000 mètres de distance.
M. Maurengq établit l’impossibilité, par la nécessité
d'assurer un écoulement constant pour débarrasser les
villes de leurs eaux d’égouts, devant un débit inter-
mittent souvent à de longs intervalles ; il dit ensuite que
le refoulement du premier réservoir dans le second exige-
rait une pompe énergique et coûteuse et des tuyaux d’une
force et d’une résistance qui entraîneraient un prix de
revient par mètre bien supérieur à celui de 5 francs
cité par M. Olivier.
M. Maurenq ne regarde pas ce système comme pouvant |
entrer dans la pratique.
La question n'étant pas épuisée sera maintenue par le
programme des questions à discuter dans le Don
Congrès. 2 |
M. Boulatignier présente une proposition dans le but
d'engager le Congrès à formuler un vœu qui maintienne,
pour l’agriculture , les exemptions de patente dont elle a
toujours joui. La tendance actuelle de l’agriculture est
évidemment d’adjoindre l’industrie aux exploitations
agricoles, ce qui lui permet d'utiliser les produits plus
considérables et plus variés qu’on demande aujourd’hui
106 INSTITUT DES PROVINCES DÉ FRANCE.
à la terre. On ne peut, suivant lui, assimiler l’agriculteur
au commerçant et à l'industriel,
La séance est levée à cinq heures et demie.
Le Secrétaire général,
DE Bours.
SÉANCE DU 21 AVRIL 1857.
(Présidence de M. Desrerris, ancien député, membre du
Conseil général et délégué de la Manche. )
Sont appelés au bureau : MM. Tniac, le comte DE
Gourcy, le vicomte DE GENOUILLAC et VARIN DE RussY.
M. SELLIER remplit les fonctions de secrétaire.
La séance est ouverte à deux heures et demie.
L'ordre du jour appelle l'examen de la 46°, question,
ainsi Conçue :
«Quelles ont été, en 14855, les tendances économiques
« en France? Y a-t-il eu progrès dans la moralité des
« entreprises et la bonne foi des transactions ? »
M. Maurenq se préoccupe de la tendance générale des
esprits vers la spéculation. Les agriculteurs n’emploient
plus leurs ressources ou leurs économies à l’amélioration
du sol ; ils ont pensé qu’ils pouvaient faire de leurs fonds
un emploi plus avantageux ; aussi depuis plusieurs années
les capitaux de la province ont-ils afflué dans les entre-
prises industrielles. L’opinant est loin de. combattre l’es-
prit d’association, qui a produit d'heureux résultats,
surtout dans l'application qui en a été faite à la création
CONGRÈS DES ACADÉMIES., 407
et à l'exploitation des chemins de fer; mais on doit re-
connaître que, par suite de la tendance actuelle, l’agri-
culture se trouve privée des capitaux qui lui sont néces-
saires. D’un autre côté, le développement de l’industrie
a été la cause de l’augmentation des salaires, ce qui est,
pour l’agriculture, une nouvelle charge. L'avenir peut
donc inspirer de l'inquiétude, mais quel remède peut-
on apporter au mal signalé ? C’est là ce qu’il serait difficile
de décider.
La seconde partie de la question, ajoute M. Maurenq, ne
peut malheureusement pas être résolue affirmativement.
Le genre d’affaires qui absorbe maïntenant les capitaux
s'accorde peu avec la moralité des entreprises et la liberté
des transactions.
Ce n’est pas un cri d'alarme que profère M. Maurenq ;
il n’a pas même eu l'intention d'exprimer un blâme ; il a
seulement voulu appeler l'attention du Congrès sur les
sérieux dangers auxquels est exposée l’agriculture.
Le Congrès accueille avec sympathie les réflexions de
M. Maurenq, dont il partage l’avis.
M. d’Illier, pour confirmer ce qu’il a dit-dans la
séance du 44 avril, apporte des tiges herbacées de di-
verses variétés de blé qu’il a semées à l’automne dernier,
après y avoir appliqué le pralinage.
M. Paquerée demande si le pralinage a été employé
dans des terrains très-perméables, et s’il n’est pas à
craindre que les substances fertilisantes qu’il contient ne
soient , dans ce cas, entraînées par l’eau.
L’inventeur du procédé répond que ces substances
ont une certaine consistance ; qu’à la vérité elles sont
solubles, mais qu’il a eu occasion de remarquer qu’elles
ne se désagrègent que quand la maturation s'opère. La
106 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
capsule qui recouvre la graine est très-forte et très-résis-
tante. Le blé praliné a, en effet, un poids triple de celui
qu'il avait à l’état naturel.
M. le duc de Maillé désire savoir si le pralinage convient
aux terrains calcaires, comme aux terrains siliceux.
M. d'Illier dit qu'il la expérimenté dans des terrains
de diverses natures et qu’il a réussi partout, à cause des
substances azotées qu’il emploie.
A une dernière interpellation, faite par M. de Balain-
court, M. d’Illier expose enfin que, si le fumier était
employé en même temps que le pralinage, la récolte
pourrait certainement en profiter, mais que le fumier
n’est pas indispensable.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire général,
SELLIER.
SÉANCE DU 22 AVRIL 1857.
: (Présidence de M. le général BoreLLt. }
Siègent au bureau : MM. DE GAUMONT, directeur du
Congrès ; le duc DE MAILLÉ, du Cher; le comte DE
Gourcy : le baron CHAUBRY DE TRONCENORD, de la
Marne. ' !
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et
adopté.
M. Gomart lit le compte-rendu suivant de la visite du
Congrès à l'établissement du Matériel agricole de M. Jour-
dier. Ce rapport est entendu avec un vif intérêt,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 109
RAPPORT
SUR LA VISITE FAÎTE AU DÉPÔT D'INSTRUMENTS ARATOIRES DE LA
COMPAGNIE DU MATÉRIEL AGRICOLE PERFECTIONNÉ,
Le mardi 21 avril 1857.
L’insuffisance des bras qui s’est fait sentir pour l’agricul-
ture dans quelques parties de la France, a été l’objet des
vives préoccupations des hommes sérieux qui prennent
souci de l’avenir de notre production agricole ; aussi c’est
aujourd’hui pour l’agriculture une nécessité absolue, une
question vitale, que d’avoir recours aux instruments
agricoles les plus perfectionnés et d’employer les ma-
chines, toutes les fois qu’on pourra le faire dans de
bonnes conditions.
Le Concours universel agricole de 1856 a été un grand
événement, puisqu'il a familiarisé les cultivateurs et les
propriétaires ruraux de la France avec tous ces instru-
ments qu’à peine auparavant ils connaissaient de nom,
Non-seulement on a vu, on a touché ces machines, mais
bien mieux on les a vues à l’œuvre et l’on a pu apprécier
leurs degrés de puissance et d’utilité. Car aujourd’hui,
c’est encore un progrès à noter, on ne se prononce sur le
mérite d’une machine ou d’un instrument qu'après des
expériences faites en plein champ, si c’est nécessaire,
On sait qu’à la suite du Concours agricole universel de
1856, une Compagnie s’est formée à Paris pour exposer,
fabriquer et mettre en vente tous les instruments agricoles
perfectionnés. Cette Compagnie , créée par des personnes
bien connues pour l'intérêt qu’elles portent à l’agricul-
ture, compte aujourd’hui 84 fondateurs, dont le but a été
110 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
plutôt de propager et de faire connaître les instruments
agricoles les plus perfectionnés, que de tirer des béné-
fices de la vente. Le Congrès a donc accepté avec le plus
vif empressement l'offre de M. Jourdier, directeur de
cette Compagnie, et le matin un grand nombre de mem-
bres du Congrès s’étaient donné rendez-vous au Dépôt
du Matériel perfectionné, pour y voir fonctionner et exa-
miner tous ces instruments nouveaux qui se perfection-
nent chaque jour.
Parmi les assistants on remarquait MM. de Caumont,
directeur du Congrès ; Sellier, de Châlons ; Desvaux, de
Montdoubleau : comte d’Herlincourt, d'Arras; comte
de Bure, de Moulins ; docteur de Bouis, de Paris ; l'abbé
Brullée, de Sens ; Jourdier, maire de Melun ; vicomte de
Cussy, du Calvados ; Thiollet, de Paris ; Porriquet, de
l'Orne; de Marguerit de Rochefort, du Calvados ; de
Genouillac, de Rennes: Olivier, de Vaucluse; comte
d’Estaintot, de Rouen; comte Du Manoir, de Bayeux ;
Prémêlé , maire de Séez; duc de Maillé, du Cher;
Paquerée, de la Gironde ; A. de Brives, de la Haute-
Loire : de Bonand, de la Nièvre; de Buyer, de la
Haute-Saône; Varin de Russy, du Calvados ; Leclerc,
ingénieur ; de Fraville, de la Haute-Marne; vicomte de
Vandœuvre, du Calvados ; Target, président de la Société
de Lisieux; d’Ozouville, de la Mayenne ; de Saint-Ve-
nant, délégué de Vendôme; Godefroy, marquis de
Mesnilglaise, délégué de St.-Omer ; comte de Gourcy, de
la Seine ; Moore O’Ferrel, propriétaire en Irlande ; comte
d’Esterno, de Saône-et-Loire; Maurenq, de l'Indre ; comte
d'Héricourt, du Pas-de-Calais; vicomte de Pomereu,
de la Seine-Inférieure ; comte Hercé, de la Mayenne;
marquis de Vogué, du Cher ; Ch. Gomart, et un grand
CONGRÈS DES ACADÉMIES. aii
nombre de membres, curieux d’assister aux expériences
faites par M. Jourdier , à l’occasion de cette visite.
Vous n’attendez pas, Messieurs, que je vous donne ici
la nomenclature de tous les instruments exposés; votre
secrétaire n’a cru devoir faire ici mention que des instru-
mentset machines qui ont paru intéresser plus particu-
lièrement les membres du Congrès, ce sont :
La Charrue Parquin à pointe de soc mobile, avec étrier
américain, qui a paru fort bien établie ; mais elle doit
exiger un grand tirage ;
La Herse noriwégienne est un bon instrument trop peu
répandu. — La Herse-scarificateur avec bascule pour
empêcher l'instrument de s’engorger, du prix de 265 fr. ;
Le Semoir Arnaud-Robert, semant en lignes, en
paquets placés en quinconce ;
Le Rouleau compresseur, Land-presser, du prix de
830 fr., qui permet de semer le blé en lignes à la main,
sur un terrain comprimé, ce qui est favorable à la culture
de cette céréale ;
Le Semoir à engrais: pulvérulents, d’Olm, dans
lequel l’engrais, continuellement divisé par une foule de
lames mises en mouvement par les roues, est répandu
d’une manière égale et régulière au moyen d’un registre ;
La Houe à cheval, de Bodin, à cinq dents, dont la
vente active et facile prouve en faveur de cet instrument
et de son prix modéré , 75 fr. ;
Le Butoir de St, Tea d'antolé: du prix de 40 fr.,
à versoir pouvant s’écarier à volonté;
. La Machine à battre de Cumming, nouvellement
perfectionnée, du prix de 1,800 fr. avec manège et
tarare, — La Machine à battre de Legendre, ne brisant
pas la paille, avec manège de la force de deux'chevaux ,
—
112 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
du prix de 800 fr., mais sans tarare, — Le manège est
garni d’un tampon en caoutchouc qui modère le coup
de collier du cheval ;
La Machine à vapeur locomobile de Lotz. — Celle de
Rouffet, qui n’a que le défaut d’être d’un prix trop élevé ;
La Faneuse anglaise de Smith et Ashbyt, qui fait
l'ouvrage de 40 personnes, excellente pour les foins dans
les terrains unis, mais insuffisante pour les trèfles dans
des terrains accidentés :
Le Raleauàchevalde Howard, de fabrication française,
à dents indépendantes , solidement établi pour 250fr. ;
Le Laveur de légumes, de fabrication française, mu
à bras, auquel on a reproché un cylindre trop court et un
baquet trop. petit ; |
L’Ecorche-racines-Philipps , pour la betterave, qui
écrase toutes les cellules des racines. — Le Couype-
racines de Samuel Son, à double effet, qui coupe en
tubes d’un côté et en lames de l’autre, afin de faciliter
ainsi l’alimentation des moutons et des vaches;
Le Hache-paille de William Dray, avec un système
de contre-poids , et un régulateur pour couper la paille à
des longueurs différentes. Le petit modèle coûte 440 fr. ;
et le grand modèle, 250 fr. ;
Un Cylindre à menue paille de Joly de Ferrières,
pour le nettoyage de la poussière ou terre qu’elle con-
tient , avant de la donner en nourriture aux bestiaux ;
Le Trieur Pernollet, qui donne 4 espèces de grains. —
Le Trieur Vachon, dont le brevet, tombé dans le domaine
public, permet de l’établir aujourd’hui au prix modéré
de 75 fr. ;
La Brouette de ferme pour le transport des fourrages,
qui se répandra lorsque le prix en sera abaissé ;
CONGRÈS DES ACADÉMIES. | 113
Le Parc à moutons en cordes, préparées par le pro-
cédé Husson : chaque panneau a 40 mètres de longueur ;
le mètre courant coûte 2 fr, 25 c. ;
La Pompe arabe, principalement applicable pour le
purin ; elle débite 2 litres à chaque coup de piston : le
soufflet coûte 55 fr, ;
Un Malaxeur à préparer la terre pour fabriquer les
tuyaux de drainage, du prix de 650 fr.
D’autres instruments ou outils, d’une importance moins
grande, ont encore attiré l'attention des membres du
Congrès :
L’Auge à porcs en fonte. — Le Semoir à betteraves,
à la main, du prix de 45 fr, — La Sauterelle pour la sépa-
ration des chevaux dans les écuries et la facilité de
dégager le cheval empiégé. — La Boucle ardillon à re-
trail pour dételer à l'instant le cheval abattu dans les
brancards. — La Mesure à bæufs, de Mathieu de Dom-
basle, — Les Boules à cornes , pour éviter les accidents.
Enfirr, nous avons remarqué des échantillons de graines,
de semences, d’engrais, etc, qui sont livrés avec
garantie sur commande.
Le Secrétaire,
Ch. GOMART.
M. de Caumont demande que le Congrès vote des re-
merciments à M. Jourdier pour la complaisance avec
laquelle il a fait les honneurs de son établissement au
Congrès. L'Assemblée manifeste son approbation et adopte
la proposition.
M. le duc de Maillé prend la parole. Ceque dit
M. Gomart l’engage à demander si, dans l'opinion des
agriculteurs , il y a un grand avantage à se servir du
11/4 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
tarare combiné avec la batteuse, I] lui a été dit que, pour
ces machines combinées, la force motrice devait être
considérable , quoique le travail fût incomplet. Cet in-
convénient peut être irès-grave, surtout dans les exploi-
tations qui n’ont pas adopté de machines à vapeur. Dans
laplupart de nos fermes on a établi des machines à battre
à manége, mu par des chevaux; on est obligé de ménager
la force, lorsque le tarare est placé sous la machine à
battre; il entre des épis dans la machine, qui la rendent
plus difficile à mouvoir ; les chevaux du manège sont obli-
gés de déployer plus de force, de se fatiguer davantage ;
l’adoption de la machine à battre séparée du tarare lui
paraît donc devoir être préférée, ce système ne demandant
qu'une faible dépense de force supplémentaire transmise
à l’aide d'une construction mécanique fort simple. On lui
a assuré que les mêmes hommes employés à ramasser la
paille, à nettoyer le grain, pouvaient suffire à servir le
tarare. En exposant les doutes qui lui ont été communi-
qués, il n’a d'autre but que celui d’amener les explications
des hommes compétens qui se trouvent dans le Congrès.
M. Gomart pense qu’il y a toujours lieu de revenir sur
l'opération faite par le tarare qui ne suffit pas pour net-
toyer le grain ; d’un autre côté, les cultivateurs ne doi-
vent pas rejeter immédiatement les pailles battues et les
livrer à la consommation dans la ferme, il y reste encore
assez de grain pour payer les frais d’un battage. Il n’est
pas de système exclusif pour la position du tarare. Ce
point ne Jui paraît que d’une médiocre importance et
devra dépendre des conditions où se trouve placé le cul-
tivateur ; il croit néanmoins que la main-d'œuvre sera
moins considérable, si le tarare est placé au dessous de la
machine à battre,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 145
M. Albert de Brives fait observer que, pour le service de
la machine de Lotz, un seul homme ne suffit pas ; il faut
pour enlever la paille 3 ou 4 hommes. Cette machine
donne en moyenne un rendement de 30 à 40 hectolitres
par jour. Il désire savoir quels ont été les motifs quiont fait
abandonner les cylindres alimenteurs auxquels on semble
revenir en ce moment ; il demande si on peut lui donner
quelque aperçu sur le prix de revient du travail des
machines à battre à vapeur. Ces machines lui ont paru
consommer beaucoup de charbon.
M. Paquerée répond qu'il faut évaluer à 3 kilogrammes
de charbon, par heure et par force d’un cheval, la quan-
tité consommée par la machine. Quelques-unes d’entre
elles ne demandent cependant que 2 kilogrammes. Dans
l'état actuel de nos connaissances, cela ne lui semble pas
exorbitant, et constitue un travail fort économique , si
l’on veut réfléchir aux résultats obtenus. |
M. le comte de Gourcy a vu chez son beau-frère, rece-
veur-général de l'Oise , une très-bonne machine à battre,
du prix de 4,800 fr., qui peut fournir 200 hectolitres de
blé par jour. Dans la Mayenne, il a vu une petite ma-
chine à battre, qui ne coûte que 700 fr. et qui donne
10 hectolitres de blé par heure, c’est-à-dire 100 hecto-
litres par jour ; le manège , dans ces machines, est mu
par quatre chevaux. Il fait remarquer combien sont
tombées les objections qu’on avait faites à l'introduction
de ces machines à battre, auxquelles on reprochait de
briser la paille. La paille brisée est plus avantageuse au
cultivateur , soit qu’il veuille s’en servir pour nourrir ses
bestiaux, soit qu’il veuille ne l’employer qu’en litière; dans
le premier cas, elle nourrit mieux, car elle-est plus
complètement assimilée ; dans le second , elle absorbe
mieux les urines et toutes les déjections des animaux.
116 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
La parole est à M. le marquis de Vibraye , pour faire
connaître les résultats obtenus à Cheverny, en 1856.
M. le marquis de Vibraye, avant d’entrer dans la question
de la pisciculture pour laquelle il a demandé la parole, croit
devoir signaler les heureux effets des eaux ferrugineuses
naturelles et du traitement ferrugineux dans le traitement
de la cachexie des moutons. Il croit qu’il ne faut pas
se borner à ces soins curatifs, qu’il faut drainer les prés
trop humides des hauteurs où l’on envoie paître les
moutons.
Il a vu de si heureux effets de la présence de l’absinthe
sur des tas de blé pour en chasser les charançons, qu’il
croit aussi devoir profiter de l’occasion qui se présente
pour la recommander aux agriculteurs,
Après ces communications , il entre dans le sujet qu’il
s’est proposé surtout de traiter devant l’Assemblée, 1] fait
observer que la pisciculture a continué d’être comme une
question de laboratoire jusqu’à ces derniers temps. Rap-
pelant les travaux de Jacobi, le rapport du comte de
Golstein , les tentatives des pêcheurs des Vosges, Rémy
et Geshin, les expériences de M, Coste, il arrive à con-
clure que la seule difficulté qui reste à résoudre est celle
qui consiste, après la fécondation et l’éclosion qu’on sait
bien diriger maintenant, à faire grossir l’alevin et à le
conserver jusqu’au sixième mois de son développement,
parce qu’alors seulement il a acquis une force de loco-
motion suffisante pour échapper à ses ennemis par la
rapidité de ses mouvements.
Les principaux ennemis des jeunes poissons sont les
dytiques , les rats d’eau, les épinochettes. Tous ces ani-
maux les poursuivent avec acharnement; ils sont surtout
très-friands de la vésicule ombilicale du jeune poisson ;
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 417
c’est en la coupant que le plus souvent ils le font périr.
Le meilleur moyen d'obtenir le résultat cherché est de
conserver le jeune frai pendant six mois environ dans de
petits bassins en bois blanc, étagés les uns au-dessus des
autres ; il faut donner une nourriture abondante , mais
proportionnée néanmoins avec le volume d’eau et son
renouvellement, de façon qu’elle n’y subisse aucune
putréfaction , qui empoisonnerait le liquide et tuerait le
poisson qui, à cette époque de sa vie, et principalement
au moment de la disparition de la vésicule ombilicale, est
d’une excessive délicatesse et sujet à une véritable
épizootie. M. de Vibraye pense que les frayères artificielles
réussissent mieux que les fécondations artificielles. Il est
nécessaire, pour que l’éclosion ait lieu dans les frayères
artificielles, que les eaux aient une température de
4° “+ 0. Dans les frayères artificielles, il faut garantir
d’autres ennemis encore le jeune frai. Les oiseaux : le
martin-pêcheur, le rouge-gorge, viennent manger les
œufs qui sont placés seulement à 20 ou 30 centimètres de
profondeur. Il faut donc garantir ces frayères par des toiles
métalliques. M. de Vibraye croit que les œufs peuvent
éclore avec une quantité faible de lumière. Les rayons
directs du soleil et même une trop grande quantité de
lumière diffuse leur seraient nuisibles et les empêcheraient
d’éclore. M. de Vibraye a pu élever ces poissons jusqu’à
ce qu'ils aient une taille de 22 centimètres et qu’ils
pesassent 750 grammes à 4 kilogr. La truite des lacs
devra acquérir un volume plus considérable; les difficultés
sont nombreuses pour les saumons, il faut les nourrir
avec des œufs de carpe; mais lorsqu'ils ont acquis une
certaine taille, on ne les retrouve pas, on ne sait com-
ment ils ont pu s'échapper et ce qu’ils sont devenus.
118 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M. de Vibraye a vu frayer des truiles : le mâle vient
préparer le terrain, creuser le sable avec sa queue ;
la femelle y dépose ses œufs, puis le mâle se couchant
dessus y dépose sa semence, puis recouvre le nid d’une
légère couche de sable. La carpe est difficile à reproduire
à cause de la haute température (24° + 0) des eaux
qu’elle exige pour que ses œufs qui, comme on sait, sont
très-petits, puissent éclore. On a beaucoup parlé, dans ces
derniers temps, d’un saumon du Danube, qui pourrait
vivre uniquement dans les eaux douces. Les tentatives
faites pour l’acclimater, soit au château de Fleury, appar-
tenant à M"°, la marquise de La Rochejacquelein ; soit
à Cheverny, n’ont pas eu de succès. M. Coste a réussi à en
conserver un vivant au collége de France.
M. d’Esterno demande si la question de la pisciculture
est assez avancée pour qu’on puisse en dire les avantages
au point de vue industriel , et quelles inductions peuvent
ressortir des expériences faites pour le profit à tirer rela-
tivement aux dépenses.
M. de Vibraye répond que la fécondation et l’éclosion
ne demandent aucuns frais réels : un simple bassin en
terre cuite suffit; il n'ya donc que la conservation pour
laquelle il faut des réservoirs en terre : tout cela n’est
pas dispendieux, mais demande des soins éclairés.
Sur l'invitation de M. de Caumont, M. de Vibraye entre-
tient ensuite le Congrès des reboisements dans la Sologne,
dont le but est de ramener l’état de prospérité ancienne
dans cette contrée qui était peuplée et fertile tant qu’elle
fut couverte de forêts. On sait, par des témoignages écrits,
que la culture y était possible et avantageuse. Il y avait
des pâturages, par suite des engrais sans lesquels on ne
CONGRÈS DES ACADÉMIES. à 149
peut en faire. La destruction des bois a changé le climat et
rendu improductif le travail de agriculteur. En reboïsant,
on rétablira les choses dans l’état primitif. M. de Vibraye
se justifie d’une accusation portée contre lui dans le Bul-
letin monumental , sur la destruction du parc, ou bois du
beau château de Cheverny ; s’il a dû détruire, c’est pour
restaurer. Déjà il a planté plus de 1000 chênes d’Amé-
rique ; il veut surtout introduire le chêne de Mantchourie,
utile pour le ver à soie qu’il nourrit. Il se trouvera
peut-être quelque espèce parmi celles d'Amérique qui
pourra le remplacer. Dans tous les cas, on le multi-
pliera par la greffe dès qu’on le pourra, il faut pour cela
que le jeune bois ait atteint sa deuxième année, — M. de
Vibraye a remis à M. Vilmorin la nomenclature de toutes
ses espèces; on sait que l'Ecole d’arboriculture, de syl-
viculture , de la propriété des Barres ( Loiret), permet
d'établir les noms des espèces d'Amérique, rapportées
par M. Michaux, avec beaucoup de certitude. M. de
Vibraye pense que’, dans lacclimatation des végétaux, il
faut faire grande attention aux lignes isothermes dans la
France du Nord et du Centre; on ne peut guère espérer
acclimater que les espèces qui croïssent au Nord de San-
Francisco. Le climat d’Harcourt (Eure) étant un climat
marin , c’est-à-dire jouissant d’une température plus
égale, a permis néanmoins à quelques espèces de vivre
et de s’acclimater. Dans le centre de la France, on a des
variations de température qui embrassent 21°; à Vienne,
en Autriche 48°; à Londres 10°; à Angers 8°, seule-
ment, ce qui explique pourquoi et comment des végétaux
exotiques très-délicats ont pu réussir-dans cette ville.
Les tissus des arbres ne se modifient pas facilement ; si
cette modification a lieu, cela ne peut être qu’à l’aide
120 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCE,
de beaucoup de temps et peut-être par des croisements.
M. de Vibraye a fecondé l’Abies Douglasii avec l’Abies
Fraseri et il a obtenu 600 sujets de graines. On sait
qu’une des variétés de l’Abies Douglasii, celle à chatons
verts, ne se reproduit pas; la variété à chatons purpurins
jouit seule de cette possibilité.
M. le général Borelli rappelle que les lignes isothermes
peuvent avoir leur importance, mais que l’altitude doit
fournir une base d’induction puissante pour diriger dans
les essais d'introduction des végétaux étrangers. On peut
sous l’Equateur trouver des lieux qui, en raison de leur
élévation , n’aient que des températures très-faibles.
M. de Bouis croit devoir faire remarquer que le climat
d’un pays, et par conséquent les conditions nécessaires
aux végélaux, ne repose pas seulement sur la connaissance
de la température moyenne de l’année , fournie par les
lignes isothermiques. Il n’y a pas seulement à les com-
pléter par les lignes isochémeniques, mais il faut savoir
quelle est la courbe qui représente leur succession dans
l’ordre annuel; il faut savoir l’état hygrométrique, la
direction des vents, les conditions géologiques et topo-
graphiques de la région, la direction des chaînes de
montagnes, l'exposition des pentes. Les botanistes con-
cluent plutôt d’un climat par l’ensemble, par l'aspect
général de la végétation, qui rapproche certaines espèces.
Ce sont là les guides les plus sûrs pour savoir les chances
de succès d'introduction d’un végétal dans une contrée.
M. de Caumont demande si les magnifiques plantations
de M. de Vibraye ont continué leur végétation vigoureuse.
M. de Vibraye répond qu’il est toujours fort satisfait de
ses plantations ; mais, pour réussir, il faut avoir soin
de ne pas semer à la volée dans les bruyères et dans les
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 194
ajoncs qui étouffent tout; il faut préparer le.sol par une
bonne culture et les dépouiller entièrement de.ce qui
couvre sa superficie. Pour les arbres verts, la. présence
du calcaire lui paraît nuisible.
M. Guérin-Menneville communique un ideLe qu il re-
garde comme très-utile aux sériciculteurs, pour la con-
stitution d’une Compagnie financière dans le but de créer
de bonnes races de vers à soie et d’en vendre les produits.
La fraude a tellement détérioré les races, qu’il devient
absolument nécessaire d'y apporter remède.
La séance est levée à 5 heures.
pts | Le Secrétaire,
ARE DE BOUIS.
NOTE SUR LES PROGRÈS DE LA GÉOLOGIE, EN 1856,
PAR M. BOUÉ,
à
Membre de l’Académie impériale de Vienne.
_ Parmi lés travaux sur la géographie géologique pro-
duits par nos savants, je dois signaler le Mémoire sur
les anthracites des Alpes, de M. Studer; la Descrip-
_ tion du trias en Lombardie, par M. Curioni. D’après
les découvertes des géologues autrichiens Foetterle, de
» Hauer, Stur, elc., il est constant que le trias s’étend -
le long des Alpes vénitiennes jusqu’en Carinthie et en
Carniole; on le rencontre même en Croatie et en Dal-
- matie. Derrière ce trias se trouve, adossé à une chaîne
. de schistes cristallins, un énorme banc de calcaire de
montagne , ou #7ountain lime-stone, et de dévonien
6
1929 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
carbonifère à plantes fossiles offertes, en France, par
les anthracites des. Alpes. Cette formation se prolonge
du Tyrol jusqu’en Carinthie, tandis que, sur le versant
nord des Alpes... il y a, sur les schistes cristallins, du
silurien, mais avec une grande pénurie de fossiles. Le
muschelkalk a été découvert, par M. Zepharowich, dans
les monts voisins de Füred , sur le lac Balaton au milieu
de la Hongrie. Le terrain paléozoïque existerait,. dit-
on, aussi dans la Dalmatie septentrionale, vers les
frontières turco-croates. Des cartes géologiques achevées
laissent apercevoir aisément tous ces curieux faits de
géographie géologique.—La coupe de M. Franc de Hauer,
de Duino sur J'Adriatique à Passau sur le Danube ,
coupe proportionnelle en tout avec la nature , donne
une idée parfaite. de la structure des Alpes autrichiennes.
D'une autre part, dans les Carpathes septentrionales
et dans la Silésie autrichienne, M. Hohenegger nous
montre, sur une belle carte, la série suivante de dé-
pôts; savoir: autour de Teschen, la formation du hils
de l’Allemagne septentrionale, le néocomien, l'argonien,
l’aptien, le gault, l’albien, le plâner, le crétacé supérieur,
l’éocène à nummulites, avec les marnes et grès à fu-
coïdes; enfin l'argile tertiaire ou tegel néogène. Tout cela
a été déterminé par les fossiles et la superposition. Les
terrains inférieurs sont au Nord en Silésie, et les au-
tres sont superposés sur eux dans une direction qui
va du Nord-Ouest au Sud-Est, ou orthogonale à la
direction de leurs couches. Les terrains secondaires su-
périeurs forment la crête des Carpathes.
M. Suess propose la formation d’une Société cosmo-!
polite de géologues pour les Alpes.
M, Alt de Tschernovitz m’a fait connaître un fait bien
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 1925
extraordinaire, c’est l'existence de roches trachitiques
non loin du della du bas Danube. fl prétend qu’il y
en a même au Nord du Danube, non loin du fameux
pied de nez des diplomates, de Bolgrad. Jamais dans
cette région, assez plate et peu accidentée, on n'avait
indiqué pareille chose. Mais si M. Alt, bon géologue
du reste, ne s’est pas laissé tromper, le groupe de
Babadagh, au Sud du débouché du Danube, pourrait
être aussi trachitique !
En Russie, les relevés géographiques de la mer d’Aral
et des steppes entre cette mer et la mer Caspienne
nous ont fourni des données toutes nouvelles, sur les
phases de formation par lesquelles ont passé ces grands
affaissements de l'Asie. On avait cru | jusqu'ici que le
terrain de ces plaines était surtout formé de dépôts
récents. Or, il y a beaucoup de couches coquillières
des assises supérieures et tertiaires ; mais en outre
” J'éocène y est en abondance.
On doit connaître, en France, les découvertes des
frères Schlagintweit, qui ont traversé la chaîne du
Kuenlun et visité la province de Ladack, en Asie.
En Amérique, nos connaissances sur la partie occi-
dentale du Nord de ce continent se sont fort augmentées.
Nous avons reçu une série de relevés sur la Californie
(parties Sud et Nord), sur l’Orégon, sur l’Utah, etc.
Le gouvernement des États-Unis a voté les fonds né-
cessaires pour des expéditions autant géographiques que
géologiques. Un des derniers rapports de ce genre qui
nous sont parvenus est celui qui figure les cinq ou six
grandes voies de communication possibles entre les,
États-Unis que baigne l'océan Atlantique et ceux que
49% INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
borde la mer Pacifique. Avec la liberté pleine d'action
des Américains, leur bon sens pratique, un rail tra-
versera bientôt tout ce continent; un travail d’un siècle
en Europe sera, en Amérique, l’affaire de cinq à dix
ans. L'établissement d’une voie ferrée reliant Vienne à
‘Frieste a demandé dix-sept ans : à ce compte, les Amé-
ricains n'iraient de New-York à San-Francisco qu’en
Fan de grâce 2000,
Pour le Sud de PAmérique, M. le docteur Karsten
nous à fait connaître, avec tous les détails désirables,
les terrains secondaires des Cordilières entre les plaines
de l’Orénoque, et celles que baigne la rivière des Ama-
zones. Il à pu distinguer, par les fossiles, la craie in-
férieure, ycompris le gault et le néocomien, puis une
” grande zône crétacée à rudistes et polythalamées ; enfin
le terrain tertiaire pauvre en fossiles, mais très-riche
en agglomérats; et, par-dessus le tout, les alluvions,
les cailloux, les dépôts à coquilles marines — lon
trouve encore actuellement vivantes.
Quant à l'Afrique, les ouvrages de MM. de Barth
et de Livingston vont nous donner enfin des notions
raisonnées sur les parties centrale et méridionale de ce
continent. Le voyage, de huit à dix ans, de Ladisluns
Magyar dans les possessions portugaises sera aussi fort
curieux. I a déjà donné quelques idées du cours du
Zaire. D’après les analogies de la géographie physique,
la découverte de grands lacs et même de mers inté-
rieures dans le centre de PAfrique n’a rien d'étonnant,
parce qu’on y retrouve réunies plusieurs des circon-
stances qui ont donné lieu aux mêmes accidents dans
l'Asie centrale. Il n’y a que la différence que ces affais-
sements y ont eu lieu à des degrés de profondeur tout-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 195
à-fait opposés, et qu'ils sont relativement les uns aux
autres dans des directions totalement orthogonales. Le
Nil trouve même son analogue dans lIrtisch, en Asie,
continent qui, dans la formation de sa partie septen-
trionale, est beaucoup moins compliquée que le Nord
de l'Afrique, où le désert de Sahara est composé à peu
près cependant comme le continent sn par la mer
glaciale.
Les nouvelles découvertes faites en Agérié abnt
faire souhaiter vivement qu'on puisse aborder le Sud
du Maroc, pour avoir enfin une notion générale du
Nord de l'Afrique. Ces gîtes d’émeraude, .décrits par
MM. Bayle et Ville, sont bien intéressants.
En fait de cartes géologiques, outre celles de lPEu-
rope entière publiées, à Edimbourg et à Bruxelles, par
M. Dumont, j'aurais à signaler celle des Alpes autri-
chiennes, par M. F. de Hauer. Elle est fort réduite,
et annexée à un Essai de statistique, de M. Czoernig ,
mais malgré cela fort instructive comme coup-d’œil.
La carte de la partie orientale des Alpes pour l’époque
des alluvions anciennes et le sol tertiaire, par M. Stur,
est une ébauche qui mérite des éloges, même des per-
sonnes n’admettant pas ses explications théoriques, Il
a publié aussi un Mémoire très-curieux sur l’influence
qu’exerce sur la végétation la nature du sol ou des
. roches sous-jacentes. Sept ans de rudes voyages à pied
dans les Alpes l'ont rendu capable, Il prétend qu’on
y rencontrerait des alluvions à une altitude de plus
de 1,666 mètres.
La Société des géologues allemands travaille à une
carte géologique détaillée de l’Allemagne, M. G. Rose 2
126 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.,
achevé sa carte de la partie orientale du Riesengebirge
en Silésie , et M. Beyrich celle de la partie occidentale,
y compris une partie des frontières de la Bohème. La
communication de cartes autrichiennes de lÉtat-major
a seul pu donner à M. Beyrich les moyens de terminer
son travail, car les frontières y sont figurées d’après
ces cartes et exactement sous les mêmes traits.
Une carte balnéographique et géologique de la Tran-
sylvanie, de M. Koristka, est un travail présentant un
intérêt tout particulier, eu égard à son te et aux
idées neuves qu’il révèle. |
La Société de Médecine de Yionie travaille à une
carte générale des eaux minérales de tout lempire.
Des cartes d’un nouveau genre, dites cartes benthéo-
graphiques ou du fond des mers, viennent d'être pu-
bliées, comme celle de M. Forchhammer pour le détroit
entre la Troade et Ténédos, celle du fond de PAtlan-
tique entre l'Irlande et la Nouvelle-Écosse, celle plus
ancienne de Stevenson établissant la constitution géolo-
gique du fond de la mer du Nord, de la Manche, etc.
Sous ce rapport, les Américains ont l'air de vouloir
prendre les devants, Le lieutenant Maury, non content
de nous avoir donné sa carte des vents pour l’Atlan-
tique , va bientôt livrer à la science une carte topo-
graphique générale des mers, où sera indiqué tout ce
qu’il est possible de rencontrer en mer. Naturellement
la température des eaux, les courants et le fond de
la mer, sa profondeur, la nature du sol sous-marin,
ne seront pas négligés.
On ne saurait trop louer les efforts tentés, en France,
pour la confection de cartes agricoles, cette branche
importante de la géologie pratique. J’insiste sur la né-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 197
cessité de faire ces cartes sur une grande échelle, et
de donner la composition aussi probable que possible
du sol sous-jacent jusqu’à quelques centaines de pieds
de profondeur, et cela au moyen de plusieurs cartes
se superposant l'une sur l'autre. De cette manière,
l'agriculteur étant à même de distinguer la nature des
différents terroirs de son exploitation, pourra toujours
les utiliser avantageusement quand il lui faudra, sui-
vant les exigences de ses: cultures, un sol humide,
sec, argileux ou pierreux. -— M. Ravenstein a ouvert
une souscription pour des caries, qu’il nomme schichten
karten, figurant les différentes couches géologiques
par des bandes horizontales qui en déterminent d’une
manière approximative l'étendue et l'épaisseur, comme
celle de M. Dupin-Triel pour la France, de Oeltzen
pour toute l’Europe. M. Strefflen, de Vienne , a com-
posé des reliefs présentant, aussi sous des bandes ho-
rizontales, les montagnes du Tyrol, des Alpes autri-
chiennes et de la Bohême : il est fort regrettable qu'ils
ne soient pas dans le commerce.
Sur les questions théoriques de géologie, J'aurais à
citer plusieurs mémoires; mais cela m’entraiînerait trop
Join. Le mode de corroder les minéraux et les roches
au moyen des acides, et de les polir ensuite, a porté
M. Leitoldt à déduire quelques conséquences du succès
de ce procédé. Il a découvert ainsi des cristallisations
dans le verre, par exemple, où on n’en voyait pas à
la loupe. |
La question de la régularité de la surface terrestre
devient de plus en plus claire. J'ai publié une petite
notice, dans le but de démontrer, en peu de mots,
que notre terre n'est point un simple agglomérat de
128 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
matières diverses, sans aucun ordre, Des lois fixes et
bien définies ont présidé à sa formation; ces lois doivent
avoir produit leurs effets dans un certain ordre, et de
là il sera résulté un corps composé, il est vrai, de
matière inerte, mais d’une certaine régularité symé-
trique. Or, si cette régularité symétrique se manifeste
à l’intérieur du globe, elle doit nécessairement se re-
produire à l'extérieur. C’est là la source de toutes les
observations déjà faites sur la symétrie ou régularité
des mers ou des terres à la surface du globe. C’est
là la base des systèmes divers des cercles d'action, à
différentes époques géologiques. Il est bien curieux de
voir que les écrivains contemporains de l’Exposé des
douze soulèvements, d’Élie de Beaumont, ont critiqué
ce travail, parce qu’il leur semblait établir cette régula-
rité dans la composition des couches superficielles de
la terre. Mais leur opinion est tombée sans valeur à
l'apparition du système du réseau pentagonal ; et voilà
que le tracé de ce réseau, dû à MM. Dien et Langol,
vient d'empêcher la présentation, à la Société géolo-
gique de France, d’un travail de même nature préparé
par M. Feldmarschall de Hauslab. Toutefois, MM. Mi-
chelin et Collomb ont pu l’examiner à Vienne, au mois
de septembre dernier. Ici se présente une dissidence in-
téressante à noter : tandis que les entrecroisements des
cercles décrits par Élie de Beaumont reposent sur de
grands affaissements du globe ou sur des mers pro-
fondes, ces mêmes entrecroisements, dans le tracé de
M. de Hauslab, s'appuient sur les sommets des plus
hautes montagnes connues, comme le Chimboraço, etc.
Pour moi, je ne trouve pas seulement la preuve de
la régularité de la composition extérieure du globe dans
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 129
la place des terres et des mers, mais encore dans les
plans et directions des chaînes de montagnes, des ri-
vières, des lacs, etc., témoignant de la régularité dans
la composition des couches intérieures ; je m'appuie
aussi sur les phénomènes déjà connus du magnétisme
terrestre , les affaissements amenés par les siècles, etc.
J'ai recherché la cause des tremblements de terre :
je crois qu’on peut les attribuer, comme les aurores
boréales et les phénomènes magnétiques terrestres, aux
rapports entre la terre et les astres. Peut-être suis-je
dans l'erreur : à la science de prononcer sur la valeur
de cette opinion ; encore reste-t-il à déterminer d’une
manière bien tranchée la différence qui existe entre
ces faibles tremblements de terre qui se manifestent dans
une localité seulement , et ces grandes secousses qui se
font ressentir dans toute la direction du Nord au Sud,
embrassant un vingtième, un dixième, et quelquefois
même un quart du globe. Quelle que soit la cause qui
détermine ces deux chocs, elle ne saurait être la même
assurément. J'ai recherché, avec la plus grande attention,
dans quelle direction se produisent et le choc propre-
ment dit et les vibrations latérales qui le suivent: deux
phénomènes entre lesquels on n’a pas jusqu'ici établi
de distinction. La coïncidence de fréquence variable, sui-
vant les saisons, des tremblements de terre, ou des
aurores boréales, est-elle accidentelle ou inexplicable sans
liaison réelle des deux phénomènes ? A cela je réponds
que je ne crois pas le gite des volcans à une très-grande
profondeur dans la terre , et que ces masses ignées sont
assises sur d’autres douées déjà d’une plus grande
consistance et reposant elles-mêmes sur les massifs
primitifs constituant, si l’on peut s'exprimer ainsi,
130 INSTITUT DES PROVINCES: DE FRANCE.
l'embryon de notre planète, dans le principe à l'état de
vapeurs condensées,
Des physiciens ont'été amenés à des considérations
toutes semblables, par suite des phénomènes magnétiques
_qui leur ont facilité puissamment l'explication des faits.
Je ne saurais trop recommander l'usage des instru-
ments nouveaux pour l'observation des tremblements
de terre, surtout de ceux qui s’enregistrent eux-mêmes:
nous’arriverons ainsi à nous rendre compte de nombreux
phénomènes qui passent sb nous complètement ina-
perçus. |
Encore un mot sur la Paléontologie. neo jour
amène la découverte de nouveaux fossiles dans le Sud-
Est de l’Europe, moins exploité que le Nord-Ouest au
point de vue de ce genre de recherches. Je puis, à ce
sujet, signaler de nombreux Mémoires , enrichis d’un
certain nombre de planches, dus à MM, Reuss, Heckel,
Suess, de Hauer, Hornes, Peters, etc. Les Céphalo-
podes et Gastéropodes secondaires des Alpes ne sont
pas encore tous décrits. Viendront ensuite ceux de la
Hongrie. M. Hornes travaille au second volume de sa
Description des fossiles tertiaires de Vienne. C'est
au Musée impérial, dont il est maintenant conservateur,
et où tous ces fossiles ont été déposés, qu’il continue
son œuvre, c’est [à que le crayon d’artistes devenus
habiles à les dessiner s'exerce à en tracer des images
fidèles. Les fossiles tertiaires sont tellement abondants
chez nous que l’on a toujours, au Palais de FInstitut
géologique impérial, des collections emballées , toutes
prêtes à être expédiées en échange d'objets qui peuvent
intéresser la science. %
L'ouvrage préparé par le docteur Reuss est appelé à
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 431
faire époque, si je ne me trompe: il doit traiter de
tous les genres de Céphalopodes microscopiques connus,
dont il donnera des figures ; et offrir , en même lemps,
mais avec quelques planches seulement, une descrip-
tion de leurs différentes espèces.
M. Barrande publiera bientôt, sans doute , la seconde
partie de son Encyclopédie paléozoïque.
‘Les plantes fossiles ont provoqué plusieurs ou-
vrages intéressants, tels que la Flore tertiaire de la
Suisse, par M. Heer, dont nous avons aussi une pu-
blication, en 2 volumes, Sur les insectes fossiles
d’OEningen et de Radberg, etc. M. Ettingshausen n’a
livré à la science qu'un Mémoire sur la botanique fos-
sile, ayant été trop occupé de son grand ouvrage, en
6 volumes in-4°,, Sur les nervures des plantes. Les
planches qui accompagnent cet ouvrage sont imprimées
au procédé dit de pression naturelle, Quoi qu’on ait
dit de ce procédé, il est fort commode et réussit très-
bien pour la reproduction des nervures.
M. le professeur Unger a terminé l’année par la dé-
couverte que les prétendus Nullipores (Lamark ) des
calcaires tertiaires de Desnoyers, de Dinant, etc. (nos
Leithalkalk), sont des restes de végétaux marins cal-
caires : il en a divisé en tranches très-minces qu'il a
examinées au microscope. Il les a trouvés identiques
avec ce qu'il a recueilli lui-même sur les rivages de la
Norwége. 11 a retrouvé dans les fossiles la teinte rosée
du végétal sur pied, etc.— Chez nous, l'amour de la
science paléozoïque va jusqu’à faire rêver à l'existence
de l’homme véritablement fossile, c’est-à-dire contem-
porain d’Adam et d’Eve.
Ennfait d’ethnographie, M. Czoernig fait précis
132 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
sous un format réduit, pour la répandre dans le com-
merce, sa Carte ethnographique générale et détaillée
de la monarchie autrichienne. Je pense qu’il la pré-
sentera au Congrès cosmopolite de statistique qui doit
avoir lieu, cet été, à Vienne. En mai, nous avons eu
une exposition, semblable à celle de Bruxelles, où se
voyaient des meubles nombreux et, en général, tous
les objets de nature à intéresser l’économie domestique ;
le tout à des prix excessivement réduits. En 1858, nous
aurons une grande exposition industrielle.
Je pourrais ajouter beaucoup à cette note, si j'entre-
prenais, par exemple, de parler de la Société d’agri-
culture de Vienne, qui compte plus d’un demi-siècle
d'existence. —Mais je m’arrête ici, heureux d’avoir montré
que l’Autriche marche résoläment dans la voie du progrès.
ve
ARCHÉOLOGIE, LITTÉRATURE ET BEAUX-ARTS.
SÉANCE DU 14 AVRIL 1857.
( Présidence de M. le comte pe MELLET. )
Sont appelés au bureau : MM. DE CAUMONT , le marquis
DE GODEFROY-MESNILGLAISE, le comte DE MAILLY, le vi-
comte DE BONNEUIL, BizEuL (de Blain), le colonel
SOLEIROL , DUPUIS.
M. R. BORDEAUX tient la plume, comme secrétaire-
général.
Les 17°, et 18°, questions mises en discussion, sont
ainsi CONÇUES :
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 133
« Que doivent faire maintenant les Sociétés archéo-
« logiques pour compléter les notions acquises déjà sur
« l’état de l’art, durant les périodes mérovingienne et
« carlovingienne ? » |
« Les études archéologiques ne sont-elles pas dirigées
« un peu trop exclusivement vers l’étude des monuments
« des XIII, , XIV°, , XV°. et XVI°, siècles ; n’aurait-on
« pas dû étudier avec le même empressement l’histoire
« de l’art du V°, au XII°, siècle ? »
M. de Caumont signale l’importance de ces deux ques-
tions, qui roulent sur des points beaucoup trop négligés
Jusqu'ici. Il rappelle qu’à Poitiers, l’église St.-Jean
est un beau spécimen de l'architecture mérovingienne :
le transept et l’abside sont encore debout et les sub-
structions de la nef ont été récemment retrouvées dans le
jardin de l'évêché. Évidemment cette église, qui était
orientée et qui est près de la cathédrale actuelle, a été
bâtie pour servir de baptistère à la cathédrale primitive.
M. de Caumont ajoute que presque tous les musées de
province recèlent des fragments d’architecture méro-
vingienne, auxquels la plupart des visiteurs n’accordent
pas assez d'attention. Ces fragments mériteraient d’être
mis plus en évidence. Quelques-uns de ces débris sont
dus à des églises des XI°., XII°., et XIII. siècles, etc. ,
démolies dans ces dernières années , et dans la maçon-
nerie desquelles on a découvert ces restes d’églises
antérieures, Plusieurs églises romanes ou ogivales, en-
core debout, présentent également, dans leurs mu-
railles, de ces débris mérovingiens. Telle est l’église
d'Évrecy, près de Caen, dans les murs de laquelle
on voit pêle-mêle des claveaux très-curieux provenant
d’une église beaueoup plus ancienne, La Société fran-
134 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
çaise d'archéologie se propose de faire mouler et: de
publier ces claveaux, jetés dans la maçonnerie du chevet
de l’église d’'Évrecy.
M. de Caumont termine en rappelant que tout AcbbiEts:
ment, à Chartres, M. Durand a trouvé, dans la crypte de
St.-Brice , des chapiteaux en marbre identiques avec les
célèbres chapiteaux mérovingiens de l’église de Jouarre
(Seine-et-Marne ),
M. de Mellet, dans une improvisation élégante , résume
les causes qui avaient fait négliger jusqu'ici, par les
archéologues, l'étude et la recherche de ces monuments
antérieurs au XI°. siècle.
M. Gadebled voudrait que l’on recherchât s’il peut y avoir
encore quelque chose de mérovingien dans l’église de St.-
Germain-des-Prés, à Paris. Il indique, dans le tome II de
l'ouvrage de Dom Bouquet, p. 722, une curieuse disser-
tation, écrite en 4699, par Dom Thierry Ruinert, sur les
parties mérovingiennes encore subsistantes de son temps
à St.-Germain-des-Prés. En ce moment même, il y a en-
core, dans les tribunes de la nef, plusieurs colonnettes
dont les füts en marbre, masqués sous le badigeon, sont
peut-être des débris de l'église primitive.
La discussion est renvoyée à une autre séance.
M. le Président donne la parole à M. Tailliar pour la
lecture d’un mémoire intitulé : Origines des communes
du Nord de la France.
Dans ce travail, l’auteur , après avoir signalé la place
considérable que tient la Gaule dans l’Empire romain au
IV°, siècle, sous Constance Chlore et ses successeurs , re-
trace l’état des cités du Nord de la Gaule-Belgique à cette
époque. Il décrit le territoire de chacune d'elles, sa dis-
tribution en cantons ou pagi. I représente le chef-lieu de
rer
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 139
la cité ou cité proprement dite, son enceinte , ses rem-
parts, ses fortifications ; — ses divisions intérieures , ses
places, ses rues; — ses principaux temples, sa basilique,
son forum, ses thermes ou bains publics, ses autres
monuments, ses vici ou quartiers habités par des profes-
sions diverses. |
Les autres villes ou places fortes a nitee de la cité
principale , les bourgs fortifiés, les ports de mer, les
bourgs ouverts et les nas sont mentionnés tour à
tour.
L’auteur indique ensuite les différentes classes de per-
sonnes qui habitent les cités et leur territoire : la noblesse
impériale et municipale ; les plébéiens, comprenant eux-
mêmes plusieurs catégories ; les artisans , divisés en cor-
porations ; les affranchis ; les colons et les lètes ; enfin,
en-dehors de la vie civile et de l’état social, les esclaves
attachés à la personne et les serfs d’héritage.
Dans ce mémoire, M. Tailliar, combinant les docu-
ments que fournissent le Code Théodosien , les écrivains
du IV®, et du V°. siècle , les plus anciennes biographies
des martyrs et des confesseurs, et les traditions recueillies
dans les histoires locales , s'attache principalement à re-
chercher et à constater les éléments gallo-romains gui
plus tard entrent dans les communes,
Cette lecture est suivie des applaudissements de l’As-
semblée,
La 49°, question est ainsi conçue :
« Quelles sont les études encore à faire pour préci-
« ser, mieux qu'on ne l’a fait jusqu'ici, les principes
« de classification chronologique des en et des
« tombeaux ? »
M. Gadebled rappelle l'ip ice des textes que on
136 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
trouve sur cette question, dans l'ouvrage de saint Gré-
goire de Tours, intitulé : De gloria Confessorum. Ainsi
le chapitre 1v de ce traité, est intitulé: De sancto
Martino Turonico episcopo et de sepulcro sancti Gra-
ciani. Le chapitre v a pour titre : De segulcro
Vitalinæ virginis. Le chapitre 1x, Sepulcri sancti
Martini , et le chapitre x contiennent des passages in-
téressants. Dans le chapitre xxr, De sepulcro sancti So-
lenis, on lit la description d’un tombeau caché dans
une crypte où conduisait une série de degrés. Au cha-
pitre xxvu, De sepulcris presbyterorum in basilica
sancti Martialis, il est question de plusieurs sarco-
phages dans l’un desquels le saint évêque Martial reçut
la sépulture, conjunctis sarcophagis in eadem crypta.
Le chapitre xxx1r parle de deux amants inhumés dans
le même lieu, l’un au Nord, l’autre au Midi. Plus loin,
chapitres xxxv et xxxvi, il est question de tombeaux
de marbre, placés dans la basilique de St.-Vénérand
et dans lesquels nonnulli virorum sanctorum et
mulierum religiosarum quiescunt. L'auteur y raconte
comment ces sépultures furent ouvertes et violées. Les
chapitres xxxvir, LIT et LIII contiennent des détails ana-
logues. Des récits de déplacement de sépultures ou de
violation de tombeaux se retrouvent encore aux cha-
pitres Lx et LxI—. Au chapitre Lxxr11, il est question
de cœmiterio Augustodunensis urbis, où l’on décou-
vrit multorum hominum cadavera funerata. Enfin le
chapitre LxxIv et cv ont pour titre, lun: De sepul-
cro Cassiani episcopi , et l’autre : De sepulcro Cres-
centiæ in vico Parisiorum.
M. Tailliar pense que la violation des tombeaux fut
généralement l’œuvre des Normands, Tous les tombeaux
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 4137
ne furent pas cependant violés, témoin celui de Chilpéric
découvert à Tournai, au XVII, siècle, et décrit par
Chiflet. |
M. Gosse apporte de nouveaux documents à l’appui de
ce fait si étrange, et pourtant si constant, du bouleverse-
ment des anciens tombeaux : il a ouvert plus de 50 tom-
beaux aux environs de Genève : tous étaient vides , ex-
cepté 2 où se trouvaient encore des fémurs; mais la
situation de ces os attestait que le cercueil avait ce-
pendant été violé. #
M. Perrot, d'Orléans, demande quelles pouvaient être
les causes de cette violation.
M. Bordeaux répond que l’on possède beaucoup de
textes anciens relatifs à cette abominable coutume. On
lit, dans les anciens conciles, des anathêmes contre les
violateurs , et les lois pénales de nos aïeux ne sont pas
muettes à ce sujet. M. l’abbé Cochet, dans sa Norman-
die souterraine et dans son volume sur les Sépultures,
qui vient de paraître , s’est beaucoup occupé de ces ques-
tions.
M. Dréollé dit que la violation des tombeaux était fré-
quente, dès les temps les plus anciens, chez les Égyp-
tiens et les Grecs ; on regarde que c’était par réaction
contre la mémoire de certains morts puissants, que ces
violations avaient eu lieu.
Un membre de l’Assemblée explique que beaucoup de
cercueils que l’on trouve vides n’ont cependant pas été
violés : c’étaient des tombeaux préparés à l’avance ; mais
ceux qui les avaient fait faire n’y furent pas inhumés.
M. Bordeaux rappelle que plusieurs textes de légendes
et de vies des saints attestent qu’à l’époque mérovin-
gienne, on était parfois dans l’usage de louer des sarco-
138 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
phages qui, au bout d’un certain temps , servaient à re-
cevoir de nouveaux cadavres.
La séance est levée à cinq heures.
L'un des Secrétaires-yénéraux ,
Raymond BORDEAUX.
: SÉANCE DU 15 AVRIL 1857.
(Présidence de M. Taïzrar, conseiller à la Cour impériale
de Douai, )
Le procès-verbal de la séance du 44 est lu et adopté.
Sont présents au bureau: MM. DE CAUMONT ; VINCENT,
mêémbre de l’Institut ; le comte Du Manor, délégué de
la Société de Bayeux ; LE GRAND, député du Nord; le vi-
comte DE KERIDEC , délégué de la Société philomatique
de Vannes; le général DE BORELL1; Louis PARIS, ancien
secrétaire-général du Congrès scientifique.
M. Ch. GomarrT remplit les fonctions de secrétaire.
M. le Président procède au dépouillement de la cor-
respondance.
M. le Président de la Société archéologique de Sens
annonce que cette Compagnie a délégué M. Julliot , son
secrétaire, pour la représenter au Congrès.
M. L. Berluc de Pérussis délègue , en qualité d’ins-
pecteur des monuments historiques des Basses-Alpes ,
et de président départemental de la Société française
d'archéologie, M. Marius Garcin , secrétaire de la rédaction
de l’Ami de la Religion , et M. le docteur Garcin.
La Société d'histoire naturelle du département de la
Moselle délègue , pour la représenter au Congrès, lPun
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 139
de ses membres, M. le colonel Soleirol, ancien pro-
fesseur à l’école d'application du Génie de Metz.
La Société du Berry délègue au Congrès M. le comte
de Bondy, ancien pair de France, et M. Maurenq, lun
de ses membres.
M, le baron de Montreuil , membre du Corps législatif
et M. Dupétiaux, de Bruxelles, s’excusent de ne pouvoir
prendre part aux travaux du Congrès. M. Dupétiaux an-
nonce de plus que le Congrès international de bienfaisance
est convoqué à Francfort-sur-le-Mein, pour le 14, La
tembre prochain.
Il est fait hommage au Congrès des ouvrages suivants :
Jehan le Victorieux, duc de Brabant; étude historique
par M. Oswald Van der Bergh, membre de l’Académie
d'archéologie de Belgique ; 4 vol. in-8°. Louvain ,:1857.
Études pratiques sur l'art dedessécher ; par le mar-
quis Ch. de Bryas. 4°. partie, Brochure in-12. Paris, 1857.
Rouissage manufacturier, par fermentation conti-
nue, du lin, du chanvre, etc., avéc emploi de la craie:
par M. Louis Terwangne. Lille (Nord). Brochure in-8°.
Rapport sur les travaux du Congrès des délégués
des Sociétés savantes de France, fait à la Société d’agri-
_ culture , commerce , sciences et arts du département de
la Marne, par M. Sellier. Brochure in-8°. Châlons.
Mémoires de la Société d'agriculture , commerce ,
sciences et arts du département de la Marne ( année
académique 1855-1856 ). 4 vol. in-8°. Châlons. 4857.
L'agriculture et l'industrie du département de
Vaucluse, à l'exposition universelle de 1855; par R.
Lancon. 4 vol, grand in-8°. Avignon, 1856.
Esquisse d’un Code criminel de l'armée. — Organi-
sation ; — Compétence ; — Procédure; — Délits et peines;
410 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
par M. Legrand, avocat, député au Corps législatif. 4
vol. in-8°, Lille, 1857,
Note sur les murs gallo-romains de Dax, par M, de
Caumont ( Extrait du Bulletin monumental, publié à
Caen, tome XXII. Paris 1857 ).
Discours d'ouverture et programme des leçons de
l'exercice 1856-57 au Cours d'agriculture de Bor-
deaux; par M. Auguste Petit-Laffitte. Brochure in-8°.
Le Cultivateur breton, revue agricole , archéologique
et industrielle {XIIT*. année , n°, 1), Gérant, M. Aug. De-
jars. Janvier, 1857.
Réglement de la Société des jeunes gens, amis de la
vieillesse, de Lille, et Compte-rendu de l’année 1856.
2 brochures in-8°. £
M. le Président annonce que la discussion va s'ouvrir
sur la 22°, question, ainsi conçue :
«Les ponts anciens disparaissant partout, par suite des
« travaux des ponts-et-chaussées , comment doit-on étu-
u dier ces curieux monuments de la civilisation ancienne
« que respecte si peu le vandalisme moderne ? N’est-il
« pas utile d’en conserver des images en relief, indépen-
« damment des dessins plus soignés ? »
M. de Caumont expose que les ponts anciens, dont
plusieurs remontent à des siècles éloignés , tendent à dis-
paraître tous les jours; il croit qu’un dessin n’est pas
suffisant pour donner une idée satisfaisante de l’impor-
tance de ces monuments; il voudrait que les ponts an-
ciens, qui existent encore ; fussent modelés en liége ou en
plâtre et que ces modèles fussent déposés dans les musées,
de manière à faire connaître l'importance de ces monu-
ments avant qu'ils aient disparu.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. Ali
M. Raymond Bordeaux trouve des difficultés dans la
reproduction par des modèles ; il préfère la photographie.
11 cite le pont de Pont-de-l’Arche qui a disparu, sans qu’il
soit resté de dessins suffisamment détaillés de cet intéres-
sant monument, que quelques antiquaires font remonter à
Charles-le-Chauve : en effet, ses arches primitives étaient
à plein-cintre, et ce pont présentait une chaussée à peu
près de niveau. On a retrouvé sous les parapets modernes
les vestiges d’un système de créneaux des plus curieux ;
un calvaire s'élevait , comme sur beaucoup de ponts du
moyen-âge, dans la partie du milieu. A l'opposé de la
ville, un château fort, avec donjon du XIII°. siècle en dé-
fendait l’allée ; la dernière arche de ce côté n’était pas
voûtée, mais un système de corbeaux permettait d'établir
un pont de bois qui pouvait être supprimé et intercepter
le passage de la Seine. M. Raymond Bordeaux raconte,
à ce sujet, la légende du pays qui faisait intervenir le
Diable dans la construction de ce pont. Sous le pont se
trouvait un radier qui mettait obstacle au cours du fleuve,
lui faisait former cataracte et empêchait la navigation. Il
y a deux ans, les Ingénieurs des ponts-et-chaussées
ont fait démolir la moitié du pont; à la suite de cette dé-
molition,un mouvement très-remarquable s’est fait sentir
et, peu de temps après, le dernier tronçon, composé de
neuf ou dix arches, s’est écroulé. M. Raymond Bordeaux
regrette que le pont de Pont-de-l'Arche n’ait pas été pho-
tographié.
M. Marchal proteste, au nom des Ponts-et-Chaussées ,
contre le mot vandalisme employé dans la 22°, question.
Les ingénieurs détruisent, il est vrai, d'anciens monu-
ments; mais c’est pour les reconstruire dans de meilleures
conditions : ainsi, au lieu de ces ponts démesurément
442 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
cintrés en accent circonflexe , ils établissent des ponts
droits qui donnent de grandes facilités pour la cireula-
tion, Les travaux que font exécuter MM. les Ingénieurs
des ponts-et-chaussées sont toujours, du reste, ordonnés
soit par les pouvoirs publics, soit par les Conseils-géné-
raux. Quant à la chute du pont de Pont-de-l'Arche, rien
ne démontre que les travaux faits sur ce point aient dé-
terminé cette chute. Le radier , qui servait de base solide
au pont de Pont-de-l'Arche a pu être miné souterrainement
par la chute des eaux, et le pont, ébranlé depuis long-
temps, a pu s'écrouler tout d’un coup. Si les Ponts-et-
Chaussées ont fait démolir le pont de Pont-de-l'Arche,
c'est parce que les piles massives du pont, ses arches
étroites, présentaient un étranglement à l'écoulement du
fleuve qui, resserré dans son cours, causait des inonda-
tions. L’élargissement des arches du pont, la suppression
du radier, agrandiront les débouchés et rendront la navi-
gation plus facile. M. Marchal est d'avis de faire repro-
duire par la photographie les anciens ponts; il suffirait
de les signaler à MM. les Préfets.
M. Raymond Bordeaux répond à M. Marchal que ce
n’est pas lui qui a posé la question. D'ailleurs, dans ce
qu’il a dit tout à l'heure, il n’a rien avancé de son chef :
il n’a fait que résumer le débat engagé à ce sujet , l’an
dernier, dans le Courrier de l'Eure, dans les trois jour-
naux quotidiens de Rouen, etc. Le Corps des Ponts-et-
Chaussées n’a pas répondu à ces articles reproduits par le
Bulletin monumental, V'Illustration, etc.
M. Marchal s’est plaint que les antiquaires qualifiassent
les ingénieurs de vandales ; parce que les Vandales dé-
truisaient sans édifier, et que les ingénieurs ne démolis-
sent que pour mieux bâtir. Mais, réplique M. Bordeaux,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 4143
il y: a des vandales parmi les antiquaires eux-mêmes ,
parmi les architectes soi-disant restaurateurs de monu-
ments. Les Vandales et les Goths ont laissé eux-mêmes
des monuments édifiés par eux. Les ingénieurs bâtissent,
mais pas toujours solidement, A Pont-d’Ouilly, dans le
Calvados, on a détruit un pont gothique fort solide, qu’on
eût pu conserver. Le pont perfectionné qu’on lui a subs-
titué s’est écroulé au bout d’un an. I a fallu le rebâtir
une seconde fois, et on ignore encore si cette fois il
tiendra debout. Qui garantit que le nouveau pont de Pont-
de-l’Arche ne subira pas une pareille catastrophe ? L’an-
cien pont, lui, durait au moins depuis six ou sept siècles,
et il n’était pas besoin d’être archéologue pour reconnaître
enluiun magnifique édifice. Les ingénieurs, dit M. Marchal,
obéissent aux ordres du Conseil général des Ponts-et-
Chaussées ; mais ce Conseil n’est-il pas composé d’ingé-
nieurs? Au reste, M. Bordeaux proclame avec bonheur
que le goût de l’archéologie pénètre heureusement dans
le Corps des Ponts-et-Chaussées, et plusieurs ingénieurs
réputés sont de fervents admirateurs des travaux publics:
du moyen-âge. -
M. le général de Borelli fait quelques rapprochements
comparatifs fort curieux entre le pont de Pont-de-l'Arche
et l’ancien pont de Cé, qui date de 849 et appartient à
l'époque romane. A l’occasion de l'Arche du Diable,
M. de Borelli cite plusieurs ponts, surtout en Suisse, qui
ont la même légende: il croit que l’arche non cintrée
était réservée pour le passage des bateaux sur lesquels
les seigneurs percevaient un péage,
M: de Borelli regrette la destruction récente d'un monu-
ment très-remarquable, le pont de Constantine, destruc-
tion qui a été achevée par l'artillerie, La ruine de ce qui
Anh INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
restait de ce Curieux édifice était encore bien solide,
puisqu'il a fallu une énorme quantité de projectiles pour
l’abattre.
M. Challe veut ajouter quelques mots pour appuyer
la réfutation qu’a faite M. Marchal des imputations
de vandalisme dirigée contre le Corps auquel il appar-
tient. Si ces accusations ont été méritées dans le temps
passé , ce n’est pas seulement par les ingénieurs ,
mais par les administrations, par le clergé lui-même et
parfois par les antiquaires, car on a vu détruire des
monuments antiques pour chercher des monnaies dans
leurs fondations. M. Challe est heureux d’avoir à citer
deux exemples récents qui protestent contre le maintien
de ces accusations. Un pont du XII, siècle, voisin
et contemporain de la célèbre abbaye de Pontigny,
condamné par l’administration municipale, parce qu’il
menaçait ruine et s’élevait en accent circonflexe , a été
conservé, sur les instances et par les soins de M. Mondot
de la Gorce, ingénieur en chef, qui s’est chargé de le
consolider par l'emploi du ciment de Vassy et d’en adou-
cir la pente par des remblais et des abords, sans rien
changer à sa physionomie, Le second fait concerne le
pont d'Auxerre, qui est du XII*. siècle et que son peu de
largeur allait faire démolir, ou tout au moins dénaturer :
M. Hernoux, ingénieur en chef actuel, a obtenu qu’on lui
permit de faire, sur les vieilles piles du XITI°, siècle , un
élargissement qui pourvoira aux besoins d’une communica-
tion plus active, sans altérer l'aspect moyen-àge de cette
œuvre monumentale de lassociation des frères pontifes.
M. de Caumont croit que la photographie donnera bien
l'appareil extérieur des monuments ; mais il estime que,
dans beaucoup de cas et lorsque les monuments en vau-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 445
dront la peine, il faudra joindre un modèle pour donner
la coupe et le relief de l'édifice.
M. Marchal dit que le plan, la coupe et l'élévation, suf-
fisent pour reconstruire le monument.
M. Raymond Bordeaux cite les pilotis curieux qui ont
été extraits de l’eau où ils séjournaient depuis plusieurs
siècles, et déposés au musée de Rouen. Ces bois d’une
solidité énorme, presque pétrifiés , viennent confirmer le
fait, déjà reconnu , du durcissement et de la conservation
indéfinie du bois de chêne dans l'eau.
L'un des Secrétaires-généraux ,
Ch. GOMART.
SÉANCE DU 16 AVRIL 1857,
{ Présidence de M. Gonerroy DE MESNILGLAISE, ):
Siègent au bureau : MM. DE COUSSEMAKER, DE MELLET,
DE BONNEUIL, D’ALVIMARE, MARIONNEAU ( de Nantes Le
DE CAUMONT. k
M. R..BORDEAUX rédige le procès-verbal.
On reprend la discussion de la 22°. question, ainsi
conçue : a
« Les ponts anciens disparaissant partout, par suite
* « des travaux des ponts-et-chaussées, comment doit-on
« étudier ces curieux monuments de la civilisation an-
« cienne .que respecte si peu le vandalisme moderne ?
4 N'est-il pas utile d’en conserver des images en relief
« indépendamment des dessins les plus soignés ? »
M. Mantelier dônne des détails sur le pont d'Orléans.
7
446 INSTITUT DES PROVINCES DE, FRANCE,
M. Pernot assure que ce pont avait une arche en bois,
et qu’il en était de même à Montereau dont le pont füt le
théâtre du meurtre de Jean-sans-Peur , duc de Bour-
gogne. Plusieurs historiens racontent qu’on avait élevé,
sur l'arche en bois de ce pont, une cage en bois pour
l'entrevue du Dauphin et du duc de Bourgogne qui ne
devait plus repasser le pont en vie.
M. Pernot rappelle aussi les maisons qui étaient con-
struites sur les ponts, surtout à Paris où la Seine dispa-
raissait sous les pontset les ponts sous les maisons.
Quant à une arche de bois ou à une arche manquante
dans les ponts de pierre , il y en avait une dans presque
tous les ponts des villes fortifiées ou des châteaux forts,
parce qu’en cas d’invasion on démolissait ou on brülait
cette arche pour intercepter momentanément la circu-
lation. |
Le pont d'Orléans, conduisant de la ville aux Tournelles,
est représenté sur un ancien tableau que l’on croit du
temps de Jeanne-d’Arc, ou au moins d’une époque assez
rapprochée du siége d'Orléans. Il ya une arche de moins,
et Ja communication du pont de pierre avec le bastion
Fes Tournelles avait lieu au moyen d’un plancher en
bois.
M. Bordeaux Ste comme présentant de l’analogie
avec les ponts, certaines arches pratiquées dans les murs
de clôture, afin de laisser passer les cours d’eau dans
l'enceinte des monastères ou des bourgs fermés, sans |
- interrompre le mur. On voit encore de ces arcades dans »
le mur ire des abbayes de St. -Taurin et dei |
st.-Sauveur, à Évreux.
M. legénéral de Borelli remarque que souvent on.
fermait les ponts avec des chaînes. #
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2
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 4A7
M. Perrot à vu, à Orléans, ‘des arches comme celles
dont vient de parler. M. Bordeaux.
M. de Caumont à vu’, à Angers, les deux systèmes.
M. de Borelli rapporte qu’à Angers, pour se défendre des
Normands, on plaça une chaîne, nommée la Basse-Chaîne :
moyen si efficace, que les Normands furent forcés de faire
une dérivation pour amener leurs bateaux par un autre
endroit; alors, on mit la Haute-Chaine sur ce nouveau
bras.
M. Pernot rappelle aussi les chaînes qui, à Paris,
étaient crochées à la tour de Nesle ét à celle du Bois.
A l’approche d’une invasion, on tendait les chaînes et
Paris dormait tranquille.
M. d'Héricourt demande le renvoi de cette question à
l’année prochaine. 1! admet emploi des chaînes ; mais à.
l'entrée des petits ports il y avait des arches: deux pe-
tites, qui restaient libres, et une grande, ‘celle-là où
re tendait une chaîne.
M. Thiollet dit à ce sujet que l'entrée du port de La
Rochelle est flanquée de deux tours dont l'une s RASE |
encore Tour de ba Chaine. He Dir.
La discussion amène la 24°. question : Mn tr. LS
« Quelle a été, durant le moyen-âge , la tete di +
| « disposition des fontaines ad Las dans les villes et
« dans les campagnes ?»
M. de Caumont entretient l’Assemblée de la décou-
verte d’une quantité de tuyaux de terre cuite qu’on
a faite au Mans. H y a quinze jours, M. de Caumont
a vu, au Mans, plusieurs de ces tuyaux vernissés en
. dedans et entourés d’une sorte de ciment romain : on
| les a déterrés en nivelant les rues. — M. de Caumont
a prié d'en conserver quélques-uns au Musée, Il parait
148 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
que ces tuyaux sont du VIII, ou du IX°. siècle, et
qu'à une époque très-ancienne il y avait des conduits
d’eau dans tous les quartiers.
M. Brongniart avait dit que les Romains n'avaient pas
connu le vernis de plomb et qu’on ne l’avait employé
qu'assez tard, c’est une erreur : des tuyaux , conservés
à Sèvres , prouveront le contraire, ainsi que le magni-
fique vase plombifère de Néris. Les tuyaux du Mans sont
également vernissés à l’aide du plomb.
Quant aux bornes-fontaines ou aux monuments plus
considérables qui recevaient l’eau pour la distribuer au-
dehors, M. de Caumont n’en a pas signalé ; mais il a dit
qu’elles devaient offrir des imitations de ce qui existait”
auparavant. Un des types les plus simples et les plus ha-
bituels a été, à toutes les époques , un réservoir muré
recevant les eaux de la source, protégé par une espèce
de portique ou de galerie voütée.
L'arc qui donne accès au réservoir de la fontaine dut
être à plein-cintre ; et, au XII°. siècle , l'archivolte en.
fut quelquefois ornée de moulures , ainsi qu’il résulte des !
" renseignements qui ont été recueiliss; mais M. de Caumont .
n’a montré que des fontaines appartenant à la Mon
ogivale.
Il a cité notamment les deux fontaines qui existent à un.
kilomètre de l’abbaye de Fontaine-Daniel (Mayenne )..
Ces deux fontaines sont voûtées en ogive, les .
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sont revêtus en pierre de taille , le réservoir est carré
et l’on peut y entrer par une ouverture ou porte.
Une des figures suivantes montre la disposition in
Je |
térieure d’une de ces fontaines , par suite de la sup,
pression idéale du mur qui entoure et surmonte les
porte.
À
CONGRÈS DÉS ACADÉMIES. 49
De ces deux réservoirs, situés à quelques pas seulement
l’un de l’autre, l’eau se rendait à l’abbaye dans des
tuyaux en terre cuite.
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FONTAINES DE L'ABBAYE DE FONTAINE-DANIEL (MAYENNE).
M. de Caumont a présenté ensuite l’esquisse de deux
fontaines du département de l'Yonne, figurées par M.
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ESQUISSE DE DEUX FONTAINES DU DÉPARTEMENT DE L'YONNE.
Victor Petit dans l'Annuaire de ce département, et qui
150 INSTITUT DES :PROVINCES DE FRANCE,
offrent à peu près la même disposition que les précé-
dentes. CPR |
Une autre fontaine intéressante, citée par M. de Cau-
mont , existe à Cully, département du Calvados.
La source arrive dans un réservoir carré par deux
ouvertures cintrées , au-dessus desquelles on remarque
une petite niche tréflée : le réservoir , à ciel ouvert, est
encaissé de trois côtés par des murs qui ont conservé leurs
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VUE DE LA FONTAINE DE CULLY ( CALVADOS }.
tablages primitifs. De ce réservoir , l'eau se déverse à
l'extérieur par deux canaux qui correspondent à chacune
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 454
des ouvertures cintrées qui paraissent abriter les sources
principales fort abondantes et d’une grande limpidité.
M. de Caumont, après avoir cité plusieurs autres
fontaines de la même famille qu'il a visitées dans diverses
parties de la France, mentionne celle de Poitiers, connue
sous le nom de fontaine Joubert, et présente le dessin
qu’en a fait tout récemment M. de Longuemar, membre
de l’Institut des provinces, qui a envoyé à ce sujet une
notice au Congrès. C'est encore une fontaine voûtée en
forme de grotte.
La source est abritée ns une arcade ogivale, cou-
ronnée d’un fronton au milieu duquel on voit l’écusson
de Gaucher de Sainte-Marthe, maire de Poitiers en 4579.
-Un autre écusson placé au centre du pignon latéral
n'a pu être restitué ; mais il doit remonter au XVI°. siècle,
comme le petit monument élevé sur la fontaine.
L’écusson qu’on voit au fond de Parcade, sous la voûte,
est celui de René Citoys, qui était mi ire de Poitiers en 1663...
- En avant de la voûte se développe, à Poitiers comme + Ë
à Gully, le réservoir qui reçoit les eaux de la source.
--Après cette énumération de ces divers édifices, que
l'on peut appeler fontaines-grottes , M. de Caumont a
passé aux fontaines à grands réservoirs octogones ou
ronds isolés sur les places ou dans les carrefours, dont
quelques-unes doivent remonter jusqu’au XIII°, siècle.
La plupart de ces réservoirs ont au centre un pié-
destal ou une vasque d’où l’eau sort pour venir se ré-
pandre dans le réservoir.
Au XV°, ou au XVI. siècle, ces fontaines se sont
multipliées; on les retrouve représentées fréquemment
dans les vitraux et les peintures murales. Quelques-unes
ont été fondues en métal.
452 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
1] faudrait des dessins pour faire connaître les prin-
cipaux monuments de ce genre qui existent encore.
M. de Caumont s’est borné à citer les fontaines de Bruns-
wich, de Nuremberg, et plusieurs autres du XVI. siècle,
dans lesquelles on trouve des figures mythologiques.
Il a terminé son improvisation en engageant les délé-
gués des Sociétés savantes à recueillir et à dessiner les
différentes fontaines monumentales antérieures au XVII.
siécle qu’ils pourront rencontrer, afin que l’on puisse
bientôt connaître tous les types qui méritent d’être obser-
vés. | |
M. Pernot cite la fontaine du souterrain dit de Sabinus,
à Langres. Il fait passer ensuite, sous les yeux de PAs-
semblée , un dessin curieux, celui d’une fontaine autre-
fois placée sur le parvis de la cathédrale, à Meaux. Des
chroniques de Meaux disent que ce fut le comte Thibaut de
Champagne qui fit construire cette fontaine ; on ne dit
pas l’époque , mais elle est facile à deviner par son style
ogival; elle existait de 1492 à 4512, mais était plus an-
cienne. Elle fut dessinée, et sans doute recopiée, par
un curé de l’église de St.-Thibaut de Meaux ; ilse nom-
mait Janvier et écrivit l’histoire de sa ville natale (Meaux);
il a laissé six volumes de manuscrits dans lesquels sont de
grands dessins très-curieux, quoique laissant beaucoup à
désirer. Le sujet de cette singulière fontaine était incon-
venant : c'était, dit-on, la Vierge lançant deux jets d’eau
par les seins. Aussi plusieurs ont-ils cru reconnaître
plutôt, dans cette bizarre statue , Vénus et l'Amour.
Un membre rappelle l'existence d’une fontaine ana-
logue , à Bruxelles, le célèbre Mankin-piss. À Lyon, le
nom de la rue de l'Enfant qui pisse rappelle encore le …
souvenir d’une fontaine du même genre.
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EE :——— a
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VUE DE LA FONTAINE PLACÉE DEVANT LA CATHÉDRALE DR MEAUX,
( D’après le dessin de M. Pernot.)
154 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M. Bordeaux dit qu'en Normandie la construction des
fontaines devint un des grands travaux d'utilité publique,
au commencement du XVI. siècle. On possède encore
les noms de plusieurs architectes et ingénieurs en ce
genre. M. Bordeaux publiera un document curieux sur
Marin Lebourgeois, peintre d'Henri IV, qui probable-
ment dirigea l'établissement des fontaines de Lisieux
et de Falaise, Rouen possède encore des fontaines très-
monumentales : celle de la Croix de pierre , bâtie sous
le cardinal d’Amboiïse ; celle de la Crosse, aussi du
style ogival-fleuri ; celle de la rue de la Savonnerie ,
groupe de la renaissance représentant le mont Parnasse,
_ avec Pégase et les Muses, adossé à l’ancien hôtel
des Évêques de Lisieux. Dans la même rue de la Savon-
nerie, une plaque de marbre marque l'emplacement
de la maison de Jacques Lelieur, poète rouennais,
prince du palinod, qui fit exécuter un manuscrit fameux,
le Livre des fontaines, dont les miniatures ont été
lithographiées en fac-simile par M. de Jolimont, et
forment un recueil d’une importance capitale pour la
question en discussion. Il ne faut pas oublier non
plus la très-belle fontaine , érigée sous Louis XV , au
pied de la Grosse-Horloge de Rouen : c’est un bel échan-
tillon de sculpture rococo, qui s’harmonise bien avec les
édifices environnants, et produit un effet très-pitto-
resque. Aussi, a-t-elle été dernièrement photographiée
en grand format. |
M. Bordeaux nomme aussi les superbes fontaines qui
existaient au château de Gaillon , et la jolie fontaine que
l'on voit encore à Mantes , devant l’Hôtel-de-Ville.
M. Parker rapporte qu’en Écosse la mode des fontaines
prit aussi dans tous les châteaux au XVI, et au XVH.
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4 x
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 155
siècle. Il yen a de magnifiques. En Angleterre elles sont
rares.
M. de Caumont a trouvé, à us de grandes
vasques en granit, qui lui ont paru, ainsi qu'à M. V.
Petit, appartenir au XILL°. siècle.
M. Gadebled dit un mot des fontaines de Dieppe.
M. Gosse a dessiné une trentaine de belles fontaines
dans la Suisse allemande ; elles sont du XV°. etdu XVI°.
siècle.
A propos d’une Pret élevée par MM. de Mailly
et de Caumont sur l'élargissement des rues , M. Boula-
tignier voudrait associer les améliorations modernes
avec la conservation des monuments de notre passé.
Il n'est pas le partisan absolu de ces éternelles rues
droites, longues de plusieurs kilomètres, dont on s’est
engoué, et où l’on ne pourra se tenir ni en été ni
en hiver. On a trop dédaigné, de nos jours; l'expérience
des aïeux, et peut-être faudra-t-il revenir aux lignes
courbes pour le tracé de nos rues. Ges paroles ont été
vivement applaudies.
L'un des Secrétaires-généraux ,
Raymond BORDEAUX.
156 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCE.
SÉANCE DU 17 AVRIL:
( Présidence de M. Parker, d'Oxford, )
La séance est ouverte à 2 heures.
Siégent au bureau : MM. DE CAUMONT ; le général vi-
comte DE BORELLI ; le général PEYTIET, grand-officier
de la Légion-d'Honneur, membre du Corps législatif ;
le comte de LA FERRIÈRE-PERCY, de l'Orne.
M. Victor Perir remplit les fonetions de secrétaire.
M. de Caumont, revenant sur l’une des questions qui
ont été étudiées la veille, invite M. Pernot à donner de
nouveaux détails sur une fontaine érigée à Meaux, au
milieu de la place publique, devant la cathédrale.
Il présente, au nom de ce dernier, un dessin de la
fontaine de Ribeauvillé (Haut-Rhin ).
M. Pernot dit qu’il n’a rien absolument à ajouter aux
observations qu’il a faites à la séance précédente, sur la
fontaine de Meaux, observations qui étaient motivées par
la vue d’un dessin qu’on a tout lieu de croire exact, malgré
le peu d’habileté d'exécution ; que ce dessin, quia été mon-
tré au Congrès, est un calque fidèle du dessin original ; et,
qu’enfin, il est impossible de se méprendre ou de ne pasre-
connaître le sujet représenté par l'artiste sculpteur. Celui-
ci a surmonté la fontaine d’un groupe de la Vierge et de
l'Enfant-Jésus accompagnés par divers saints. M. Pernot
ajoute que, selon lui, et d’après le dessin, il n’est pas
douteux qu’un filet d’eau sortait de chacun des seins de
la Vierge, et que l'Enfant-Jésus rappelait l’action du fa- ?
meux Manneken-Piss, de Bruxelles. D'ailleurs, cette
fontaine a été décrite par. un historien du diocèse de
Meaux , dans un grand ouvrage qu’on peut encore Con-
Ÿ
- UT
= SE ——_——
FBREVAL . RE —— "
VUE DE LA FONTAINE DE RIBEA UVILLÉ (HAUT-RHIN ),
158 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
sulter , et dans lequel on trouve le nom de l'artiste et
aussi la date d'exécution de la fontaine , qui apparte-
nait à l’art de la renaissance.
M. Victor Petit, demandant à répondre brièvement
au préopinant, témoigne le regret de n’avoir pas. vu le
dessin qui a été soumis au Congrès , lequel dessin, d’après
l'indication de M. de Caumont, sera copié et gravé pour
le Bulletin monumental et l'Annuaire de l’Institut des
provinces. M. Victor Petit se demande si on ne peut pas
révoquer en doute l'exactitude de ce dessin; si même il
n’est pas entièrement imaginaire ou apocryphe ; ou si,
du moins, on ne doit pas croire que le dessinateur s’est
plu, par une étrange fantaisie, à ajouter les trois filets
d’eau suspects.
MM. Pernotet Thiollet s *empressent d’assurer que, dans
le dessin, les trois filets d’eau sortaient bien de la Vierge
et de l’Enfant-Jésus ; que le doute n’est pas possible.
M. Victor Petit, malgré cette affirmation, repousse
comme imaginaire ce détail du dessin signalé au Congrès
et croit fermement que si l’art de la renaissance , no-
tamment en Italie , s’est montré prodigue de filets d’eau,
ces mêmes filets d’eau s’échappent exclusivement. du
corps des dieux et des déesses de la Fable, Les admi-
rables fontaines monumentales qu’on voit encore dans
plusieurs villes d'Italie , témoignent qu’à l’époque de la
renaissance les scènes mythologiques étaient seules repro-
duites ou représentées avec autant de matérialisme. M.
“Victor Petit termine en réclamant, comme une chose utile
aux études d’iconographie chrétienne, une sorte d'enquête
archéologique relativement à la fontaine de Meaux, dont
il ne recuse pas l'existence , mais dont il repousse éner- «
giquement les filets d’eau qui font seuls l’objet du débat. :
CONGRÈS DES ACADÉMIES, : 159
M. le comte de Mellet, tout en comprenant et approu-
vant la pensée du préopinant, croit cependant que Île
dessin de la fontaine de Meaux peut être très-exact. Il ne
faut pas oublier qu’il s’agit d’un monument datant du
XVIS. siècle, et, qu'à cette époque, les ecclésiastiques
eux-mêmes ne se montraient pas bien sévères pour les
œuvres d’art.
M. le comte de Bonneuil, qui a examiné avec c attention
le dessin communiqué par M. Pernot, fait remarquer que
la statue de la Vierge est représentée vêtue pudiquement
et la robe à peine entr’ouverte, vers l'extrémité des seins.
M. de Bonneuil ajoute qu’il aurà bientôt l’occasion de
se procurer tous les renseignements possibles, durant'un
prochain voyage qu’il compte faire à Meaux.
M. de Caumont déclare que l'incident est vidé et veut
appeler l'attention du Congrès sur les deux précédentes
questions dont l’examen avait été renvoyé à la séance de
ce jour. Il s’agit des 17°. et 48°, questions, relatives aux
études commencées sur l’état de l’art durant les périodes
mérovingienne et carlovingienne, périodes intéres-
santes et fructueuses à étudier de nouveau sous le
ranger de la statuaire et de l’ornementation.
Qui né sait, dit M, de Caumont que, en Italie et
dans le midi de la France, on a conservé et utilisé,
dans plusieurs reconstructions d’églises , des fûts de
marbre et quelquefois des chapiteaux antiques ? En sup-
posant qu'une partie de ces fragments, ce qui est certain
pour quelques-uns , proviennent de monuments romains
et n'aient rien de chrétien, il y en a d’autres incontesta-
blement qui ont été taillés à l’époque mérovingienine ; et
comme alors on imitait l'architecture antique, : autant que
le pouvaient les artistes du temps, en copiant ce qu'on
160 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
avait sous la main, en prenant pour patron tantôt un
chapiteau corinthien provenant d’un péristyle , tantôt des
chapiteaux et des moulures provenant de la décoration
intérieure des maisons antiques, publiques ou privées,
il dut en résulter des variétés assez grandes dans les
galbes et la composition : il y avait, sous la domination
romaine , une assez grande liberté, et, conséquemment,
beaucoup de variété dans les ornements ; la fantaisie
s’'écartait plus ou moins de la règle. Il dut y avoir, dans
quelques cas , dans les édifices privés surtout, autant de
dissemblance que nous en voyons entre la décoration
architectonique de nos cafés et celle des monuments
publics, tels que la Bourse et la Madeleine.
L'école mérovingienne qui, dans ses églises générale-
ment peu spacieuses, utilisait les chapiteaux qu'elle trou-
vait tout faits et les complétait en en copiant d’autres, est
done, continue M. de Caumont, une époque qui fournira
des données très-intéressantes et très-curieuses. Mais il
faut, pour se livrer à cette étude, un œil exercé ; il ne
faut pas retomber dans les erreurs de nos devanciers, qui
voyaient si souvent des monuments des premiers siècles
dans les églises romanes du XI°. On a donc fait sagement
d'attendre que la science archéologique fût avancée, et
nous touchons à l’époque où l’on pourra, sans danger ,
recommander cette étude, mais non pas à tous les anti-
quaires, Elle devra particulièrement convenir à ceux qui
ont beaucoup vu et comparé; ce ne sont pas les hommes
sédentaires , et qui n’ont exploré que leur province, qui
pourront s’y livrer avec fruit.
M. de Caumont a mentionné rapidement ensuite les
églises qu’il a précédemment signalées comme antérieures
au XI°. siècle et comme appartenant à diverses époques,
CONGRÈS DES ÀCADÉMIES. 464
à partir du V°, siècle jusqu’au X°. Il cite, dans l'Ouest,
l’église de Savenières, près d'Angers , figurée pour la
première fois, en 1830, dans son Cours d’antiquités
monumentales ; la chapelle de Langon, près de Redon ;
la Basse-OEuvre , à Beauvais ; l’église de Vieux-Pont-en-
Auge (Calvados); les églises de Suèvres et de Gennes (en
“partie). Le plus important des monuments mérovingiens
est certainement, dans l'Ouest, ce qui reste du baptistère
de St.-Jean de Poitiers. Les chapiteaux de cet édifice sont
tous en marbre, M. de Caumont, le premier de tous,
donna des notions positives sur cet édifice en 14830. On
sait qu'il existe extérieurement, entre les fenêtres, des
tables de pierre appliquées dans la maçonnerie, et dont
la partie supérieure est coupée en forme de fronton.
M. de Caumont indique le caractère des moulures en
méplat qui ornent ces pièces, et il y trouve le caractère,
parfaitement certain, du ciseau de l’époque mérovin-
gienne ; il a montré, pour le prouver, un de ces morceaux
aujourd’hui dans le musée de Poitiers. Il est maintenant
certain que l’on ne possède plus d’ancien que le transept
et lechevet de l’église St-Jean; les fondations de la nef pri-
mitive , reconnues dans le jardin de l’évêché, ont prouvé
que l’édifice était en forme de croix, comme les anciennes
basiliques ; on comprend comment quelques pierres sem
blables , de forme et de style, à celles qui se voient dans
la partie subsistante du baptisière, avaient été placées
dans des constructions voisines. C’est le dessin d’une
de ces pièces, aujourd’hui au musée de Poitiers, que
M. de Caumont a présenté (voir la page suivante); il
montre bien le faire des sculpteurs des premiers siècles
du moyen-àge. M. de Caumont fait mouler plusieurs
des chapiteaux du baptistère , ils seront dessinés d’après
462 . INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
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—
Le
cs moulages et plus tard reproduits par la gravure.
M. de Caumont a présenté au Congrès, en atten-
dant que ces moulages soient faits, les dessins de deux
des chapiteaux du ‘baptistère : l’un, encore en place, se
compose d’une corbeille garnie d’un rang de feuilles
d’acanthe surmontées de volutes, réunies par une torsade
composite , que M. de Caumont signale comme ayant dû
ètre très-fréquemment exécuté dans les premiers siècles
du moyen-âge. | |
DEUX DES CHAPITEAUX DE S',-JEAN DE POITIERS,
4164 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
L'autre, qui provient de la nef supprimée et que l'on
a trouvé dans le déblai, sous le pavé, présente au-dessus
des feuilles d’acanthe deux rangs de moulures en creux
que le dessin, p. 163, fait connaître. On trouve des des-
sins à peu près semblables sur des poteries présumées
mérovingiennes.
M. Victor Petit a pris ensuite la parole : pendant long-
temps il avait pensé que l'architecture antique avait été
tout entière représentée par les cinq ordres classés par les
grands architectes italiens de la renaissance, et notam-
ment Vignole, qui a eu la gloire de laisser son nom à une
œuvre fort estimée encore et qui n’a pas cessé de servir
de point de départ pour les études architecturales de
l'antiquité. M. Victor Petit avoue, qu'après avoir copié
minutieusement et servilement son « Vignole », il pensait
connaître les ordres antiques, et en quelque sorte , les
savoir par cœur et pouvoir en reconnaître les moindres
détails. Aussi, fut-il grandement surpris en visitant
l'Italie , et la ville de Rome tout particulièrement, de ne
reconnaître presque nulle part, dans leur rigoureuse simi-
litude , ces fameux cinq ordres antiques dessinés et me-
surés par Vignole, Palladio et autres architectes illustres
de l'Italie. Tout au contraire, les types principaux de
l'architecture antique présentent une variété infinie , va-
riété qui augmente dans les édifices dont la date de con-
struction se rapproche des premiers temps de l’ère chré-
tienne, à ce point qu’il devient réellement fort difficile de
préciser « l’ordre » auquel appartiennent tels ou tels en-
tablements , chapiteaux, bases , colonnes, etc. , qu’on
retrouve encore en très-grand nombre dans les églises
bâties aux XI°, et XII°. siècles , avec des débris, ou si l’on
veut, avec les matériaux de temples ou d’édifices antiques.
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 165
Les chapiteaux, notamment, présentent une diversité de
forme et d’ornementation qui défie absolument toute
elassification ; toutefois ils offrent dans leur agencement
une richesse et une souplesse de ciseau extrêmement
remarquables. Ainsi les parties creuses sont fouillées pro-
fondément et témoignent d’une entente parfaite des effets
pittoresques, vus à distance, des ombres et des lumières.
Les reliefs sont ménagés avec un soin extrême et gardent
l'empreinte d’une main habile et indépendante. En étu-
diant les chapiteaux antiques qui furent utilisés, vers les
XI°. et XIL°, siècles, pour soutenir la retombée des voûtes
de quelques-unes des églises de Rome, on fait cette re-
marque qui n’est pas sans importance : c’est que des cha-
piteaux d’un style analogue se retrouvent en certain
nombre dans différents monuments de la France; que,
jusqu’à présent, ils ont été classés uniformément comme
appartenant à l’époque mérovingienne et carlovingienne ;
tandis qu’on pourrait les faire remonter à une époque plus
ancienne , en les rattachant aux édifices publics et privés
construits durant la période gallo-romaine.
"M. de Caumont appuie fortement l’opinion de M. Victor
Petit. Il est évident, dit-il, que les artistes romains vou-
laient la variété dans l'unité, tandis que l’école moderne |
a voulu l’invariabilité et par suite La monotonie dans
l’unité des ordres. Pour preuve de la variété dont les
sculpteurs gallo-romains savaient faire usage , M. de
Caumont cite les chapiteaux antiques, très-beaux, qui ont
été utilisés tout près de Paris, dans l’église de Mont-
martre; ce sont des chapiteaux corinthiens dont aucun
ne ressemble à l’autre, et pourtant tout porte à croire
qu'ils ont autrefois appartenu au même édifice.
M. de Caumont croit du reste que, si un très-grand
166, INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
nombre de chapiteaux employés à l'époque mérovin-
gienne proviennent de monuments romains préexistants ,
comme l’a dit M. Victor Petit, il y en a aussi qui ont dû
être sculptés à cette époque ; il croit, par “exemple, que
les chapiteaux dont il a présenté l’esquissé | ceux de St.-
Jean de Poitiers, p. 163 ), ont été faits pour cette église et
ne peuvent provenir de monuments préexistants. |
Plusieurs membres ont pris la parole. M. de Bouis a
expliqué comment Vignole et ses contemporains, rédui-
sant l'architecture antique aux types les plus purs, et
composant, un cadre nouveau pour les architectes, ont dé-
truit. les variétés dont parlaient MM. de Gaumont et Victor
Petit : évidemment l'architecture moderne est à larchi-
tecture antique ce que serait la langue de Cicéron, com-
parée aux idiômes que l’on parlait de son temps dans les
provinces et dans les faubourgs de Romé, Reste à savoir
si l’art ainsi épuré vaut l’art avec ses inspirations natu-
relles, que regrettent si vivement MM. de Caumont et
Victor Petit.
M. Pernot pense que la variété ou, si l'on veut, la
diversité d’ornementation doit tenir au défaut d’écôles
architecturales , surtout en ce qui concerne les Gaules,
pays conquis, et où les esclaves qui avaient Au talent
étaient employés à la construction des édifices publics.
M. Gadebled parle de l'influence romaine sur la civili-
sation de la Gaule, et sur les œuvres d’art importées
d'Italie en France. Il pense que l'influence romaine a été
assez puissante pour imposer ses formes, ‘ses goûts et
ses traditions d’art.
M. le conseiller Tailliar , de Douai, partage le même.
avis ; il trouve tout naturel que l’art mérovingien ait con-
tinué l’art gallo-romain. La conquête franque a mis un
CONGRÈS DES ACADÉMIES. . 467
terme à la puissance romaine; mais elle n’a détruit ni
l’ancienne organisation, ni le cadre même de l’adminis-
tration impériale. Le monarque gallo-franc prenait le titre
de virällustris, titre que la Notice de l'Empire attribue
aux premiers personnages romains. Les dignités de pa-
trice , de duc, de comte, sont maintenues. Les institu-
tions restent debout. La curie ne reçoit que les modifica-
tions rendues nécessaires par l'avènement du christianisme
et le changement de gouvernement; on peut lire à ce
sujet, les Formules de Marculfe et autres. Si les institu-
tions romaines se conservent ainsi à travers. les siècles,
pourquoi les monuments qui en sont pour. ainsi dire la
représentation, pourquoi l’art romain qui les érigeait,
n’auraient-ils pas conservé leurs principaux caractères ?
Passant à l’époque carlovingienne, ou, pour moins
préciser les limites de temps, à une époque un peu moins
ancienne que celle des églises précédemment citées,
M. de Caumont cite une église très-connue déjà, celle de
Germiny-les-Prés, quia été souvent décrite, à cause de
la date à peu près certaine de ses parties primitives ,
puis il renvoie aux détails qu’il a donnés à la Société
française d'archéologie sur l’église de Cravan , près Chi-
non , dans un rapport qu’il compte imprimer prochaine-
ment dans le Bulletin.
« Comme on le voit, a dit M. de Caumont , par le des-
« sin très-exact que je présente, du côté méridional de
« l’église de Cravan, les fenêtres sont garnies d’un en-
« cadrement cintré orné de billettes, et alternent avec
«des frontons dont les rampants et la base sont garnis
“« du même ornement. Ces fenêtres et ces frontons se con-
« tinuent sur la façade occidentale ; mais le centre de
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CONGRÈS DES ACADÉMIES. 169
« cette façade ayant été reconstruit, les frontons n’existent
«plus qu’en partie près des angles qui joignent le mur
« occidental aux murs latéraux du Nord et du Sud: on
« peut d’ailleurs se convaincre que l'ordonnance était la
« même: je crois être sûr qu’il y avait au-dessus du por-
« tail occidental trois fenêtres._et quatre frontons. »
Il sera plus amplement question de cette église dans
un travail que prépare M. de Caumont sur les caractères
de l’art carlovingien. Mais il insiste dès ce moment sur
les rapports qu'offre , avec celle de Cravan, l’église de
St.-Généroux, dont il avait donné, il y a long-temps ,
une esquisse incomplète, suffisante {outefois pour indi-
-quer cette analogie.
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PORTION DES MURS LATÉRAUX DE SAINT-CÉNÉROUX.
Si l'église de St.-Généroux {Deux-Sèvres) offre plu-
sieurs rapports incontestables avec l’église de Cravan,
St.-Mesme de Chinon, quoique du XI°. siècle, présente
encore dans ses fenêtres latérales et dans ses appareils,
les mêmes dispositions que les églises de Cravan et dest. -
Généroux.
L'église de Cravan offre un petit appareil irès-caracté-
risé, dont les assises sont séparées par des lignes, non
8
170 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de briques, comme à l’époque romaine ou dans les
temps qui ont suivi, mais par des chaînes en pierres de
taille. ,
Ainsi, dit M. de Caumont, on peut trouver la filiation
de ces édifices et les rattacher à une souche commune,
à un type qui dut être en usage aux époques antérieures
au X°. siècle, mais qui it soi origine de plus haut et
qu’on pourrait faire remonter jusqu'au baptistère St.-Jean
de Poitiers. | |
« Je viens de citer en courant, a continué M. de Cau-
« mont, quelques Monuments mérovingiens et carloyin-
« giens encore debout. it
« Mais si nous faisons l'inventaire des fragments,
« tels que : chapiteaux , fragments de corniche, mou-
« lures diverses, qui ont été replacés dans des édi-
« fices postérieurs , ou même déposés dans des
« musées, nous aurons à exploiter une mine consi-
« dérable.
« J'ai décrit et figuré dans le Bulletin monumental
« (t. XXII), quelques-uns de ceux provenant de Vertou,
« près de Nantes, déposés. dans .le musée de cette
ville.
« J'ai cité deux chapiteaux anciens dans la crfpte de
« St.-Brice, faubourg de Chartres, reconnus par M. Paul
« Durand. R
« On connaît, par la description que j'en ai donnée,
« il y a 25 ans, les chapiteaux et les colonnes en mar-
« bre qui existent dans la crypte de Jouarre qui renferme
« des tombeaux extrêmement curieux.
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CONGRÈS DES ACADÉMIES. 171
« J'ai figuré des chapiteaux de même style et de même
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CHAPITEAU MÉROVINGIEN DU MUSÉE D'ARLES.
époque que l’on voit au musée d’Arles. : #:
« Le musée de la Société des Antiquaires de Normandie
possède quelques fragments mérovingiens, provenant
de l’ancienne église de St.-Samson-sur-Risle ; d’autres,
provenant de la même abbaye, existent dans le mu-
sée d'Évreux. Je.les ai figurés, il y a long-temps, dans
mon Cours d’antiquités (pl. XLVII ).
« Je citais dernièrement, dans le XXII. volume du
Bulletin monumental, des moulures existant dans
les murs de la cathédrale du Puy et dans les bâtiments
voisins de cet édifice.
172 INSTITUT, DES PROVINCES DE FRANCE.
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« Peut-être doit-on citer aussi les sculptures incrustées
« dans la tour de St.-Germain d'Auxerre et que nous
« avons reproduites dans notre Abécédaire d'archéo-
« logie. |
« J'ai fait remarquer il y a long-temps, dans mon Cours
« d’antiquités, que certains entrelacs, dont j'ai donné
« des spécimens et qui offrent quelquefois l’image de
« nattes, peuvent caractériser une époque ancienne :
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vingiennes et carlovingiennes.
474 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« Le chapiteau de St.-Samson, qui vient d’être figuré,
nous offre encore un détail qui paraît aussi caractériser
une époque fort ancienne : ce sont des espèces de pal-
mes allongées et peu fouillées qui garnissent les côtés
de la corbeille. Cet ornement, facile à sculpter, se voit
sur des pierres historiées replacées dans les parements
de certaines églises des XI. et XII. siècles, con-
struites avec des matériaux préexistants. Et s’il n’est
pas toujours partout un caracière certain, au moins
annonce-t-il une date ancienne et, en général, anté-
rieure à la seconde moitié du XI°, siècle.
« Je pourrais indiquer bien d’autres fragments pré-
|
COLONNE ET CHAPITEAU DE FULDE. -
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 175
« cieux , notamment ceux qui proviennent du palais de
* « Charlemagne à Ingeelhem et qui.ont été récemment
« publiés par M. Roach-Smith, de Londres; ceux de
« Fulde, signalés par M. le baron de Quast, l’année
«€ dernière, etci.-etc. etc.
« Mais il faut se borner à des indications: je pré-
« pare un mémoire étendu sur ce sujet. Il suffit, et
« je crois. lavoir fait, de démontrer que celte étude
« est opportune , qu ’elle peut être faite avec cer-
« titude de succès et que le. sujet est encore neuf, Il
« résultera, de cette discüssion , qu'il existe des carac-
« {ères au moyen desquels on peut reconnaître le
« travail des époques méroyingienne et carlovin-
« gienne, et que les matériaux ne manquent pas à
« qui sait les rechercher et les examiner Faneuer
« ment.
La 19°. question présente également un vif intérêt,
en ce qui iouche la classification chronologique des
sépultures aux époques mérovingienne et carlovin-
gienne.
M. de Caumont cite une foule de tombeaux dont
les couvercles portent une double croix : une grande
partie de ces sarcophages doivent être anciens : bien
qu'on ne puisse affirmer que le type ne s’est pas per-
pétué jusqu’au XI°. siècle, M. de Caumont affirme qu'ils
sont en général antérieïrs à cette date, quand d’ailleurs
ils présentent à l'extérieur certaines moulures qu’il in-
dique.
M. Thiollet qui avait, il y a Pr dessiné la
collection de tombes que l’on voit à Civeaux, en Poitou,
a présenté ses dessins, M. de Caumont à désigné parmi
INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
t antérieurs au XI°. siècle.
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térieurs au XI°. siècle,
SARCOPHAGES DU
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ces types ceux qui lu
En voici quelques-uns.
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Après quelques observations présentées par MM. Bor-
deaux , Thiollet et Pernot, M, de Caumont reprend la
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 177
parole et cite deux couverceles de sarcophages déposés au
musée d’antiquités de Poitiers, et qu’il croit pouvoir être
rapportés aux temps carlovingiens où mérovingiens, En
voici l’esquisse. -
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Bouet dele
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Pagar sculp. :
DEUX GOUVERCLES DE SARCOPHAGES CONSERVÉS AU MUSÉE DE POITIERS.
fs portent l’un et l’autre une croix dont la forme offre
178 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
des rapports avec celle que M. Gomart a dessinée dans le
caveau qui renferme le tombeau de saint Quentin , et dont
l’antiquité ne peut être douteuse.
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SCULPTURES DANS LE CAYEAU DE SAINT QUENTIN.
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M. de Caumont a terminé en rappelant les quelques
renseignements donnés, dans une séance précédente, par
M. Darcel. Ces renseignements, très-sommaires, peuvent
être éomplétés par les figures de tombeaux placées dans
le VI°. volume de son Cours d’antiquités et dans son
Abécédaire d’archéologie auxquels il renvoie, aussi bien
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 479
qu'aux nombreux mémoires qui en ont traité dans les
vingt-deux volumes déjà publiés du Bulletin: monu-
mental. |
Personne ne demandant plus la par ole, M, le Président
pose la 21°, question du programme ; ainsi conçue :
« La chronologie des cloches a-t-elle été suffisamment
-«- étudiée ? À quelles causes doit-on attribuer la supério-
« rité des cloches du moyen-âge, sous le rapport de la
« qualité du son ; quelles étaient la nature et la pro-
portion des métaux habituellement employés dans leur
«fabrication ? »
…. M, le comte de Mellet a soulevé de nouveau boit ques-
tion qui avait été posée déjà au Congrès de Châlons, mais
qui resta indécise. La pensée de l’auteur était de cher-
cher à connaître quels pouvaient être les travaux ou les
recherches à faire sur les cloches anciennes, au point de
vue industriel ou de fabrication. Il en est, continue M. de
Mellet, descioches modernes comme des vitraux modernes:
elles sont inférieures en qualité et en beauté de son aux
cloches anciennes, plus durables et plus pures que celles
d’à-présent. Enfin M. de Mellet se demande si cette supé-
riorité incontestable tient au mélange de métaux qui.
dit-on, étaient jetés dans le métal en fusion,
Plusieurs membres du Congrès établissent que l'analyse
du métal des cloches n’a pas fait retrouver la trace de
métal précieux, ou n'aurait pu la faire reconnaître qu’en
infime quantité. .
M. Parker, consulté sur la valeur et la qualité des
“cloches anglaises , dit que, depuis long-temps, on s’est
occupé de cette question en Angleterre, Les analyses les
plus précises n’ont jamais fait retrouver d’or ou d'argent.
180 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Plusieurs cloches nouvelles sont excellentes et donnent
des sons magnifiques. La qualité et la sonorité des cloches
tiennent à la forme donnée au métal et aussi à l'épaisseur
de ce métal. M. Denison a fait, à ce sujet , de longues et
savantes recherches,
Divers membres engagent une discussion sur la com-
position du métal dit « métal de cloches » , avec lequel
on fabriqua , durant la République, des sous qui avaient
une couleur particulière.
M. de Caumont pense qu’on n’a pas assez recherché et
décrit les clochettes des églises. Il rappelle combien est
curieuse la clochette romane dont M. Didron a publié
des fac-simile, et voudrait qu’on recherchât toutes celles
qui existent encore dans les trésors des églises. Un très-
grand nombre remontent au XVI°. siècle. M. Du Chatellier
vient de lui envoyer, pour être soumis au Congrès , le
dessin d’une clochette de ce genre qui remonte à lan
1575. |
M. Parker, répondant à une nouvelle demande sur
l’époque où l’on fit en Angleterre les plus belles cloches ;
dit qu’on en fit de belles et de laides à toutes les époques ;
que les cloches d'Angleterre ne lui semblent pas différer
beaucoup de celles de France.
MM. Tailliar, Gomart, Dréolle et Parker citent diverses
cloches ou clochettes qui étaient durant le moyen-âge
déjà célèbres , soit sous le rapport historique au point de
vue des coutumes municipales, soit comme objets reli-
gieux et reliques. Ces divers membres s'accordent à re-
connaître le rôle important que les cloches communales
ont été appelées à remplir dans l’histoire des villes du
Nord de la France et en Belgique. Plusieurs ouvrages
ont été publiés sur ce sujet.
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182 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M, de Caumont pense qu’il est toujours utile d'explorer
les clochers de nos campagnes , pour visiter les cloches
qui s’y trouvent et dont quelques-unes peuvent être très-
anciennes. Il cite celle de Fontenailles (Calvados), décrite
dans sa Statistique monumentale de ce département, et
qui est de 1202. Bon nombre de cloches des XVI°.,
XVII. et XVIII. siècles portent des inscriptions qui
méritent d'être relevées et publiées, parce qu'elles
mentionnent, avec leurs titres et dignités, les notabilités
du pays qui les ont nommées, le curé existant, etc. Tous
ces documents sont intéressants pour l’histoire locale,
M. le comte de Mailly dit qu’en effet l’histoire des
cloches lui paraît fort importante : c’est dans l’étude des
inscriptions qui couvrent les cloches anciennes , qu’on
peut retrouver plus sûrement les noms des familles
éteintes, qu’il serait en conséquence désirable que MM.
les ecclésiastiques, au lieu d’engager leurs paroissiens à
fondre les vieilles cloches, cherchassent au contraire à
les conserver, ou tout au moins , si cela n’était pas pos-
sible, ne négligeassent pas de relever et de copier, avec le
plus grand soin, les noms et les armoiries des seigneurs
bienfaiteurs de la paroisse, toujours inscrits ou gravés
sur les cloches anciennes. M. de Mailly cite plusieurs
cloches de la province du Maine , dont il a relevé et con-
servé les inscriptions; il insiste surtout, pour que l’atten-
tion de MM. les Curés de campagne soit de nouveau
appelée sur tous les objets anciens qui appartiennent à
leurs églises, On pourrait solliciter l'appui des évêques.
M. de Caumont, approuvant les idées exprimées par
M, de Mailly, est forcé de reconnaître un mouvement de
ralentissement pour les études archéologiques dans les
séminaires : déjà, plus de quinze cours d’archéologie ont
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 183
été supprimés, à sa connaissance, après avoir été faits
pendant plusieurs années. C’est là un fait bien regrettable,
en ce qui touche à l'instruction archéologique des curés
de campagne , qui obtiennent souvent de leurs paroïis-
siens des sommes assez considérables, destinées presque
toujours à défigurer ou à gâter leur église par de préten-
dues restaurations. M. de Caumont cite plusieurs traits
de curés de village qui rivalisent d’émulation pour tout
« remettre à neuf. » : EH
Le mal serait moins grand , si l'éducation archéologique
. était plus générale dans les séminaires. Je désire, dit l’ora-
teur, en terminant, que mes paroles soient consignées au
procès-verbal de la séance.
L'heure avancée ne permettant plus d'aborder une
autre question , la séance est levée à 4 heures ét renvoyée
au lendemain. | |
Le Secrétaire,
Victor PETIT,
* De l’Institut des provinces,
SÉANCE DU 18 AVRIL 1857.
( Présidence de M. Bouzarrener , conseiller d'État, )
Le bureau est occupé par MM. DE GAUMONT, le comté
de MAÏLLY , le vicomte Du MONCEL, PARKER, le DA
DE TANLAY.
M. pe Bouts remplit les fonctions de secrétaire.
M. Raymond Bordeaux lit le procès-verbal de la séance
. précédente, qui est adopté.
M. Parker développe la pensée qu'il avait émise l’année
dernière et qui a fait une nécessité de s'occuper ; dans
184 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
chaque Société archéologique des départements, de
donner la date exacte des grands monuments du moyen-
âge qui y ont été édifiés; c’est le seul moyen de donner
une base solide à l’histoire de l'architecture, qui est
celle de la civilisation. Joignant l'exemple au précepte,
M. Parker donne la liste suivante des dates pour quelques-
uns d’entr’eux :
1152-1182. L'abbaye de Kirstall (comté d’York ).
Style roman secondaire avec ogive.
1155-1191. L'église de Senlis. Style de transition.
1157-1211. La maison du Chapitre, à St. -Georges-de-
Bocherville (Seine-Inférieure). Style roman secondaire
de transition.
1160-1185. Les arcades et la nef de la cathédrale de
Bayeux. Style roman secondaire.
1163-1182. Le chevet de l’église de St.-Germain-des-
Prés. Style de transition très-lourd, moins avancé que
Notre-Dame. re
1168-1219, La cathédrale. de Soissons. L’abside du
Midi appartient à la première église, commencée en 1168.
M. Parker ne donne pas de date précise pour cette por-
tion dont le style lui paraît très-mauvais.
1168. La cathédrale de Sens. Une chapelle et quelques
portions des murs sont de cette époque. Elle fut presque
entièrement ruinée par un incendie en 1184 : la plus
grande partie du monument-est donc postérieure à cette
date ; il y a une grande ressemblance avec l’église de
Coutances, du style de transition,
4175-1184. Le chœur de la cathédrale de Coutances,
rebâti après l’incendie, est dans un style de transition
très-remarquable, mais qui se modifiait pour ainsi dire
chaque année, L’abside de cette église «est dans un style
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 185
presqu ‘entièrèment gothique , Sn ES nr d travaux
furent achevés en 118/. |
1177-1184. L'hôpital et l’église de SL Jets à Angers,
fondés et bâtis dans le temps de Henri If, roi d’Angle-
terre, comie d’Anjou et de Poitou, duc de Normandie et
de Guyenne. Le style en est entièrement gothique, très-
léger. C’est un des monuments les plus avancés.
1186-1996. L'église de la ville d'Eu (Normandie).
Style presqu’entièrement gothique très-léger , fort élé-
gant, mais avec des restes du style roman secondaire.
1194. La cathédrale de Chartres, ruinée pat un in-
cendie sous cette date; le monument fut reconstruit
alors, il ne resta de la construction primitive que la
crypte et quelques autres portions peu importantes.
4195-1205. La chapelle de la St°-Vierge dans la ca-
thédrale de Winchester. Style gothique pur à lancettes.
. 4495-1214. Une portion de la nef et la partie occiden-
tale de l'église de l'abbaye de St.-Alban, dans le comté
de Huts. Style gothique pur.
1195-1200. Le chœur de la cathédrale de Lincoln.
Style gothique pur, très-léger.
1198-1215, Le jubé de la cathédrale d’Ely, dans le
comté de Cambrigde. Style gothique pur, très-léger, à
lancettes tréflées.
1907-1935. Cathédrale de Rouen, rebâtie après l’in-
cendie. Style gothique primitif très-élégant et très-léger.
M. Challe pense qu’il faut reporter la construction de
la cathédrale de Sens à une date plus ancienne. C’est
avant 4143 qu'elle fut commencée par Henricus Aper,
évêque. Cela est prouvé par la chronique de Clarius, qui
donne cette année comme celle où mourut Henri-le-
Sanglier, Ce passage de la chronique de Clarius était
186 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ignoré, quoiqu’elle eût été publiée par Duchesne et dans
le Recueil des historiens de France ; il a fallu qu’on re-
trouvât à la Bibliothèque impériale un manuscrit où ce
passage omis dans les ouvrages imprimés peut se lire en
ces termes : Hic ( episcopus) incipit renovare ecclesiam
S', Stephani et in ecclesia majori nova. — Le pape
Alexandre III consacra l’autel de St.-Pierre , en 1160.
On sait que le chœur de Sens ressemble beaucoup à
celui de l’église de Cantorbéry, on y retrouve le même
style de transition du roman au gothique ; ce qui ne doit
pas étonner puisque l'architecte de cette cathédrale
d'Angleterre fut Guillaume de Sens. M. Challe croit en
outre devoir faire remarquer que, dans la tour de plomb
accolée à l’église de Sens et qui fut construite, comme on
le sait, par Philippe-Auguste, l’architecte revint davantage
à l'architecture romane, ce qui aurait pu induire en erreur
si on n’avait pas eu de documents écrits qui prouvent
qu’elle est postérieure à l’église d'environ soixante années;
car on sait, par la chronique du moine Godefroid , que
l'incendie qui détruisit l’église eut lieu en 1184.
M. Raymond Bordeaux ‘demande qu’on continue à
placer cette question sur le programme du Congrès , et à
la recommander à l’attention des Sociétés archéologiques.
Il signale l’église ogivale des Andelys qui appartient au
XIII, siècle , dans laquelle il a découvert dernièrement
une inscription dont il a pris l'empreinte : son état
illisible présente un problème fort curieux. À
M. de Caumont exprime le désir que M. Parker précise
mieux qu’on ne l’a fait jusqu'ici les caractères du style
Plantagenet.
M. Parker répondra à cette question dans une pro=
chaine séance,
#
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 187
M. le comte de Mailly croit qu’il faut expliquer le
passage ‘du style roman à l’ogival par la nécessité des
toits élevés dans notre climat qui à fait élever l’arc des
voûtes.
M. de Bouis ne peut partager cette opinion , qui ne lui
paraît pas justifiée par les toits de nos grands édifices,
qui n’avaient pas , à l’origine de l'architecture ogivale,
Pélévation qui leur fut donnée plus tard au XIV°. et au
XV°. "siècle.
M. le comte de Mellet fait observer que l'origine de
logive a été traitée bien des fois; qu’elle n’est pas
soumise au Congrès en ce moment.
M. Parker veut profiter de sa présence au Congrès pour
parler des deux églises décrites par M. l’abbé Cochet,
dans le Bulletin monumental : la première a été rebâtie
au XII°. siècle dans le style ogival; la seconde, du
XIIIe, siècle aussi, mais un peu moins ancienne, appar-
tient au style roman. | |
La discussion sera continuée dans la prochaine séance.
Le Secrétaire-général :
DE Bouis.
SÉANCE DU 20 AVRIL 1857.
Présidence de M, Nicias Garzzarp, président à la Cour de
cassation).
__ Siègent au bureau : MM. DE CAUMONT ; BOULATIGNIER ;
l’abbé LALANNE, directeur du collége Stanislas; D'Ozou-
VILLE ; le baron ErNour.
M.R, BORDEAUX remplit les fonctions de secrétaire.
188 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
La 26°. question est mise en discussion. En voici le
texte : F
« N’est-il pas utile que les Sociétés savantes s'occupent
« d’études hagiographiques plus qu’elles ne l’ont fait jus-
« qu'ici? Doivent-elles laisser, comme elles le font,
« avancer ou retarder de plusieurs siècles, la venue des
« premiers apôtrés de nos diocèses? » : |
M. de Caumont voudrait que, au moment où, dans tous
les départements on s'occupe de ces D LE les Sociétés
savantes intervinssent.
M. le comte de Mellet croit que tout le monde doit être
d'accord sur l'utilité et l'intérêt des études hagio-
graphiques : les saints ont joué un rôle éminent dans notre
pays; les uns, comme grands agriculteurs ; lés autres ,
comme érudits ou comme orateurs; d’autres enfin,
comme mêlés aux affaires publiques.
- Quant au second point de la question, l'extrême anti
quité de l’arrivée de ces premiers missionnaires est plus
délicate à traiter pour les esprits modérés. Les traditions
anciennes méritent l'examen : il en est qui doivent avoir
de l'autorité, d’autres qui doivent être discutées. Il ne
faut pas croire que jusqu’au XVII°. siècle tout fût sous
l'éteignoir. Cependant, au XVII°, siècle, on a révisé très-
sévèrement l’histoire de la vie des saints. Nous voudrions
pouvoir dire qu’on l’a fait sans prévention ; mais parfois
le vent souffle d’un seul côté et alors il faut que toutes
les feuilles soient balayées de ce côté-là , tant l’entraîne-
ment est grand! Sans être sévère pour certaine école,
il est bon de réviser ces travaux hypercritiques du XVIT°.
siècle, et cette tâche doit appartenir légitimement à la
moitié du XIX°, siècle, qui sera assurément une époque
de réparation. Il est impossible de ne pas tenir compte
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 189
du livre si savant de M. l’abbé Faillon, directeur au
séminaire St.-Sulpice , les Monuments de l'apostolat
de sainte Madeleine ; et, dût-on ne pas avoir une convic-
tion entière et garder des doutes, il faut reconnaître la
hauté valeur de ce livre érudit.
* - M. d’Ozouville, qui a publié sur ce Sujet un recueil de
lettres adressées au R. P. Piolin, bénédictin de l’abbaye
de Solesmes (1), est d’un avis diamétralement opposé,
- Suivant lui, tout l’ensemble du volume des Monuments
de Provence ne contient, il faut bien l’avouer, qu’une
immensé illusion. On peut s'étonner , en effet, que les
quinze principaux monuments qui servent de base à cet
échafaudage soient restés inconnus jusqu’en 1846. Le
principal de ces documents, restés inédits jusqu'alors, est
une Vie de sainte Madeleine , attribuée à Raban Maur,
archevêque de Mayence vers 850, et trouvée à Oxford,
en Angléterre, Cette vie n’a d'autre rapport avec Raban
Maur que de porter en tête le premier de ses deux noms:
Rabanus, — De vita B. M. Magdalenæ ; elle n’a jamais
été comprise dans les œuvres de l’archevêque de Mayence.
En examinant cette vie, on trouve une foule de points
qui pefmetlent de reconnaître qu'elle a été écrite en
Angleterre vers le milieu du XV°. siècle, et on y rencontre
des passages motivés par l’hérésie contemporaine de
Wicleff, sur le culte des images, la confession et l’abso-
lution par le prêtre. De plüs ce manuscrit contient un pa-
rallèle entre sainte Marie-Madeleine et saint Jean-Baptiste,
(1) Origines chrétiennes de la Gaule: — Lettres au R, P,
Piolin : vol. in-8°., avec supplément, ensemble 328 pages. À
Paris, chez Julien et Lanier, rue de Bussy, 4. Prix: 4 fr,
190 INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE.
parallèle étrange, car aucun point de comparaison n'existe
entre ces deux saints personnages. Or, il faut savoir que le
collége d'Oxford, où cette légende a été trouvée , est
dédié à sainte Madeleine et à saint Jean-Baptiste. De plus,
ce collége a été fondé vers 1450, et c’est précisément
l'époque de la calligraphie du manuscrit. Cependant tout.
d’un coup , sans autorité et sans l’autorisation de per-
sonne , l'éditeur d’une nouvelle édition des Pères de
l’Église a inséré, dans sa collection, sous le nom de
Raban Maur, cette vie jusque-là inédite de sainte Marie-
Madeleine. Et voilà ce qui explique l'engouement nouveau;
car, comme l’a dit l'honorable préopinant, il est des temps
où le vent se met tout d'un coup à soufller et à balayer du
même côté les feuilles. Cette fois, ce ne sont pas seule-
ment les feuilles qui ont été entraînées, mais aussi les
arbreslesplus forts et les plus verts. Voilà comment on est
arrivé à substituer l'autorité d’un texte apoeryphe, soi-di-
sant de Raban Maur, à l'autorité admise jusqu'alors de
Grégoire de Tours, de tous les autres monuments et de
Raban Maur lui-même, dont le martyrologe fait mourir
saint Lazare dans l'île de Chypre, où il était évêque , et
sainte Marie-Madeleine à Jérusalem.
Sur le fond de la question, M. d'Ozouville de en
revue d’autres arguments : il rappelle que le premier à
avoir contredit Grégoire de Tours et les autres titres de
ce côté, est Hilduin, abbé de St.-Denis. A la fin du VIH.
siècle et au commencement du IX°., l'Empire grec re-
cherchant l'alliance de Charlemagne et ensuite de Louis-
le-Débonnaire , le patriarche de Constantinople Tarasius ,
avait émis l'opinion d’une identité d’origine religieuse
entre les deux peuples. En 828, une ambassade célèbre
apporta en France les œuvres attribuées à saint Denis
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 494
d'Athènes ou lAréopagiste, le déclarant le même que
saint Denis de Paris. Le manuscrit fut remis , par les or-
dres de Louis-le-Débonnaire, à l'abbé Hilduin, avec invi-
tation de rechercher ce qu’il trouverait sur saint Denis.
L'abbé, au lieu de s’adresser à l’enseignement public
üniversellement admis, borna ses recherches dans l’inté-
rieur des archives de son monastère ou de l'Église de
Paris , et prétendit y découvrir l'identité des deux saints
Denis. Mais il y a long-temps que les preuves alléguées
sont reconnues frappées de nullité. Quant à l’enseigne-
ment public à l'époque d'Hilduin, M. d’Ozouville invoque
l'autorité ‘de Fréculphe , évêque de Lisieux , élève de
l'abbaye de Fulda, en Allemagne, et employé dans les
affaires de l'ambassade grecque de 828; Fréculphe, écri-
vant une histoire ecclésiastique pour l'éducation du prince
Charles , depuis Charles-le-Chauve, n’a pas d’autre avis
que celui de Grégoire de Tours ; il en est de même
d'Usuard , qui écrivait son Marlyrologe célèbre dans l'ab-
baye de St.-Germain-des-Prés, là précisément où siége
le Congrès. Avant Hilduin, sous Louis-le-Débonnaire, on
ne parle que d’une lettre de l’église d'Arles au Saint-
Siége , en 450. On y voit la mission de saint Trophime at-
tribuée à saint Pierre. Maïs, sauf ce seul mot, toute cette
lettre est conforme à Grégoire de Tours ; et il faut que ce
mot soit une interpolation ou bien que le mot de Pierre
ne s’y trouve que comme synonyme d’un successeur de
saint Pierre. Ce dernier avis est celui qu'embrasse l’his-
torien Fleury , tout partisan qu'il se montre d’une ho
Sr apostolique.
M. d’Ozouville conclut en disant qu'il serait très-fà-
cheux, historiquement et moralement de céder à l’en-
irainement dont nous sommes témoins, et il pense qu'il
192 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
est très-important que les Sociétés savantes résistent à un
revirement si subit.
M. de Bouis constate avec plaisir que notre époque
soit revenue à des études si graves, naguères l’objet d’un
ignorant dédain.
« Il proclame l'importance de l’hagiographie comme étant
évidente, incontestable : elle est en quelque sorte à l’ordre
du jour ; la Société de l'Histoire de France, en publiant
les Opera minora de Grégoire de Tours, et le Marty-
rologe romain de Chastelain, répond à ce besoin de
notre temps. En Normandie, plusieurs de 208 ecclésias-
tiques instruits se livrent à ces études avec “une grande
ardeur : on s'attache d'autant plus à ces fglorieuses ori-
gines de notre église nationale , qu ‘ilne nous en restera
plus que le souvenir. Sans doute, il n’est guère possible
que, dans des matières de ce genre , il n’y ait pas d’er-
reurs ; ces erreurs peuvent blesser la vérité, mais jamais
la conscience de chacun de nous, qui reste libre dans
son for intérieur d'accepter ou de refuser les opinions
diverses. Dans les légendes, même les plus contes-
tables, on trouve des renseignements sur les mœurs,
les idées , les pratiques , la liturgie, qui éclairent d'un
jour merveilleux beaucoup de questions historiques. Il y
a donc un intérêt réel dans ces études méprisées, dé-
daignées par le siècle précédent ; et nos confrères, par
la discussion qui vient d’avoir lieu, me prouvent que les
esprits sérieux attachent beaucoup de prix à de savants
travaux sur ce sujet, » |
M. le comte de Mellet répond que les légendes du bré-
viaire romain, dont l’origine est si ancienne, accordent
à nos Saints la plus haute antiquité; car le bréviaire
romain, introduit dans la Gaule sous Charlemagne ,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 193
était récité bien avant le VII*, siècle, dans le reste de
l'Occident.
M. d'Ozouville réplique que jamais Rome n’a entendu
. prononcer ex cathedra. sur ce sujet , elle ne donne à ces
légendes qu’une autorité liturgique et non pas historique.
Poutrédiger le Martyrologe, Rome a consulté les tra-
ditions des églises ; c’est ce qui est arrivé dernièrement
à Limoges lorsqu'on a révisé la liturgie , ainsi qu’on peut
le voir dans le Mémoire de M. l'abbé Arbellot sur l’apos-
tolat de saint Martial. En laissant dans le bréviaire que
saint Martial fut envoyé par les apôtres , Rome n’a pas
dit que cela. fût démontré historiquement, encore bien
moins que l’on fût obligé d'y croire , mais seulement que
telle est la tradition de l'église de Limoges. Rome a trouvé
cetie église en possession des honneurs apostoliques, et
elle ne veut pas les lui ôter. Mais, d’après le pape saint
Sozime., saint Trophime d’Arles est le premier évêque
arrivé en Gaule , et ce fut de la ville d’Arles que les
sources du christianisme se répandirent ensuite sur toutes
les Gaules. C’est un enseignement historique que tous les
documénts des neuf premiers siècles viennent corro-
borer.
M. l'abbé Lalanne ne demande pas la parole pour pro-
longer la discussion , il veut seulement dire avec quel
intérêt il a entendu un entretien si savant. 11 abordera
seulement le point de savoir s’il convient que les So-
ciétés savantes discutent ces questions. La vérité ne peut
que gagner à être examinée, pourvu qu’elle le soit de
bonne foi. Ces questions ne sont pas neuves ; il y a long-
temps déjà qu’on a abordé ces matières. On trouve dans
l'Histoire de l’Église gallicane du P. de Longueval, une
dissertation spéciale sur l’antiquité des églises ; or,
9
4194 INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE.
n’admet , comme remontant aux temps apostoliques ,
qu'un petit nombre d’évêchés.
A ce sujet; M. Gadebled résume en ces termes la bi-
bliographie des principales sources hagiographiques :
« Les sources où l’on peut puiser l’histoire des saints
semblent être de trois sortes :
1°. Les monuments matériels : statues, figures, ef
gies et inscriptions, qui ont été conservées, OÙ: qui se
retrouvent, et qui ont quelque rapport avec la vie des
premiers apôtres connus. +
On sait que deux publications importantes : celle des
Catacombes de Rome et des Inscriptions chrétiennes
de la Gaule , de M. E. Leblant, sont en voie d'exécution,
sous les auspices du gouvernement français. Elles se-
ront, sans nul doute, de quelque intérêt pour l’hagiogra-
phie.
2°, Les manuscrits. Le nombre en est grand , et il est
douteux que , désormais, on en rencontre beaucoup qui
déjà n’aient pas été publiés.
3°. Les livres imprimés. Depuis l’origine de lPimpri-
merie, plusieurs grandes publications contenant des
Vies des saints ont été répandues. Le plus fameux de ces
livres est celui de Voragine, connu sous le titre de
Legenda aurea , œuvre du XV°, siècle , pendant le cours
duquel il n’a pas eu moins de 70 éditions ; c’est, du reste,
un travail un peu mythologique dans lequel lhistoire
est quelquefois en défaut. Mais l'ouvrage le plus impor-
tant de ce genre est celui qu’a publié Boninus Mon-
britius, sous le titre de Vie des Saints. Ce recueil,
imprimé à Milan, vers 4480 , d’après des manuscrits
extraits des archives de St.-Jean de Latran, offre, les
caractères d'authenticité les plus recommandables, Gité
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 4195
fréquemment jusque dans le milieu du XVII, siècle ,
il semble avoir été injustement un peu oublié. Ilest vrai
que le Sanctuarium de Monbritius est"devenu très-
rare. Ru:
Nous possédons encore un ouvrage de même nature,
le Speculum historiale, de Vincent de Beauvais , tant de
fois réimprimé, quoique très-volumineux. Ce travail est
conforme à celui de Boninus Monbritius,, et mérite de
fixer l'attention.
D. Chifflet , dans un de“ses opuscules , a traité des
saints primitifs de la Gaule, mais en termes concis, n’en
ayant rapporté que ce qui lui paraissait être vrai au point
de vue de l’histoire. » |
M. d'Ozouville rappelle que Tertullien, parlant de la
destruction de Pompéi arrivée en 79 ,»remarquait alors
qu’il n’y avait pas de chrétiens en Campanie; et cepen-
dant Pompéi était aux portes de Rome.
M. l’abbé Lalanne réplique que saint Irénée de Lyon,
au [i°, siècle, indique qu'avant lui il y avait des chrétiens
dans les Gaules.
M. l'abbé Brullée, chanoine de sens, objecte à son
tour que Tertullien , au Il°. siècle, parle des églises ré-
pandues dans les Gaules.
M. d'Ozouville entre dans des détails spéciaux et des
applications X' différents évêchés.
M. l’abbé Lalanne remercie M. d'Ozouville: de sa sa-
vante dissertation : son érudition a vivement .intéressé à
et M. l’abbé Lalanne déclare que son sentiment diffère
très-peu de l'opinion de M. LOzouvile,
M. le comie de Mellet a 2 qu'en formulant. la
questionon s’en {int à la première partie, ainsi conçue :
496 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« N’est-il pas utile que les Sociétés savantes s'occupent
« d’études hagiographiques plus qu’elles ne l'ont fait jus-
« qu'ici ? »
Faut-il admettre la seconde parlie : -
« Doivent-elles laisser , comme elles le font, avancer
« ou retarder de plusieurs siècles selon le bon plaisir de
« tels et tels, la venue des premiers Le de nos
« diocèses ? »
M. de Caumont, qui se déclare l’auteur de cat question,
en demande le maintien: il l’a posée, à la demande d’un
grand nombre de personnes qui avaient envoyé diverses
formules qu'il a fondues ensemble :
Sur la proposition de M: Boulatignier, les mots selon le
bon plaisir de tels et tels sont seuls supprimés.
L'un des Secrétaires-généraux ,
Raymond BORDEAUX.
A Pouverture de la séance suivante (du mardi 21
avril), M. Bizeul à donné communication au Congrès
de la note suivante , qui résume son opinion sur cette
question de la prédication du christianisme dans les
Gaules :
Il me semble qu’on s’est un peu jeté en-dehors de la
question. Il ne s’agit point d'élever des doutes sur l’exis-
tence d’aucun saint ; personne ici ne me paraît être dans
l'intention de devenir un dénicheur de saints, comme le
docteur Launoy au XVII. siècle; et bien moins encore,
Dieu merci, de se produire comme sectateur de la philoso-
phie incrédule du XVILE°, siècle : je ne vois parmi nous que
des gens pleins de respect non-seulement pour la religion
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 197
mais encore pour les vénérables personnages que l’Église
a canonisés. Les saints sont donc ici tout-à-fait hors de
cause.
Ce qu’on recherche, c’est l’époque à laquelle quelques-
uns d’eux sont venus apporter le christianisme dans Ja
Gaule, l'y faire fleuriret y former des agrégations reli-
gieuses, devenues plus tard ces évêchés dont la Notice des
provinces nous a conservé les noms primitifs, et dont la
plupart existent encore aujourd’hui.
On a, certes, pendant long-temps cru qu’un assez grand
nombre de ces pieux missionnaires avaient été envoyés
dès le temps des apôtres. Chaque église aimait à rivaliser
d’antiquitéet ne se faisait pas faute Pour y parvenir, d’invo-
quer des légendes plus ou moins authentiques; ilen a été
ainsi dans l’histoire civile, qui, sous la plume de Tite-Live
et de Justin comme sous celle des chroniqueurs du moyen-
âge , a enveloppé les premières origines des peuples
dans une accumulation de faits peu sûrs et a
fabuleuses.
Les savants les plus renommés des XV°, et XVI°, siècles
ont accepté tout cela, sans la moindre répugnance. La
critique historique n’était pas née encore. Mais, avec le
X VII*, siècle, sont venus les grands et beaux travaux des
congrégations savantes, Les Bénédictins et surtout les
Bollandistes ont jeté une éclatante lumière sur la question
qui nous occupe. Ils ont jugé avec une juste sévérité ces
légendes pleines d’anachronismes, œuvres-pour l,plu-
part des XI°, et XIL°, siècles et données en. composition
à de jeunes religieux. C'était le roman d’alors.
Cette saine critique s’est égarée dansle XVIII, siècle. Ce
genred’étude a disparu à peu près, sous le règne tyrannique
des opinions philosophiques, et en présence dela triste
198 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
frivolité de l’époque. Aujourd’hui qu’une réaction con-
traire s’est manifestée, aujourd’hui que la méthode et
les recherches historiques sont loyales et consciencieuses,
ne pouvons-nous donc pas reprendre le thème des Bollan-
distes et discuter le plus ou le moins de probabilité
que présente, sous le rapport des époques, la mission
sainte des apôtres de la Gaule ; apprécier ces traditions
fort anciennes sans doute, mais qu’on peut, sans hérésie,
combattre et ne pas admettre ?
Cette étude se lie à une autre grande étude, celle de
l'histoire de la Gaule aux IV°., V4 et VI* siècles.
Quelques bons esprits l'ont ébauchée, en traitant de
l'établissement de la monarchie française. Chacun de nous
ne peut-il pas essayer d’en éclaircir quelque partie ?
11 est une chose qui m’a frappé dans la discussion, et
que je crois devoir signaler ici, c’est qu’en parlant de
l’importation de la religion chrétienne dans la Gaule, on
comprend toujours la Gaule dans son intégralité. C'est
une faute grave, à mon avis. II me semble impossible
que cette importation ait été faite à une même époque.
Ilrest sensible que les premières prédications, les pre-
miers établissements sérieux, doivent avoir eu lieu dans
cette lisière bordant l'Italie, dans cette Gaule narbon-
naise, déjà romaine bien avant la conquête; à Arles, à
Lyon, à Autun, dans toute cette partie allant de la
Méditerranée aux bords du Rhin; dans cette partie de
la Gaule que les historiens romains ont seule connue,
dont ils ont uniquement parlé, tandis qu’ils ont gardé
le silence le plus complet sur tout le reste. Or, ce reste
se composait de tout l'Ouest de la Gaule, de ce que la
Notice de l’Empire nomme le Tractus Armoricanus,
formé de deux des Aquitaines , de deux des Lyonnaises et
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 199
de la Sénonie; je pourrais même y ajouter le Tractus
Nérvicanus, ou la première Belgique.
Comment saurions-nous quelque chose de tout ce
pays, sous le rapport de l’introduction du christianisme
au I[°, siècle. de notre ère, quand nous ignorons
complètement ce qui s’y est passé sous le rapport poli-
tique ? Réduits à raisonner par induction, comment
croire que ce vaste territoire occidental avait dès-lors
des apôtres, des évêques, enfin deséglises fondées, quand
les premiers martyrs de la Gaule ne remontent qu’à
l'an 177 ? L
I] faut avouer. que, si les ar d’un apostolat rela-
tivement plus moderne n’ont pas une somme bien com-
plète de preuves, les plus sages inductions sont vérita-
blement pour eux; tandis que leurs adversaires ont à
peine à présenter des traditions que la moindre critique
fait disparaître, ainsi que l’a si bien prouvé, dans la
dernière.-séance , le savant M, d’Ozouville.
Dans une pareille question, les. études doivent être
larges. Il faut montrer le fort comme le faible et ne rien
dissimuler; il faut, s’il est possible, débarrasser la ma-
tière de tous ses nuages et nous efforcer de l’élever au
rang de thème véritablement historique ; il faut qu’on
voie bien clairement que tous nos efforts ont tendu à la
recherche de la vérité, si nous ne voulons pas que nos
travaux soient. jugés avec un dédain, souvent fort igno-
rant , par ceux qui sont hostiles à tout ce qui a rapport à
la peliéion , c'est-à-dire par nos vrais adversaires à. tous.
200 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
SÉANCE DU 21 AVRIL.
( Présidence de M. le comte pg Maizy. )
Le bureau est composé de MM: BOURJOT SAINT-HILAIRE,
BOULATIGNIER, DE CAUMONT, directeur ; A. DE BURE.
Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté.
M. le Directeur annonce que l’ordre du jour appelle la
discussion des questions 27,28, 29 et 30 du programme,
relatives à l’histoire de l’agriculture.
Il pense qu’il importe beaucoup que les Sociétés sa-
vantes, à l'exemple de la Société d’agriculture, sciences
et arts de l’Eure, s'occupent à provoquer des recherches
et des travaux sur l’état de l’agriculture et des agricul-
teurs au moyen-âge, de manière à faire connaître les
procédés de culture, les plantes cultivées, le prix des
terres, celui des fermages , la disposition des bâtiments,
granges, écuries et autres pièces, destinés à l'exploitation
rurale, en même temps que leur construction. Il faut
aussi recueillir tout ce qu’on pourra sur les anciens in-
struments aratoires et les outils. On a déjà dans les plans
des abbayes de bonnes indications, qui peuvent servir
de point de départ. Le plan de l’abbaye de St.-Gall a été
publié en Angleterre avec d’excellents commentaires , il
fournit déjà de précieux renseignements ; un autre ou-
vrage excellent à signaler sur'ces études est celui de
M. L. Delisle, couronné d'abord par la Société libre
de l'Eure , puis par l’Académie des inscriptions, qui
appellera bientôt, sans aucun doute, l’auteur à siéger
dans son sein. Depuis lors, ajoute M. de Caumont,
M. Delisle a continué #compléter ses documents. Le car-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 204
tulaire de St.-Vigor de Bayeux lui a permis de fixer, d’une
façon assez positive, le prix des fermages dans cette
portion de la France au XIIT°, siècle. Beaucoup de rou-
leaux de comptes, jusqu’à ce jour restés inexplorés dans
nos archives , amèneront, sans aucun doute, à des
conclusions solides ceux qui pourront se livrer à ces
études. FPT" |
M. le comte de Mailly ajoute aux documents signalés
par M. de Caumont, qu’on trouvera des renseignements
très-précis dans les anciens aveux et dans un livre fort
ancien, intitulé : De la propriété des choses.
M. Gadebled pense que M. L. Delisle, dans son savant
ouvrage sur l'État de l'agriculture au moyen-äge, en
Normandie, s’est trop inspiré des documents fournis par
les cartulaires des abbayes ; il aurait désiré qu’à ceux-ci
il en eût adjoint d’autres, tirés des archives civiles, c’est
ainsi, par exemple, qu’il eût trouvé, dans” cette salle
basse et humide, qui est une véritable cave, dans les
archives du Palais-de-Justice de Rouen, siriches et si
heureusement conservées jusqu’à nous, une collection
de plus de 12,000 volumes des actes des tabellions et des
notaires, depuis le temps de Philippe-le-Bel jusqu’à la
Révolution. Les savants qui voudront écrire sur l’histoire
de l’agriculture au moyen-âge, doivent certainement ne
pas négliger une source aussi abondante de renseigne-
ments. Il rappelle que le livre De la propriété des
choses est dû à un moine savant du XIV°. siècle, nommé
Bartholomeus. de ‘Brambella, etque la singulière tra-
duction de son titre : De proprietate rerum, qui fut
adoptée, l’a fait nommer le propriétaire des choses.
M. Boulatignier fait remarquer que , dans la mañière
dont on avait conçu jusqu’à notre temps l’histoire natio-
202 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
nale, beaucoup de matières se trouvaient comme englobées
dans une histoire écrite d’une façon trop générale. Il faut
revenir à des études plus spéciales sur des matières trop
négligées, comme celle de l’histoire de l’agriculture. Il y
a des époques où les documents manquent, et il faut bien
se garder de tomber dans cette dangereusepratique de
quelques écrivains , signalée par M. Daunou, qui sont
d'autant plus affirmatifs qu'il y a moins de preuves et qui
commencent à douter lorsque le nombre des monuments
écrits leur permettrait d’asseoir leurs jugements. Il y
a donc un intérêt réel à poursuivre l'exploration des
sources.
M. de Longuemar et M. l'abbé Barbier de Montault,
de Poitiers, n’ayant pu assister au Congrès, ont envoyé
des notes fort étendues, sur les travaux agricoles au
moyen-âge, dont les zodiaques nous ont transmis les
diverses époques.
M. le Secrétaire donne lecture de ces deux travaux qui
répondent à la 29°, question du programme.
M. Paquerée fait remarquer que l’examen des zodiaques
pourrait faire croire que l’ordre des saisons a changé;
cependant, si lon veut bien se souvenir qu’il y a des années
où l’on vendange exceptionnellement en septembre, quoi-
que.cela arrive plus ordinairement en octobre, on pourra
penser que les artistes quiont sculpté ou peint les zo-
diaques , étaient libres de choisir une des deux époques.
Il faut ajouter d’ailleurs que,les artisans maçons ou
les moines dessinateurs des manuscrits, qui. en sont les
auteurs, voyageaient; qu'ils ont pu adopter pour la
représentation du Zodiaque, celle qui était adoptée dans
leur province et porter dans le Nord celle du Midi, et
réciproquement, Il termine enfin par cette considération
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 208
que les agriculteurs, même à peu de distance les uns
des autres, ont pu avoir des méthodes différentes :
ainsi, près de Bordeaux , on taille la vigne en octobre,
tandis qu'à dix kilomètres de là, dans la Dordogne, on
la taille eh mars. Rien donc ne lui semble prouver le
changement-des saisons.
M. Sellier appuie l'observation tirée des deux époques
pour le provignage qui se retrouve en Champagne.
M. de Caumont insiste sur les connaissances utiles,
pour la forme et la nature des instruments d'agriculture,
qu’on peut obtenir par les représentations de ces zodia-
ques. Les charrues, les herses , Les rouleaux, les serpes ,
les faux , les faucilles, s’y retrouvent avec les formes que
nous voyons autour de nous.
La séance est TeVée à cinq heures.
Le Secrétaire,
DE BQOUISs.
SÉANCE DE CLOTURE DU 22 AVRIL:
se
( Présidence de M. ne KeRipec. )
MM. Rossey, le comte VAN DER STRATEN-PONTHOZ et
le vicomte DE Cussy composent le bureau.
M.Raymond BorpeAux remplit les fonctions de secré-
taire.
Aucune discussion ne s’est élevée sur la 30°, question,
qui était ainsi conçue : 0
« Les Sociétés d'agriculture ne doivent-elles pas re-
204 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« Cueillir toutes les traditions relatives aux anciens pro-
« cédés de culture ; les pratiques qui vont cesser, les
« meubles qui vont disparaître, ne méritent-ils pas
« qu’on en conserve le souvenir? Ne sont-ce.pas là des
éléments précieux pour l’histoire de l’agriculture ? »
mn
On donne lecture de la 31°. question, ainsi conçue :
« Quelle est la puissance des Sociétés savantes pour la
production et l'élaboration d'œuvres sérieuses ? Dans
quels cas la supériorité des travaux collectifs se ren-
contre-t-elle ? Quand et comment la division du tra-
vail est-elle possible et nécessaire ? L'association est-
elle possible pour les monographies , etc. ? »
Cette question ne donne d’abord, lieu à aucune obser-
vation, plusieurs exemplaires du programme ne la portant
pas à son rang d'ordre. Cependant la question ayant été
relue , M. Sellier a formulé son opinion en ces termes :
« Il est difficile que le même homme, à moins d’être
une rare exception, élabore seul une œuvre qui suppose
tout à la fois des connaissances scientifiques ou littéraires
très-diverses, Lorsqu'il s'agira donc d’une œuvre de cette
nature, la miseen commun des travaux des capacités de
diverses sortes qui se rencontrent dans les Sociétés sa-
vantes , pourra présenter de grands avantages; il n’en
serait pas de même s’il*s'agissait de la confection d’un
ouvrage qui dût conserver, par son unité, le cachet de
son auteur. L'association serait encore utile pour les mo-
nographies, surtout celles qui s'appliquent aux monu-
ments, car elles doivent comprendre , avec la partie
historique , la description détaillée de l'édifice, celle des
objets d’art qui s’y rencontrent et la reproduction du tout
par le dessin, Chacune de ces parties du travail pourrait,
Pn
_
2
Pa
Lai
Led
=
L
es
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 205
on le conçoit, être confiée à autant de spécialités diffé-
rentes, et l’ensemble ne pourrait qu’en profiter, »
M. Bordeaux croit qu’en fait on supposesaux Sociétés
savantes une puissance d'élaboration beaucoup plus
grande que celle que ces Compagnies possèdent réelle-
ment. Trop souvent, dans le sein même du Congres,
quand une question paraît difficile et lourde à traiter,
un bon nombre de voix sont d’avis de la renvoyer aux
Sociétés savantes des départements. Cependant ces s0-
ciétés mènent très-rarement à bonne fin des travaux sé-
rieux et de longue haleine : la plupart sont encombrées
d’une foule de membres inertes et impropres à tout la-
beur soigné. Ceux même qui agissent manquent souvent
de persévérance, et ne travaillent que par veine et pour
charmer quelques loisirs passagers. Le recrutement de
ces compagnies est d’ailleurs parfois difficile, et on se
trouve forcé d’admettre dans certaines sociétés des-gens
peu letirés, et dont le rôle est tout simplement celui d’un
abonné. Les premières académies provinciales, formées
au siècle dernier, étaient autrement difficiles sur les ad-
missions, et le titre d’académicien, même en province,
avait sa valeur.
Aujourd’hui, un bon nombre “de sociétés sont des
espèces de cercles où lon est reçu pour son argent.
C'est même un heureux hasard quand ces associés su-
pérflus veulent bien gatder un silence modeste ; car,
trop souvent, ils contribuent à grossir les collections
généralement encombrantes, de poésies incolores, de dis-
.cours verbeux, et de rapports sans portée. Les Sociétés
savantes produisent, chaque année, des monceaux de
volumes qui vont s’entasser dans les greniers des biblio-
thèques , et où les bons mémoires sont vraiment noyés
206 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
dans le pêle-mêle,des articles de remplissage. Trop de
sociétés tiennent absolument à faire paraître régulière-
ment un volume, 5 ù
Mais ces travaux sont rarement collectifs. Les travaux
collectifs sont en général l’œuvre de commissions , les-
quellesne font rien , ou produisent ces rapports indigestes
dont je parlais tout à l’heure. Comment faire un travail
collectif dans certaines villes où chaque spécialité compte
souvent à peine un seul adepte ? S'agit-il de faire de l’ar-
chéologie ? comment entreprendre une œuvre collective
si vous n’avez qu’un archéologue ? Si vous en aviez deux,
encore faudrait-il qu’ils s’entendissent. Il arrive alors
ce que j'ai vu : on compose une commission d'agriculture
avec un fermier , un poète, un receveur d’enregistre-
trement , un mathématicien et un notaire. Ou bien on
donne à juger une question scabreuse d'archéologie à un
groupe de membres dans lequel on fait entrer, par
exemple, un ou deux employés quelconques, un journa-
liste , un instituteur , un horticulteur , un ingénieur et
deux .ou trois plaisants bien décidés à rire de l’archéo-
logie et de ceux de leurs confrères qui croient en faire
sérieusement... Les beaux résultats que l’on obtient
alors! ”
Cependant cet état de choses, trop général dans la plupart
des villes, est fâcheux. Certains travaux, par leur étendue,
par leur caractère complexe , sônt au-dessus des forces
d’un seul homme. Comment mener à bien, par exemple, la
flore d’une contrée sans collaborateurs ? Combien sérait-il
profitable de voir unir des spécialités diverses à l’accom-
plissement d’un même but? Voici une cathédrale à décrire:
qui osera tout seul en entreprendre l'étude ? qui se déci-
dera à dépenser plusieurs années de sa vie à exécuter une
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 207
monographie qui procurerait peu de’ gloire ? Mais sidl’ar-
chéologue, promoteur et directeur "de l’œuvre, avait,
pour le seconde», des collaborateurs zélés ; si, tandis
qu’il rédige le texte, un paléographe scrutait les ar-
chives ; si un architecte levait les plans, dessinait les
coupes, traçait les profils, cotait les dimensions ; si un
ou plusieurs dessinateurs amis faisaient les dessins d’en-
semble , les vues, les intérieurs; si un autre photogra-
phiait les statues ; si, la besogne se partageant de plus
en plus, on trouvait un homme de bonne volonté pour
calquer les vitraux , un second pour estamper les pierres
tombales , un troisième pour mouler les détails délicats :
n'est-il pas évident que l’on élèverait , comme par en-
chantement et en quelque sorte sans effort, un monu-
ment à l’art et à l’histoire? Mais, supposez qu’une même
ville recèle assez d'hommes instruits qui s'entendent
pour mener à bonne fin une pareille œuvre, léditeur
manquera, et cependant c’est un des services que
peuvent rendre les Sociétés savantes, que de publier des
ouvrages au-dessus des ressources de simples , parti-
culiers.
M. le marquis de Ménilglaise ne croit pas que l'on
puisse trouver de formule ni de principe pour servir de
réponse et de solution à la question. La question est une
question de fait, sans conclusion rigoureuse : tout
se réduit à dire qu'il faut obéir aux circonstances, Quand
quelqu'un peut faire le travail tout seul, qu’il le fasse,
sinon que l’on se groupe.
on passe à l’examen des questions 32, 35, 3, 3,
36 et 37, ainsi conçues :
« Quels principes orthographiques Fr être sui-
208 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
«
«
vis dans la publication des anciens manuscrits ? —
Faut-il pousser l’exactitude jusqu’à proscrire la ponc-
tuation, les accents et l’usage des capitales ? »
« Quelles règles convient-il d'adopter dans la réim-
pression des anciens documents et des anciens auteurs
Doit-on , lorsque d’ailleurs on conserve la vieille or-
thographe, introduire la distinction actuelle entre les
I, lesJ, les U et les V ? Jusqu’à quel point faut-il res-
pecter les fantaisies orthographiques introduites à la fin
du XVIII°, siècle par quelques imprimeurs, telles que
la multiplication des lettres capitales, la suppression
des lettres doubles , etc. ? »
« Pour préciser ces règles , ne doit-on pas distinguer
le cas où il s’agit de la reproduction intégrale d’un
ancien écrivain , et celui où il s’agit de citations in-
corporées dans un ouvrage moderne ? »
« Déterminer les principes à suivre pour la reproduc-
tion des inscriptions , des lettres et documents auto-
graphes, des manuscrits écrits avec soin , desi impres-
sions.rares et la publication des simples archives, ou
la réimpression d'ouvrages courants Ge sans physio-
nomie typographique. »
u N’esi-il pas urgent d'adopter, en cette matière, un
système raisonné en présence de la bigarrure et des
errements contradictoires suivis, dans la plupart
des publications faites par les Sociétés des dépar-
tements ? »
« La rédaction d’un Manuel où les divers systèmes or-
thographiques français seraient classés par époques ;
où les règles typographiques des divers siècles seraient
formulées , ne serait-elle pas utile pour les éditeurs et
les imprimêurs ? »
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 209
M. Bordeaux ouvre la discussion en ces termes :
J'ai proposé à M. de Caumont la position de ces ques-
tions sur notre programme, à cause de l’embarras que
l’on éprouve lorsqu'on a à faire imprimer des textes an-
ciens. J'ai éprouvé moi-même cet embarras et je me
suis trouvé dans une grande perplexité en présence des
méthodes contradictoires et des usages très-différents des
imprimeries auxquelles j'ai eu affaire, Il m'a semblé que.
le Congrès ferait bien de tracer quelques règles pour :
servir de guide en cette matière, où l’on est livré à toutes
les variations des protes et des correcteurs.
M. Sellier formule ainsi son opinion :
« La 32°, question s’applique aux anciens manuscrits ;
c’est-à-dire , à des ouvrages qui n’ont pas encore vu le
jour. Ces ouvrages peuvent être publiés dans deux buts
différents : ou l’on veut en faire l’objet d’une lecture que
j'appellerai courante, par exemple , s’il s’agit de manu-
scrits contenant, soit des documents historiques, soit des
mémoires qui gps euvent intéresser le public; ou “bien la
publication de ces manuscrits ne s'adresse qu’à un petit
nombre d'hommes éminents, comme une sorte de curio-
sité littéraire, scientifique ou artistique.
Dans le premier cas, c’est l'orthographe courante qu'il
faut adopter, avec la ponctuation et les accents actuelle-
ment en usage; dans le second, il faudra se conformer
exactement à l’orthographe de l’auteur, et supprimer
comme lui, la ponctuation, les accents , l'usage des
capitales, et même employer les 1 pour les J et les V
pour les U. |
Quant à. la réimpression des anciens documents et des
anciens auteurs , la même distinction semble devoir être
établie,
210 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Les fantaisies orthographiques de la fin du XVIIE*, siècle
doivent, à mon avis , être complètement proscrites, car
elles n’ont aucune raison d’être. La tentative faite à cette
époque, par les imprimeurs qui les ont introduites ,
est restée sans résultat à cause de la bizarrerie quiavait
présidé à cetie innovation et qui à été ainsi condamnée
par l'expérience.
S’il s’agit de citations d'ouvrages anciens incorporées
dans un ouvrage moderne, l'orthographe ancienne devra
être conservée, parce que ces citations étant né-
cessairement assez courtes, la lecture n’en sera pas
pénible , et qu’elles ressortiront mieux, suivant le désir
de l’auteur , au milieu de l’ouvrage dans lequel il les
aura recueillies,
35°. question. Cette question ne semble présenter au-
cune difficulté. 11 faudra , suivant moi, suivre l’ortho-
graphe ancienne pour les inscriptions, les lettres et les
documents autographes , les-manuscrits écrits avec soin
et les impressions rares. Les inscriptions devront être re-
produites exactement, avec les caractèrés qui les com-
posent, et même avec la ponctuation qui se trouve entre
chacun des mots, si c’est ainsi qu’elle a été établie. Quant
aux autres publications mentionnées dans la question ,
il faudra suivre l'orthographe actuelle.
Sur la 36°: question , je suis d’avis que l'urgence si-
gnalée existe, et quêle Congrès rendra à la bibliogrä-
phie un éminent service en excitant les Sociétés sa-
vantes à adopter une marche uniforme. |
Le Manuel dont parle la 37°, question serait d’une
utilité évidente , et il est à souhaiter que le Congrès en
ns la rédaction. M. Raymond Bordeaux, notre col-
lègue, l’un des secrélaires-génér aux du Congrès, au-
CONGRÈS DES ACADÉMIES, 241
teur de cette partie du programme , sera sans doute
invité à s’en charger, »
M. Gosse a été spécialement chargé, par la Société
d’histoire de Genève , d'appuyer sur l'utilité pratique de
cette question d'orthographe et de typographie historique.
HISTOIRE DE LA RELIURE DES LIVRES.
La discussion des 38°, et 39°. questions, relatives à la
reliure des livres, a rempli le surplus de la séance. Voici
en quels termes le programme formulait ces questions :
« L'art de relier les livres intéresse les bibliophiles.
« Les reliures exécutées pour certains amateurs fameux,
« tels que Grolier, au XVI°, siècle, le comte d’Hoym, etc.,
«sont justement recherchées, Faire connaître Chronolo-
« giquement les diverses époques de cet art, les noms
« des principaux amateurs , des artistes les plus réputés,
« des graveurs qui ont. dessiné et exécuté des fers et des
« ornements. Faire connaître les collections les plus re-
« marquables sous ce rapport, qui existent en pro-
« vince. » | ‘
« A notre époque très-peu d'ouvriers , Surtout en pro-
« vince, savent exécuter des reliures pouvant satisfaire
« des gens de goût. Comment relever cet art, principa=
« lement dans les départements ?»
M. Bordeaux croit que les Sociétés savantes des dépar-
tements pourraient trouver, dans ces questions, un
aliment nouveau pour réveiller leurs séances. Le côté
artistique de la bibliomanie est trop négligé en province.
Cependant .cerl taines reliures anciennes sont de véritables
monuments, ‘et les gens de goût doivent quelqu’ estime
aux cürieuses reliures en bois du XV°, siècle , aux orne-
212 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ments gaufrés des reliures semi-gothiques du commen-
cement du XVI: siècle et des reliures de la Suisse alle-
mande.
L'histoire de la reliure au moyen-âge serait longue à
faire. Frère Herman, habile relieur de manuscrits, venu
en Angleterre lors de la conquête, devint évêque de
Salisbury.
On dit que l’emploi du maroquin fut imaginé par
le roi de Hongrie Mathias Corvin, bibliophile enragé,
dont les volumes sont estampés de sa devise, #n corbeau
tenant dans son bec un anneau d'or. 11 paraît que la
bibliothèque impériale de Vienne possède encore environ
300 volumes de sa collection. à
Plusieurs statues de la cathédrale de Chartres tiennent
des livres représentant de riches reliures du XIII°. siècle.
Au Louvre , la statue couchée du prince de Carpi, ou-
vrage de bronze de Paul Ponce Trebati, tient à la main
un livre figuré avec une reliure de la renaissance d’un
beau dessin.
Le goût exquis des dessinateurs de la renaissance se
retrouve dans les Cômpartiments ingénieux exécutés sur
le plat des livres, sous Henri IT et Henri III. Vigneul-
Marville raconte que l'ambassadeur Grolier dessinait lui-
même les combinaisons de filets et d’arabesques élégam-
ment tracées sur ses volumes. Les reliures de Le Gascon,
de Maioli et de Dusseuil sont encore des chefs-d’œuvre’,
et il n’est rien de plus splendide pour orner une biblio-
thèque que les beaux volumes, tout semés de fleurs-de-
lis, donnés en prix dans les colléges des Jésuites, sous
Louis XIII et Louis XIV. Les reliures jansénistes con-
trastent, par la sombre couleur de leur dos en veau brun,
avec les luisantes enveloppes des volumes reliés en vélin
#4
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 213
blanc par les libraires hollandais et allemands. Ces re-
liures blanches, qui craignent peu les vers et l'humidité,
sont devenues le modèle dont Bradel s’est servi, deux
cents ans plus tard, pour inventer ses cartonnages. Chez
les libraires de Leyde, de Rotterdam et de la Haye, le
vélin reste sans dorures ; en Italie, au contraire, où la
mode des reliures blanches est aussi fort accréditée, des
fers variés viennent rehausser le parchemin. Le vélin
cordé donne bonne mine à un livre d’érudition. Mais le
maroquin du Levant rivalise, sous Louis XIV et Louis XV,
avec le veau fauve dont la blonde couleur fait si bien va-
loir les grands écussons armoriés , frappés en or,sur le
plat des volumes. Le maroquin Lavallière , avec sa nuance
effacée et ses’ tons gris-poussière , apparaît à son tour ,
précurseur des reliures en veau-écaille , à la mode aux
approches dé"la Révolution. L’art du doreur s’exerce sur
les almanachs royaux et sur les semaines-saintes des-
tinées aux gens de la Cour. Mais ces dorures sont souvent
lourdes et confuses, et bien loin. de l’élégance des dorures
à mille points et à petits fers. Certains volumes de prix
sont revêtus de chagrin, c’est-à-dire de la peau rugueuse
et solide du chien de mer. Cependant son grain. offense
les mains délicates qui lui préfèrent le maroquin écrasé.
Les reliures molles figurent au nombre des reliures
singulières. Voici des gardes de toutes sortes, en
maroquin, em tabis, en moire et en soie plus légère ;
en voici en papier doré, marbré, ondé, veiné de
toutes manières, Le papier peigne rivalise avec le
papier. tourniquet Sur la garde des in-4°. et des in-12.
Des ex-libris finement gravés et ornés d’armoiries,
sont collés par les riches amateurs, sur la garde ainsi
décorée. Jusqu'au milieu du XVII, siècle, la garde
21/4 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
était toujours blanche (1) ; au XVIII®. on la couvre
d’enjolivements, on la polit au fer, on l’entoure d’une
large dentelle dorée à petits fers. Tous les livres ont dé-
sormais au dos une étiquette ou pièce, en maroquin
rouge ou vert, tranchant avec les nerfs. Le veau marbré
et le veau granit se partagent les reliures courantes. La
tranche elle-même , gaufrée , ciselée , antiquée à la re-
naissance, est tantôt rouge, tantôt dorée. La dorure à
un reflet verdâtre jusqu’au milieu du XVII. siècle ;
plus tard on l’applique sur une assiette à la sanguine ,
apprêt orangé qui lui donne un ton plus chaud. Sou-
ventencore la tranche a été marbrée avant de recevoir
l'or , et les marbrures ‘apparaissentsous un certain jour.
Dusseuil, Padeloup (2), Derome , Bozerian , Kœhler,
Durt, Thompson , Niédrée , Thouvétiie Simier, Beau-
zonnet, Capé , Petit, voilà des noms de”relieurs de di-
verses époques, dont les ouvrages enflamment la passion
des amateurs. Boyet, Ginain, Anguerrand, Purgold ,
(4) Tallemant des Réaux, dans ses Historiettes, parlant de
la Guirlande de Julie, ce manuscrit offert à Julie d'Angennes
et qui était écrit de la main du fameux, Nicolas Jarry, dit
qu'il avait été relié le plus galamment du monde. Il en décrit
ainsi la reliure : « Le livre est tout couvert des chiffres de
mademoiselle de Rambouillet, Il est relié en maroquin du
Levant des deux côtés, au lieu qu'aux autres livres, il y à
du papier marbré seulement. Il y a une fausse couverture de
frangipane... »
(2) L'usage de signer les reliures estassez récent. Padeloup
_‘ mettait quelquefois à l’intérieur des siennes une étiquelle
gravée, ainsi conçue : Relié par PaneLouP le, jeune, place Sor-
bonne, à Paris. Les reliures ainsi signées de Padeloup sont
recherchées à cause de leur rareté,
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 25
Lortic, Lefebvre, Ottmann-Düplanil, Vogel, le soi-
gneux Courteval, Ducastin,. Biziaux, Gruel, Closs,
Hardy, figurent aussi au rang des bons artistes.
Plusieurs relieurs anglais sont également fameux. On
cite surtout parmi eux Robert Payne, qui commença
à travailler vers 1766, et dont les reliures-sont. d'un goût
et d'une élégance incomparables, Il appelait maroquin
à la-vénitienne, un certain maroquin olivâtre qu'il
employait pour ses reliures aristocratiques. Il restau-
rait admirablement les livres gothiques. Un livre sorti
de son atelier a un cachet qui le fait reconnaître entre |
mille. jo:
Il y a des reliures anciennes, d'ouvriers inconnus ,
qui sont de vrais C Chefs-d’œuvre. Mais aujourd’hui, en pro-
vince, la plupart des relieurs ne sontque de vulgaires ma-
nœuvres (1). Beaucoup de bibliothécaires et de soi-disant
amateurs font preuve du goût le plus dépravé , en faisant
habiller. à la moderne des livres naguèresreyêtus de pré-
cieuses reliures originales. Ces gens-là traitent les livres
commé. certains propriétaires traitent leurs maisons ou
leurs châteaux , en faisant couvrir de plâtre des façades
précieusement historiées , ou en abattant des tourelles
féodales ou les beaux toits surélevés. L'art de restaurer
une ancienne reliure est trop peu connu. Cependant les
reliures exécutées pour des ämateurs fameux, tels que
Grolier , le cote. d'Hoym, Longepierre , M°°, de Pom-
padour, atteignent aujourd’hui, dans les ventes, des
prix exorbitants, En présence de cette recherche, que
dire du vandalisme indifférent de certaines villes qui,
précisément, metfent'au rebut les livres les plus précieux
(1} On cite à Rouen les reliures de Gassassus |
216 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
par l'illustration de leur origine? A Évreux , la munici-
palité a laissé pourrir de rares volumes à reliures ita-
liennes en.vélin blanc ÿ"où brillaient les armoiries du
célèbre cardinal Du Perron, évêque d'Évreux. A Lou-
viers, ily a quelques années, on vendit les doubles,
discrètement, afin d'éviter les formalités ; et les exem-
plaires que l’on préféra garder pour la bibliothèque de
* la ville, furent précisément ceux dont la reliure était
unie. On ne se soucia pas des reliures qui portaient l’em-
preinte de la personnalité d’un ancien possesseur , ét des
volumes splendides, couverts d'ornements de la renais-
sance .et provenant de la Chartreuse de Gaïllon, furent
véndus par lots aux fripiers et aux ferrailleurs. Cétaient
des volumes aux armes du cardinal dé-Bourbon , malgré
lui roi de la Ligue. Ces actes de vandalisme sont fré-
quents , et le catalogue de la bibliothèque de M. Ch.
Giraud atteste que la bibliothèque impériale de Vienne,
en Autriche a elle-même livré à l’encan des douzaines
de volumes aux armes du prince Eugène de Savoie, bi-
bliophile fameux autant qu’illustre général... F
M. Dréolle répond que si les auteurs de ces actes de
vandalisme savaient ce que les reliures précieuses se
vendent à Londres , au lieu de les détruire , ils les ven-
draient. L’Athenœum anglais de cette semaine annon-
çait des prix fabuleux.
M. Marionneau raconte qu’il existait à Bordeaux, dans
la bibliothèque de la ville, un exemplaire des œuvres de
Montaigne avec des notes de sa main. On a jugé à pro-
pos de lui donner une reliure neuve ; or, en rognant les
marges , on a précisément ôté "les annotations auto-
graphes... ( Hilarité )…
M. Marionneau croit qu'il serait très-utile de popula-
CONGRÈS DES ACADÉMIES. 217
riser un peu le bon goût de ce côté, dans les départe-
ments; car dans beaucoup de grandes villes il n’y a
que de mauvais relieurs. A Bordeaux, il n’y a pas un seul
atelier de reliure où l’on sache exécuter un travail un peu
soigné. | |
Plusieurs membres prennent la parole pour se plaindre
de l’inhabileté des relieurs, dans leurs villes respectives :
on signale toutefois un relieur très-intelligent dans la
ville de Troyes.
M. le vicomte de Kéridec prend la parole pour an-
noncer que les questions inscrites au programme ont
été examinées; il félicite les membres du Congrès de
l'assiduité avec laquelle ils ont suivi les séances, et il les
invite à venir tous, l’année prochaine, continuer l’œuvre
à laquelle ils ont pris part cette année : il remercie, au
nom de tous, M. de Caumont du dévouement qu'il
apporte à l’organisation du Congrès et à la direction des
séances.
M. de Caumont répond qu'il est heureux de voir
l'intérêt et l'utilité des congrès appréciée par les hommes
les plus éminents de la France, et qu’il continuera d’ap-
porter tous ses soins à l’organisation des sessions.
Il remercie le Congrès du concours qu'il veut bien lui
prêter.
L'un des Secrétaires-généraux,
Raymond BORDEAUX,
40
[INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
218
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RAPPORT
SUR
LES TRAVAUX ET LES PUBLICATIONS ACADÉMIQUES DES PROVINCES
pendant l’année 1856,
D'APRÈS LES RENSEIGNEMENTS COMMUNIQUÉS AU CONGRÈS
DES DÉLÉGUÉS DES SOCIÉTÉS SAVANTES,
PENDANT LA SESSION D'AVRIL 41857;
Par M, SELLIER, l'an des secrétaires-généraux du Congrès, -
TT
ve
MESSIEURS ,
En chargeant, cette année, le rapporteur général des
travaux et des publications académiques des provinces
_ pendant l’année 1856 de présider la partie de vos séances
qui a été consacrée, chaque jour, aux comptes-rendus par-
tiels présentés par MM. les délégués des diverses Sociétés
savantes, notre éminent Directeur a voulu que votre rap-
porteur fût en position d’exciter, d’une manière plus
spéciale , le zèle des membres de cette Assemblée et de
réunir ainsi les éléments d’un travail plus complet. Ce but,
je m’empresse de le dire, a été atteint; et, à quelques ex-
ceptions près, je pourrai vous soumettre l’analyse de
tout ce qui a été fait de bon et d’utile par chacune des
Sociétés académiques dont les représentants se sont fait
remarquer, dans cette enceinte, autant par leur dévoue-
ment aux intérêts de la science que par leurs talents.
|: C'est un progrès, Messieurs; car, il faut bien le recon-
220 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
naître, vous aviez, pendant les années précédentes, à
regretter de nombreuses lacunes dans l’exposé qui vous
était soumis , et les lecteurs de l'Annuaire publié par
l'Institut des provinces étaient privés d’une foule de do-
cuments qui ont trouvé place, à la vérité, dans des publi-
eations locales , mais auxquels leur rapprochement, dans
un travail d'ensemble, peut seul assurer de l’intérêt et
une réelle utilité. |
Félicitons-nous , d’un autre côté, de voir mieux com-
prise, d'année en année, une institution dont Fimmense
avantage est de livrer publiquement aux savantes et
lumineuses discussions d'hommes compétents des ques-
tions scientifiques, littéraires, agricoles et industrielles,
aussi variées qu'importantes, et de mettre en commun
les connaissances acquises sur tous les points dé la
France.
L'appel qui a été fait par l’Institut des provinces a
été entendu : jamais vous n’aviez compté de plus nom-
breuses délégations ; des Sociétés qui, jusqu’à présent,
g'étaient tenues éloignées de vous, sont aujourd’hui re-
présentées dans cette enceinte; de nombreux rapports,
dressés par nos collègues sur les travaux de leurs sociétés
respectives, ont été lus et déposés sur votre bureau ;
d’autres sociétés enfin vous ont fait hommage de leurs
publications annuelles , et la tâche de votre rapporteur .
se bornera ainsi, soit à la transcription des notes qui lui |
ontété remises, soit à une analyse que les sociétés auraient
eu intérêt à présenter elles-mêmes, mais qu’il s’efforcera ,
de rendre aussi exacte qu’il lui sera possible de le faire. ;
La marche adoplée dans les rapports précédents ‘est k
celle qui sera suivie dans mon nouveau travail; quoi-*
qu’elle ait pour résultat de confondre des travaux dev
NE Le
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 294
diverses natures, elle présentera cependant cet avantage,
de mettre en même temps sous vos yeux tous les travaux
d’un même département, et tous ceux de chaque Société
savante.
C’est aussi par chaque département que j'aurai à vous
entretenir des ouvrages qui ont été offerts au Congrès.
Les bornes imposées à mon rapport ne me permettront
souvent, à mon grand regret, que de vous en soumettre
une analyse très-sommaire ; je serai heureux, toutefois,
d’avoir pu appeler votre attention sur des œuvres que la
lecture seule pourra vous faire apprécier selon leur mérite.
AISNE.
Le Comice agricole de l'arrondissement de St.-
Quentin (2), qui a fait hommage au Congrès du V*. vo-
lume de ses Bulletins, poursuit avec régularité le cours
de ses travaux, et l’on peut dire que ses publications, ses
efforts , ne sont pas sans influence sur le progrès qu’on
voit se révéler dans l’industrie agricole de sa circonscrip-
tion. |
Ses concours annuels sont toujours nombreux et re-
marquables , surtout ceux des bêtes ovines.
Le concours universel de 1856 a démontré que le dé-
partement de l'Aisne tient le premier rang pour la pro-
duction des métis-mérinos, et l’on peut féliciter les
éleveurs de ce département d’être arrivés à réunir des
qualités qui semblaient inconciliables : la finesse, la
longueur et le tassé de la laine, et d’être parvenus à
donner à leurs moutons ces formes larges et arrondies
{1) Note de M, Ch. Gomart,
229 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
qui annoncent la propension à faire de la viande, et que la
nature semblait avoir refusées à la race mérinos primitive.
Les essais de culture de plantes nouvelles ou de va-
riétés de plantes, les essais comparatifs d'engrais, ont
continué d’occuper l'attention du Comice; grâce à son
patronage, des associations se sont formées pour l’achat
d'animaux perfectionnés, pour l'introduction de variétés
de froment plus productives, pour lachat du guano.
Ces associations ont rendu les achats plus économiques
et l’amélioration accessible à toutes les bourses.
Des instruments nouveaux, ou perfectionnés, ont été
introduits en grand nombre.
C’est une voie nouvelle dans laquelle le Comice de
St.-Queniin a cherché à guider les praticiens avec toute
la prudence convenable , en réitérant, par des concours ,
les essais sous les yeux des cultivateurs, afin de les
meitre à même d'apprécier quels sont les meilleurs
instruments et aussi quels résultats ils peuvent attendre
du semage et du sarclage en lignes.
Les machines à battre sont nombreuses; et le Bul-
letin du Comice de St.-Quentin nous apprend que le
nombre s’en élevait, il y a un an, à 422 pour l’arrondisse-
ment. Ce nombre, déjà considérable, s’est encore accru
depuis. Mais une des améliorations les plus intéressantes,
c'est l'introduction, dans chaque canton, de machines à
battre locomobiles, mues par la vapeur, qui se trans-
portent de grange en grange, de ferme en ferme, pour
battre à domicile les produits de la terre. C’est là une
grande facilité donnée à la petite culture, atteinte par
l'insuffisance des bras, et qui hésile à établir des ma-
chines à battre. Aujourd’hui le petit cultivateur peut
facilement et économiquement faire battre sa récolte par
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 2923
la locomobile de son canton qui, à un jour donné,
l’affranchit d’un travail ingrat et lui donne les moyens
de disposer , quand il veut, du produit de sa terre.
M, Ch. Gomart vous a offert sa brochure contenant la
description du camp romain de Vermand. La notice. de
notre collègue vous a fait connaître un établissement
intéressant, en même temps qu’elle vous a mis à même
d'apprécier de nouveau la science archéologique de. son
auteur.
ALLIER,
# La Société d’Émulation de l'Allier, dit M. de Bure,
son délégué, a marché avec ardeur dans la voie qu’elle
s’est tracée depuis long-temps et dans laquelle elle a été
encouragée par notre savant Directeur. Ses études se sont
principalement dirigées vers l’histoireet l’archéologie, et,
sous ce double rapport, les résultats ont été assez favo-
rables. L'idée d’une bibliothèque formée d'ouvrages con-
cernant le Bourbonnais , “ou écrits par des auteurs ori-
ginaires du pays, est suivie avec persévérance et succès.
Les fouilles faites en différents endroits , et surtout sur les
bords de l'Allier, ont enrichi la collection de la Société
d’émulation , de manière à lui donner un réel intérêt. La
géologie et la paléontologie n’ont pas été oubliées, et de
remarquableséchantillonsont été réunis. Lanumismatique
et l’art héraldique ont été l’objet de travaux sérieux de
MM. Clairefond et de Soultrait. L’armorial publié par ce
dernier en fait foi. L’année a été bonne , en somme, et la
Société n’a pas déchu; ses efforts lui acquièrent une place
honorable parmi les sociétés du centre de la France.
« Depuis quelques années, elle a établi des séances com-
2294 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
munes aux Sociétés Éduenne et Nivernaise. Les Assises
scientifiques du centre de la France , qui paraissent de-
voir se tenir cette année à Moulins, donneront à ces
réunions un caractère plus important et une direction
plus sûre. Je ne veux pas oublier de vous parler ici de
l'ouvrage si considérable, que publie M. Girard , sous les
auspices de la Société qui la couronné en 1854 , sur le
naturaliste Perron et l’état comparé de la science au
commencement de ce siècle et à notre époque.
« Les fouilles exécutées , pour les fondations de la ca-
thédrale, sur l'emplacement du château de nos anciens
souverains, dont le donjon est toujours menacé de de-
struction, ont fourni à M. Esmonnot le sujet d’une note in-
téressante qu’il a enrichie de planches, Le même membre
a fait un travail , accompagné de cinq planches, sur les
objets trouvés au domaine des Laris. Ce petit Panthéon a
paru à plusieurs d’entre vous digne d'intérêt, M. Tudot
a publié une notice sur les marques des potiers romains,
une étude historique sur la mairie de Moulins, un pre-
mier travail sur les vestiges des voies romainesen Bour-
bonnais. Ces trois articles sont ornés de planches exécu -
tées avec le talent de ce dessinateur , déjà connu par des
travaux nombreux dans l’ancien Bourbonnais et l’an-
cienne Auvergne. Il nous a encore donné une notice sur
des objets de céramique trouvés dans un puits à Picus ,
près Dompierre , et une note sur les fouilles de M. l'abbé
Cochet à Lillebonne ; cette note est aussi accompagnée
d’une planche, |
a M. Chazaud a lu un travail très-important sur
les communes du Bourbonnais au moyen-âge; une note
sur la population de St.-Pourçain aux XIV°, et XV°.
siècles ,.et sur la patrie de Jacques Cœur.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 295
« Des notes précieuses ont été fournies par M. Bertrand
sur les fouilles à exécuter dans l’arrondissement de la
Palisse, M. Dubief a fait une étude sur don Juan, et une
autre sur la condition des femmes dans la famille romaine ;
travaux très-soignés et très-intéressants.
_« M. Étienne Méplain a continué ses études sur la ju-
risprudence et les jurisconsultes bourbonnais ; sa no-
tice est remarquable. M, de La Guérenne, sous le titre
de : T'ableau de l’origine et des progrès de l'autorité
royale en France, a fait un véritable cours d'histoire
nationale. | |
« On doit à M. l'abbé Boudant une note sur les ca-
pitaines gouverneurs du château de Chantelle, dernier
séjour du connétable dans son duché,
« M. Clairefond a étudié les monnaies et le monnayage
dans le Bourbonnais.
« M. de Séréville a rédigé une notice sur le généra
Rabusson ; et M. Meilheurat, la biographie de M. Hen-
nequin , député aux États-Généraux.
« Des vers ont été adressés à la Société par MM. de
Chavigny et Adolphe Michel; celui-ci est l’auteur d’une
grande partie de l'Ancien Bourbonnais qu’il a continué à
la mort d'Achille Allier , enlevé si jeune à ses travaux.
« La littérature a été représentée aussi par les tra-
vaux consciencieux de M. Le Gagneur, proviseur du Lycée,
sur le rôle des mères dans nos trois grands tragiques, »
ARDENNES.
Les Sociétés du département des Ardennes ne vous ont
pas fourni l’analyse de leurs travaux, et je n'ai à vous
parler ici que d’une publication poétique importante,
226 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
due à la plume élégante, facile, harmonieuse et pleine
de sentiment, de M. Chéri Pauflin, de Rethel, membre
de l’Institut des provinces. M. Pauffin a mis en vente,
au profit des pauvres, la deuxième édition de ses Chants
du soir. Trente nouveaux morceaux de poésie ont été
ajoutés à la première édition, dont la publication remonte
aujourd’hui à dix années.
C’est faire suffisamment l'éloge de l'ouvrage , que de
vous dire qu’il a été honoré des suffrages de MM. J. Janin,
de Lamartine, Alexandre Guiraud et de Pongerville.
« L'expression, dit à l’auteur M. Jules Janin, me
« paraît simple et châtiée ; le vers est chaste et correct;
« le style est de la bonne école; enfin, vous avez ce grand
« mérite, celui de vous arrêter à temps, même dans vos
« émotions intimes. »
« Je désire à votre poésie, écrit à son tour M. Alexandre
« Guiraud , tout le succès qu’elle mérite, et c’est lui en
« souhaiter beaucoup. »
Ai-je besoin d’insister davantage, Messieurs, pour
vous engager, quoique dans notre siècle positif la poésie
soit peu à l’ordre du jour , à lire cette œuvre consacrée
presque tout entière à nos gloires et à nos douleurs
nationales ?
AUBE.
La Société académique de l’Aube (1) se partage en
quatre sections : agriculture, sciences, arts, belles-lettres.
Quoique ces sections confondent souvent leurs efforts,
et se prêtent un mutuel appui, je rendrai compte de
leurs travaux par chapitres séparés.
(4) Note envoyée par M. A. Gayot, secrétaire de la Société.
EN
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 297
Agriculture. — Le premier travail, par ordre de date,
concernant la science agricole, est un rapport sur un
nouveau mode de cultiver la vigne, et sur un nouveau
cépage, introduit à Villenauxe par M. Gentil-Jacob. Ce
rapport, œuvre de deux savants viticulteurs, MM. Eu-
gène Nay et Cornet, est entièrement favorable à la
méthode de M. Gentil-Jacob qui a l’avantage d’être plus
économique , plus productive que la culture en usage
jusqu'alors. Quant au nouveau plant dit pineau de Mar-
seille , il a présenté, dans ces deux dernières années, la
propriété de remonter, après la gelée, et de produire de
nouveaux bourgeons fructifères , assez abondants pour
donner une récolte complète. L’état florissant de ces
treilles, à la vendange dernière, contrastait d’une manière
significative avec la complète stérilité des anciens cépages.
La sollicitude de la Société pour la culture de la vigne
qui est la seule richesse de la partie Est du département
de l’Aube, a motivé encore deux rapports, d’un vif
intérêt : l’un sur un nouveau mode de traiter la maladie
de la vigne, indiqué par M. Thiraut, vice-président de
la Société des Sciences de St. “Étienne ; l'autre sur un
procédé contre la coulure de la vigne , dont l'inventeur
est M. Troubat. M. le docteur Prié, membre associé, a
continué , de son côté, ses recherches savantes sur
. l’oidium, et sur les moyens de le guérir.
Je citerai ensuite : 4°, un mémoire de M. Léon Debreuze,
membre correspondant, sur {a nature et la propriété
des terres ; mémoire concis, clair, tout pratique, où la
science est mise à la portée du plus humble cultivateur ;
2, Un rapport de M. Dosseur , membre résidant, sur
les essais de culture d’un nouveau froment, nommé blé
prince Albert ;
928 INSTITUT DES PROYINCES DE FRANCE,
3°. Enfin, un travail excellent de M. Oudard, pharma-
cien , sur la conservation des engrais.
La section d'agriculture a continué, en 4856 , l'œuvre
commencée en 14853 pour le drainage. Grâce à ses efforts,
à ses encouragements, aux exemples donnés par ses
membres, les terres, à la fois les plus fertiles et les plus
difficiles à cultiver du département, vont être débarras-
sées des eaux qui les noyaient et donneront des produits
constants et réguliers.
C’est encore la section d'agriculture qui a soutenu le
poids des comices agricoles, et qui a fourni, en grande
partie, les commissions chargées de la visite des fermes
et les jurys d'examen.
Sciences.— La section des sciences est venue en aide
à la section d’agriculture par un mémoire de M. Clément-
Mullet, suivi d’un rapport de M. Boutiot, sur les gisements
de phosphate caleaire dans le département de l'Aube ; —
par un travail excellent de M. Jules Ray, sur quelques
animaux réputés nuisibles en agriculture ; — par une
note de M. Legrand, sur l'Oidium pini qui a fait mal-
heureusement son apparition dans les plantations de la
Champagne ; — et enfin , par une notice de M. le docteur
Prié, sur la carie du maïs.
On lui doit, en outre, un excellent rapport sur la
création projetée d’une manufacture de porcelaine à
Villenauxe. M. Uhrich, membre résidant, est l’auteur de
ce travail, qui contient l'analyse des terres sur lesquelles
les auteurs de cette grande entreprise fondent leurs espé-
rances de réussite.
Je citerai encore un rapport de M. le docteur Bédor
sur les accidents qui atteignent le plus souvent les ou-
vriers . dans les manufactures ; — et une note, de
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 2929
M. Dutailly, membre associé, sur ses procédés de pisci-
cullure. 0
Enfin je mentionnerai, d’une manière toute particulière,
deux travaux d’une grande importance : un Mémoire sur
la galvanoplastie , par M. Jules Maison , et la Mono-
graphie des Unios de France , par M. Drouet. Ce der-
nier ouvrage est une histoire et une description complète
des coquilles d’eau douce désignées par les naturalistes
sous le nom d’Unios ; il prendra rang parmi les traités
classiques d'histoire naturelle. Il est accompagné de neuf
planches , et a paru dans le premier semestre des Mé-
moires de la Société pour 1857.
Arts.—La section des arts a rempli sa mission naturelle
en présidant aux plans et aux décorations artistiques des
monuments en construction dans le département, et notam-
ment de l’Hôtel-de-Ville de Troyes. Ellé a poursuivi sa
grande entreprise de l'érection d’une statue au pape Urbain
IV ; —elle a la direction du musée départemental dont les
richesses s’accroissent sans cesse, grâce à son excellente
initiative ; —elle a,entre autres services, puissamment con-
tribué à la revendication de la magnifique châsse de saint
Aubin quiavait été soustraite par la cupidité privée à l’église
de Villenauxe;—elle a été moins heureuse dans la demande
en grâce si pressante, qu’elle avait adressée à l’Adminis-
tration municipale de Troyes, en faveur de quelques restes
précieux de l’architecture militaire da moyen-âge,
En documents écrits , on doit à la section des arts :
1°. L'inscription gravée sur la porte du château de la
Tour, dernier vestige des constructions romanes dues
‘aux comtes de Champagne;
2°. Un rapport, de M. Camusat de Vaugourdon, sur la
découverte de 3,500 médailles faite à Cléry ;
230 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
-8,. Un rapport de M. Fléchey sur deux mosaïques
gallo-romaines trouvées dans les fouilles du nouvel abat-
toir', à Troyes ;
4°. Un rapport de M. le docteur Prié sur les décou-
vertes faites au tumulus de Fiel,
5°. Un rapport de M. d’Arbois de Jubainville sur
deux nappes d’autel, du XII, et du XV°. siècle, trouvées
à Lentilles, et sur une tombe antique à la Ville-aux-Bois;
6°, Une note (avec planche), sur deux vases, du XIV®,
siècle, trouvés à Troyes, dans la démolition des remparts.
Belles-leitres. — La section des belles-lettres n’a pas
été en arrière du mouvement des autres sections.
Elle est chargée d’une mission délicate et laborieuse,
celle de faire, par chaque séance, l’analyse des ou-
vrages envoyés dans le mois par les sociétés correspon-
dantes. Ce devoir a été rempli , avec une grande supério-
rité, par l'un de ses membres, M. le baron Doyen.
On doit, en outre, à la section des lettres une foule
de rapports sur des travaux historiques ou littéraires ,
qu’il serait trop long d’énumérer.
Au nombre des travaux originaux qu’elle a produits,
on remarque un apologue, de M. l’abbé Tridon , intitulé :
La petite vigne et le vigneron; — une note sur la date
précise de la fondation de l'Hôtel-Dieu de Troyes, et un
document sur les quatre petits hôpitaux de Troyes avant
1225, par M. d’Arbois de Jubainville ; — une traduction
(avec commentaires) des poésies attribuées au rabbin
Raschi, par M. Clément-Mullet;—une biographie de Ville-
hardouin , et une vie de Juyénal des Ursins, par M. l'abbé
Etienne Georges ; -— un mémoire de M. Gérost , membre
associé, intitulé : Annales de l'abbaye de Nesle; —
une note sur le partage des eaux de la Seine au-dessus de
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 231
Troyes, et un mémoire sur une cave romane, découverte à
Ramerupt, par M. d’Arbois de Jubainville;—des recherches
historiques et archéologiques sur les restes mortels d’Ur-
= baïn IV, par M. l'abbé Coffinet; — une monographie de
l’église de Bar-sur-Seine, par M. l'abbé Tridon; -— une
notice sur Nicolas Bourbon, par M. Jacquot, membre
associé.
Enfin, comme poésies : des stances, de M. Dosseur, sur
Urbain IV, et une ravissante boutade de M. le baron
Doyen, intitulée : Promenade autour de mon jardin.
Le grand nombre et la diversité des travaux de la So-
ciété académique de l'Aube a empêché d’en faire une
analyse plus complète. Cette simple nomenclature suf-
fira pour faire apprécier le zèle et les connaissances des
membres qui la composent.
AUDE.
M. Mahul, délégué de la Société des Arts et Sciences
de Carcassonne, vous a présenté ainsi qu’il suit, le ré-
sumé des travaux de cette Compagnie :
« M, Louis Barbès a fait don au musée de la Société
de six deniers d’argent, d’Eudes, roi de France, frappés à
Carcassonne ; ce qui prouve qu’au IX°. siècle , un atelier
monétaire était établi dans cette ville.
« M. le Préfet de l’Aude a annoncé qu’il venait de re-
cevoir du Ministre de la maison de l'Empereur un fac-
simile de la bulle du pape Agapet (951), dont l'original,
sur papyrus, faisait partie des titres conservés aux ar-
chives de l’abbaye de la Grasse, diocèse de Carcassonne.
L’original n’a pu être réintégré aux archives dépar-
tementales de l’Aude. Par suite du don que le Préfet du
9232 7 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
département s'était cru autorisé à faire au Roi, en 1826,
il est resté déposé à la Bibliothèque! impériale du Louvre.
« La Société a reçu de M. Cornet, l’un de ses membres,
le don, pour sa bibliothèque , d’un exemplaire des Prin-
cipes de la Philosophie de Descartes (Elzevir, in-4°.),
donné par Descartes lui-même à un prédicateur du nom
d’Ogier, secrétaire du comte d’Avaux de Mesmes, l’undes
plénipotentiaires de la France au Congrès de Munster. Cet
exemplaire porte, écrite de la main de Descartes , l’anno-
tation suivante, placée au bas du titre : « Fr°. Ogier
« acris judicii senatore censenda proponit DES CARTES. »
— Sur la première garde on lit, écrites de la main
d’Ogier , les lignes qui suivent : « Hagà Comitis missus
« liber ab autore cum epistola monasterium Westofa-
« lorum ubi nunc temporis commoror , in comitatu
« Claudii Memmii Avauxii Mecenalis mei ad pac.
« — 18 septembre 1644. — F. OGrer. » Ce volume ren-
ferme une remarque écrite de la main d’Ogier, en marge
de la page 30 du livre intitulé : Dissertatio de Me:
thodo, et provoquée par le célèbre axiôme de Des-
cartes : « Ego cogito, ergo sum, sive existo. »
« La Société a été informée, par le même membre, que
la Commission de la Bibliothèque avait cru devoir établir,
d'une manière isolée et toute spéciale, la partie de la
bibliothèque qui concerne la province, le département et
Ja ville.
« M. Mahul, membre de la Société, a communiqué
une lettre de M, Tournal, secrétaire de la Commission
archéologique de Narbonne, qui contient d’intéressants
détails :
« 4°, Sur les armoiries de l’archevêque Pierre de Mont-
brun, sculptées sur une des tours de l’archevêché (au-
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1656. . 235
jourd’hui l’Hôtel-de-Ville), que cet archevêque a fait
bâtir ;
« 2°, Sur deux bornes milliaires romaines conservées
dans l’église de St.-Conat-sur-Aude (ancien Flexus),
détruites par la municipalité de 1848 ;
« 3°. Sur les fouilles exécutées proche de Narbonne,
pour le chemin de fer du Midi, et qui ont mis au jour la
statue d’un Faune, et trois inscriptions funéraires chré-
tiennes de l’époque des Visigoths (VI°, siècle).
« Il a été fait don-au Musée, par M. l'abbé Bize, au-
mônier de l’Hôtel-Dieu de Carcassonne, de plusieurs
poids anciens de cette ville.
« M. Denisse, membre de la Société, l'a avertie
qu’une pierre taillée, posée par les astronomes Méchain
et Delambre à 1,111 mètres de la tour de St.-Vincent
de Carcassonne , et servant à indiquer le passage du mé-
ridien de Paris , est dans un état complet de subversion.
Il a exprimé le vœu que cette pierre fût remplacée par un
monument indicatif d’un caractère simple. M. le Maire de
Carcassonne a déclaré s’emparer de la question et a
promis d°y donner suite, aux frais du budget municipal.
« M. O. Rolland du Roquau a offert à la Société,
dont il fait partie, une plaque en métal, trouvée à Azille,
ancien diocèse de Narbonne, où sont gravées les armes
de la maison de Condé, avec l'inscription d’une loge
maçonnique de Carcassonne. |
« M. Mahul, membre de la Société, lui a fait hommage
du I°". volume de son livre ayant pour titre : Cartulaire
et archives de l'ancien diocèse et de l’arrondissement
administratif de Garcassonne (in-4°.). »
« Enfin, un ouvrage intitulé : Hospices de Narbonne ;
Classement des archives antérieures à 1790 (un vol.
23 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
in-/°. ) a été adressé à la Société par M. H. Faure, l’un
des administrateurs de ces hospices. »
Votre rapporteur doit ajouter que, suivant ce qui
résulte des procès-verbaux des séances de la Société,
le Cartulaire de M. Mahul, qui témoigne de l’éru-
dition profonde et des recherches persévérantes de son
auteur, a été accueilli par ses collègues avec la plus
vive sympathie.
Une seconde publication a été faite par le même
auteur, elle est intitulée : Éloge historique d’Armand
Bazin de Besons , 71°. évêque de Carcassonne.
-Cet ouvrage est aussi remarquable par le talent de
l'écrivain que par l'intérêt qui s’attache à la noble vie du
saint prélat, objet de sa notice historique.
AVEYRON (1).
Il y a près de vingt ans que quelques jeunes hommes,
mus par l’amour de la science et du progrès, conçurent
la pensée de fonder la Société des Lettres, Sciences et
Arts de l’Aveyron. À leur appel, un grand nombre de
compatriotes et d'étrangers vinrent se grouper autour
d'eux. On traça le programme des études, on établit la
règle qui devait régir la Société. Les fondements du
Musée de Rodez furent jetés, et la population, s’asso-
ciant au vœu des fondateurs, n’a pas cessé depuis ce
moment de l’enrichir de ses dons. Un grand nombre
d'écrivains consacrèrent leur plume à des questions
d'histoire locale, à l’examen de nos vieux monuments, à
l’investigation des sciences naturelles à peine effleurées
(1) Communication de M. Léopold Bourguet, au nom de la
Société dont il est membre.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 235
dans un pays où la nature s’est montrée si prodigue.
Il en est résulté d'importants avantages : d’une part,
on a recueilli des documents précieux et fait d’utiles dé-
couvertes ; de l’autre, de sages critiques et des avertis-
sements réitérés ont amené la fin ou tout au moins le
ralentissement de ces dégradations et de ces restaurations
barbares qui, depuis longues années, afligeaient les amis
des arts par les travestissements de mauvais goût
qu’elles faisaient subir aux monuments légués par les
siècles passés. |
La Société a exploré toutes les richesses végétales et
toutes les productions du règne minéral, si abondantes et
si variées sur le sol de l'Aveyron, et dont les nombreux
spécimens réunis au Musée mettent à la portée de chacun
de faciles moyens d'étude et d'observation.
C’est à la Société des Lettres, Sciences et Arts qu’on
doit la connaissance de cet amphithéätre romain vague-
ment indiqué par quelques-uns de nos annalistes, et
dont l’origine se lie au plus précieux souvenir de notre
histoire locale, la conversion de nos pères à la foi chré-
tienne. On lui doit la découverte de cet antique aqueduc
qui, grâce à la persévérance de quelques-uns de ses
membres, va retourner à sa destination primitive et
doter la ville de Rodez d’un bienfait dont elle était privée
depuis tant de siècles.
En effet, l’année 1856 a vu commencer l’exécution
d’un magnifique travail dont la conception et l'initiative
sont dues à la Société. La ville de Rodez, située sur un
mamelon dépourvu de sources, est sur le point de voir
enfin couler en abondance, dans ses rues, d’excellentes
eaux que l’on est allé chercher à une distance de 25 kilo-
“mètres, à travers de profondes vallées, Il a fallu, pour
236 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
mener l'œuvre à bonne fin, tout le zèle de la Société et
les plus honorables efforts de plusieurs de ses membres.
« 11 ya long-temps déja que la Société chargea une
commission d'explorer un conduit souterrain, connu
dans le pays sous le nom de Cave des Anglais. M. Lunet,
secrétaire de la Société, qui s’acquitte de ses fonctions
avec un soin au-dessus de tout éloge, publia un mémoire
dans lequel il constata que la Cave des Anglais était un
aquéduc dont l’origine remontait à l’époque de la domi-
nation romaine, et qui avait, sans doute, alors servi à con-
duire à Rodez les eaux de Vors. M. Lunet à qui revient en
grande partie l’honneur du projet, c’est justice à le procla-
mer, invitait le Conseil municipal de Rodez à faire examiner
s’il était possible de restaurer l’aquéduc et ‘de le rendre à
sa destination primitive. Quelque temps après , en 1840,
M. Boissonnade, architecte du département, émit l'avis
que l’on pourrait se contenter d’une restauration par-
tielle et traverser la vallée de l'Aveyron au moyen d’une
conduite forcée. Le Conseil municipal refusa de voter des
fonds pour lexploration de laquéduc. Mais on n’aban-
donna pas l’idée de fournir la ville d’eaux potables.
M. Lunet renouvela, en 1851, sa proposition touchant
l’aquéduc romain. La Société nomma une nouvelle com-
mission qui fut présidée par M. Commier, ancien ingé-
nieur en chef des ponts et chaussées. Elle déclara, le
7 décembre 1852, qu’en réparant l’aquéduc romain et en
établissant un siphon de 100 mètres de flèche, on pour-
rait amener à Rodez des eaux saines et abondantes. Un
nouveau rapport de M. Lunet, et un très-bon mémoire de
M. Blondeau, professeur de physique au Lycée et membre
de la Société, complétèrent le savant travail de M. Boisson-
nade, et déterminèrent enfin le Conseil de la commune
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 237
à voler une somme de 4,000 fr. pour l’exploration de
l'aquéduc. Ç
« Dès ce moment, la science avait triomphé, Le rapport
de M. Romain, agent-voyer en chef du département, fut
de tous points favorable au projet de la Société. L’aqué-
duc est maintenant restauré en grande partie. Les
vallées qui séparent Vors de Rodez seront franchies au
moyen de siphons en tôle bitumée de Chameroiï. Le
dernier de ces siphons, qui n’a pas moins de 125 mètres
de flèche, est peut-être le plus grand qui ait jamais
existé. Bientôt Rodez recevra, tous les jours, 450 litres
d’eau pour chacun de ses 142,000 habitants, et la Société
aura assuré la conservation d’un monument historique
de la plus haute antiquité.
« M. Boisse, ingénieur des mines, a envoyé à la Société
la copie d’une esquisse de la grande carte géologique de
Aveyron. Cette carte présente assez de détails pour être
du plus grand secours aux savants, aux industriels et aux
agriculteurs. On aura une idée de limportance et de
l'étendue de ce travail, quand on saura que l’auteur y a
distingué vingt-six natures différentes de terrains par
vingt-six teintes spéciales, et qu’il n’y a pas, pour ainsi
dire, 4 kilomètre carré du département qui ait échappé
à son exploration, Les terrains primitifs ou cristallisés
qui forment, en quelque sorte, le noyau du département,
et.qui constituent notamment tout le massif du Lévezou,
y sont étudiés avec le soin le plus minutieux et subdivisés
en cinq natures de roches, distinguées chacune par une
teinte particulière.
« Les terrains de transition, si intéressants dans le
département de l'Aveyron par le terrain houiller qui
forme leur étage supérieur, y comprennent trois subdi-
visions et, par conséquent, trois teintes.
238 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
…. « Le terrain houiller y est surtout, et on en comprend
le motif, l’objet de l'étude la plus détaillée et la plus
consciencieuse. Toutes les plaques de ce terrain qui
affleurent au jour sont soigneusement indiquées ; leurs
moindres lambeaux sont exactement relevés, et leurs
relations avec les terrains avoisinants, si utiles à bien
apprécier pour les explorateurs de mines, paraissent
avoir été observées et notées avec autant de sagacité que
de précision.
« Le terrain de frias, qui comprend ces grès rouges
si fréquents dans le département et qui présente une
formation gypseuse dans l’arrondissement de St.-Afrique,
y est distingué en trois subdivisions par trois teintes.
« Le terrain jurassique, grande formation calcaire,
dont les cultures forment un contraste si frappant avec
celles des terrains à base siliceuse, y présente trois de ses
étages habituels, y compris le lias, et s’y trouve subdivisé
en cinq Zônes ou horizons par cinq teintes différentes.
« Le terrain tertiaire moyen, qui ne forme que de
petits lambeaux épars à la surface des autres terrains ,
au nord , à l’ouest et au sud-ouest du département , est
divisé en deux teintes.
….« Ces terrains alluviens, qui remplissent les bas-fonds
des vallées et forment quelques dépôts d’origine très-
récente sur le flanc des autres formations, comportent
également deux teintes. |
« Les roches éruptivesenfin, telles que les porphyres,
les basaltes, les trachytes, etc., qui se sont fait jour à
travers les autres terrains dans un grand nombre de
points du département, sont distinguées en six catégories
ou six teintes , et ont exigé peut-être, à elles seules, une
étude de détail plus minutieuse que tout le reste des
autres terrains,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 239
« M. Boisse n’a voulu rester, en aucune partie de son
travail, au-dessous de la tâche qu'il s’était proposée, et il
a eu le soin d'indiquer sur sa carte tous les gîtes de
minerais métalliques connus dans le département, en les
subdivisant, suivant leur nature, en quatre catégories.
« Il y a aussi indiqué les sources minérales, les prin-
cipales carrières et les diverses usines,
« Ily a marqué, enfin, les périmètres de toutes les
concessions, soit de gîtes de combustibles minéraux,
soit de minerais métalliques , instituées jusqu’ici.
« M. Boisse a joint à sa carte une feuille de coupes,
présentant sept coupes de terrains prises dans toutes les
directions , d’une extrémité à l’autre du département,
et combinées de manière à donner une idée exacte des
relations de superposition qui existent entre nos diverses
formations géologiques ; on y retrouve clairement la
trace des principaux mouvements que cette partie de
l'écorce du globe a subis à diverses époques, et on y re-
connaît la part qu'ont eue alternativement, dans la con-
figuration actuelle du relief du sol, les mouvements
internes de la croûte terrestre, et les grandes érosions
- qui ont labouré sa surface.
« Cet exposé rapide présenté à la Société par M. de
Nerville , ingénieur en chef des mines, qui en est
membre , suffit pour montrer tout l'intérêt scientifique
et l’incontestable utilité pratique du remarquable travail
de l’un des membres les plus instruits de ce corps
savant. » |
M. Hippolyte de Barreau a publié le 3°. volume de son
ouvrage intitulé : Documents historiques el généalo-
giques sur les familles et les hommes remarquables
du Rouergue, dans les temps anciens et modernes.
240 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« Dans cet ouvrage, M. de Barreau apprécie l’origine de
familles, les suit pas à pas dans leurs transformations à
travers les âges, étudie les grands personnages qu’elles
ont produits, indique le rang qu’elles occupaient dans
l’ancienne société, raconte leurs services éminents, le
relations qu’elles avaient entre elles , et revendique celles
qui, après avoir quitté la terre natale, sont allées grandir
sur un sol étranger.
« L'honorable Président de la Société des Lettres ,
Sciences et Arts de l’Aveyron n’a rien négligé pour rendre
son livre aussi complet que possible, et l’on peut dire de
lui que, non moins ardent que ces naturalistes qui
fouillent dans les entrailles de la terre pour retrouver les
antiques races des premiers habitants du globe, il est tout
aussi heureux lorsque, après bien des peines et des re-
cherches, il est parvenu à reproduire quelques-unes de
ces nobles lignées dont le nom, depuis des siècles, gisait
ignoré dans la poussière.
« M. de Barreau a divisé son ouvrage en deux parties.
Dans la première , il donne un coup-d’æil sur l’établisse-
ment féodal, pour servir d'introduction à l’histoire gé-
néalogique de la noblesse du Rouergue , et examine l’état
du pays avant la grande révolution qui en changea le
régime. Il y est tour à tour question de la propriété, de
la servitude, de l’origine des fiefs et de leur constitution ,
des droits féodaux, des justices seigneuriales, des lois et
coutumes, des guerres et combats privés, des commence-
ments de la noblesse et des progrès de sa puissance.
M. de Barreau continue en parlant de la chevalerie, des
croisades, des armoiries, des troubadours, des costumes
nationaux, de l'architecture féodale ; et, après un rapide
aperçu des causes qui amenèrent la fin du gouvernement
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 9U1
féodal, il termine par diverses remarques qui RE
l’histoire politique de la noblesse.
« Dans la seconde partie, le savant historien parle de
la noblesse’ moderne, celle de ei et de la Restau-
ration.
à Cette seconde partie contiendra une notice sur la
Légion-d’Honneur et un grand nombre d'articles biogra-
phiques sur les membres de cet ordre. ienragnsuite
des mémoires sur les anciens Templiers, sur. l'ordre, de
Malte, sur les autres ordres équestres existant, avant la
Révolution, sur les personnages du pays qui ont occupé
des emplois auprès des souverains, sur les évêques , tant
anciens que modernes, originaires du Rouergue, et sur
les hommes éminents de l’ordre civil et de l’ordre mi-
litaire., L'ouvrage se terminera par une notice sur les
anciens états du Rouergue et par une liste raisonnée de
tous les châteaux du pays, classés par cantons et par
arrondissements.
« Le quatrième et dernier volume des Documents his-
toriques et généalogiques ne tardera pas à être achevé.
« M. de Barrau, qui dirige la Société avec tant d'i in-
telligence et de. dévouement, ne s’est pas contenté de
donner un ouvrage. historique d’une grande valeur; il a
entrepris encore d'importants travaux sur les sciences
naturelles, et il vient de mettre la dernière main à la
Flore de lAveyron, qui était réclamée depuis long-
temps.
«La Société des Lettres , Sciences, «et Arts, a déjà
publié sept volumes de Mémoires, de.
« Le huitième est actuellemer mp: il con-
tiendra : sn NB ù
« 4°, Un travail inédit de l'historien Monteil :
44
249 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« 2°, Un rapportsur l'amphithéâtre et l’aqueduc romain
de Rodez, ayant conduit des eaux potables dans cette ville ;
« 3°. Des études surles mots patois qui dérivent. -de
anglais ; ‘
« 4°. Des études géologiques sur le département ;
« 5°. Une promenade scientifique au bassin d’Aubin ;
« 6°. Des prudes critiques sur une histoire de saint
pre de quelques projets d'amener des
aDICS à Rodez ;. 6
7x Le + volume donnera l'Histoire du Jan-
sénisme dans le Le ss
CALVADOS.
Vous pu à M. poulie délégué, et à M, J
Travers ; secrétaire de l'Académie des Sciences , des {s
et Bellés-Léttres de Caen , le résumé suivant des tra-
vaux de cette savante Académie : & |
« Dans la note que nous avons eu l'honneur de mettrez
l’apnñée dernière, sous les yeux-de l’Institut des provinces
t du Congrès des délégués des Socié s savantes des
EE nous disions que l Académie des Sciences, .
Arts et Belles-Lettres de Caen avait : sous presse un vo-
lume. Ce volume; publié vers le milieu de l’année, n’a
point paru inférieur aux précédents. Un des mémoires
qui le composent, ayant. été connu pendant l'impression ,
a eu COUP sur Coup. trois éditions : il est vrai que, ce
mémoire scientifique € st de notre confrère } M. Th. Du
Moncel. De À gs 7e Het
« Mais la nouvelle. püblication est aujourd’hui connue.
Plus de cent Sociétés correspondantes l'ont reçue; plûs. de
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 243
350 exemplaires ont, en outre, été distribués aux mem-
bres résidants, aux membres associés, aux bibliothèques
publiques. et aux journaux ; laissons à d’autres le soin
d'apprécier les divers travaux qui composent le volume
de1856, et ne parlons au Congrès. que ÿ ce que tous où
à peu près tous ses membres ignorent. É
« On a vu dans l’Annuaire de l institut des provinces
accepter deux legs de 12, 000 fr. chacun, quel i avaient
faits MM. Le Sauvage et Lair ; et que, grâce à cette double
libéralité, elle avait pu ouvrirun double concours. Ainsi,
sur la fondation de M. Le Sauvage, elle a offert un prix
de [à valeur de 800 fr. au meilleurim rt xémoire sur la ques-
tion suivante : Action de. d'électricité sur l'organisation
humaine. dans l’'étatde santé et dans l’état de maladie.
D’après. l programme , cè prix devait être décerné à la
fin de 4856. Le concours n’est pas encore jugé.
« La somme léguée par M. Lair à l'Académie et à la
Société d'A Agricu ulture de Caen qui doivent en toucher
alternativementsl rente annuelle, a donné le. moÿen
d'offrir un second prix, d’égale. valeur, au +
» moire historique sur le Parlement d Normandie, de-
puis” Rue à Caen , au m is. de juin 1589,
jusqu'à son relour à Rouen , en avril. «4594. Mais
c’est : seulement en 1858 que le CopgQUrs sera clos et que
le prix pourra être accordé. NE
En indiquant les matières principales traitées dans les
douze Fr à séan es me suelles de l’Académie , se
terminant à. celle & “juillet 4 18 56 qui clôt l’année aca-
démique 4855-1856 , nous trou on$ sommairement :
Pour les Éélvarés: — uT rapport de M. Du Moncel
2114 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
sur un savant ouvrage où M. le capitaine de vaisseau
Lartigue a exposé son système des vents;—une démons-
tration ,; par le même auteur, de plusieurs ‘solutions
qu'il a trouvées, our divers problèmes d'électricité ;
— un exposé, par le même, de ses découvertes ré-
centes , à l'appui duquel il a fait fonctionner un de ses
instruments pour rendre ses théories tout-à-fait sensibles
par. l'expérience ; —.un mémoire de mathématiques *
transcendantes , par M. Girault; — un travail plein de
faits curieux sur 1 intelligence des animaux, par M. Eu-
des-Deslongchamps ; — des recherches, fort étendues,
de M. Pierre, sur la distribution des. matières azotées
dans les différentes parties de la betterave ; — enfin un
traité de la rage, pa . Le Cœur.
« Pour les ArtS'ét les Lettr es : — un fragment de vo-
yage, intitulé : Venise et Florence.expliquant le génie
de leurs peintres ; — un épisode d’un romanfhistorique
tiré de l'histoire de la Normandie, à l’époque de Jean-
sans-Terre, par M. Courty ; — une analyse de prûnes
inédits du XIL°. siècle, en langue [rase attribués
à Mauri ice de. Sully À par M, Hippeau : — biographie
de "Pierre du Bosc , minis re du saint Évangile à Caen, de
1645 à1685, parde même ; — un morceau sur les colo-.
nies françaises | M sur la Guadeloupe , par
. Rabou;— Sur la démocratie athénienne, par M.
mr — ‘Tableau de la civilisation musulmane , ar
M. François ; — Frâgment d'uné histoire. de ne
par le même ; -—Sur la loi d'accroissement et de décrois-
sement de la population , par M: 6. Besnard D Rapport
eur l'ouvrage de M. Mat lin, intitulé + 2 La vie future, par
M. Roger; — Rapport de M. Lecerf, sur Le Devoir,
ouvrage de M. Jules Simon # __ Théorie de la traduction,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 275
par le même ;—Mémoire de littérature, à l’occasion de la
théorie de M. Lecerf, par M. Joly; —Mémoire en réponse
à quelques assertions de M. Joly, par M. G. Besnard ;
— Mon avis Sur la question des théories littéraires de
MM. Besnard et Joly, par M. TrAVeS ; — Extrait des
livres quon ne lit plus (analyser du. traité des Herma-
phrodits (sic) de Jacques Duyal, "médecin de la fin du
XVI, siècle et du commencement du XVII*.), par le même ;
— Fragment des Mémoires de Vismes, directeur de
. l'Opéra en 1778, rédigés et abrégés par Te même ; — Bio-
graphie de Jean Simon. Addition à la vie et aux œuvres
de Nicolas Vauquélin des Yvetéaux , et Mémoire sur les
patois , par le même ; — enfin des. +4 de vers, par
M**. Lucie Coueffin, M". de Monte an
Michaux et Vieillard. à à
« Plusieurs des mémoires ci-dessus mentionnés sont
d’une étendue telle, qu’il a fallu les lire en plusieurs
séances set 3 les séances ÿE été si nine PARA
La Socèté française d 7, die > sous lastive im-
pulsion de son illustre et infatigable Directeur, a tenu, en
1856) deux séances généralesfadministratives à Paris,
deux-Séances générales à la Rochelle, deux séances .
inistratives à Gournay (Seine-Infé] ieure), six séances
dministratives à Caen, une séance "générale à Chartres
et une autre séance au Mans.
Le Congri s archéo ogique de France a siégé pendant
six jours à Nantes #7 ,
La Société françaiseavait, en outre, été réunie pendant
quatre Jours à Louviers. Le Compte-rendu du Congrès
246 INSTITUT DES PROWINCES DE FRANCE.
archéologique tenu à Nantes ‘etdes séances générales
de Louviers est sur le point de paraître.
Le Bulletin monumental , publié par la Société , est
parvenu à son 23°. volume, et forme une des collections de
Mémoires archéolôgiques les plus intéressantes. Le 29°.
volume, publié en 4856, se compose de 680 pagés et
comprend, outre les chroniques etsles procès-verbaux
des séances, trente-trois mémoires d'un haut intérêt, la
plupart illustrés de figures. % “
La Société tiendra, en 14857, son Congrès archéologique
à Mende, le 24 août, et à Valence, le 2; du même mois. .
L'Association normande (4), qui se ‘composait l’année
dernière de 1720mer res, en a eu 4740 en 1856; elle
a tenu à Gournay (Se eine-Inférieure) son 24° Congrès
provincial agricole et industriel, préparé par les soins
de MM. Mabire et d’Ernemont, membres du Conseil gé-
néral, inspecteurs de PAssociation. Des séances des dis-
cussions pleines d'intérêt ; diverses exe jons agr
miques; un concours magnifique de best aux el
ments ritoird tels sont les faitssqui ont disb cette
” mémorable session, quis "est | lerminée pari
solennelle de prix, faite sous la présidence
Roy, préfet de lasSeine-Inférieure, par “un “banquet de
trois cents couverts el par des fêles pour lesquelles la
petite ville de Gournay avait voté 6,000 fr. Cette année,
l'Association tiendra#son Congrès provincial ann ue
Alençon (Orne), du 45 au 20 juilletss
En 1856 , l'Association s’est aussi réunieesix fois à
Caen, et une fois à Louviers, en séa ice administrative.ss
Ses recettes se sont élevées à on frs,
L
(1) Note de M. de Caumont.
Li
TRAVAUX DES xcanËS | Se 56. 947
Ses dépenses, à 11, 078 1
Les primes, Re et récompenses diverses acCot-
dées par l'ASs0 tion figurent pour plus de 5,000 fr.
dans le chapitre de la dépense. a
L'Annuaire imprimé en 1856, et qui a paru en janvier
1857, est, comme ses devanciers, un livre vraiment
inté ssant et cofposé de mémoires substantiels. Ce
volume , , qui comprend x@ et 575 pages, esi imprimé avec
*soin et illustré de vignettes sur bois. Après les mémoires
_et les procès-verbaux l es séances générales, vient, comme
dans les années précédentes , le chapitre des Nouvelles
de l'agriculture, des sciences, de l'industrie et des
arts, lequel renferme une série d'articles courts et bien
choisis sur des faits constatés en 1856 et qui intéressent
particulièrement la province. hi
Un chapitre. particulier est consacré à rendreggompte
des | COnCOHR agricoles en 1856 dans la province.
L'Art St {ermine,sselon l'usage, par desNotices
r les membres que l’Association a ré-
ires que Eu PR. | et n’en publie de
meilleurs, Nous approu vons beaucoup l'usage qu'elle à
adopté dé des donner dans un annuaire, qui est, non-
seulement reçu par tous ses membres, : mais que le public
recherche également, et qui devient chaque année plus
répandu.
é Société Late de Normandie (4) continue avec
(4) Note de M. de Caumont.
218 ne | PROVINGES DE FRANCE.
un grand succès $6s + et ses publications ; elle
maintient , grâce au talent de son Sec rétaire et de quel-
ques autres membres éminemment i struits, sa haute
position scientifique ; noush’avons qu'un regret à ex-
primer, c'est que ses Mémoirés ne soient tirés qu’à deux
cents exemplaires, et que l'échange avec les Sociétés
savantes en soit, par suite, assez réstreint. Toutes les
grandes Sociétés savantes de l'Allemagne, de u Pr 1sse ,
des Pays-Bas, de’Angleterre font un tel cas dés Mé-*
moires de la Société Linnéenne,; >aque quelques-unes ont
offert des collections de trente et quarante volumes in-4°.
pour obtenir la collection de la Société Linnéenne, arrivée
en 4856 au 10°, volume.
Ce volume, in-4°. de Lxxx et 343 pages, est un des
plus importants que la Société ait publiés. L'histoire de
” Ja Société, les rappor ts du Secrétaire sur ses. ‘travaux, et
les pro ès-verbaux de deux excursions occüpent les 80
pages” numérotées en chiffres! romains. On ee parmi
les notices , celle qui est: relative à l'organisa Lion du
Nautile flambé, par M. Vrolick, se e de l'Aca-
démie des Pays-Bas, accompagnée de deux gl des
ches. *
M. E.-Deslongchamps donne ensuite une note détaillée
sur des empreintes ow traces d'animaux observées
depuis long-temps au val d’Aubin, près de Trun, sur
des banñcs de grès intermédiaire (grès DC éloc de
une planche reproduit ces curieuses empreintes,
Un travail, de M. Suess, sur l’appareil brachial des
T'hécidées est suivi d’une Note sur le même sujet , par
M. E. DeSlongchaïnps (deux planclies). ”
La plus grande partie du volt ie est occupée par le
travail intitulé : Introduction al istoire naturelle des
TRAVAUX DES ACADÉMIE VEN 1856. 229
Brachiopodes vivants et fossiles, par M. Th. Davidson,
membre de l’Ins itut des provinces; ce travail est com-
posé de près. de 20 o pages, el accompagné de neuf grandes
planches renfermant près de 300 figures.
On remarque encore, dans ce volume, la Doscriplion
d’un nouveau genre de coquilles bivalves fossiles (Elig-
mus), par M. Deslongchamps; mémoire accompagné de
deuxplanches ; — des Observations sur la bolanique
de,la Manche (environs de St.-Lo), par M. l'abbé Talon:
— des Observations météorologiques de M. Le Boucher,
en 1851, 1852, 1853, 1854 et 1855 ; et plusieurs petits mé-
moires sur des coquilles fossiles, par M. Deslongchamps.
« ‘La Sociclé d'Agriculture, Beaux-Arts et Littéra-
ture de Bayeux, vous à dit M. le vicomte de Cussy,
son délégué, toujours animée du même esprit,on a pass
cessé de faire rogresser, dans la mesure de son influence
et de som pouvoir, le pl ogramme qu'elle s’est imposé.
Des réunions pour ‘éueidel : les questions le plus”à l'ordre
. du jour sont heureusement suivies : des expositions agri-
coles, des concours de charrues, des récompenses aux
serviteurs fidèles moralisent la population en lui faisant
dûment apprécier les avantages du travail et de la bonne
conduite. En un mot, cette Société, présidée par un
homme aussi honorable qu'érudit, M. le président Pezet,
qui consäére. ses loisirs à faire connaître l’histoire et la
législation de cette partie de la Normandie et l’histoire de
ses monuments les plus intéressants , “continue de mé-
riter la confiance de tous les gens de bien, amis de leur
pays. |
« La bibliothèque de Bayeux, bide confiée aux
soins éclairés de M. Æ. Lambert, s'est enrichie , en 4856,
à
à
NET
250 INSTITUT DES) PROVINCES DE FRANCE,
d'un nombre notable d'ouvrages dé choix dus, soit à la
- munificence du Gouvernement, soit à celle des particu-
liers. Son Musée a vu ses collections diverses également
augmentées, et_16S du, ‘es trouvent, dans
l'obligeance duMaborieux gar ien de ce précieux dépôt,
tous lès moyens possibles de satisfaire leur amour des
lettres et des beaux-arts. »
M: de Caumont vous a fait hommage de deux brothures
intitulées, l’ne : Le Castellum galle-romain de Lar-
cay, près de Tours, et l’autre : Note sur les murs
gallo-romains de Dax, toutes deux ornées de plusieurs
planches. Notre honorable Directeur n’a pas besoin de
mes éloges; vous voudrez tous lire, dans le Bulletin mo-
numental, l'intéressante description de ces beaux débris
«de la Gaule romaine, ebrvous joindrez vo$ protéstations à
ci l'auteur contre la: tendance , trop.
aujourd'hui, qu'ont certaines villes de vouloir étendre
leur enctinte aux dépens et respectables monu-
ments de l'antiquité. Espérons. que la conservation des
murs de Dax pourra se concilier avec les intérêts de cette
cité et que l'influence de lPAdministration supérieure
viendra sanctionner les réclamations si bien motivées de
M. de Caumont. j
M. J2 Travers vous a adressé sa Biographie de M. Louis
Du Bois, de Lisieux, dont M. Guizot a dit qi, savant
aussi laborieux que modeste , il s'était voué à l'étude
de tout ce qui peut intéresser la Normandie, sa patrie,
en ajoutant qu’il était connu par d'utiles travaux sur
Les antiquités el’ "stalistique de cette belle province.
L'œuvre de M, J. Travers se faitremarquer par toutes
les qualités qui distinguent cet écrivain.
ds À Re PT
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 251
ET | |
Vous avez reçu, de M.C. Brisson, membre de PAcadémie
de la Rochelle, un recueil de fables. Ag:
On remarque, dans les nombreuses fables qui le com-
posent, .la qualité du genre, c’est-à-dire, de la facilité,
de la clarté, une certaine élégance; elles peuvent se faire
lire, même après celles de nos grands fabulistes.
CÔTES-DU-NORD.
M. le vicomte Paul de Genouillac, délégué du Comice
central Agvoe de Dinan, vous a fourni, sur les tra-
vaux de cecomice, les renseignements suivants :
Cette, Société , qui réunit au chef-lieu de l’arrondisse-
ment les com ices de tous les cantons##un seul é*cepté ,
ignon , donne une vive impulsion à l’agricul-
ture, Chaque année, une fête agricole dans lun des
cantons vient stimuler le zèle des cultivateurs et réussit
presque toujours à leur faire abandonner quelques-unes
de leurs vieilles routines. Depuis peu de temps, on a vw
les instruments perfectionnés prendre faveur; laraire
Dombasle, la machine à battre, les coupe-racines, les
coupe-ajones, les pressoirs à nouveaux systèmes se trou-
vent maintenant en assez grand nombre dans plusieurs
communes , et ce progrès est certainement dû aux efforts
du Comice central. Un résultat non moins avantageux se
fait aussi remarquer dans les cultures. Les plantes sar-
clées commencent à prendre une. large place dans” Pas-
solement des terres; les prairies artificielles , pour'cela ,
ne sont pas négligées, et chaque année en voit augmenter
252 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la culture ; les conseils des comices obtiennent souvent
aujourd’hui ds faire rompre, après les coupes d’un an,
cet herbage#que la paresse et l’insouciance faisaient
garder trois où quatre ans. 4 À
Le drainage aété l’objet de mesures très-efficaces de la
part dû Comice. Une machine à fabriquer les tuyaux a
été achelée et confiée à un habile ouvrier ; des tuyaux
ont été livrés dans l'arrondissement à des prix réduits
au moyen d’une indemnité payée pu le Comice. Des
travaux ont été entrepris et exécutés" avec succès , et ce
n’est peut-êtrepas anticiper sur l'avenir, que de signaler
ceux qui sont en cours d'exécution. M. Larère, vice-
président du Comice, commence en ce moment un drai-
nage qui s’étendra sur 400 hectares. Le canton où il opère
est très-arriéré, les terres y sont très-humides. Nul doute
que cet exemple, n'aitela plus heureuse influence, en
faisant.voir les avantages de l’assainissement d'un sol que
l'humidité rend absolument improductif. M
Les grèves de nos côtes, et divers guenents dans l’in-
térieur des terres nous fournissent dés sables coquiliers
dont l’usage prend chaque année plus d’accroissement ;
c’est une source inépuisable de richesses pour ceux qui
peuvent y recourir sans des frais trop élevés. Malheureu-
sement on en fait souvent”äbus; trop fréquemment on
les emploie sans égard à leur valeur naturelle, ni à la
nature du sol où on les porte, et on néglige la fabrication
du fumier d’étable. La vente des pailles est un mal
contreJequel luttent les propriétaires ; mais la propriété
divisée, cultivée par le petit propriétaire lui-même, se
trouve sans défense: Après la diminution des litières
vient inévitablement la vente trop précoce des bestiaux
et, par suite, l'insuffisance du fumier d’étable, Le Comice,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 253
par les primes qu’il distribue à ses fêtes agricoles, combal
autant qu’il le peut cet Fete r * prrenl avec
succès,
Les détails contenus dans les procès-verbaux des con-
cours donnés en 1855 et1856 feront, sans doute, apprécier
les eflorts et les succès du Comice central de Dinan.
€” Douss,
Ë “ : ; é
* Danse compté/rendu par lui, des travaux de la Société
d'Agriculture de Besançon et de la Société d’Émulation
du département du Doubs, M. Bruand d’Uzelle s'exprime
ainsi :
« La Société d'Agriculture de Besançon à été station-
naire pendant plusieurs années, et .sés travaux ont été
peu. considérables. Pourtant, depuis 1854, elle a secoué
un peu son apathie, a apporté plusieurs modifications
à son réglement , et ses membres paraissent décidés
désormais à marcher plus fermement dans la voie du
progrès, et à appliquer les diverses améliorations qui
surgissent sur tant de points de la France.
« Le concours régional de 1854 a certes aidé à ce
mouvement, à cette louable tendance; mais j’oserais
dire que le voisinage d’une sœur, bien plutôt que d’une
rivale, la Société d'Émulation du Doubs, n'a pas été
peut-être absolument étranger à la nouvelle activité qui
semble devoir remplacer l’ancienne indolence. $
« Le territoire de Besançon offre, à 5 kilomètres en
amont de la ville, sur un plateau élevé de 150 mètres
environ, une plaine marécageuse, de près de 4 kilo-
mètre de large, sur plusieurs de longueur, et qui est
enlevée à l’agriculture, La plaine de Saône forme le
mt
254 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
premier gradin de l’arête qui nous sépare de la Suisse ;
les prairies quila composent n’offrent que de la laiche et
des joncs, et on les exploite enstourbières ; le peu de
produit qu’on pourrait en tirer autrement, et de qualité
très-inférieure , ne saurait souvent être enlevé à cause de
"l’abondance de l’eau qui recouvre parfois tout le sol, où
dans certains endroits on ne marcherait qu’en enfonçant
jusqu'à mi-jambe, et dont quelques autres partieStsont
entièrement inabordables." 2”
« La Société d’Agriculture a naturellement désiré
d'appliquer des essais de drainage sur cette localité
improductive ; grâce à l'inspiration de M. de La Peyrouze
de Bonfils, préfet du Doubs, et de M. Parandier, ingénieur
en chef des ponts-et-chaussées , des travaux ont été en-
trepris sous la dingetion de M. Jeannenot, ancien élève
du Comité agronomique de Versailles, Les avis n'étaient
pas | unanimes tout. d'abord sur les chances de réussite;
mais le résultat est venu donner gain de cause à M. Jean-
nenot. | ri
_ « Ces mêmes terrainsen’ auraient jamais pu trouver
d’amodiateurs à 40'fr. hectare, et l’on en offre actuel-
lement de 410 à 120 fr.
« Les agriculteurs de la localité, qui d’abord avaient
tourné, en dérision cette innovalion et avaient montré
même ün certain esprit d’hostilité au commencement
des travaux, ont été les premiers à changer tout-à-fait
d'opinion, même avant d’avoir pu s’assurer d’une manière
certaine de l'amélioration obtenue. .
« Du reste, comme toujours, il y a eu réaction : d’une
incrédulité blâämable, ils ont passé à une confiance peut-
être exagéree. On eût été heureux, il y a quelques années,
de trouver à vendre de ces terrains à raison de 300 fr.
&
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. |. dos
l'hectare ; aujourd’hui on en demande 1,200, 4,500 et
même 1,800 fr.
« La portion qu’on a affectée au drainage a élé divisée
en plusieurs lots : une partie a été drainée simplement,
sans autre opération; une autre a été drainée et éco-
buée; une troisième, drainée, labourée et marnée ;
enfin, on a läissé une petite portion sans toucher, afin
de maintenir tout à côté un point de comparaison entre
l’état ancien et la situation nouvelle ; mais, neuf mois après
le drainage qui avait été fait en juillet, c’est-à-dire dès
le mois d’avril suivant, nous avons pu constater que la
laîche et les joncs avaient été immédiatement remplacés
par des graminées. Un rapport circonstancié a dû être fait
par M. Jeannenot sur tous ces travaux et sur leurs résul-
tats. La Société d'Agriculture en a ordonné récemment
l'impression. Nous pourrons donc incessamment soumettre
ce document aux membres du Congrès.
« Je viens de prononcer le nom de la Société d’'Ému-
lation du Doubs ; j'aurais eu, sans doute, une délégation à
remplie en” son nom, et à vous, ret dre comple de ses
travaux, si ni0n départ de Besançon. avait été fixé le
jour même d’une séance qui ne devait avoir lieu que le
soir,
. « Cependant quoique, en | celte circonstance, je ne.sois
pas délégué spécialement, je ne crois pas devoir passer
sous. silence les œuvres de cette Société, dont j ’ai été l’un
des fondateurs, en 1840, le secrétaire pendant 10 ans
( de 1843 à 1853), et dont j'ai eu l'honneur d'occuper la
présidence annuelle en 1854.
« Depuis 1840, ses publications ont témoigné de son
utilité et du zèle de ses membres. Plusieurs mémoires
ont attiré l'attention du monde savant : je citerai ,
v$ M
4 a,
256 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCÉ.
en botanique, les notices de M. Grenier (auteur de la
Nouvelle Faune française, conjointement avec M. Go-
dron); en géologie minéralogique, les mémoires de M. A.
Delerre ; en archéologie, la notice de M. A. Delacroix
sur l’ancienne Alesia. En entomologie , un catalogue du
Doubs, publié par la Société, comprend plus de 4,700
espèces , et peut être regardé, je crois, comme le plus
complet de la province. Un travail de M. Delerre, sur
les porphyres des Vosges, a valu à la Société une allo-
calion de 600 fr. de la part du Ministre; la Monographie
des Lépidoptères nuisibles a oblenu deux médailles
d'argent : l’une, du Comité central d'agriculture, en
1850 ; l’autre, de la Société impériale d’horticulture du
Rhône, à son exposition de 1856. On peut n'être pas
de l'avis de M. Delacroix sur Alesia; mais, évidem-
ment, la question qu’il a soulevée est pleine d’intérêt ;
la manière dont il l’a traitée dénote du talent et des
études approfondies, et, selon moi, si M. Delacroix
avait tort sur un point, il aurait raison sur un autre, à
savoir qu’Alise, en Auxois, ne doit et ne peüt pas être
l’Alesia détruite par Jules César. Je ne iétendrai pas -
davantage sur un Sujet important que des hommes d’un
mérite transcendant sont en train .d’éclaircir, et cela
avec un talent que je suis loin d'égaler : je citerai
M. Quicherat, professeur à l’École des chartes, etc.
« Je mets sous les yeux de la Commission la livraison
de 4856, qui pourra donner une idée de la persévérance
avec laquelle les membres de la Société poursuivent la
tâche commencée en 1840, »
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 257
DRÔME.
M. l'abbé Jouve, chanoine de la cathédrale de Va-
lence, membre de l’Institut des provinces ; en expri-
mant, dans sa lettre du 13 de ce mois, » {ous les regrets
qu’il éprouve de ne pouvoir, à cause de la très-grave
maladie de l'évêque de son diocèse , venir prendre part
aux travaux du Congrès, donne les renseignements sui-
vants sur les travaux de quelques-uns de ses compatriotes
de la Drôme.
N'cite :
« 4°, Un Dictionnaire manuscrit (en deux volumes
in-4°. de 400 pages chacun), intitulé : Origine , signifi-
cation et étymologie des noms propres d'hommes et
de localités , disposés par ordre alphabétique , par
M. À. de Costou de Montélimart. C’est un travail fort in-
téressant, à cause des noms historiques dont il expose
l'origine et les diverses phases, et. qui , en dénotant
beaucoup d’érudition , suppose de lon ni, gues et patientes
T: Fe RE
recherches, très-curieuses d’ailleurs. v
« 2°, Un manuscrit, de 457 pages note, de M. l’abbé
Nadal, actuellement chanoine titulaire de Valence, in-
titulé : Les Adhémar et M°°. de Sévigné. Il s’agit de
l’illustre famille des Adhémar de Monteil (plus tard Mon-
télimart). Si l’on en excepte la partie simplèément généa-
logique, on peut dire que l’histoire de celte noble et
grande famille, qui tient en même temps au Dauphiné et
à la Provence; qui fournit, à la première croisade, un
Jégat du pape, dans la personne d’Adhémar, évêque du
Puy, à l'église, d’illustres prélats, et à l’armée, de
vaillants capitaines , était digne de devenir le sujet d’un
ÿ L2
258 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ouvrage spécial, lorsqu'on songe surtout que le nom et
l'existence d’une femme célèbre du siècle de Louis XIV,
M. de Sévigné, sont venus s’unir étroitement à elle,
pour lui donner un nouveau lustre et l’immortaliser, au
moment même où elle tendait à son déclin. Ce travail
inédit se recommande autant par la facilité et la clarté
du style que par les recherches consciencieuses el inté-
ressantes les il a donné lieu. Il est divisé en vingt-
six chapitres ; on y lit avec plaisir la Notice sur l’ancienne
église collégiale (aujourd’hui paroissiale) de Grignan,
attenante au château, et sur le chapitre insigne que les
Adhémar y'avaient fondé. ”
« 8°. Deux notices historiques, de M. l’abhé Vincent,
curé dans ce diocèse et membre de l’Institut historique
de France, sur les communes d'Etoile et de Livron,
près Valence. L'auteur, que le Conseil général de
Ja Drômé encourage dans ses recherches et publications
par sune allocation annuelle de 300 fr., a déjà publié
une dizaine de notices sur diverses autres communes
de ce département.” Ces petits volumes, imprimés à
Valence avec pea coup de soin, se distinguent par un
style de narration facile, coulant et imagé, sur un
fond de sdïné érudition, enrichi de détails curieux et
inédits. M. l’abbé Vincent est sur le point de terminer
deux notices complètes et beaucoup plus importantes que
leurs aînées : l’une sur la ville de Nyons-les-Baronnies ,
l’autre Sur celle de Montélimart.
« 4°. Enfin, M. l'abbé Nadal, cité plus haut, a publié
un beau volume in-8°. de 700 pages, intitulé : Histoire
hagiologique du diocèse de Valence.
« Quant à mon Dictionnaire d'esthétique, dit M. l'abbé
Jouve, je m’en rapporte à vos soins pour en faire mention
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 259
au Congrès, si vous le jugez convenable ainsi que de
EEE . . .
mon Guide Valentinois. »
Vous suppléerez, Messieurs, au laconisme de l'auteur
sur les deux savants ouvrages qu'il ne fait qu'indiquer.
DE V4
EURE.
M. Emile Colombel, secrétaire perpétuel de la Société
libre d'Agriculture , Sciences, Arts et Belles-Lettres
de l'Eure, nous a fait parvenir une note sur les travaux
de cette Société qui se préoccupe toujours, de la manière
la plus efficace, des intérêts agricoles de sa circonscrip-
tion” Depuis plusieurs années , ses efforts tendent surtout
à introduire dans les’exploitations rurales l'emploi des
machines à battre | propager le drainage , à faire com-
prendre aux campagnes l'importance des engrais, à en-
seigner et répandre les meilleurs procédés pour: leur
conservation et leur manipulation. #S
Les résultats qu’elle a eu à constater dans les concour
ouverts par ses soins démontrent qu’elle ne s’est pas épuisée
en vaines tentatives. On peut direé"aujourd’hui que, dans
les fermes, la cause des machines à battre éstgagnée. —
Pour les engrais, le progrès, quoique plus lent, est ce-
pendant remarquable et l’on a trouvé dans plusieurs
exploitations des installations irréprochables pour les
plates-formes et les fosses à purin. — Quant au drainage,
Ja Société ne s’est pas contentée des bulletins périodiques
qu'elle publie sur toutes les questions dignes de son
attention : elle a fait étirer plusieurs milliers de tuyaux
qu’elle donne en primes ou à prix réduit aux cultivateurs
qui adoptent'eet excellent moyen d'assainissement, Elle
260 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCÉ.
a pu , dans son concours de Pacy, en septembre dernier,
décerner huit prix et un plus grand nombre de mentions
honorables, pour récompenser des travaux vraiment im-
portants. Elle a cru devoir aussi, et c’est là une excel-
lente pensée, encourager les ouvriers draineurs, qui
manquent encore d'expérience et d’habileté et dont l’ap-
titude est si indispensable pour la bonne exécution d’un
drainage. Cinq primes ont reçu cette destination.
Il faut citer ici un travail que a Société est.en train de
publier et qui est l’œuvre de M Antoine Passy, son an-
cien président: nous voulons parlende: la carte géologique
du département de l'Eure , carte. précieuse. à plus d’un
point de vue et qui servira de guide certain pour l'appli-
cation du drainage. Le nom de son auteur suffit pour
en faire apprécier le mérite. D
Gette Société organise en outre, chaque année, un con-
cours pour le labourage et pour l’amélioration des bes-
tiaux , et, chaque année aussi, elle accorde des récom-
penses aux domestiques ruraux dont le dévouement et les
longs services ont mérité une distinction.
Enfin, on lui doit une innovation récente et qui est
destinée à avoir un grand retentissement en France , c’est
le concours de chevaux qu’elle a institué à Evreux à l’oc-
casion du Concours régional du mois de mai dernier.
Ave®ses seules ressources, et grâce à la généreuse ini-
tiative de M. le Préfet de l'Eure, son président, elle a
fait un essai, sans précédent jusqu'alors , et les résultats
obtenus permettent d'affirmer que cette épreuve réussie
sera pour elle un titre de gloire. Quoique l’époque ne
permit pas d'appeler à la lutte les poulinières, et fit crain-
dre que les étalons eux-mêmes ne pussent êlre facilement
déplacés pendant plusieurs jours, 94 élevêurs se sont
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 261
cependant fait inscrire, et 74 ont présenté des sujets pour
la "plupart admirables, Le rapporteur du jury d'examen
exprimait le vœu que l’État, frappé du succès obtenu,
voulüt bien subventionner ces sortes d’encouragements.
Nous ne pouvons que nous joindre à lui REY une même
pensée. &
Le Concours régional a été encore, pour la Société,
l'occasion de préparer une exposition de produits horti-
coles. Cette gracieuse exhibition, à laquelle les départe-
_ments voisins avaient élé conviés, élait le meilleur sti-
mulant pour les horticulteurs, et les prix € décernés ont
récompensé de véritables mérites. ï
vaux li téraires de la Société de l'Eure, dans'ces
temps, méritent une mention toute spéciale.
Où se E rap en effet, ajoute M. Colombel, la fa-
meuse découverte d’un cimetière mérovingien due à l’ima-
gination féconde de M. Lenormand, de l’Institut. La
Société désigna une commission pour examiner la question
soulevée par le savant archéologue, et deux rapports
remarquables , dont la publication fut accueillie avec une
grande faveur, mirent en lumière les résultats de l’en-
quête à laquelle on s'était livré. Depuis cette publication,
le silence significatif qui se fait, à l’Institut même, autour
de la brillante découverte, et de nombreux témoignages
venus de divers points de la science, prouvent assez que
la Commission est parvenue à jeter quelque jour sur cet
étrange mystère.
La Société a publié, dans son dernier lécueil, un ou-
vrage-important de l’un de ses membres, M. de Beau-
repaire; c’est l’Histoire de la vicomté de l'Eau “de
Rouen. Éditer de pareilles œuvres, c’est acquérir des
droits à l'estime de tous les amis de la science #
=
262 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
MM. Léon Métayer et Gardin fils vous ont fait h hop
mage de leur deuxième rapport sur la découverte de
constructions et sépultures gallo-romaines dans la com-
mune de Menneval , près Bernay.
GIRONDE.
La Société Linnéenne de Bordéaut, représentée au-
près de vous par M. Paquerée, à commencé dignement,
cette année, la publication de Ja 3°. série de ses actes,
en insérant dans son 24°. volume elques travaux scien-
tifiques remarquables , parmi fie on peut citer le
L° el der Mel EN pplément au Catalogue les plante Hola
nérogames de la Dordogne, par. M. Moulins , , pré-
sident ; — Prodromus Lichenam Galliæ et Algeriæ,
par le docteur Nillander; — une Monographie du genre
Thara du dotteur Walman, de Stockolm , traduite du
suédois par le savant auteur de l'ouvrage qui précède :
—une Monographie du genre Testacelle, par MM. Gas-
siès et Fischer ; — enfin, les Relations d’un voyage
d'exploration dans l'ile de Crète, entrepris sous les
auspices du Muséum d'histoire naturelle de Paris, par
M. Raulin, professeur de géologie à la Faculté de Bor-
deaux, ancien vice-secrétaire de la Société géologique de
France , etc.
son Excellence le Ministre actuel de l’instrüction pu-
blique a gracieusement accordé à la Société Linnéenné
de Bordeaux une somme de 1,000 fr. , pour subvenir aux
frais que nécessitait la gravure d’une Carte géolôgique
‘qui accompagne cêt important travail. Cette Compagnie,
comme on le voit, travaille sérieusement ; "chaque jour,
le cercle.de sa correspondance s'agrandit et, grâce à son
LÉ EE. -
. TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 263
influence , le goût des sciences naturelles se propage au
milieu d’une population nombreuse qui, il ya quelques
années à peine, se livrait exclusivement au comme ce et
aux pratiques Surannées d’une agriculture routinière.
Enfin ; 1 Société Linnéenne n'es! pas étrangère au SuCCès
qu ‘obtient le Comité régional, que la Société impériale
d’acclimatation vient de fonder à Bordeaux. 3
MM. Marionau et Paquerée, auraient voulu présenter
un rapport sur les travaux des sections du Sud-Ouest
de l’Institut des provinces et de la Société française
d'archéologie , mais les documents leur ont manqué. Ces
Messieurs ont dû se borner, en conséquence, à constater
le zèle et l’activité des hommes éminents qui les com-
posent. Le mandat dont leurs délégués ont été honorés
n’est ainsi qu'un témoignage de l'intérêt sympathique
qu ‘ils rennent aux savantes recherches du Congrès.
Parmi les publications faites dans le département de la
Gironde, votre rapporteur doit vous signaler :
4°. Une Instruction simplifiée pour l'essai et le choix
des eaux d'irrigation, par le professeur d'agriculture
de la Gironde, chargé de linspection agricole de ce dé-
partement.
Cette brochure contient de précieuses indications pra-
tiques, à l'usage des cultivateurs qui voudront convertir
leurs terres es arables en prairies naturelles: :
*. Des, T4 pratiques sur l'art de llessée ‘her, par
è, mar RUE Ch. de Bryas. “1
s 6 udes , qui sont le fruit du travail éclairé d’unx.
homme compétent , forment la 4°. partie de ses publi.
cations sur 14 même matière , et contiennent la relation
æ #.,
264 INSTITUT DES PROVINCES DE ii «
d’un voyage par lui fait en Angleterre, en Irlande, en
Écosse et dans le pays de Galles.
ee.
; ILLE-ET-VILAINE.
Il y a un an, M. Amédée Bertin, dés pres de
vousspar la Société d'agriculture et d'industrie d’Ille-et-
Vilaine, vous donnait un aperçu dé l'état agricole de ce
département. dus
M. le vicomte Paul de Genouillac, délégué actuel de
cette Société, vous annonce que , dans le courant de
cette année, les travaux de lagriculture ne se sont
point ralentis. Ainsi, en 4852, trente-deux comices vous
étaient signalés; et, au mois de septembre 1856, qua-
rante comices donnaient des fêtes agricoles dont les ré-
sultats constatent, sur plusieurs points, des progrès pe
La Société n’est point étrangère cetle actions, sou-
vent elle a provoqué et encouragé les efforts des co-
mices. Elle-même a pris un nouveau développement :
aujourd’hui elle compte plus de deux cents membres
habitant les diverses communes, même les plus éloignées
du chef-lieu du département où se tiennent ses séances.
Le Journal d'agriculture pratique, qu’elle publie,
répandu à peu de frais dans la campagne, y fait connaître
les progrès de l’agriculture et signale aux cultivateurs les
améliorations dont leurs terres sont susceptibles. Dans
les séances mensuelles de la Société , des questions à d'un
véritable intérêt local sont discutées. C’est ainsi qi , c
année , l'amélioration de la race bovine. SE lé, l'objet
de sérieuses contestations. Cette fois … “encore. on à
opposé à l'amélioration obtenue par des croisements
ke,
celle qu’on obtient par sélection. L'on a voulu exclure
F2 s
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 265
äes concours le taureau auquel on reprochait d’être issu *
d’un métis, et, sur-ce point, s’est élevée la question de
l'ancienneté de la race Rennoise. Ces discussions souvent
sans solution , si elles n’aboutissent pas immédiatement ,
portent cependant des fruits et excitent, des deux parts,
les contradicteurs à faire triompher leurs opinions par
la production, dans, les ia a d'animaux perfec-
tionnés.
Chaque année, un concours est donné dans l'un des
arrondissements du département. En 1856, il avait lieu
à Montfort. Le compte-rendu de cette fête, compris aux
numéros du journal des 2 et 16 novembre dernier, fait
voir l’impulsion que la Société imprime à l’agriculture du
pays, et combien déjà on peut constater de progrès réalisés.
Des.plantes sarclées, des prairies artificielles , se trouvent
aujourd’hui dans des terres que l’on croyait impropres à
ces cultures. Les engrais étrangers, le noir-animal , le
guano, le sablon coquillier, la chaux, les marnes de
mer, sont transportés, mais toujours à trop grands frais,
dans les campagnes. Ces essais font, chaque jour, dé-
plorer davantage l’état si impraticable des chemins
ruraux. Le drainage a été opéré avec succès Sur de
grandes étendues ; la Société fait tous ses efforts pour
développer de plus en plus ce moyen. d’assainisse-
ment dans un pays où se trouvent tant de. terres
froides et humides. Les primes données aux concours
de bestiaux sont un puissant mobile auprès des culti-
valeurs ; aussi de nombreux prix figurent-ils au pro-
gramme pour la race des vaches laitières, qui constitue
une portion considérable des produits du département.
La race porcine, non plus, n’est pas négligée; la So-
ciété croit devoir faire de nouveaux efforts pour substi-
42
266 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
tuer à celle du pays les belles races de divers comtés
de l’Angleterre.
La fabrique si remarquable d'instruments agricoles
de M. Bodin met la Société à même de propager l'emploi
de ces nouveaux moyens d'action: c’est ainsi que la plu-
part des primes sont transformées en instruments per-
fectionnés.
La ‘Société essaie aussi de répandre.dans les cam-
pagnes des connaissances positives sur l’agriculture.
Elle engage les instituteurs primaires à donner des
notions à leurs élèves, et à ouvrir des conférehces agri-
coles le dimanche. Des ouvrages élémentaires d’agricul-
ture, des abonnements à des journaux agricoles , ont
été distribués en primes au concours de 14856: de
nouveaux encouragements sont inscrits au progrämme
du concours de 1857.
Outre la publication du Journal d'agriculture pra-
tique, paraissant le 2 et le 16 de chaque mois, et dont la
collection, pour 1856, vous a été offerte par la Société
d'agriculture et d'industrie ; des publications faites par
des membres de cette Société ne doivent pas être ou-
bliées. M. Malagutti,-doyen de la Faculté des Sciences
de Rennes, a fait paraître en 1856 la suite de son Cours
de chimie agricole, et, au commencement de cette
année, un Petit cours de chimie agricole à l'usage des
écoles primaires. M. Bodin, directeur de l’Ecole d’agri-
culture de Rennes, a publié, en 4856:
4°, La troisième édition des Eléments d'agriculture,
ou leçons d'agriculture appliquées au département d’Ille-
et-Vilaine ; so
2°. L’Herbier agricole, pour les élèves des Trois-
Croix et ceux de l'Ecole normale, avec 110 figures ;
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 267
8°. Des Lectures el promenades agricoles pour les
enfants des écoles primaires ; |
L°. Enfin on doit à M. Gagon, conseiller. à la Cour,
une brochure, récemment imprimée, sur l'Agriculture
de l’ancienne province de Bretagne.
Ces divers ouvrages et ceux non moins populaires de
M. Bertin, répandus dans le département avec le concours
de la Société, y produiront sans doute d’heureux résultats
et sont, au surplus, une nouvelle preuve du zèleet de la
bonne volonté de leurs auteurs, aussi bien que de l’em-
pressement de la Société à profiter de tout ce qui peut
hâter les progrès de l’agriculture. |
L'intérêt que vous portez à toutes les institutions qui
se rattachent à l’agriculture sera l’excuse d’une digression
à laquelle je crois pouvoir me livrer : le nom de M. Bodin
a été prononcé dans la note qui précède. Ce ne sera
donc pas sortir tout-à-fait de mon sujet, que de tran-
scrire ici les détails fournis à votre rapporteur sur
l'école d’agriculturesque cet agronome distingué dirige
avec tant de succès. Quoique déjà une partie de ces
détails soit connue de plusieurs d’entre vous, il m'a
paru utile de les reproduire, en les rapprochant des ré-
sultats nouvellement obtenus ; vous jugerez mieux des
progrès que j'ai à vous signaler. Aujourd'hui d'ail-
leurs que le Gouvernement se propose d'introduire l’en-
seignement agricole dans les écoles normales primaires ,
il m'a semblé que des documents sur une importante
école d'agriculture, quoique sa création remonte à 1840,
auraient en quelque sorte le mérite de l’actualité.
Un homme dont la carrière a été trop courte, M. Le-
grand, recteur de l’Académie de Rennes, constamment
268 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
occupé de faire pénétrer une instruction solide dans les
campagnes, eut l’idée neuve et féconde d’allier l’ensei-
gnement de l’agriculture à l’enseignement primaire. Il
était convaincu que l'instruction primaire ne serait pro-
fitable qu’autant qu’elle se rattacherait aux besoins des
cultivateurs et à leur profession. En effet, l'instruction dé-
pourvue d’une application spéciale, et donnée incomplète-
ment, devient plutôt un fléau qu’un bienfait pour la société.
Lorsque le jeune paysan, en apprenant à lire, s’habi-
tuera aux idées de théorie agricole raisonnée, il ne dé-
daignera plus la profession de son père et restera Î fermier
comme lui, mais avec cette différence que les bons prin-
cipes qui lui auront été donnés par son maître lui per-
mettront de tirer un meilleur parti du sol qu'il cultivera.
Pour arriver plus sûrement jusqu'aux élèves, M. Legrand
pensa qu'il fallait d’abord instruire les maîtres ; il fit, en
conséquence, tous ses effol ts pour unir l’enseignement agri-
cole à l'instruction qui se donnait à l’École normale pri-
maire récemment fondée à Rennes, et réunissant les élè-
ves-maîtres des cinq départements de l’ancienne Bretagne.
Cette vaste combinaison, qui, au premier abord, ne
fut appréciée que de bien peu de personnes, avait besoin
d’être appuyée fortement par l’autorilé. Des hommes
éclairés et désintéressés sollicitèrent le Gouvernement,
qui accorda quelques secours et permit de fonder un
cours d'agriculture à l'École normale.
Ce n’était pas assez. La volonté ferme de M. Legrand
suppléant à ce qui manquait d’ailleurs en appui et en
ressources, on obtint enfin du Gouvernement l’autori-
sationde louer une petite ferme, et quelques fonds furent
votés par le Conseil général pou r cet objet. +
La terre de Gros-Malhon, d’une étendue de 8 hectares
“TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 269
seulement, et située tout près de l’École normale, fut
donc prise à bail en 1832.
Une si petile ferme paraît bien peu de chose pour une
entreprise de ce genre ; les bâtiments étaient, en outre,
comme ceux de presque toutes les fermes de Bretagne,
en mauvais état ét mal appropriés à leur destination.
"C'était commencer avec des difficultés de toutes sortes et
dans une position où plus d’un se fût découragé.
Cependant, on avait proposé à M. Bodin de créer et
de diri er. l’école projetée. Il venait de passer dix-huit
mois à l'école de Grignon, et était revenu cultiver quelques
arpents de terre que possédait son père dans le départe-
ment de la Sarthe. M. Bodin crut la tâche au-dessus de ses
forces; avant d'essayer de l’accomplir, il voulut retourner
pendant six mois à Grignon, où il trouva dans les leçons
de l’habile directeur ce qui po lait encore lui manquer.
Il arriva donc à Rennes en octobre 1832. Il commença
à l'École normale des leçons d'agriculture théorique, et
mit la petite ferme en état de servir bientôt de base à ces
leçons. |
D'abord, les personnes qui examinèrent de bien près
Ftcbrie furent les seules qui ne trouvèrent pas cette |
petite école trop mesquine et presque ridicule, Les débuts
inaperçus, pour ainsidire, furent probablement une chance
de succès. Si l’école eût été plus, vaste et mieux installée,
on eût été plus exigeant , et quiconque a mis la main à
l'œuvre sait que les succès en agriculture ne peuvént être
que lents. D’un autre côté, une position aussi humble. ne
pouvaitexeiter l'envie, et l’on sait encore à quelles jalousies
sont enbuite ceux dont la position peul faire ombrage.
La troisième année "quelques élèves internes furent
admis gratuitement à la” ferme, et, les ressources n'étant
270 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
pas suffisantes pour les entretenir, M. le Ministre de
l'agriculture accorda 1,800 fr. pour la pension de six
jeunes cultivateurs. Quoique pris au hasard, les premiers
élèves eurent des succès, et d’autres sujels se présen-
tèrent bientôt.
Tous les essais ayant à peu près réussi et les cultures
ayant été appréciées, l’utilité d’une école d’agriculture
ne fut plus contestée, non-seulement dans ses rapports
avec l’École normale, mais aussi et plus particulièrement
pour l’avantage de l’agriculture.
On songea donc à donner plus d'extension N l'élablis-
sement, et le Conseil général, sollicité par quelques-uns
de ses membres dévoués aux intérêts de Pagriculture ,
nomma une commission pour faire un nouveau bail avec
le propriétaire de la petite ferme, ou & louer une lerre
plus considérable, gg
Heureusement pour l'avenir de l’école, ces Messieurs
avaient compris toute l’importance de leur mission, et,
malgré le peu d’étendue des pouvoirs qui leur étaient
confiés , ils n’hésitèrent pas à louer la ferme des Trois-
Croix, d’un prix de fermage annuel de 3,500 fr.
Le Conseil général avait fixé aux membres de sa Com-
mission une allocation de 2,000 fr. seulement ; le sur-
plus dut être acquitté par M. Bodin. Du reste, cet
arrangement plaçait ainsi le directeur dans la position
d’un fermier , et l’entreprise n’inspira que plus de con-
fiance,
Le bail des Trois-Croix fut continué jusqu’en 1850. A
cette dernière date, il fut renouvelé pour quatorze années,
avec une augmentation de fermage de 500 fr. , et une
autre ferme, nommée Coëtlogon, fut ajoutée à l'école.
Ces deux fermes, réunies et contiguës , forment une
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 271
étendue de 65 hectares, que M. Bodin loue entièrement
pour son compte, moyennant 8,000 fr. Le département
lui donne, sur ce prix de fermage, une indemnité de
2,000 fr. et paie la pension de six boursiers.
M. le Ministre de l’agriculture et du commerce accorde
aussi à l’école douze boursiers.
Les bâtiments des deux fermes, mal appropriés aux
besoins de l'exploitation, ont dù être augmentés. M. Bo-
din à fait construire, à ses frais, très-simplement et
économiquement, des étables et autres bâtiments, et les
deux fermes entretiennent soixante bêtes à cornes et six
chevaux. |
Une. fabrique ‘d'instruments aratoires fut annexée à
l’école. On lui doit en Bretagne la connaissance et l’usage
des instruments perfectionnés, et maintenant elle en-
voie ses produits dans toutes les parties de lasFrance.
Cette fabrique, qui commençait, il y a vingt-deux ans,
avec un forgeron et un menuisier, occupe aujourd'hui
plus de cent ouvriers , et produit, chaque année, environ
quinze cents instruments.
Les leçons d'agriculture avaient été interrompues à
l'École normale, en 1840, par des circonstances indé-
pendantes de la volonté de M. Bodin. Sur les instances
de l'autorité départementale et de M. le Recteur de
l’Académie, elles furent reprises en janvier 1856.
Les élèves de l'École normale sont amenés deux fois
par semaine à l’École d'agriculture, dont ils suivent les
travaux, tout en recevant les enseignements théoriques
qui s’y rattachent.
M. de Genouillac vous. annonce que déjà les leçons
reçues par ces élèves ont produit de bons effets et donnent
de justes espérances pour l'avenir; mais,sselon lui, il est
272 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
à regretter qu'une autre école normale, celle qui a été
fondée à Ploërmel (Morbihan), par M. l'abbé Jean-Marie
de La Mennais , et qui fournit aussi de nombreux insti-
tuteurs primaires aux cinq départements de la même
province, ne puisse pas profiter, comme celle du
département d’Ille-et-Vilaine, des avantages que lui
procurerait la fréquentation d’une école d’agriculture
voisine de Ploërmel.
M. Amédée Bertin, ancien sous-préfet de Fougères et
ancien représentant d’Ille-et-Vilaine, dont vous con-
naissez tout le zèle pour l’agriculture , a fait hommage
au Congrès de diverses brochures, savoir : 1°. Statistique
des subsistances et des comices agricoles (deux vo-
lumes) ; 2°. le Credo agricole, 8°, édition, entièrement
neuve; 3°. Infériorité de la France en agriculture ;
moyen de la faire cesser en créant l’enseignement
agricole rural général, permanent, sur place, à
domicile et énpublic; 4°. Réforme agricole ; moyen de
faire cesser l'infériorité de la France en agriculture.
A cet envoi, M. Bertin a joint, à l'adresse de M. le Pré-
sident du Congrès, la lettre suivante, dont je dois vous
donner lecture, parce qu’elle résume les vues de son
auteur el qu’elle annonce, en même temps, comment il a
lui-même mis en pratique ses recommandations :
« Ne pouvant être à Paris au moment de la réunion
du Congrès des délégués des Sociétés savantes, j'ai
l'honneur de vous adresser, pour en faire hommage au
Congrès, divers écrits dont quelques-uns répondent , je
crois, à trois des questions.posées dans le programme de
la session de 4857. Pour moi, cela ne fait aucun doute ;
mais je sais combien il faut de temps pour amener la
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 273
conviction dans les esprits, même lorsque l’on peut
invoquer le succès à son appui. Un petit écrit, que je
vous adresse pour être distribué, intitulé : Réforme
agricole, résume mon système, mes moyens et leurs
résultats; il répond à la 2°, question du programme. Je
fais l'expérience de tous ces mécanismes dans deux
communes d’un esprit différent : dans l’une, à Montaigu,
tout marche à merveille: les plus anciens, comme les
plus jeunes, sont animés des meilleures intentions ;
60 personnes y ont régulièrement suivi les conférences
du dimanche, et, comme ce ne sont pas toujours les
mêmes , 8300 au moins y ont assisté; 40 ménages sont
inscrits pour la lecture de la bibliothèque, mais un plus
grand nombre prennent part à cette lecture. A Sl.-
Germain, qui est cependant la commune que j'habite,
cela va moins bien; les habitants sont plus mal disposés,
mais, néanmoins, ils suivent l'impulsion donnée.
« Dans les deux communes, la question de la fabri-
cation des fumiers est une question résolué,; mise en
pratique par beaucoup de cultivateurs et qui sera très-
promptement vulgarisée ; et cependant tout cela date
d'hier; c’est l’œuvre de mes Opuscules et du Calendrier-
affiche, qui n’est qu'au numéro 40; car les conférences
du dimanche ne sont assez nombreuses, pour produire
de l'effet, que depuis le mois de novembre et même
depuis février, et elles ne réussissent pas encore à St.-
Germain. |
« J’ai donc raison de dire que, quelque moyen d'en-
seignement que l’on emploie, pourvu qu’il y ait repe-
tition à domicile et en réunion, il y a succès, parce
qu’il y à agitation agricole entretenue. Et, en effet,
dans ces deux communes, et même dans les communes
97h INSTITUT DES PROŸINCES DE FRANCE.
voisines, on ne parle que d'améliorations agricoles dans
toutes les conversations. Le jardin-agricole-école que
j'ai créé, attire beaucoup l'attention des habitants, et
sera visité par un grand nombre de personnes qui y
viendront de très-loin.
« Que le Gouvernement crée un Moniteur-agricole-
affiche illustré; qu’il fasse prendre aux Préfets des
arrêtés de police sanitaire sur la tenue des fumiers
(voir celui que j'ai formulé page 167 des Comices agri-
coles), l'agitation agricole générale naîtra par ces
deux seuls faits; ce sera la meilleure préparation à
létablissement et au succès des autres moyens que je
propose et que je mets en pratique. Le droit de l’admi-
nistration, dans cette matière, n’est pas douteux : si
j'étais maire ou préfet, je n’hésiterais pas à prendre un
_ arrêté sur cette matière. C’est la meilleure solution des
deux questions 6 et 7 du programme du Congrès. L'année
dernière, lorsqu’au Congrès vous énonçâtes le titre de mon
projet d'arrêté sur la bonne tenue des fumiers rendue
obligatoire par mesure de santé publique, un sourire
assez général , peu favorable à ce projet, accueillit vos
paroles; j'espère que, cette année, l’idée, étant présentée
par le Congrès lui-même , recevra un meilleur accueil, »
INDRE-ET-LOIRE.
Vous avez regretté , Messieurs, que la Société archéo-
logique de Touraine , dont les communications sont tou-
jours si importantes, n’ait pas été, pendant cette session,
représentée au milieu de vous. Je dois cependant men-
tionner l’envoi, qui vous a été fait par M. André Salmon,
vice-président de cette Société, d’une publication inti-
TRAVAUX DES "AcADÉIES EN 1856. 27b
tulée : Marché fait avec des maçons pour la constr'uc-
tion de certaines parties du château de Chambord.
Cet intéressant document, qui se rattache à l’histoire
de l’un des plus magnifiques châteaux de France, porte
la date du 9 mai 1544.
LOIRE.
Une société nouvelle, qui a pris le titre de Société
impériale d’agriculture, industrie, sciences, arts et belles-
lettres du département de la Loire, s’est formée tout ré-
cemment à St.-Étienne, nouveau chef-lieu de ce dépar-
tement ; elle ne pouvait encore vous faire connaître ses
travaux , «et son délegué a dû se borner à vous remettre
un exemplaire de ses statuts. Les noms des membres
distingués qui composent le bureau de cette société pour
1857, et celui de son délégué actuel, vous permettent
de compter, pour les sessions ultérieures du Congrès,
sur une active et utile collaboration.
Dans le bulletin de la Société des sciences naturelles
et des arts de St.-Étienne, publié en 1856, j'ai remarqué,
outre le compte-rendu de chacune des séances de cette
société, et diverses planches se rattachant à la botanique
et à des sujets de tératologie : 1°, une notice nécrologique
sur M. Barthélemy Courbon , ancien président de la
Société, par M. de la Tour-Varan; 2% le.compte-rendu
des travaux du Congrès des délégués des Sociétés sa-
vantes de France pendant sa session de 1855. Ce remar_
quable travail, très-lucide et très-complet, est l’œuvre
de M. d’Albigny de Villeneuve, secrétaire et délégué de
la Société , aujourd’hui membre de l’Institut des pro-
276 INSTITUT DES PROVINGES DE FRANCE.
vinces. Permettez à votre rapporteur de regrelter que
nos collègues du Congrès ne prennent pas généralement
l'habitude de rendre compte à leurs compagnies de tout
ce qui se passe dans cette enceinte pendant vos sessions.
Les Sociétés représentées au milieu de vous connai-
traient beaucoup plus tôt l'importance, toujours crois-
sante, de vos travaux, et pourraient ainsi, avant la
publication de votre Annuaire, profiter de vos enseigne-
ments, se conformer à vos recommandations et pré-
parer, pour l’année suivante, la solution des questions
restées indécises, ou des questions nouvelles sur les-
quelles vous auriez appelé leur attention.
Le bulletin de la Société des sciences et des arts se
termine par la résolution qu’a prise cette société de se
réunir à la Société agricole et industrielle, nouvellement
établie à St.-Étienne, pour ne former avec elle qu’une
seule. et même compagnie.
+4 LOIRE-INFÉRIEURE.
Dans une de vos séances, M. Bizeul, de Blain, dé-
légué de la Société archéologique de Nantes, vous a lu
la note suivante :
“ «Il ne vous a pas été rendu compte, l'an passé, des
travaux de la Société archéologique de Nantes pour 1855.
de ne puis le faire ‘aujourd'hui, mais je crois bon de
vous dire que cette Société a continué: avec régularité
ses séances mensuelles, et que ces séances-ont presque
toutes présenté d’intéressants travaux, ayant principa-
lement pour objet des recherches archéologiques et to-
pographiques dans le pays Nantois et dans le Bas-Poitou.
« Le même zèle, les mêmes travaux n’ont point fait
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 977
défaut en 1856. M. le baron de Wismes, qui prépare
un Album du Maine et de l’Anjou , remarquable par de
très-beaux dessins des monuments principaux de ces
deux provinces, nous a lu le texte qu’il a joint à Ja vue
du château-de Lassay , texte plein d'intérêt par la de-
scription du monument, et plus encore par la mention
fort curieuse et piquante des personnages célèbres qui
l'ont habité, |
« M. de La Borderie, l’un des élèves les plus distin-
gués de l’École des chartes, chargé à Nantes de la clas-
sification des archives historiques et ducales de la pro-
vince de Bretagne, s’est. occupé de revoir le procès des
quatre malheureux gentilshommes bretons décapités à
Nantes, en 1720, comme rebelles à l’autorité du roi;
il a fait sur cette matière un travail de longue haleine,
» et d'autant plus intéressant qu’il pourra jeter un jour
tout nouveau sur cette affaire, et amener à discerner
les différences et le peu de connexion qu’elle présente
avec la conspiration de Cellamare et les intri igues de la
duchesse du Maine,
« M. Bizeul, de Blain, a lu le commencement d’une
description de l'enceinte romaine de Nantes dans les
fondations de laquelle on a retrouvé des sculptures,
des inscriptions, des pièces d’architecture, comme en
tant d’autres villes. Cette enceinte, dont il existe encore
d'assez petits fragments, mais dont on peut presque
partout reconnaître le périmètre, était à petit pont
et à cordons de briques.
« M. de La Borderie nous a raconté, dans plusieurs
séances, un voyage archéologique fait en Basse-Bretagne,
à Landernau, Roscofe, St.-Pol-de-Léon, St.-Erbot.
etc, Nous espérons que ces récits pleins d’intérêt seront
278 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
reproduits dans nos Mémoires, et prouveront que cette
région si reculée de notre péninsule bretonne, que ce
Quimper-Corentin , que ce Landernau , trop souvent
l’objet des quolibets parisiens’, méritent qu’on ne s’écrie
pas avec le bon, mais malin La Fontaine :
du;
Dieu nous préserve du voyage !
« La réunion, à Nantes, du Congrès archéologique de
France avait stimulé notre zèle. Nous avons hâté l’éta-
blissement de notre musée dans l’ancienne et grande
chapelle de l’Oratoire. Le catalogue en a été rédigé et
imprimé en moins de quinze jours, grâce au zèle si
actif de MM. Parenteau et Armand Guéraud, Ce cata-
logue , à beaucoup d'articles duquel les auteurs ont joint
des notes explicatives, toujours utiles, souvent cu- :
rieuses, mentionne 3,825 objets, dont 1,544 monnaies
et médailles anciennes et modernes, et 2,281 en terre
cuite, pierre, plâtre, bois, métal; des plans, cartes, des-
sins, gravures, portraits peints, toiles peintes, étoffes
brodées , verres, etc.; et, chaque jour, cette collection
s’augmente par quelques acquisitions et surtout par des
dons particuliers. Il en résultera que la ville de Nantes
sera dotée d’un établissement scientifique qui lui man-
quait.
« L'absence d’un musée archéologique à Nantes était
d’autant plus regrettable, qu’elle a été cause de la perte
d’un grand nombre d’antiques de toutes sortes, parce
qu’on ne savait où les placer, Aujourd’hui il n’en est
plus ainsi, et l’on s'occupe de faire de nouvelles fouilles
dans les endroits mêmes où les fondations de nos mu-
railles romaines en ont déjà fourni, et d’où sont sorties
nos plus importantes inscriptions, M, Bizeul, de Blain , a
\!
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 979
été chargé d'indiquer les éndroits qui présenteraient le
plus de facilités pour exécuter de nouvelles fouilles dont
les résultats satisfaisants sont presque - pate Un mé-
moire a été lu à ce sujet.
« Les poteries romaines et autres objets en terre cuite
de nôtre musée se sont singulièrement accrus par des
fouilles qui ont eu lieu en deux endroits principaux du
pays Nantois, d’abord à Blain, ancienne ville romaine,
mais surtout à Rezay, établissement romain considé-
rable , où le percement d’un chemin de grande com-
munication, traversant tout le terrain formé de ruines,
a mis au jour une étonnante quantité d'objets antiques,
tous recueillis avec soin par M. Vandier, l’un de nos
membres fondateurs, qui a bien voulu se charger de
l'arrangement et de la conservation de notre musée,
“tâche fastidieuse , souvent pénible, mais qu’on ne pou-
vait confier à de meilleures mains, à un zèle plus
généreux.
« Je dois rappeler ici que M. Vandier nous tient in-
formés, chaque année, par un rapport d’une parfaite
exactitude , de tout ce que nous acquérons annuelle-
ment de richesses archéologiques, et de toutes les ma-
tières qui ont été traitées dans nos séances, Ce travail,
fort bien fait, présente en AUS pages la substance
de nos procès-verbaux.
« Je ne puis terminer cette note sans exprimer le
regret qu’il ne vous ait pas été envoyé un précis des
travaux de l'Association bretonne, tant sous le rapport
agricole que sous le rapport archéologique. La session
de St.-Brieuc, en 1856, a dignement inauguré la di-
rection générale confiée à M. le comte de Caffarelli. Je
ne puis entrer dans aucun détail, n'étant nullement
280 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
préparé à cette tâche. Mais je puis du moins signaler
à l’Assemblée deux Lravaux très-remarquables de notre
jeune et savant confrère , M. | Ramé, qui a démontré,
de la manière la plus convaincante , l’âge et la destinä-
tion de ce qu’on a nommé le temple de Lan-Leff ; puis
nous a fourni, sur la destination des bâtiments de l’an-
cienne abbaye de Beauport, prèside Paimpol (Côtes-
du-Nord ), les explications les plus savantes et Jes plus
complètes, »
M. Dupuis, délégué de la Société archéologique de
l’'Orléanais, vous a, dans un rapport étendu, donné
d’intéressants détails sur l'origine et la constitution de
cette Société, qui date de 1849, sur sa bibliothèque, sur
son musée , et sur les excursions que font ses membres
pour protéger les monuments ménacés de destruction ; je
regrette que la limite dans laquelle doit être renfermé
mon rapport ne me permette pas de les reproduire.
M. Dupuis s’est ensuite exprimé ainsi :
« Nous avons maintenant, Messieurs, à vous entre-
tenir de nos travaux proprement dits. *
« Ce sont : 1°. nos publications ; 2°. les avis que nous
avons donnés; 3°. les découvertes que nous avons pu
faire ; 4°. la conservation ou la restauration de monu-
ments obtenues par nos soins. |
« Quant à nos publications, 26 bulletins trimestriels
ont paru: ils renferment, outre le compte-rendu des
séances, une foulé de documents, de renseignements
sur l’histoire politique , artistique ou littéraire de la pro-
vince, sur ses monuments, les ‘objets d'art; ces docu-
ments, sans offrir l’ importance ou sans comporter l’éten-
due d’un mémoire, présentent parfois un intérêt réel.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 281
« Trois volumes d’annales ont été. publiés; le qua-
trième est sous presse. Les deux premiers contiennent
32 mémoires en plus grande partie relatifs à des événe-
*ments ou à des monuments de la localité. Le troisième
est consacré à la publication de lettres de rois de France
et surtout d'Henri IV, adressées à la ville de Chartres.
Il a vivement intéressé les personnes qui se préoccupent
de recherches historiques.
« Des maires, des curés, des corporations, voulant
mettre la science d’accord avec le bon goût, nous ont
demandé des avis sur des restaurations et des embellis-
sements à faire à leurs monuments, à leurs églises , sur
des projets de médailles ou de jetons.
« Ainsi, M. le maire d'Orléans a demandé à la Société
un rapport sur les restaurations à faire à son Hôtel-de-
Ville, et sur la médaille à frapper en commémoration de
l'inauguration de la statue de Jeanne d’Arc ; M. le Préfet
du Loiret, un projet de la médaille destinée aux médecins
cantonaux; notre Institut musical, un modèle de jetons ;
M. le Curé de St.-Laurent d'Orléans, un avis sur la dis-
position de l’entrée de la crypte de son église.
« Parmi les points historiques, que nous avons
éclaircis et auxquels des mémoires ont été consacrés ,
nous signalerons :
« Le lieu où mourut Henri I‘. de France ;
«Celui où fut donnée la bataille de Patay ;
« L'endroit où fut assassiné , par Poltrot, Je bite à de
Guise ;
« Les détails du siége de Montargis et de sa levée par
Dunois, en 4426. — Et, à ce propos, nous avons émis le
vœu que le monument commémoratif de Ja première
victoire du grand capitaine , détruit en 1793 , fût rétabli.
282 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. #
« Parmi les lieux incertains ou inconnus, fixés ou re-
connus, nous indiquerons :" 50
« Une mansion romaine à Bazoches :
« Un établissement romain à Suèvres ;
« L'emplacement de l’ancien Brivodurum à Ouzouer-
sur-Trézée, près de Briare ; F
« Un théâtre romain à Triguères, monument unique
dans nos contrées, où l’on connaît plusieurs cirques ;
mais où jamais l’existence d’un théâtre n'avait été si-
gnalée. |
« Une découverte plus précieuse encore, c’est celle
que vient de faire l’un de nos plus zélés collègues ,
M. Pillon, et à laquelle il s’est empressé d'associer la
Société archéologique, l'invention de la grotte de saint
Mesmin, ancienne caverne druidique , ‘creusée dans la
falaise de la Loire, en face de la vieille abbaye de Mici ;
grotte à l’entrée de laquelle se trouvent deux magnifiques
piliers mérovingiens et communiquant jadis avec le sanc-
tuaire de l’église de la chapelle St.-Mesmin par un esca-
lier dont les débris se voient encore, Ce fut là que le
saint fondateur de Mici voulut être enterré. Depuis un
temps immémorial , cette grotte était bouchée et la tra-
dition seule gardait le souvenir de son existence, sans
rien révéler sur sa situation. Sa découverte, fruit de per-
sévéranies et courageuses investigations , est pour la
religion et pour la science un heureux événement.
« Mais de toutes les recherches, celle dont le succès qui
l’a suivie nous a causé le plus dej joie et qui nous semble
vraiment un titre à la reconnaissance publique, c’est
celle que, l’an dernier, nous avons opérée dans l’église de
Notre-Dame de Cléry.
« Là existe une chapelle, mise sous l’invocation de
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 283
saint Jean, et connue sous le nom de chapelle des Lon-
gueville.
« Bâtie par Dunois, ornée de ses armes et de celles de
Marie d'Harcourt, sa femme, et destinée à la sépulture
de sa famille , l’histoire et la tradition disaient qu’il y
avait été enterré ; mais la tradition disait aussi qu’à
plusieurs époques de nos troubles civils, ces tombeaux
avaient été violés et qu’ils ne conservaient plus rien des
restes glorieux qui leur avaient été confiés.
« Des fouilles pratiquées dans cette chapelle nous ont
fait retrouver, à côté d’un caveau où quelques ossements
de femme et d'enfant ‘étaient mêlés. à la terre qui le rem-
plissait, à des débris de sculpture , de meneaux brisés ,
de pierres et de planches de bières , deux petits caveaux
construits côte à côte où reposaient deux cercueils intacts,
l’un , en bois, consommé par le temps, c'était celui de
François IT de Longueville, fils de Dunois ; l'autre, en
plomb, portant une inscription et des armes, contenait
le corps embaumé d’Agnès de Savoie, sa bru. De pelits
pots, renfermant du charbon, étaient placés autour de
ces cercueils.
« Dans cette même chapelle, les fouilles ont révélé
l'existence d’un caveau s’avançant sous l'autel; caveau
d'honneur évidemment. Il avait été violé. De la terre,
des débris , le remplissaient et, parmi cette terre et ces
débris , , des ossements étaient épars. Ces ossements
étaient forts; quelque chose qui inspirait le respect sem-
blait émaner d’eux. Recueillis avec un soin religieux et
assemblés sur le sol de l’église, ils se sont trouvés re-
constituer un squelette complet ; unesseule des vertèbres
cervicales manquait; c'était celui d’un homme de haute
stature, robuste, âgé, atteint de la goutte , ayant, d’après
284 INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE.
la flexion des jambes , passé à cheval une partie de sa vie.
A ces signes, à d’autres encore, il ne restait aucun doute
possible : nous avions retrouvé les restes du Bâtard d’Or-
léans , du compagnon de Jeanne d’Arc , du libérateur de
la France. Ces restes, recueillis avec respect ; renfermés
dans une tombe, ont été, à la suite d’une cérémonie re-
ligieuse , déposés de nouveau dans leur caveau rendu à
son état primitif. a
« Quelquefois l'autorité locale a invoqué notre appui
et nous a demandé de joindre nos réclamations aux
siennes pour la conservation ou la restauration de monu-
ments, Plus souvent, c’est d'office et de nous-mêmes que
nous avons signalé l’état fâcheux de ces monuments et
tâché de les arracher à la dégradation et à la destruction.
« C’est ainsi que nous avons obtenu le déblaiement,
souhaité depuis si long-temps, de la crypte de St.-Benoît-
sur-Loire, et tout récemment de celle de St,-Aignan
d'Orléans ; que nous avons contribué à obtenir la restau-
ration de la crypte de St.-Avit, construction mérovin-
gienne, selon les uns, carlovingienne, selon d’autres,
découverte dans le jardin du séminaire d'Orléans.
« Ainsi nous à été accordée la conservation du clocher
de St.-Martin. de Vendôme, et nous avons attiré l’atten-
tion sur les fresques, alors très-menacées, de la chapelle
St.-Gilles de Montoire et de la chapelle de St. Cr à
Celles-sur-Cher.
« Les dessins de ces deux fresques, habilement re-
levés, sont dans nos cartons et prêts à être publiés dès
que nos ressources nous le permettront.
« Ainsi nous-avons conservé, par des plans et des
dessins, le souvénir de châteaux, qui, comme celui de
Chemault, jadis habité par Henri IV, comme celui de
_ TRAVAUX DES ACADÉMIES EN s 856. 985
TO tombaient sous la hache du ndalisme. ei
dela bande noire. |
« Nous avons tàché de pritétiée contre Piicabià et
l'indifférence, soit de l’autorité, soit.de leurs posses-
seurs, de précieux restes : ici, les curieuses grottes
druidiques de Monioire; là, les vitraux de..Cour-sur-
Loire , et la crypte de l’église de,St.-Aignan-sur-Cher ,
changée en magasin de tonnellerie.
« A plusieurs fois, nous avons signalé le péril qui
menace les voûtes de notre magnifique église de St.-
Benoît : en cesmoment encore, nous réclamons avec
instance , et le Ministre vient d'écouter nos doléances.
« L'édilité d'Orléans avait ordonné que les façades
des maisons de la ville fussent reblanchies ou regrattées.
Nous avons, par nos remontrances, sauvé de cet ou-
trage les façades de nos vieilles maisons historiques.
« Nous venons de faire mieux encore en leur faveur,
et je vous demande, Messieurs, la permission d'entrer
dans quelques détails sur une idée qui, je lespère,
aura votre sympathie , car elle est toute de conservation.
+ « Orléans renferme un assez grand nombre de maisons
remarquables par. l'élégance de leurs façades et les dé-
tails de leur architecture. Presque toutes sont de l’époque
de la renaissance, qui y a prodigués les plus gracieux
caprices de son ornementation. Elles. sont situées dans
les vieux quartiers de la ville. Quelques-unes sont in-
habitées et servent de magasins; on conçoit à quels
dangers elles sont exposées. Celles qui sont habitées
sont peut-être sujettes à plus de périls encore. Elles
doivent, en effet, être appropriées aux besoins des loge-
ments, à ceux du commerce. Les exigences de la vie
moderne s’arrangent mal des dispositions anciennes.
286 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Pour avoir plus de jour, on supprime les meneaux des
fenêtres , on agrandit des ouvertures; on abat des cor-
niches, on déplace ou l’on détruitrun escalier en pierre :
de délicates sculptures sont noyées dans le badigeon ou
mutilées par le ciseau qui les gratte. Toutes celles à qui
on touche ainsi sont déshonorées; quelques-unes ont
complètement disparu ; _etles amis des arts gémissaient
de ce vandalisme qui ‘continuait ses ravages sous leurs
yeux mêmes, sans qu’ils pussent faire autre chose qu’ex-
primer des regrets inutiles. Q
« Une idée née dans le sein de la Société archéo-
logique, approuvée par elle, patr onnée par plusieurs de
ses membres s'est réalisée en un projet déjà en cours
d'exécution et qui ‘doit soustraire ces maisons à la de-
struction plus ou moins prochaine qui les ‘menace. A
cet effet, quelques personnes se sont réunies et ont con-
stitué une société dont le but est d'acheter, de con-
server et de restaurer les maisons remarquables d’Or-
léans. Le fonds social est formé à l’aide d'actions de
100 fr. chacune. Les maisons seront louées sous des
conditions de surveillance et de conservation. Le ‘prix
de cette location servira à donner aux sociétaires un in-
térêt de 3 °Lo: Le surplus des revenus sera employé à
la restauration” et à la création. d’un ‘fonds de réserve
destiné à faire de nouvelles acquisitions. k
__ « Déjà une maison, Tune des plus remarquables et
des plus menacées, est acquise; et, dans ce moment,
trente personnes, par le moyen d’un prospectus, ap-
pellent leurs concitoyens à se joindre à elles pour con-
courir à cette œuvre de protection. Vingt d’entre elles
sont membres de la Société archéologique. Leur appel
sera entendu, nous n’en faisons nul doute. Nous ne
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 287
doutons pas non plus que l’élan donné dans notre ville
par la Société ne soit pour beaucoup dans ce succès.
« Nous bornerons.ici le compte-rendu des travaux et
des projets principaux de la Société archéologique de
l’Orléanais, ayant à cœur de le faire le plus succincte-
ment possible et de ne pas abuser de:vos moments.
« Permettez-nous, toutefois , de vous signaler l’entre-
prise de trois œuvres de longue haleine et dont l'achève-
ment exige le laps de plusieurs années :
« 1°. .Une carte archéologique de l’Orléanais;
« 2°, Une histoire statistique des fiefs de la province ;
« 3°, Et un ‘armorial des feudataires, À villes et com-
munautés de cette province. Los Pre
« Ces travaux, mis à chef, ofniront. de puissants
secours. à Yétude de notre histoire locale. Des commis-
sions spéciales sont. chargées de recueillir et de mettre
en ordre les matériaux.
« Voilà, Messieurs, un aperçu très-abrégé de ce qu’a
exécuté jusqu'à ce jour ou entrepris, la Société archéo-
logique de VOrléanais. Bien posée dans l'opinion, elle
espère tout de l'avenir. Elle a pu déjà, dans la courte
durée de son existence, rendre quelques services : elle
compte par la süite-en rendre davantage. Elle veut ici
témoigner de sa gratitude pour l'appui et les secours
bienveillants qu'elle n'a cessé de rencontrer. Elle veut,
avant tout’, être juste: en reportant l'honneur de ce
qu’elle a pu faire de bien à notre savant et honorable
directeur, M. de Caumont. C’est son initiative éclairée
qui a ouvert la carrière où elle tâche de le suivre : c’est
son Zèle infatigable qui la guide et l’encourage. »
M, Charles-Auguste Grivet est un ouvrier-poête, émule
298 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
des Reboul, des Jasmin , des Durand, des Hégésippe
Moreau. Son recueil de poésies, qui ne comprend pas
moins de 369 pages, est précédé d’une notice sur l’au-
teur, par M. Dupuis, vice-président du Tribunal civil
d'Orléans, dont je viens de reproduire le ae
rapport. À
« Vos compositions, disait Béranger à M. Grivet, dans
« sa lettre datée de Passy, le 5 décembre 1843, sont
« presque toutes conçues et exécutées avec goût et
« talent; ce qui me surprend, autant que leur mérite,
« c’est que votre nom n'ait pas plus de retentissement
« à Paris. Beaucoup d’éloges ont été prodigués à des
« vers qui sOnt loinyde valoir les vôtres , et je regrette
« de vivre loin du monde des journaux, ce qui m’em-
« pêche d’en obtenir la justice qui vous est due, etc. »
Mon appréciation, après celle de lillustre chanson-
nier, serait plus que iéméraire; aussi me bornerai-je à
vous recommander, pour la lecture de ce nouveau vo-
lume de poésies, une indifférence moindre que celle du
monde des jourfäux parisiens.
D JL
MAINE-ET-LOIRE.
$
La Société industrielle d'Angers et du département
de Maine-et-Loire n’est pas restée iDactins pendant
l'année qui vient de s’écouler. |
Le rapport sommaire sur ses travaux, que vous a pré-
senté M. Leroyer, son délégué, vous en convaincra et
vous fera voir qu’elle marche dans la voie du progrès,
fidèle à la noble mission qu’elle s’est donnée de ‘tra-
vailler à la recherche, à la propagation des sciences,
et surtout des sciences pratiques , dans l'intérêt de tous;
ee
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 289
à l’instruction, et par suite à l'amélioration du sort du
cultivateur en particulier, sans négliger les lettres, l’his-
toire et les beaux-arts , sources de si douces cs
pour les esprits cultivés.
Elle vient de publier son vnatentibise Bulletin
annuel, usage qu'elle n’a pas manqué de suivre depuis
4830. Ses séances générales mensuelles ont été au
nombre de dix. Si je n'étais obligé, dit M. Leroyer, de
me renfermer dans des limites aussi étroites, je vous
dirais, in extenso, quelques-unes des communications
soumises à ses ordres du jour et qui sont consignées
dans son intéressant Bulletin; cette lecture, j'en suis
. certain, aurait pour vous un vif intérêt. L’exposé des
divers comités qui composent la Société, et qui tous,
dans le courant de l’année, ont eu à s'occuper des
questions de leur ressort, vous donnera du moins une
idée de la variété et de l'importance de ces questions.
Ces comités sont au nombre de onze :
1. Comité d'agriculture ;:
*. = <— des beaux-arts ;
3... — hippique:
4. — d’horticulture et d'histoire naturelle ;
5, — d'hygiène;
6... — de littérature, histoire et géographie ;
7%. — . de mécanique;
8 — de physique et chimie ;
9. —- des prisons;
10% — de statistique et d'économie;
41% — de viticulture et d’œnologie,
Parmi les communications les plus importantes con-
tenues dans le Bulletin de la Société, je citerai d’abord
celles qui ont été faites par son honorable président :
13
290 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
elles sont nombreuses, grâce à l'activité et au zèle qui
ne Mo de l’animer :
. Communication relative à M. David, d'Angers,
à é suite de laquelle il a été décidé que le buste de
l'illustre statuaire serait placé dans la salle des séances.
2e, Communication sur des expériences faites sur
la nature et les produits de nouvelles espèces de
vigne sintroduites dans le département de Maïine-et-
Loire. Vous savez, Messieurs, de quelle importance est
la question vinicole dans l’Anjou. C’est sous l'empire de
cette question que, depuis quinze ans et plus, M. Guil-
lory aîné, dans sa propriété de la Roche-au-Moine,
consacre environ 3 hectares à des expériences com-
paratives sur la culture et les produits de nouvelles
éspèces de vigne. Grâce à lui, après des essais longs et
persévérants sur des plants de toute provenance, le
département s’est vu doté de cépages de variétés plus
hâtives , tels que le Carmenet-Sauvignon, pour les vins
de choix; le Liverdun et le Mälin, pour les vins rouges
communs. Déjà, par ses soins, quarante mille cros-
seties environ de ces cépages ont été réparties entre une
vingtaine de propriétaires, dans treize communes du
département.
3°. Communication sur le drainage en Maïine-et-
Loire. I1 résulte, de cette communication, que le dépar-
tement de Maine-et-Loire est un de ceux où la pratique
du drainage a reçu le plus de développements, et, si ce
n'est l’œuvre de la Société, elle y a puissamment con-
tribué. MM. Bordillon et Lebanier , membres de la Société,
qui ont commencé ces travaux, ont trouvé de nombreux :
imitateurs dans plusieurs élèves de M. Lebanier et dans
un grand nombre de propriétaires éclairés. Enfin,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 291
M. H. Pineau, ingénieur agricole à Châteauneuf, a exé-
cuté de nombreux et importants travaux ; 750 à 800
hectares ont été assainis par des travaux de drainage,
La Société, par l'entremise du Préfet de Maine-et-
Loire, a obtenu du Ministre de l’agriculture une sub-
vention de 800 fr. pour l’acquisilion de deux machines à
fabriquer les tuyaux de drainage, destinées aux arron-
dissements d'Angers et de Beaugé.
Lh°. Communication à l’occasion de l’établissement ,
à Angers, d’une école supérieure des lettres et des
sciences. Dans cette communication, M. Guillory fait
ressortir la part qu’a prise la Société à l'obtention de
cette faveur; elle s’est constamment préoccupée depuis
1837 de la question de créer, à Angers, des cours
publics et gratuits. Cette communication se termine
par des citations de documents historiques cürieux con-
cernant l’ancienne Faculté de Droit d'Angers.
5°. Lettre à M. le Préfet sur les moyens de pro-
céder au remplacement des récoltes dans les terrains
inondés. |
6°. Note sur l'emploi économique des engrais
liquides qui s’écoulent des fumiers et des étables.
7°. Communication sur la culture du lin de‘Flandre
et régénération des graines.
8°. Proposition ayant pour objet de réunir,dans une
suite d'articles, l'indication et la date des brevets d’in-
vention et de perfectionnement pris dans le departe-
ment de Maïne-et-Loire (liste qui se trouve dans le
Bulletin).
… Je citerai ensuite un article intitulé : Quelques obscer-
_ vations pratiques d'agriculture, dû à M. Bodin, membre
de la Société, directeur de l’École d’agriculture de Rennes ;
292 INSTITUT-DES PROVINCES DE FRANCE.
nommer l’auteur, c’est dire combien l’article présente
d'intérêt.
Une note fort intéressante, due à M. E. Chevreul, de
l'Institut, membre honoraire de la Société industrielle ,
intitulée: Gonsidérations sur les ouvrages d'agriculture
du XVIII®, siècle, de Duhamel-Dumonceau et du mar-
quis de Turbilly. Un premier chapitre des extraits de
l'ouvrage du marquis de Turbilly traite du défrichement
des mauvaises terres, sables vifs et brûlants ; le chapitre
deuxième, du défrichement des terres médiocres; le cha-
pitre troisième, des bonnes terres. Dans un appendice
qui suit, il est parlé des engrais d’origine minérale et
d’origine organique, prescrits par le marquis de Turbilly,
et de l’écobuage, au point de vue théorique et pratique.
A propos du drainage , je citerai encore un article de
M. H. Pineau, intitulé : Une question de drainage ; —
une note sur le drainage du cimetière de l'Ouest de la
ville d'Angers, et quelques observations sur: le drainage
en général, dues à M. Ch. Lebanier ; —enfin, une lettre
de M. C. de Jousselin sur divers travaux de drainage
exécutés sur le domaine de la Bénaudière. M. de Jous-
selin utilise les eaux provenant des drains pour irriguer
les prés:
Il faut conclure, des expériences nombreuses faites
par MM. Lebanier et Pineau, qu’en principe on doit
donner la préférence aux drains profonds.
Remède infaillible coutre la propagation de la ma-
ladie des pommes de terre, par M. Otimann, père,
membre honoraire de la Société.
Une note sur la construction d'une étable, à la Bé-
naudière, chez M. de Jousselin.
Rapport, au nom d’une commission spéciale , sur
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 293
le projet d'association pour la vente en détail de la
viande de boucherie, par M. Janin, membre titulaire
de la Société.
Un rapport sur l'ouvrage de M. d Valserres ayant
pour titre : Dialogues populaires sur le droit rural,
par M. H. Pineau.
Rapport, au nom du Comité de Mécanique, sur un
système de ferrure de croisée, par M. Varanne-Aubry,
membre titulaire.
Note sur un mode de fondation économique dans les
terrains marécageux, par M. Launay-Pieau, architecte,
membre titulaire.
Discours d'ouverture du Cours de botanique à l’école
d'enseignement supérieur des sciences et des lettres
d'Angers, le 30 avril1856, par M. À. Boreau, secrétaire
de la Société industrielle.
Note sur l'ouvrage de l’abhé Paramelle, intitulé : L'art
de découvrir les sources, par M. L. Tavernier , membre
titulaire.
Rapport, au nom d’un Comité spécial, sur l'ap-
p areil à lessive de M. Morel, par M. Janin.
Charte et tarif de La cloison d'Angers, en 1373, par
M. P, Marchegay, archiviste de la Société industrielle
( Gette note contient des détails fort curieux. )
Le Ministre de Louis XI et le Chapelain de Chäteau-
Gonthier , par le même.
Prix des grains, en Anjou, depuis le XI°, siècle
jusqu’en 1855, par M. L. Raïimbault, membre titulaire.
Note sur une boucle d'attelage, avec ardillon à re-
traite, par M. Charles de Beauvoys, membre titulaire.
Rapport, au nom du Gomité d'économie domestique,
sur la silicatisation des pierres tendres et sur un
294 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
enduit hydrofuge, par M. E, Gripon , membre titulaire.
Rapport sur plusieurs ouvrages de M. le baron
Trouvé, membre honoraire de la Société, par M. Au-
bert , membre titulaire.
Moyen de prévenir les inondations dans la vallée de
l'Authion, par M. V. Houyau , membre honoraire.
Récolte des cantharides , par M. Charles de Beauvoys.
L'espèce galline au Concours agricole universel de
1856, par M. L. J. Couchet, membre titulaire.
Tels sont les titres d'autant de chapitres intéressants
renfermés dans le Bulletin.
On y trouve enfin la relation des travaux des Comices
agricoles :
Du canton de Chemillé ;
— de Thouarcé;
— du Lion-d’Angers;
Celle des concours du Comice agricole du canton de
Châteauneuf, à Cherré, et du Comice agricole du canton
de St.-Florent, à St.-Laurent-du-Mottay ;
Et un Rapport sur le 19°°, concours départemental
d'animaux domestiques , par M. F. Janin, |
L’horticulture a pris , dans l’Anjou , un tel développe-
ment , une telle importance , que la Société a cru devoir
charger un de ses membres, M. L. Tavernier, de lui
faire un rapport sur le Catalogue descriptif et raisonné
des arbres fruitiers et d'ornement de l'établissement
de M. A. Leroy.
M. À. Leroy étend ses pépinières sur plus de 400 hec-
tares de terre ; il occupe 200 ouvriers et expédie à
l'étranger des arbres fruitiers et d'ornement par centaines
de mille.
La Société doit à M. Menière, son bibliothécaire , des
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 295
observations météorologiques faites à Angers , obser-
vations consciencieuses consignées , jour par jour, pour
tous les mois de l’année.
Dans le but d'introduire ou de propager les plantes
reconnues avantageuses, la Société a fait de nombreuses
distributions de graines.
Pour entretenir l'esprit de recherche , elle a des expo-
sitions mensuelles où figurent des échantillons des pro-
duits de l’agriculture et de l’horticulture; les machines
aratoires et autres; en un mot, tout ce qui est l’objet
des recherches des naturalistes, des géologues , etc.
Ces expositions ont enrichi les collections de la Société,
déjà nombreuses par les dons des exposants.
M. Millet, membre de l’Institut des provinces et de
beaucoup d’autres sociétés savantes, vous a offert un
ouvrage important, publié à Angers, en 1856, et ne
contenant pas moins de 452 pages. Cette œuvre est inti-
tulée : Etat actuel de l’agriculture dans le départe-
ment de Maine-et-Loire , et de quelques moyens de
lui venir en aide. :
Dans une classe première , l’auteur traite de l’agro-
nomie ou de l’agriculture proprement dite. La première
partie de cette classe s’applique aux cultures arables et à
l'éducation des animaux domestiques ; la deuxième partie,
à l’arboriculture, c’est-à-dire à la culture des arbres
fruitiers champêtres, ou fructiculture ; à celle de la vigne,
ou viticulture; à celle du houblon; à la culture et à
l'aménagement des bois et forêts, ou sylviculture. Dans la
troisième partie, l’auteur recherche: 1° les moyens auxi-
liaires ; 2°, les causes qui nuisent à l’agriculture ; 3°. les
moyens préservalifs et réparateurs,
296 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
L’horticullure fait l’objet de la classe seconde : elle se
divise en : 4°. culture maraîchère ou culture des légumes ;
2°, culture des arbres fruitiers.
Ce livre contient beaucoup de très-bons renseignements,
et il serait à désirer que, dans chaque département, un
travail analogue fit connaître les cultures de chaque loca-
lité et les produits fournis par elle. On regrette cependant
l'absence, en tête du volume, d’une carte du département
de Maine-et-Loire, qui eût mis le lecteur en position de
suivre plus facilement les descriptions.
Vous avez encore reçu deux brochures, imprimées
dans le même département : 4°. les Travaux du Comice
horticole de Maine-et-Loire; 2°. la Pomologie de Maine-
et-Loire, 4°. livraison, publiée par le même Comice. Je
regrette, à cause de l'intérêt qui s’y attache, qu’elles ne
soient pas susceptibles d'analyse.
MANCHE.
Le compte-rendu ci-après, dressé par M. Delachapelle,
secrétaire de la Société Impériale académique de Cher-
bourg, vous fera voir que cette Société n’est pas restée
au-dessous de la tâche qu’elle a entreprise :
Sciences physiques et naturelles. —M. Besnou a lu
deux mémoires importants: l’un, sur POidium auran-
tiacum , l’autre sur les subsistances et les denrées des-
tinées à l’alimentation publique.
M. le docteur Loisel a communiqué à la Société deux
rapports destinés à être mis sous les yeux de l'Autorité
administrative : l’un, sur quelques cas de fièvre typhoïde
observés dans une commune rurale , et que l’on regarde
à tort comme constituant une sorte d’épidémie; le se-
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 297
cond, sur le choix d’un emplacement pour le nouvel
hospice , à Cherbourg.
M. Bertrand-Lachesnée a signalé l’existence, dans des
localités de l'arrondissement , de diverses plantes rares,
du moins dans le pays, savoir : à Gréville, l’Aguilegia
vulgaris, le Carex paniculata, le Rosa tomentosa ;
à Tourlaville, l’'Hieracium sylvaticum , le Platanthera
bifolia, le Juncus capitatus ; à Cherbourg, le Cepha-
laria pilosa, etc. |
Histoire et archéologie. — Cette branche de connais-
sances est toujours cultivée avec zèle par la Société :
on ne fait ici que mentionner les travaux les plus im-
portants en ce genre.
M. de Pontaumont a lu :
Une notice sur deux ex-voto du XII. ou du XII°.
siècle , à Gatteville ;
Une notice sur les armoiries de la vicomté de Va-
lognes ;
Une notice sur les extractions de pierres, à Cherbourg,
en 1788;
Un résumé d’un rapport sur le Pré-au-Roi.
M. Noël, directeur de la Société, lui a présenté un
mémoire étendu et approfondi sur l'administration mu-
nicipale, à Cherbourg, depuis 4800.
M. Victor Lesène a lu:
Une notice sur les armoiries de Desroches-Orange ;
Une note sur le prétendu passage, à Cherbourg, de
la reine Marguerite d'Anjou. M, Lesène s’attache à prou-
ver que la tradition qui fait venir cette reine à Cher-
bourg n’est fondée sur aucun témoignage digne de
foi. *
. Le même membre a lu une note sur les fleurs, et
298 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
spécialement les roses considérées comme symboles et
attributs ; |
Un relevé de plusieurs inscriptions, recueillies dans
l’église d’Equeurdreville ;
Une notice sur les Boucaniers ou flibustiers ;
Une autre notice sur les anciens registres de l’état
civil , à Cherbourg. Ce travail signale des particularités
curieuses.
M. Denis-Lagarde a présenté :
Un rapport sur la Description du musée iconogra-
phique de Lyon, par M. Commarmond ;
Une note sur des médailles grecques.
M. Lesdos a donné un mémoire sur l'Histoire de
La ville de Cherbourg.
Littérature. — Biographie. —M. le docteur Dufour
a lu une notice sur M. Alexandre, ancien médecin en chef
de la Marine, membre titulaire de la Société. Cette notice
est un digne hommage rendu à la mémoire d’un homme
distingué, d’un excellent confrère , dont la Société acadé-
mique regrette la perte , et conservera le souvenir.
M. de Pontaumont a lu:
Des Souvenirs de l’abbaye de Cherbourg au temps
du duc d’'Harcourt ;
Une Légende des environs de Cher bourg. Dans ce
dernier travail, l’auteur, ordinairement scrupuleux et
exact dans les recherches historiques et archéologiques,
a donné un libre essor à son imagination ; il en est de
même de son histoire du château de Tourlaville.
M. l'abbé Leroy a lu un Voyage à Rome.
M. Janvier a communiqué à la Société :
Des Fragments de Voyages à Fiemenera, à Callao,
et autres lieux ;
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 299
Un mémoire sur Taïiti.
M. de Lapparent a lu des fables, en vers, pour la
plupart imitées de Lessing ; on a remarqué le tour vif
et concis de ces opuscules, et la forte morale qu'ils
renferment. (
M. Armand Guiffart a présenté à la Société une tra-
duction complète des Élégies de Tibulle. Cet ouvrage
annonce un talent réel, et atteste une connaissance
approfondie de l’auteur latin, en même temps que la
vivacité de l'imagination et du style chez le traducteur.
M. de La Londe à donné lecture d’une pièce de vers,
intitulée : Regrets.
M. Bazan, cer ian: a adressé à la So-
ciété :
Un Coup-d’'œil sur la littérature française pendant
la première moitié du XIX°. siècle ;
Une Épitre aux Dames ;
Une épitre, intitulée : L’homme, Fe de la femme ;
et divers autres opuscules.
M. E. Delachapelle a présenté :
Une Esquisse d’un Cours de Logique , 1. partie ;
Un article intitulé : Pope et son École ;
Une Épitre à une Paysanne.
La Société a reçu un très-grand nombre d’envois et de
communications : elle continue à entretenir et à étendre
ses rapports avec les Sociétés savantes de France et avec
. l’Institution Smithsonienne , à New-Yorck..
M. Besnou, vice-président, pour 14857, de la Société
des sciences naturelles, autorisée à prendre le titre
d’Impériale par un décret en date du -31 mars 4854,
vous à fait parvenir le sommaire suivant des travaux
300 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
compris dans le volume qu’ ’elle vient de publier pour
l’année 1856 :
Agriculture. — Renouée tinctoriale, sa richesse
en indigo, par M. Besnou.
Anatomie végétale. — Anatomie des plantes aériennes
de la famille des Orchidées , avec planches, par M.
Chatin, de l’école de Pharmacie.
Astronomie. — Nouvelle planète, découverte par M.
Chacornac.
Botanique. — Remarques sur la nomenclature géné-
rique des algues, par M. A. Le Jolis ; — Synopsis du
genre Arthonia, par le docteur W. Nylander ; — Liste
des Desmidiées, observées en Basse-Normandie , avec
planches, par M. de Brébisson; — Instruction sur la
récolte, l’étude et la préparation des algues, par
M. E. Bornet ; — Description de 3 nouveaux lichens,
avec planches, par le Même; — Sur les anthéridées
du Fegatella conica, par M. G. Thuret; — Commu-
nication d’un nouveau procédé de dessécher et de
conserver la couleur et les formes des plantes, par
M. Théod. Du Moncel.
Chimie appliquée. — Essai d’un nine d'huiles
fixes , constatation de leur nature et des proportions
du mélange , par M. Besnou ; — Examen de l’huile
de foie de morue, par M. Besnou ; — Moyen de pré-
venir les dépôts terreux et salins dans les chaudières
à vapeur, par M. Besnou ; — Expériences à ce sujet par
M. Verjus, maître mécanicien, et M, L.-L. Fleury ; —
Examen chimique et panification de farines étran-
gères provenant d'Amérique ; causes de leur infério-
rité, par M. Besnou.
Electricité. -— Sur le développement des courants
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 301
d’induction, par M. Th. Du Moncel ; — Relais rhéo-
tomiques, par le même; — Nouvelle disposition des
piles , par le même ; — Transmission des courants dans
les conducteurs humides, par le même; — Mesureur
électrique, par le même.
Entomologie. — Découvertes de genres et espèces
nouvelles dans l'arrondissement de Cherbourg, par
M. Bertrand-Lachesnée ; — Monographie du genre He- .
riades de la famille des Apicides, par M. le docteur
W. Nylander.
Géographie. — Sur l'expédition du Nil Blanc et la
détermination des positions géographiques, par M. E.
* Liais.
Géographie astronomique.—Détermination des lon-
gitudes indépendamment de la verticale, par M. Liais.
Géologie. — Notes géologiques sur le département
de la Manche, par M. Bonnissent ; — Notes géologi-
ques sur diverses localités du département , par M. J.
Lesdos.
Herborisation.—Topographie botanique , et décou-
vertes de quelques plantes nouvelles, par MM. A. Le
Jolis et Bertrand-Lachesnée.
Horlogerie électrique. — Disposition nouvelle pour
ménager le contact des horloges électriques, par M. E.
Liais ; — Action du moteur sur la durée des oscilla-
tions du pendule, par le même.
Hygiène publique.—Analyse des eaux de la Divette,
par M. Besnou ; — Considérations sur les causes de
l'apparition de l'Oidium aurantiacum dans le pain,
par le même.
Industrie. — Coût d'extraction des roches sous-ma-
rines, par M, le docteur Payerne.
302 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE:
Magnétisme.—Sur la force portante et aspirante
des aimants, par M. Th. Du Moncel. 4
Mathématiques. — Preuve des règles fondamentales
de l’arithmétique , par M. de Lapparent ; —Démonstra-
tion des principes fondamentaux sur lesquels repo-
sent les caractères de divisibilité des nombres entiers
par des valeurs entières quelconques, par le même.
Mécanique appliquée. —Appareil destiné à indiquer
la vitesse des corps en mouvement et les avantages
que l’on pourrait en retirer par l'application aux
_ locomotives des chemins de fer, par M. Menant.
Météorologie. —Chute de grêle observée, à Garteret,
par M. Allix, lieutenant de vaisseau ; — Anémomètres
à indications continues, par M. Th. Du Moncel ; — Su
les corrections des indications du pluviomètre, par
M. L.-L. Fleury ; — Observations udométriques ; par
lé même; — Sur le nombre des orages à Cherbourg
pendant une longue période, par le même.
Orographie.—Essai sur l’histoire naturelle de l’ar-
chipel de Mendana ou des Marquises (14°. partie,
Géologie et minéralogie}, par M. Édélestan Jardin.
Physique. — Sur les longueurs des fils propres à
donner aux électro-aimants leur maximum de force,
par M. Th. Du Moncel ;— Température de l’air, par
M. Em. Liais ; —Sur les relations qui existent entre
les chaleurs latentes des dissolutions des sels incom-
patibles et les chaleurs spécifiques des dissolutions des
mémes sels, par M. L.-L. Fleury.
Physique appliquée. — Baromètre et sphéromètre
électriques, par M. Th. Du Moncel ;—Moniteurs élec-
triques des chemins de fer, par le même ; —Moniteurs
électriques pour les hauts-fonds , par le même ; —Per-
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 803
fectionnement à son régulateur électro-solaire , par
le même ; — Remarques sur le procédé employé par
M. Besnou pour constater les proportions d’un mé-
lange d'huiles fixes, et de son application possible
par le calcul à un nombre indéterminé dans le mé-
lange, par M. L.-L. Fleury ; — Nouveau système pour
retirer automatiquement , en temps convenable , un
objet quelconque soumis à une action physique ou chi-
mique, par M. Th. Du Moncel.
Physique du globe. — Influence de la torsion sur
les déterminations de la déclinaison avec les bous-
soles où l’aiguille est suspendue par un fil, par M. E.
Liais : — Sur la détermination du centre de gravité
d’un barreau aimanté, par le même ;—Maréographie
électrique, par M. Th. Du Moncel ; —Ras de marée,
par M. Em. Liais ; —Sur la stabilité de l’état thermo-
métrique actuel de la surface du globe, par le même.
Toxicologie. — Sur les précautions à prendre pour
constater la présence de la strychnine et de la mor-
phine dans le cas d’empoisonnement, par M. Besnou.
Uranographie appliquée. — Avantages que l’on peut
retirer de l'établissement de cartes uranographiques
pour conserver , sans aucune altération possible, les
dates précises, si nécessaires à l’histoire, par le capi-
taine de vaisseau Boutzkoy, directeur de l’École Impé-
riale navale de Russie.
Pendant l’année qui vient de s’écouler , la Société
d'archéologie, sciences et arts d'Avranches n’est point,
non plus, restée inactive.
La première partie du volume de ses Mémoires actuel-
lement sous presse renferme, en effet, de nombreux
j
30/4 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
travaux, parmi lesquels on remarque : Des recherches
sur l'établissement de la Monarchie française dans les
Gaules ; et sur le meurtre de Thomas Becket, par
M. Gustave de Clinchamp, président de la Société.
Un rapport sur les travaux de l'année , par M. Phi-
lippe Loyer , secrétaire.
Un curieux travail de M. Beautemps-Beaupré, entrepris
sur différentes brochures relatives au dessèchement de
la baie du Mont-St.-Michel.
Un rapport de M. Le Héricher, sur le dessèchement de
la baie du Mont-Michel, envisagé au triple point de vue
de l'archéologie, de l’art et de l’histoire. s
Un Essai, par le même auteur, sur la botanique po-
pulaire de Normandie et d'Angleterre; travail qui
témoigne d’une érudition ingénieuse et variée.
Diverses notes, de M. André-Marie Laisné, sur l’origine
du dicton : « Etre tout évêque d’Ayranches ; » — sur la
valeur des formules : « Per cultellum, cum cultello ;
Cum missali, per capillum; » — et des notices remplies
de détails précieux sur Desrues, sur Alexandre de Ville-
dieu et sur le Psalterium justè litigantium , de Jacques
de Campront; enfin des recherches archéologiques sur
les églises de l’ancien diocèse d’Avranches.
Une notice surles tableaux de confrérie, eten particulier
sur le tableau du Rosaire de St.-Quentin ; et une étude
étendue sur les poésies populaires de la Basse-Normandie,
par M. Eugène de Beaurepaire.
Indépendamment de ces travaux, la Société a entendu
la lecture de beaucoup d’autres mémoires et rapports,
parmi lesquels nous citerons les suivants :
Revue des constructions nouvelles de l’Avranchin,
par M. Ed. Le Héricher.
ie TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 305
Excursion en Bretagne , par le même.
Analyse de divers travaux publiés récemment à
Avranches par des auteurs anglais, par le même.
De la civilisation gauloise, par M. le vicomte de
Guitton de La Villeberge.
Étude sur la religion des brahmes et sur le brah-
misme, par M. le capitaine Passart, ancien comman-
dant du Comptoir de Mahé.
Étude sur les cérémonies funéraires des Indous,
par le même. | |
De l'éducation dans la famille, par M. Groult,
régent de Logique,
Nouvelles notes sur Alexandre de Villedieu, par
M. Laisné vice-président , membre de la Société Fran-
çaise,
Notes sur les paroisses de St.-Saturnin et de Notre-
Dame-des-Champs, par le même.
De l’identité des calendriers de certaines années,
par le même,
Aperçu de l’ancienne législation relativement aux
moulins, par M. Durand, juge.
Des croix doubles et de l’architecture du moyen-
âge, par M. Parey, agent-voyer.
De quelques sermons français du XII°. siècle, at-
tribués à Maurice de Sully, archevêque de Paris,
par M. Eugène de Beaurepaire.
Les poésies allégoriques, et La chasse du cerf privé,
par le même.
Du mouvement archéologique et littéraire en Nor-
mandie, par le même.
Sonnet de Courval et son Pamphlet contre les char-
latans et pseudo-médecins , par le même.
306 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Histoire de l’Hospice d’Avranches et de quelques
institutions charilables, par M. Ch. de Beaurepaire,
membre correspondant. | see
Poésies, par M. Émile Le Pelletier, substitut à
Lourdes, membre correspondant.
Traductions en vers, par MM. Lemonnier et Hucley.
Rapports divers sur les fouilles de la rue Ormont,
du château du Parc, de St.-Aubin, par MM. Renaut,
Laisné et de Beaurepaire.
Mentionnons, en finissant, les accroissements rapides
du musée de tableaux et d’antiquités, et la restauration
de la toile de Staccony, exécutée, sur la demande de
la Société, par les soins d’un artiste aussi habile que
zélé , M. F. Robiquet.
MARNE.
M. Debacq, secrétaire et délégué de la Société acadé-
mique de la Marne, vous a, dans votre première séance,
donné lecture de l’exposé qui va suivre , des travaux de
cette Société, rédigé par M. Caquot qui la préside :
« La Société d'agriculture, commerce, sciences et arts
du département de la Marne, grâce à la bienveillance de
M. le Ministre de l’Instruction publique, correspond
gratuitement avec 223 Sociétés françaises qui s'occupent,
comme elle, de tout ce qui tend à l’amélioration et au
bien-être du pays.
« On conçoit quel intérêt doit résulter de ce mutuel
échange de pensées, d’études, d’expériences, toutes
dirigées vers un même but, dans des régions diverses, et
par conséquent avec des préoccupations et sous des as-
pects variés, sinon différents. Cet intérêt est le même
dans le Congrès des délégués des Sociétés savantes ; ici
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 307
seulement , il est plus vif, il est en action. Les intelli-
gences, les pensées, les expériences y sont en présence
et se touchent la main.
« M. Sellier, un des délégués de la Société de la Marne,
dans un rapport tout à la fois vif et concis, complet et
lucide, en passant en revue toutes les matières discutées
dans les conférences du Congrès de l’an dernier, nous a
fait, en quelque sorte, assister à ses savants débats.
« Ca été une heureuse diversion à nos travaux plus
calmes , plus isolés , à nos travaux de famille, dont nous
allons , en peu de mots, dresser la rapide nomenclature.
« L’agriculture est toujours placée par nous au premier
rang.
« Les rapports de MM. Duguet, J. Lamairesse, Boulard,
Salle, ont tour à tour appelé l’attention sur la culture
des céréales , l'emploi du blé dur, les avantages du sar-
clage, de l'élève et du croisement des animaux de la
ferme , sur l'essai de machines agricoles, telles qu’un
semoir , une faucheuse ; et, si les résultats n’ont pas
tous répondu aux promesses, il faut laisser une bonne
part du mécompte à l’inexpérience des manipulateurs , et
peut-être aussi des constructeurs eux-mêmes.
« Les écrits de M. le marquis de Bryas, de M. Eugène
Lamairesse, de M. Van der Straten-Ponthoz, ont beaucoup
fait pour le drainage; des essais fructueux , déjà en cours
d'exécution dans le département, feront plus encore.
L’agriculteur n’accepte les améliorations que lorsqu'il les a
vues et jugées par lui-même.
« On se préoccupe de ce qu’on appelle, avec exagération,
la désertion des campagnes pour les villes. La Société a
ouvert une enquête départementale sur ce fait qui inté-
resse à la fois l’'économiste , le philosophe et le moraliste,
308 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Avec ses correspondants , et M. Caquot, son rapporteur,
elle a été heureuse de reconnaître qu’il n’y avait là qu’un
mouvement naturel de mieux-être et de civilisation.
« Depuis un demi-siècle, en effet, la situation des culti-
vateurs n’a pas discontinué, aussi bien que celle de toutes
les classes de la Société, de marcher en s’améliorant.
« Les maisons enterrées et sans jour ont fait place, pour
l’homme et pour les animaux , à des habitations élevées ,
bien aérées, où la lumière pénètre aisément, et avec
elle , la santé et ses suites.
« Le langage s’est amélioré ; on sait écrire, on se rend
compte des recettes et des dépenses, Quelques grands-
parens, comme une protestation peut-être , ont conservé
le costume de leur jeune temps, leurs habitudes rus-
tiques; mais, à côté d'eux, une génération non moins
robuste , plus soigneuse des facilités de la vie, apporte
quelques délicatesses qui la rapprochent des usages de la
ville.
« Ainsi, le niveau tend à s'établir dans une juste pro-
portion. Gette transition, il est vrai, comme tous les
changements , ne s’est pas opérée sans quelque pertur-
bation ; mais l’équilibre se fera par la force même des
choses, et les instruments de culture, les machines agri-
coles remplaceront avec avantage les bras qui ailleurs
créeront d’autres produits, d’autres richesses.
« M. le Ministre de l’agriculture et du commerce a fait
relever, dans toute la France, les anciens usages auxquels
nos lois se réfèrent, à défaut de réglementation spéciale.
« La Société ne pouvait rester indifférente à cette espèce
de parère. Deux de ses membres, MM, Caquot et Sellier,
ont fait partie de la Commission départementale chargée
de coordonner les renseignements obtenus. Ce travail
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 309
d'ensemble , dressé par M. Caquot, fait partie des mé-
moires de 14856.. Ce sont des renseignements historiques
et réglementaires que l’on consultera toujours avec fruit,
même quand ils cesseraient d’avoir force de loi.
« A l’occasion de récompenses décernées à l’horticulture,
M. Royer a dressé une statistique de la culture marai-
chère dans le département , en regard de celle des envi-
rons de Paris.
« L’apiculture a trouvé, dans M. l'abbé Aubert, un zélé
propagateur et , dans la Société, des encouragements et
des récompenses. à.
« Dès 1855, il aété proposé, pour sujet de prix à décerner
en 1857, la rédaction d’un Manuel d'agriculture appli-
cable au département de la Marne. Pour étudier la ma-
tière dans tous ses détails, et préparer, au besoin, le
Manuel lui-même, une Commission est formée et son
travail s’élabore.
« M. Jules Lamairesse a appelé l'attention de la Compa-
gnie sur des essais tentés en Allemagne, avec un certain
succès, pour extraire, des feuilles du pin sylvestre , un
résidu doux et moëlleux que l’on a nommé laine végétale
et qui, pour certains usages assez nombreux , remplace-
rait, avec avantage, la laine elle-même.
« Un article du Bulletin du Puy-de-Dôme (novembre
1855) avait fait, parmi les viticulteurs de la Société, une
certaine sensation. Cet article. indique un moyen de
donner au vin un bouquet agréable. Ge moyen est aussi
indiqué dans une brochure imprimée à Mulhouse , et qui
“ existait dans une bibliothèque de Châlons, trois ans avant
la publication de ce bulletin. Une personne qui a habité
Bordeaux, signale le procédé du Bulletin du Puy-de-
Dôme comme mis en pratique dans les vignobles du
310 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Bordelais. Ce procédé consiste à recueillir les pétales dés
fleurs de la vigne après la fécondation, à les conserver
desséchés dans des vases de verre bien bouchés et
tenus au sec, et à les introduire dans le vin nouveau au
moment de sa fermentation.
« Il est à remarquer toulefois que le poids des pétales
indiqué pour la quantité du vin que l’on veut améliorer a
paru en désaccord avec la minime récolte qu’il est phy-
siquement possible d’obtenir.
« Dans ces circonstances , la Société ne pouvait laisser
inaperçu ce projet d'amélioration. Elle l’a publié (Journal
de la Marne, 13 février 1856). Elle a sollicité des essais,
elle a demandé des explications partout où il lui a paru
possible d’en obtenir; elle attend le résultat de cette
publicité et des essais demandés. Provisoirement, elle
croit devoir consigner ici le fait, ne fût-ce que pour con-
stater sa sollicitude toujours éveillée.
« MM. Salle, Debacq, Faure et Mohen , en analysant
les procès-verbaux des séances de l’Académie des
sciences , en ont suivi les constants progrès, et les ont
plus spécialement appréciés dans leurs rapports avec la
pratique agricole et manufacturière , sans cependant né-
gliger le vaste domaine de la science spéculative.
« De ces conférences a surgi,notamment,une discussion
sur l'emploi des nodules de phosphate de chaux, qui se
trouvent en grande quantité dans le département de la
Marne, sur les territoires de Sermaize et de Vienne-le-
Château, et qui, après trituration, paraissent devoir
fournir un puissant engrais.
« L'histoire, l'archéologie ont apporté une heureuse
variété dans les travaux de l’année.
« Rendant compte de publications émanées de Sociétés
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. : o11
correspondantes , M. Garinet a décrit avec détail la co-
lonne de Cussy (Côte-d'Or), et a savamment discuté les
diverses opinions des archéologues sur la question de
savoir quelle est l’époque de son érection, et quelle en
était originairement la destination. Il a aussi donné deux
notices, l’une sur M. Barbé-Marbois , biographie acci-
dentée; l’autre, sur les Mémoires de Saint-Simon,
écrivain qui mérite d’être étudié, mais avec une certaine
réserve.
« M. Sellier a parlé de l’histoire de la ville de St.-
Quentin , publiée par le savant et judicieux M. Charles
Gomart, et de mémoires d'archéologie, travaux sérieux que
M. Raymond Bordeaux fait marcher de front avec les
graves méditations du droit et les luttes du barreau.
| « La description du musée lapidaire de Lyon par le doc-
teur Commarmond, a donné à M. l'abbé Musart l’occasion
de louer l’auteur et d'admirer la collection.
« M. l'abbé Aubert, dans une monographie de la com-
mune de Juvigny, monographie qui lui a mérité une
médaille, a su intéresser, et rappeler quelques faits qui
touchent à l’histoire nationale.
« La grâce et l'esprit de M. d’Otreppe de Bouvette ont
trouvé, dans M. Sellier, un gracieux et spirituel inter-
_prète, à l’occasion, soit de ses Tablettes Liégeoises, soit
de la piquante inauguration de la nouvelle salle de la
Société libre d’Émulation de Liége.
« Un travail qui a exigé de nombreuses recherches ,
l'Histoire des arquebusiers de Chälons-sur-Marne ,
a dignement couronné l’année 1856. L’auteur, M. Sellier,
prend la compagnie à sa création, d’abord compagnie
d’arbalétriers, formée en 1357 pour servir de garde au
Dauphin Charles, fils de Jean IT, alors prisonnier des
812 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Anglais. Il la suit dans-tout le cours de son existence et
de ses transformations , jusqu’au 2 juillet 1790, jour où,
en exécution d’un décret du 18 juin précédent, elle est
venue, entourée des regretset de la reconnaissance de ses
concitoyens , déposer son étendard dans la cathédrale,
aux voûtes de laquelle, selon le décret, il devait rester
suspendu pour y être consacré. à l'union, à la concorde
et à la paix.
« Mais le décret n’avait pas compté sur le vent des ré-
volutions.
« M. Joppé, se plaçant à un point de vue élevé, a traité
de la responsabilité morale de l'écrivain et a trouvé de
dignes et belles paroles pour flétrir la popularité acquise
par l’impudeur, et pour honorer le respect de soi-même,
qui ne va jamais sans le respect de tous.
« M. Demaiche, dans un ingénieux trayail, détachant
des Poésies d'Horace tout ce que l’auteur a laissé percer
de ses habitudes, de ses affections , de ses goûts, de sa
vie intime, a composé, avec ces matériaux ainsi rappro-
chés, une piquante étude dans laquelle il montre le
voluptueux ami de Mécène , le convive recherché des
grands, le chantre du vieux Falerne, du savoureux
Cécube, l’amant des Glycères à la ceinture flottante,
repoussant, avec ennui, tous ces enchantements, se
faisant par goût homme rustique, se promenant à
l'ombre de sa chère Tibur, s’asseyant à une table cham-
pêtre, garnie d’une coupe pleine d’eau fraîche prise à la
Jontaine voisine, et mangeant avec volupté la fève, cou-
sine de Pythagore, les légumes au petit lard, l'oignon
odorant, l’oseille des prairies et la mauve rafraîchissante.
« Oh! paradoxe charmant! que vous venez bien à point
dans un temps où réussit tout ce qui est paradoxe ! Mais
î
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 313
malgré vous, Horace sera toujours l’homme de la société
polie , l'ami des plaisirs élégants, le poêle de la philo-
sophie facile , l’auteur aimé des gens de goût, des
hommes du monde , des esprits distingués ; Horace sera
toujours Horace.
« M. Chaubry, baron de Troncenord, soulevant le voile
que les peintres-verriers ont jeté sur leur vie et leurs
travaux, à fait de savantes recherches pour retrouver
ceux d’entre eux auxquels la Champagne peut, à juste
titre, revendiquer l'honneur d’avoir donné le jour. Ces
artisans que deux vertus inspiraient , la piété et la mo-
destie, construisaient, dans les grandes basiliques et
jusque dans les humbles églises de villages, ces belles
verrières dont quelques-unes ont échappé à la destruction
du temps , à la dévastation des révolutions, t_ font en-
core ladmiration et le désespoir de leurs” modernes
émules. Ils les abandonnaient en quelque sorie , sans
songer À laisser à ces enfants de leur génie une marque
quelconque de reconnaissance. L’œuvre restait, l’ouvrier
disparaissait. Il a fallu à M. Chaubry de longües études
pour faire revivre ces compatriotes inconnus, pour re-
trouver leur filiation, et leur restituer les œuvres qui leur
appartenaient. C’est une belle illustration que M. Chaubry
vient de remettre en lumière.
« N'oublions pas ici le travail soutenu et remarquable
de M. Debacq, sur les travaux de la Société, en 1856 ;
il suffit de l'indiquer pour être certain qu'il sera digne-
ment apprécié. à
. « Toutefois, à celte occasion, nous réparerons ici un
oubli involontaire commis par lui, ét bien excusable au
milieu des nombreux matériaux qui ont servi de base à
son compte-rendu. 11 s’agit d’une traduction française
LC ARE
à L
Pr
Le
314 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
du Manuel d’Épictète, par M. l'abbé Cordier, sur
laquelle M, Joppé a fait un savant rapport, et des Poésies
d'Agnès de Navarre-Champagne, dame de Foix, seizième
volume de la collection des poëtes de Champagne avant
le XVI*, siècle, publiées par M. Tarbé, membre corres-
pondant. |
« Enfin la Société, dans les nombreux volumes qu’elle
a reçus , a trouvé de riches aliments à son goût pour les
lettres : impossible de les rappeler ici, même sommaire-
ment. Tout en se reconnaissant inhabile à se poser comme
juge et encore moins comme partie, en cette affaire,
elle voit, non sans un certain orgueil, que la province se
permet quelquefois de rivaliser avec la capitale d’éru-
dition, -de saine critique, de goût, de bien-dire et
d'élégances |
L'Aemie impériale de Reims n’a pas fourni à
votre rapporteur la note de ses travaux; je tâchérai ce-
pendant d’y suppléer en vous faisant connaître, d’après
le compte-rendu imprimé du secrétaire de cette Société
savante, ce qu’elle a fait de plus remarquable pendant
l’année qui vient de s ’écouler,
J'y trouve : 4°. un ‘rapport de M. Elambert, sur une
découverte de M, le docteur Gérard , ayant pour objet un
procédé fort simple pour préparer l'argent chimiquement
pur, et séparer, à volonté,-le cuivre ou l'argent d’une
liqueur contenant du cuivre et de l'argent en dissolution ;
2°, l'opinion, émise par M. le docteur Landouzy, que, lors
de la paralysie de la face, indépendante des lésions du
cerveau, il y a exaltation de l’ouie : opinion confirmée
par de récentes expériences d'électricité ; 3°. l’annonce
d'un travail important de M. Chevilliet, professeur
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 945
au Lycée de Besançon, membre honoraire de l’Aca-
démie ; et, en attendant, une note qui pourrait
bien avoir plus de valeur dans la science que n’en ont
souvent-de gros livres, car elle explique un théorême
arithmologique d'Euler, relatif à la nature des nombres,
qui a la plus grande importance et dont la solution
n’avait pas été trouvée jusqu’à présent ; 4°. un travail de
M. Sornin, consistant en une méthode générale pour
obtenir l'équation de la transformée d’une courbe tracée
sur un cône ou un cylindre, lorsqu'on développe les sur-
faces de ces corps sur un plan; 5°. un ouvrage de
M. Garcet, ancien secrétaire de l’Académie, qui, sous
une”forme abordable aux intelligences ordinaires, pré-
sente les notions les plus précises sur la :cosmographie et
l'astronomie physique ; 6°. les Eléments \débotanique,
que M. de Meissas a offerts à l'Académie, dont il
est membre, et uné” autre commMünication du même
auteur, . elative à l’établissement de fortes rampes : ou
de courbes d’un faible rayon dans la construction des
voies fel rées ; 7°. un mémoire de M. le docteur Gaillot
sur l'hygiène” publique et privée de la ville de Reims;
8°. une communication de M. Amé, membre, correspon-
dant, sur la mosaïque romaine, qui a été placée, ilya
quelques années, dans une des chapelles de la cathédrale
de Reims ; et une étude du même architecte sur la cha-
pelle de l'archevêché dé Reims, prise comme modèle
d’édifices de petites dimensions : 9°, deux mémoires de
M. Lorin, intitulés : l’un, Conjectures sur les Duses ou
Dusiens des anciens Gaulois, et sur l’étymologie de
leur nom ; l’autre, Essai sur le Labarum , et plus spé-
cialement sur l'étymologie de ce mot ; 40°. des fragments .
de l'histoire de la Ligue à Reims, par M. Henry ; 1% un
316 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
nouveau volume , dont j'ai déjà parlé, de la collection,
par M. Fr. Tarbé, des poêtes champenois du moyen-âge ;
12°. la description faite, par le même auteur , de Ja
situation morale de l'Amérique du Nord, et parti-
culièrement des États de l’Union; 13°. les Études de
M. Poinsignon sur les origines de la société moderne,
et sur les quatre premiers siècles du moyen-àge , dont il
a extrait, pour les offrir à l’Académie, divers chapitres
d'un haut intérêt; 44°. le savant rapport de M. Soullié sur
cette communication ; 45°. la découverte, par M. Du-
quénelle, de collyres revêtus d’une marque indiquant
leur QE etd’instruments de chirurgie, encore cou-
verts d'ornements en argent, qui prouvent l'aisance de
celui qui s’en servait, et le luxe que l’art savait donner
aux moindies objets à l'époque où notre pays était sous
“x
la domination ro: nail
Sainte Vierge, €:
1e ; 46°. les. Panégyriques de la
M. l'abbé Poussin, et Je savant examen. Lou a fai
livre M. Demaiche, _ : Les à
En littérature, l’Académie a entendu : Un 1 n mot sur
Descartes ,-par M. Robillard ; l’intéressante description
de la vie du-monde et de quelques-uns des effets de ses
séductions, sous le titre de : Lionel Dutilloy, par le
même : un discours de M. Pouss sin _sur l’éloquence des
Pères de l'Église, destiné à précéde comme préface, les
Extraits des mêmes Pères ar Vient de publier pour
servir à la chaire ; la continuation des études de M. l’abbé
Bouché, sur Balinès; des remarques sur PAvarc et
l’Amphitryon de Molière; une petite pièce,sur la mort
de. Mgr. Sibour, archevêque de Paris, et plusieurs fables,
qe Lorin ; un conte de MæViolette ; des fables de
1, €licquot; une lecture dé M. Robillard, me
a:
virails des Pères de l'Église, par.
!
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 317
Réflexions à bâtons rompus, sur la tendance réa-
Jiste de la littérature actuelle et du drame en particulier ;
et, enfin, la suite de la traduction, en vers français, des
Idylles de Théocrite, par M. Soullié, qui, au dire de
l’Académie , est toujours à la hauteur de son modèle,
dont il reproduit la simplicité et la grâce naïve.
L'Académie , qui s'occupe également d'agriculture, a
constaté, sur le rapport de M. Sutaine, les essais de
diverses cultures et les travaux de dessèchement que
M. le docteur Jules Guyot a fait heureusement pratiquer »
_sur l’ancien domaine de Sillery, qui appartient aujour-
+ 1 M. Jacquesson et dont le nom est si connu dans
1onde entier: Me
M. concours de l’Académie ont fait naître, Ée der-
nier, plusieurs travaux très-remarquables : : #4”, une
description de l'icon ographie inture de la cathédrale
eims ns ,, par M T'abbé Tourn r, ancien secrétaire-
lMaujourd'hui archiprètre ie Sedan et membre
honorä Cu 2, un mémoire ‘important de M. Mourin,
pr ofesseur d'histoire à Bourges, et membre honoraire ,
sur la révolution qui a fait arriver les Capétiens au
trône , et sur la part qu'ont prise à cette révolution les
archeyéques de Reims ; 3°. une histoire de l'imprimerie
à Reims, par M. l'bhé Cerf. Les deux premiers de ces
travaux, qui oubtatte 3 leurs auteurs : l’un, le prix d'af-
chéologie , l’autre le prix d'histoire , sont ou doivent
être imprimés. ”
Je dois mentionner, avec éloges, le zèle avec lequel
; l'Acadériie continue à publier, en dehors de ses travaux
ordinaires , les documénts qui intéressent le plus, pays,
| ce ’elle ne reçoivé kpour ainsi dire , aucune sub.
ref four l'impression coûteuse de ces documents. A la \
Er
318 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
dispendieuse édition du Marlot français, en quatre
gros volumes in-/4°., ont succédé : l'Histoire de Reims,
par Flodoard, en deux volumes in-8°. ; la Chronique
du même (un vol. in-8°.), etenfin l'Histoire des Gaules,
de Richer (un gros vol. in- -8°.). La traduction de ce der-
nier ouvrage par M. Poinsignon , avec les notes qui l’ac-
compagnent, est un travail tout-à-fait sérieux et qui fait
honneur à Académie. Enfin, l'an dernier, elle a commencé
à faire imprimer des mémoires fort curieux sur l’époque
* de la Ligue, par Pussot, maître-charpentier à Reims.
Cette publication, dontle texte est emprunté à un manus-
crit de la bibliothèque de Reims, se poursuit avec activité.
M. le baron Chaubry de Troncenord vous a fait hom-
mage de son rapporb au Conseil général de la Marne, dans
sa session de 1856, sur l'état et les besoins des monu-
ments historiques de ce département: si
HAUTE-MARNE,
- Les travaux de la Société historique et archéolo-
gique de Langres ont été forcément interrompus; elle
vient cependant de les reprendre, et de publier une
livraison de ses Mémoires. M. Pernot, son délégué,
espère qu'à l'avenir cette société réparera le temps perdu.
En attendant, il vous a entretenus des ouvrages ou
des travaux personnels des hommes studieux de son
pays, correspondants ou non de la Société, à la tête
desquels il place, cette année , M. Carnaudet, biblio-
thécaire de Chaumont, qui a publié «
4°, Pendant l’année 1846, La Tlaute-Marne, Revue
champénoise ; in-4°. Il serait bien à désirer quecet
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 919
important et intéressant recueil qui avait, si l'on peut
dire, La variété pour devise, pût se continuer ;
2°, Notes et documents pour servir à l'histoire de
Château-Vilain {1 volume in-8°., avec planches);
3°. Annuaire administratif, statistique el commer-
cial du département de la Ha üe-Mar ne (1°. année
1856 ; in-19). La publication de ce recueil est une excel-
lente idée de M. Carnaudet, qui est aussi, outre son titre
de bibliothécaire de Chaumont, rédacteur en chef du
journal l’Union de la Haute-Marne. Espérons que l’au=2
teur pourra y insérer, par la suite, quelques articles sur
les souvenirs qui se rattachent au nom des sires de
Joinville, des princes de Lorraine, de la Maison de
Guise, de Marie Stuart, puis.de cette grande figure
historique , comme le dit M. Guizot, qui tient de l'ange
et du héros, et que l’on nomme Jeanne d’Arc, etc.
M. Fériel, procureur impérial à Chaumont, s'oc-
cupe sans relâche de l’histoire complète de tout ce
qui a rapport au château de Joinville; il veut ainsi
augmenter encore tout ce qu’il a écrit de bon sur son
“pays natal. Les archives du département lui viennent
ensaide , et l’on attend avec impatience son excellent
travail.
Un ecclésiastique , correspondant du Comité de la
fangue, de l’histoire et des arts, connu déjà par d’im-
portantes publications sur l’ancienne abbaye de Montié-
render, son pays natal, vient de publier une Notice
historique sur le prieuré de Coudes, près Chaumont.
Get ecclésiastique est M. Bouillevaux, curé de Perthes.
Il à recherché, avec une patience de Bénédiclin, tout
ce que les établissements monastiques d’uné partie de
la Champagne, établissements si long-temps dédaignés,
320 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
avaient eu d'utilité pour la France. Il fait voir, dans Sa
Notice sur Goudes, que ces moines, ces religieux du
moyen-âge , si méprisés au XVILL*, siècle , n’ont pas seu-
lement sauvé du naufrage les sciences , les lettres et les
arts, mais qu’ils ont été, selon lui, les défenseurs, les
bienfaiteurs des nations et des peuples. Enfin, le plus
petit monastère a contribué , pour sa part, la grande
œuvre de régénération qui a occupé tout le moyen-âge.
Des vues de Coudes, exécutées par M. Hector Guyot,
professeur de dessin au lycée de Chaumont, accom-
pagnent l’ouvrage de M. l’abbé Bouillevaux.
Le même goût de recherches , sur ces pieux établisse-
ments, a gagné M. Pernot. Il vient de terminer, après dix-
huit mois de recherches consciencieuses, la Nomenclature
de toutes les abbayes, monastèresoumaisons religieuses
des diocèses de la France. Il donne le nom de chaque mo-
nastère, en français et en latin; l’époque de sa fondation,
le nom du fondateur, si cela est possible; sous quel saint
ou quelle sainte la maison est consacrée ; ildit si le nom du
patron ou de la patronne a changé, l’époque de la réforme
du couvent, et quel était l’ordre religieux qui Phabitait.m
Dans un autre genre de recherches, M. Pernot vient, ‘de
terminer une collection de dessins , reproduisant le dra-
peau historique que pourrait avoir chaque département de
la France, en mettant sur ce drapeau les armes de la ville
chef-lieu du département, au milieu dela croix blanche de
l'époque des croisades , puis , dans les quatre angles, les
couleurs qui distinguaient anciennement les provinces de
France, comme cela avait lieu, avant 14789, pour les dra-
peaux des milices provinciales : ainsi, pour la Normandie,
le rouge cramoisi ; le Limousin et la Bretagne, le blanc ;
la Champagne , le bleu de roi ; la Flandre et la Provence
TRAVAUX DES ACADÉNIES EN 4856. 591
le jaune ; le Poitou, le rouge ; la Touraine, le violet ;
“Ma Bourgogne , le bleu céleste, etc. , etc. ; enfin , la Lor-
raine , le noir et jaune. “2
A l’occasion d’une question, bien décidée cepen-
dant, celle de savoir si Jeanne d’Arc était Lorraine ou
Champenoise , c'est-à-dire, FRANÇAISE , M. Pernot a
publié « une. carte; puis, deux mots bien simples, en
réponse à la brochure de M. Lepage, de Nancy, sur ce
sujet.
L'Histoire des Pères de la Mercy, par M. l'abbé
Godard, professeur au séminaire de Langres, a paru, par
fragments, dans le journal l'Union de la Haute-Marne,
et l’on s'occupe d’en faire un volume qui sera. plein
d'intérêt. La
Un vénérable ébdlébtistique : né à Vignory, cet endroit
qui possède une église romane si bien restaurée par
M. Boswilwald, architecte diocésain, M. Maupris, fait
imprimer , en ce moment, l’histoire, très-intéressante ,
de Vignory et de son château. Les noms les plus nobles
et les plus grands de notre histoire , comme les d’Am-
boise, les Béthune, etc., se rattachent aux ruines de ce
dc Âteau si pittoresquement placées. M. Pernot a secondé
les intentions de l’auteur en exécutant plusieurs vues
rappelant des souvenirs historiques et archéologiques ,
qu'il faut plus que jamais garantir de l’oubli.
MAYENNE.
J'aurais à vous rendre compte de l'important ouvrage,
en 2 volumes, de M. le comte d’Ozouville , intitulé :
Origines chrétiennes de la Gaule ( Lettres au R, P.
dom Paul Piolin, religieux bénédictin de la Congré-
Le
929 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
gation de France, à Solesme, en réponse aux 0b-
jections contre l'introduction du christianisme dans les”
Gaules au Hfset'au 1H°. siècles), si, dans vos séances du
18 et du 20 de ce mois, vous n’aviez entendu l’auteur lui-
même justifier, avec un remarquable talent de discussion
et une logique serrée, l’opinion qu’il a émise dans son
ouvrage. Tout ce que doit donc aujourd’hui en dire votre
rapporteur, c’est qu’il l’a lu avec le plus vif intérêt et
qu’il vous engage à suivre son exemple.
M
M. le vicomte de Kéridec vous"a remis une note
sur les travaux de la Société archéologique du Mor-
bihan.
Cette Société, fondée il y a plusieurs années, s’est
livrée , en 4856, sous la présidence de M. Jacquemel,
ingénieur en chef des ponts-et-chaussées , à des travaux
d’une grande importance et d’un grand intérêt. Ils se di-
visent ainsi qu'il suit :
Philologie. — M. Le Joubioux a fait connaître à la Soz
ciété trente-quatre -provérbes bretons , recueillis” pars
M. l'abbé Guillaume de Kergrist, et qu’il a traduits en
français. — M. Rosenzweig a donné lecture de frag-
ments d’un roman de chevalerie qu’il a pu déchiffrer sur
deux feuilles de parchemin servant d’enveloppe à des re-
gistres d'audience déposés aux archives départementales,
et y a ajouté des réflexions sur IRGPETEOTMARES qui
figurent dans ces feuilles manuscriles.
Histoire. — M. de Keranflech : Vie de saint Gu-
dual, patron de Locoal-Mendon , rétablie sur les docu-
ments les plus authentiques comparés avec la tradition
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 923
locale, — M. l'abbé Mouillard : Histoire du chapitre
et de la cathédrale de Vannes. — Antiquité de la
création du chapitre de Vannes. — Noms des cha-
nôines et autres membres du clergé diocésain devenus
évêques ou abbés. — Revenus du chapitre. — Constitu-
tion du haut et du bas-chœur. — Fondations pieuses en
leur honneur. — Travaux de construction de la cathé-
drale, — Luttes à la Révolution. — Noms des chanoines
à cette époque. — Prestation de serment des évêques de
Vannes: leur entrée. dans la ville (4404). — Installation
d'un archidiacre (1596).—Bulles de Nicolas V, Calixte IT,
Pie IL et Sixte IV, relatives à la construction de la
cathédrale et aux indulgences accordées à ceux qui y par-
ticiperaient par leurs aumônes.—Études sur l'architecture
des diverses parties de la construction. — M. Fouquet :
Lettres d'un Breton à un Breton. —Légendes sur Josse-
lin. — Établissement de la chapelle de Notre-Dame-du-
Roncier. — Les lavandières. —-Ha filandière de nuit. —
Usages divers répandus sur plusieurs points du départe-
ment.—M. Lallemand : Saint Clair, évêque et confesseur,
premier apôtre des pays de Nantes et de Vannes. Sa vie,
son culte, notice historique. — Tombeau de saint Clair
à Réguiny. — A quelle époque a eu lieu, dans les pays de
Nantes et de Vannes, la mission de saint Clair ? — Par
qui y a-t-il été envoyé ? — Saint Clair a-t-il élé évêque de
Nantes et ya-t-il fondé un évêché?—M, Lallemand répond
successivement à ces trois questions. — M. L. Galles :
Histoire du prieuré de St,-Martin de Josselin, membre
_ de la célèbre abbaye de Marmoutiers , à l’aide de trente-
quatre documents authentiques. — M. Rosenzweig : Du
droit de quintaine en Bretagne; soulèvement qu'il
excite dans deux bourgs des Cites-du-Nord. —
#
824 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCÉ.
M. Lallemand : Étude historique sur la série des
empereurs dont les médailles ont été trouvées dans
le monument"gallo-romain du Lodo, en Arradon.
Archéologie ‘proprement dite. — M. de Keranflech :
Notes recueillies dans une excursion à travers le Fi-
nistère.—Description de St.-Divy, du château de Tréma-
san; de celui de la Roche-Morice; légende sur ce dernier.
—.M. de La Fruglaye : Notes sur un tumulus de la
commune de Moustoir:ac, — Dolmens, débris de pote-
ries romaines, instruments-en fer, médailles, couteau
en silex ; celtæ ; table d’un dolmen soutenue par des pi-
liers enmagonnerie ; pierres à cuvettes ; découverte de
sept ‘vases. funéraires; traces d’une caisse en bois ; dis-
que en terre cuite. — M. de Fréminville : Rapport
sur la butte de Tumiac. — Dessin et notice relatifs
à une pierre à bassins creusée de cannelures régu-
lières, en Moustoir-ac. — Commission composée de
MM. I. Galles, de Fréminville, Grégoire et Taslé fils.
— Fouilles du Lodo et de Mané-Bourgerel, en Arradon.
— Découverte de deux. établissements gallo-romains.
— Nombreuses médailles romaines. — Poteries.—Rapports
et plans. — M. Rosenzweig# # Rapport sur la borne de
Mériadec, en Plumergat, signalée par Cayt-Délandre.
— Lecture d’une inscription lapidaire recueillie à
Kerplons, en Baden. — M. Jacquemet, président :
Notice sur les vitraux de l'église de Beignon et sur
les travaux de restauration qui y sont projetés. —
M. de Langlais : Notice sur l'église de St: Gildas
de Rhuis. — Nécessité des séparations. _— Fouilles exté-
rieures près de la chapelle de la Vierge. — Découverte
d’un tombeau. — M. L. Galles : Description détaillée
du château d’Elven et de ses fortifications. — M, Le
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 325
Bouëdec : Lettre relative à la restaura ti ndu calvaire
de Guéhenno. — M. Rosenzweig : Rapp ur le
de St.-Ghristophe, en Elven. D Réfu de la lecture
qu’on a adoptée jusqu’à ce jour pour dernière ligne
de l'inscription. — M. de Fréminville : À ” Notice sur la
chapelle de Notre-Dame de Quelven.. M. de Frémin-
ville : Dessins et Notice sur quatretpierres tombales
placées en-dehors du chœur de l’église de St.-Gildas de
Rhuis. — M. L. Galles : Description des cinq pierres
tombales situées dans le chœur de la même église. —
— M. Mouillard : Notice sur une armoirie. ‘brodée du
XVIII*, siècle, provenant de l’église des Sulniac. —
— M. de Fréminville : Note sur une pierre sculptée du
cimetière de Landaul. — Recherches sur les pierres
main-liève ; leur usage 3 dessins et inscriptions qu’elles
portent le plus souvent; ymologie de leur nom.
Le musée archéologique ; nouvellement créé, possède
de nombreux fragments de poteries trouvés sous des dol-
mens, et une collection de trois cents médailles romaines
recueillies dans le département.
Les publications de 1856 sont :
Une Vie de No - Vincent Féÿrier , par M. l'abbé
Mouillard.
Sous presse, une Monographie, fort intéressante ,
de la cathédrale de Vannes , par le même auteur.
M. Lallemand a publié un Annuaire qui contient des
documents historiques d'intérêt local ; une notice sur
les découvertes archéologiques et numismatiques faites
dans l'année , et la se d’un des cantons.
Il existe, à Vannes, une société philomathique qui s’oc-
- cupe particulièrement d'histoire naturelle, etde la con-
servation de la bibliothèque.
326 INSRIPUT | pes PROVINCES DE FRANCE.
4 Mose1z.
vouêl devez à M |
Société dhstire naturelle à é la ville de Metz, le
compte-rendu | ‘des travaux de cette Société. L'intérêt
scientifique qu’il. présente , et la difficulté d’en faire
l'analyse, m’imposent l'obligation de le transcrire textuel-
lement :
« Dans l'impossibilité de donner la série des sujets qui
ont été traités par la Société d'histoire naturelle de Metz,
en 1856, ik niésera question, dans ce court aperçu, que de
ceux qui at quelque importance, au point de vue des
progrès de la science, ou de son application aux différentes
branches de l’industrie. En résumant les travaux de cette
Société, on suivra l’ordre naturel des matières.
« La géologie départementale vient en première ligne.
« Pour combattre la supposition gratuite d’un contact
immédiat du grès supra-liasique avec le calcaire oolithique
et celle d’une transition insensible de l’un à l’autre, la
constitution de l’oolithe a été de nouveau représentée avec
détail et reste des mieux étudiées, non-seulement dans
la Moselle, mais encore dans la Meurthe, ainsi que dans
la a Meuse, L La connaissance de tout ce qui s’y rattache ,
favorisée par de nombreuses recherches, par des fouilles
et d'importants travaux, que les besoins de l’industrie
métallurgiqué ont fait multiplier à l’infini , autorise , au
lieu d'en admettre la suppression en aucun point , à
regarder le gîte d’hydroxyde oolithique comme un horizon
géologique des mieux connts ; seulement, il est loin de
présenter partout le même développement. "D'une puis-
sance remarquable à l'Ouest, et surtout à l’extrémité nord
M. le Es ennocque , délégué de la
ë
du plateau jurassique, il se réduit lement à la
hauteur de Metz, ce qui a pu induire eur, quand, en
le recherchant, sans disposer des mc suffisants d’ex-
FRE on à cru ne pas, le Tr dentin.
occupé par la mer jurassique, s’est alraissé au-dessous de
son niveau primitif, à mesure qu'il se recouyrait de
sédiments nouveaux.
« De l’étage oolithique passant aux lias, la conviction de
l'importance que présente toujours l'étude comparée des
terrains d’une même époque dans des pays différents,
pour fixer dans le nôtre avec plus de précision des con-
naissances à cel égard , a fait établir une comparaison
de ce genre, entre le lias inférieur de la Moselle et celui
de la Souabe. L'un et l’autre ont paru identiques, offrir
les mêmes fossiles et présenter les mêmes conditions
stratigraphiques et pétrographiques.
Au-dessous du bone-bed, recouvrant lui-même un
grès jaune siliceux appartenant à la formation triasique,
se trouve la première assise liasique, désignée sous le nom
d’assise à Ammonites psilonotus. Elle se compose de
plusieurs bancs de calcaire bitumineux ou gr éseux, ppriois
recouverts de minces lits de grès. Moins riches. en fo IS
dans nos contrées qu’en Souabe, nous pouvons expliquer
KA
cette différence par l'insuffisance des exploratio 1 Den les
trois points très-peu étendus où seulemeéhtté lle à b
reconnue jusqu’à ce jour. Pt à
« Une seconde assise, constituée par un massif dé grès
que séparent trois lits à cardinies , et parfois un seul ,
représente le grès de Hettange ou de Luxembourg. On y
reconnait un grès à Angulatus et successivement une
328 INSTITUT DES PROVINGES DE FRANCE.
roche _cuivreuse. à à' turritelles , une roche tendre où ce
dernier fos ile prés omine encore, accompagné de nom-
es + SAR)
breux gastéropodes ; u une première gryphée s’y trouve
aussi, et se É termine par un lit renfermant des fucoïdes.
Puis, apparaissent des ( déblais dont les pierres, carriées à
leur surface supérieure, semblent indiquer l’action puis-
sante des-flots ; tandis qu’à leur surface inférieure, elles
présentent des reliefs et des creux d’astéries, ainsi que des
tubes allongés de vermiculaires. Dans nos contrées, ce
grès renferme cinq fois plus de fossiles, que dans la
Souabe ; les lits à cardinies , à gastéropodes et à fucoïdes
y sont également plus développés. En outre, dans une
carrière, à Zætrich près de Hettange, se remarquent, un
lit supérieur, entièrement pétri de perfor nts indices d’un
rivage, et des plaques d’une grande. din 1en sion couvertes
de tubes allongés, déprimés dans le milieu, el attribuables
à des térébellaires.
« La troisième assise correspond au calcaire à gryphées
proprement dit. Elle se compose d’alternances de bancs
calcaires, de marnes ou d'argile. Sa partie supérieure est
occupée par un lit à grandes cardinies.et par d’autres lits
plus minces, garnis d’entroques, el recouverts par des
couches marneuses pétrolières,
Les éléments de composition pour cette partie du lias
inférieur, : mieux développés et plus abondants en fossiles
dans notre département qu’en Souabe, restent néanmoins
identiques dans les deux pays Dans l’un, comme
dans l’autre, un certain banc, plus homogène et plus
continu , est exploité pour en tirer des dalles et des
parements de cheminées; mais la couche à grandes
cardinies et celle à pentacrines nous font* défaut, la
première n’ayant encore été reconnue qu’à Rimogne,
ë
ou
TRAVAUX DES ACADÉMIES! ÆN Je. 329
près de Mézières, dans les Ardennes. Quant aux marnes
supérieures pétrolifères que caractéi à ne bélemnite,
la première du genre qui apparaisse”, S n'ont jusqu'à
ce jour été. ‘constatées qu'au pont di À faguy et sx
d’Ars-Laquenexi. | à r
” « Quoi qu’il en soit cependant , et les derniers de ces
faits comme quelques autres le laissent pressentir ,
l'identité dont il est question n’est pas à cons
d’une manière absolue et générale: il ya plutôt à pensér,
au contraire , qu’une similitude réelle n’existe que dans
les environs de Hettange; elle est surtout déterminée
par. l’absence des marnes rouges , fournissant ailleurs
chez nous un rizon, et par la présence du grès
lui-même qui jQuabe, représenterait plutôt l’état
> normal d’une formation , que ce qui plus positivement
constitue cet état dans les autres parties de notre
département , où également le banc de calcaire, exploité
pour être converti en tablettes, ne représente qu’une
particularité exceptionnelle, qui est loin de se reproduire
dans toute l’étendue de lassise, comparée à celle dans
laquelle, en Souabe ; c on en indique l'existence.
« Comme tribut paléontologique , après les obser-
vations et réflexions géologiques qui précèdent; nous
avons eu à enregistrer , parmi les mollusques céphalo-
podes, assez rares dans la Moselle, la découverte d’un
fossile nouveau au point de vue du genre et de l'espèce.
Il appartient au lias supérieur et en même us à
l'étage oolithique inférieur. var
Des traces d’ornements, de tubercules et d'articulations
sur quelques portions de cylindres un peu arqués, con-
stituant sa partie moyenne, ont paru suflire pour caracté-
riser en lui un Ancyloceras , qui, en raison des grandes
330 INSTITUT DES PROVINGES DE FRANCE.
dimensions qui l'éloignent des espèces du même genre
déjà connues , ER reçu la dénomination 1 de
Mosellensis. u +
« D’autres tentatives de détérminato appliquées
également.à des coquilles fossiles, n'étant pas toujours
sans difficulté, surtout dans les cas où les espèces trop
voisines, les unes des autres tendent sans cesse à se
confondre, il n’a pas paru sans intérêt de chercher , en
examinant des séries de gryphées, quels pouvaient être
les caractères les plus propres à constituer entre elles des
différences invariables, quelles que soient d’ailleurs la taille
ou les modifications de forme qu’elles sontsusceptibles de
présenter , suivant leur âge ou les sguéions du terrain
qu'elles ont occupé. ci À |
« Parmi elles, et pour ce qui concer ne le champ d’explo-
ration qui nous est ouvert, se distinguent, la Gryphée ar-
quée, caractéristique du lias inférieur ; la Gryphée oblique,
appartenant au calcaire ocreux, et la Gryphée cymbium,
aux grès médiolasiques et aux marnes oxfordiennes.
« La première , la Gryphée arquée os se reconnait
aisément à sa forme arrondie sur le dos, et plus parti-
culièrement à son talon allongé , recourbé en crochet,
et à sa nervure latérale, qui, partant du talon, n'arrive
pas jusqu’au bord de la coquille. Dans cette espèce, la
cicatrice d’adhérence, toujours supérieure , n’est jamais
latérale ni inférieure, comme dans les autres, et sa valve
paraît coupée carrément pour l'insertion du ligament.
Le talon, encore recourbé en crochet et proéminent,
est déjà sensiblement comprimé dans la Gryphée oblique,
qui n'offre plus de nervure latérale. L'absence de ce der-
nier caractère, avec la brièveté du talon, distingue la
Gryphée cymbium, qui est en outre plutôt aplatie et
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 991
élargie qu’arrondie et allongée dans sa forme générale.
Comme l’un des caractères de celte dernière qui ne sont
pas non plus à négliger, sont encore à noter les orne-
ments de la Valve supérieure, constitués par des stries
fines et régulières, disposées parallèlement entre chacun
de ses plis d’accroissement.
« Comme l’histoire des corps organisés fossiles, celle
des substances minérales appartient à la géologie, et, à
ce titre, dans l’ordre de matières que nous suivons, un
mot sur le gisement de cuivre carbonaté , vert et bleu,
remis en ‘exploitation et observé sur les lieux,aux environs
de Vaudrevange, trouve ici sa place. Après avoir suivi les
traces de cette ‘xploitation à une époque déjà très-reculée,
et apprécié ce v’elle promet d’être aujourd’hui, donnant,
en traitant le minerai par l’acide hydrochlorique affaibli,
25 kilogrammes de cuivre métallique pour une surface
de 4 mètre carré, on arrive à cette conclusion que de
semblables tentatives seraient possibles à Hargarten, à
Falck, à Orenthal, près de St.-Avold, et qu’elles fourni-
raient une nouvelle ressource dans cette partie de notre
département, déjà favorisée par ses forges et par l'étendue
de son important bassin houillier.
« Les sciences naturelles, bien qu’elles embrassent la
connaissance de tous les phénomènes de la nature, ont
leurs limites ; la Société, d'histoire naturelle de Metz ne
s’est jamais. proposé d’en parcourir en entier le domaine.
Cependant , quelquefois elle est entraînée, par l’un ou
l’autre de ses membres, en dehors du cercle qu’elle s’est
tracé. C’est ainsi que dernièrement Fun d'eux, témoin
oculaire et rapporteur obligé de l'événement, a appelé
son attention sur quelques effets bizarres, attribuables à
l'électricité; voici le fait :
992 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« Le 21 août 1856, après quelques jours d’un temps
très-sec et une température de 24 degrés centigrades, de
gros nuages, venus presque en même temps de l'Ouest
et de l'Est, furent, en se rejoignant, accoOMpagnés d’un
coup de vent très-impétueux parti du Sud-Ouest, et la
foudre tombait sur une longue pile d’obus de l'arsenal ;
à quelque distance de ce point, deux ouvriers en
ressentaient également, mais peu gravement, les effets.
Au tiers de la longueur de l’une des faces latérales de la
pile frappée , et dans laquelle le choc semble s’êt 'e exclu-
sivement concentré , 140 environ des projectiles! ont elle
se composait furent arrachés et projetés en avant vers
la gauche, 11 y laissèrent une brèche, formée aux dépens
de la couche d’obus extérieure , et sans dérangement des
couches intérieures : seulement dans ces dernières, plu-
sieurs obus furent retournés, et leur œil perdit, pour
devenir supérieur, la position inférieure qui réglemen-
tairement lui est assignée. Il y eut aussi à remarquer dans
la couche extérieure , au point où s’est limité l’arra-
chement , que plusieurs autres obus, formant une rangée
inclinée, restèrent comme suspendus, et dans une
situation d'équilibre instable.
« La pile ainsi atteinte, orientée à peu près Nord-Sud,
distante de 40 mètres des paratonnerres placés sur les
bâtiments voisins, repose sur un lit de.pierre calcaire
concassée, d’une épaisseur suffisante pour la préserver,
par sa perméabilité, de l'humidité susceptible de provenir
du sol.
Dans cette dernière circonstance , où il n’est plus
offert au fluide électrique que de faibles moyens d’écou-
lement, jointe à celle de se trouver en dehors de la sphère
d'activité des paratonnerres, on peut aisément concevoir
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 333
que la pile a pu devenir elle-même un centre de puissante
attraction ; mais on s’explique plus difficilement comment
des obus restés en place ont éprouvé un mouvement
de rotation, malgré l'énorme pression qu’ils ont à
supporter par douze points de contact. Dans ce cas,
le fluide électrique, en pénétrant par l'œil dont est pourvu
l’obus, représentant une sphère creuse à parois quelque-
fois inégales, ya-t-il produit, en se répandant à sa surface
intérieure , des forces tangentielles, qui l'ont forcé à
glisser et à tourner sur lui-même ? Une supposition è
cet égard : ne laisserait aucun doute , si l’on admetfait en
preuve des traces circulaires de frottement remarquées
à l'extérieur, et qui peut-être eusseni été plus sensibles
encore sur destprojectiles plus récemment colcotarisés
que ne l’étaient ceux dont il vient d’être question.
« Ce qui frappe dans ce fait, c’est l'intervention d’une
puissance myStérieuse à rechercher pour en diriger, s’il
est possible, l’action. Un pareil sujet, sans doute, est
bien digne d’être recommandé à toutes les réflexions.
Mais il n’est pas le seul à mériter un semblable pri-
vilége, et en quittant la physique, un instant abordée,
pour revenir à l'histoire naturelle proprement\dite, nous
en citerons d’autres qui, sans se rattacher à des mani-
de festations aussi éclatantes des forces répandues | dans
l'univers, n’en ont pas moins les leurs dans une mesure
assez riche en surprises, pour que l’on soit entraîné à
s'occuper d'eux à leur tour, Relatifs à l'entomologie , ils
ressortent d’une suited’études ayant pour objet les insectes
nuisibles aux arbres fruitiers, et aux poiriersen particulier.
Plus de 130 espèces, contre lesquelles de justes préven-
tions sont établies, ont été examinées et signalées non-
seulement spécifiquement, mais encore d'après leurs
94 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
mœurs et la nature des dégâls qui souvent eñ font de
véritables fléaux; et, de ce travail est résulté un traité
spécial d’entomologie appliquée , d’une utilité incontes-
table, toutes les fois qu’il:s’agit de déployer, contre les
aggressions et les ruses infinies des plus petits êtres,
toutes les ressources que suggère l’esprit d’observation.
« Pour satisfaire des intérêts plus graves encore,
parmi les nombreux parasites du blé, une Cécidomyie,
dite Mosellane, parce qu’elle a semblé différer des autres
espèces déjà décrites, du même genre, et remplacer dans
nos contrées la Cecidomyia trilici, reconnue ailleurs,
en France, pour faire subir à nos récoltes en rôment
les plus déplorables déficits, a participé avec autant
d’à-propos aux recherches dont les arbres fruitiers ont
d’abord fourni le sujet.
« Les larves jaunes, annelées, apodes, de 172 milli-
mètre de largeur sur 2 millimètres au plus de longueur,
de ce petit diptère, assez généralement accompagné d’un
platigaster, son antagoniste providentiel, envahissaient
déjà, en juin, un grand nombre d’épis et avaient attaqué,
soit le dixième, soit le vingtième des grains que chacun
d'eux devait produire. L'époque de leur naissance a
coincidé avec celle de la fécondation des ovaires, sur
lesquels elles restent fixées tant qu'ils ne sont pas
épuisés ou durcis par les progrès de la maturité, qui,
en s’avançant vers son terme, indique alors le. moment
de leur retraite et celui du choix qu’elles font d’un lieu
favorable à leur dernière métamorphose. Dans ce court
espace de temps, on a de la peine à se faire une idée de
l'étendue des ravageS qu’elles ont causés et des pertes
qu’elles ont fait éprouver. Ces pertes, évaluées approxi-
mativement et d’après le dépouillement de 300 épis en-
EU
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 895
viron, pris au hasard dans 32 communes, s'élèvent
au chiffre énorme de 70,000 hectolitres, représentant
2,000,000 en numéraire d’après le prix du blé sur les
marchés de Metz, en 1856.
«Ce que je viens d’énoncer rapidement, dans le
but d’aider à la découverte des moyens propres à sauve-
garder,la fortune publique,:ne m’arrèêtera pas dans l'expo-
sition non moins succincte qui me reste à faire de
quelques communications botaniques, parce que dans
celles-ci, à leur tour, on trouvera peut-être autant
de valeur que dans les précédentes, si l’on veut, en
les considérant au point de vue de la science elle-
même , y voir le témoignage d’un grand amour pour
elle, ayant pour foyer la société qui vous demande
FA de vouloir bien devenir l'interprète de ses efforts. Ges
communications , en effet, elle les a provoquées en
Ho ant avec empressement à la restauration du
Jardin botanique de la ville; et en la poursuivant avec
persévérance ; elle pense ainsi pouvoir appeler sur cet
étäblissement la faveur qui doit s’y attacher, si l’on
est sûr d’y rencontrer, parfaitement classées, un grand
nombre d'espèces de choix, et de préférence toutes
. celles qui spécialisent davantage la végétation du dépar-
lement ; la réunion, enfin, des circonstances les plus
propres à répandre et à développer; de plus en plus,
le goût. pour l'étude des plantes, affranchie des diffi-
cultés qu elle présente toujours. à son début. A tous ces
soins” la à statistique phytographique a gagné immensé-
ment, Pour: certaines plantes , on est arrivé à reconnaitre
un plus grand nombre de stations, et la découverte
inattendue d’une vingtaine d’autres a été réalisée avec
bonheur, Peu dé flores locales ont pu, dans un aussi
æ
336 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
court espace de temps, s'enrichir autant que la flore de
la Moselle, Les récentes acquisitions, successivement an-
noncées , qui légitimement sont à y introduire, constitue-
ront, en réunissant les notices détaillées qui les con-
cërnent une intéressante addition aux publications dont +
l'initiative est laissée à la Société,
« En terminant cet exposé, je dois faire conn aitre à
l’Institut des provinces que les travaux de la Socit té d’his-
toire naturelle de Metz, tous les j jours mieux appréciés
par la population, lui ont acquis le concours de plusieurs
jeunes gens studieux qui. s se livrent, avec ardeur et suc-
cès , à l'étude des s ects, naturelles, et que plusieurs
membres du clergé. même s ’associent tous les jours à
ses travaux. La Societé de Metz est heureuse de pouvoir
constater ce résultat de ses efforts. » 4
M. F.-M. Chabert, membre titulaire de l’Académie”
impériale de Metz, HD honoraire de la Société grand-
ducale de Luxembourg , membre correspondant desAc:
démies du Gard, de Nancy, elc., vous a adressé plu-
sieurs publications importantes qui dénotent, dans leur
jeune auteur , avec le goût éclairé des recherches histo-
riques, des connaissances variées. Ces ouvrages sont :
4°, Le Journal du siége de Metz den. 1552 (Pdf
ments relatifs à l’organisation de l'armé
Charles-Quint et à ses travaux dey
description de médailles frappées J sion la.levée ”
du siége). …. LS
c'est une édition nouvelle et compl
de ce siége, par Bertrand de Bergerac, ay
et les variantes de la réimpression de Coll
plan gravé*par Sébastien ua vuguientée, de, dou
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 337
ments importants , entièrement inédits, relatifs à l'or-
ganisation de l’armée impériale et à ses travaux devant
Metz, faisant connaître les embarras de Charles-Quint,
et contenant, en quelque sorte, le journal de sa vie pen-
dant son séjour sous les murs de Metz et à Thionville, et
enfin les réflexions de ce grand homme sur les causes qui
le forcèrent à abandonner son entreprise. Ces docu-
ments, extraits du bureau de l’ancienne chancellerie im-
périale, sont actuellement déposés aux x archives DUT
d’Espagne, dans la ville de Simancas.… +
2°, Une notice sur Gharles- “Louis-Auguste Fouquet ,
duc de Belle-Isle, gouverneur de la province des Trois-
Évêchés, fondateur de l’Académie royale de Metz, ma-
réchal et pair de France , ministre de la guerre, membre
de l'Académie française, avec un précis historique des
travaux ét des embellissements exécutés dans la ville de
Metz, de 1727 à 1761 ( 219 pages ).
3°, Les Chroniques de la noble ville et cité de Metz,
par J ean Le Châtelain, réimprimées pour la première fois,
et précédées de notes bibliographiques. —Ces chroniques
sont en vers ; elles sont, dit l’auteur, un monufent/sin-
cère dans bon nombre de ses parties, et utiles à consulter
pour l’histoire de Metz. La manière dont elles sont écrites
égaiera de temps en temps le lecteur; elles renferment
quantité de particularités curieuses et singulières qui le
dédommagerontdes récits apocryphes qu’il pourra rencon-
». trer dans le commencement (97 pages).
k°. Des notes pour servir à l’histoire de l'hôpital St.-
Nicolas de la ville de Metz | Extrait des Annales de la
Charité, comprenant 7 pages ).
PA Un rapport sur Ja situation de la Société d’horticul-
ture de la Moselle, dont M. Chabert est secrétaire-général.
15
338 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
NORD.
M. Taïlliar vous à rendu compte des Mémoires de
da Société impériale d'agriculture, sciences et arts
de Douai, centrale du Nord.
Ces mémoires, concernant l’agriculture, l’horticulture,
les sciences exactes et naturelles les sciences morales
et historiques, Ja. litiérature et les beaux-arts, com-
prennent jusqu’ "ici ( leux. séries : Fe
La première série, dont Ja oi publication date
de 1826, se. compose de treize volumes. A là fin du
treizième volume se trouvent des tables générales, ré-
digées avec beaucoup de soin par M. le conseiller Cahier.
L'auteur, après avoir _ indiqué la tomaison des treize
volumes, donne successivement la table alphabétique
des auteurs, ef celle des matières. Il y ajoute une table
des matières contenues dans les deux volumes de bulle-
tins ‘agricoles publiés par la même Société, du 4°.
novembre 1846 au 31 novembre 4848.
Cette première série se complète par un volume in-
titulé : Recueil d’actes des XII°. et XIIT°. siècles , en
langue romane-wallonne du nord de la France, avec
une introduction et des notes de M. le conseiller Tailliar,
ancien président de la Société (Douai, 4849 ).
La seconde série, jusqu’en 1857, comprend trois vo-
Jumes. FA ,
Le tome L (1849 à 1851) a été publ en 1852. H
contient notamment : LE | |
Un Mémoire sur un fœtus humain mOnstrUEUR ;
par M..le docteur Maugin ;
Des Remarques sur le Me par le docteur Es:
un texte de la RAA de Turpin. de tuite, en 12
FE DA
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 339
calier, suivies d’un vocabulaire RAR. A G.
Briston (XEV°. siècle) ; |
Un Essai sur l’histoire des institutions dans le nord
dela France(1”°. partie, ère coque, par jaiiar, avec Mu
quatre planches repr ol
Le tome II (185: re-
marque ‘plus pa
Un Mémoire |
l’abbaye de Mc
Un coup-d'œil
Douai, par M. Cal re ve #
De co - souvent: ’usaye des habitants de
a Re sur la maiso «
queues: avocat. Dans cet o1 Éa
l’ordre de Michel de Harnes. Le texte de cette. traduction,
du XI. siècle, se trouve à la snistiiipne. de Copenhague
à Wa
Fr F0 *
0 F ut
LA à 14 FR s (à ' %,
D Essai sur pe: biniure religieuse , avec une | nolice
t flamand par M. Asselin.
*
340 INSTITÜT DES PROVINCES DE FRANCE,
La Société continue; en outre, la publication de ses but.
letins agricoles et horticoles qui forment déjà plusieurs
volumes.
La Société Dunkerquoise pour encouragement des
sciences, des lettres et des arts (4) poursuit toujours
avec le même zèle le but de son institution.
Les travaux qui vous ont été signal , au Congrès de
l'année dernière, ont été mentionnés et donnés en exemple
dans les] journaux yes départements limitrophes, et jus-
que dans un journal de la Guienne. Ils ont eu du
retentissement dans quelques villes de la Belgique. En
Espagne, onena parlé dans un journal de Madrid. L'’an-
cienne domination espagnole sur nos contrées du nord de
la France a inspiré à la Société Dunkerquoise l’idée de
se faire des correspondants au centre de la péninsule,
Cette heureuse pensée, due à l'initiative de M. Chamomin
de Saint-Hilaire, consul. d’Espagne à Dunkerque et
membre de la Société, amènera certainement des résul-
tats utiles, profitables surtout à la science historique.
Une autre inspiration, dont il faut louer la Société
Dunkerquoise, a été la création d’un musée naval. On
comprend combien la science nautique peut retirer de
fruit d’un pareil établissement dans un port de mer.
Aucune des sections dont se compose lasSociété n’a
négligé les travaux qui la concernent. |
La section des lettres a produit : des traductions de
poèmes anglais de Chancer et de Byron;par. M. Allard ; —
la relation du naufrage du navire les Trois-Sœurs, par
(1) Rapport de M. Carlier, délégué de la Société Dunker-
quoise,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. au
M. Conseil ; — l'Histoire de la Flandre religieuse, par
M. V. Derode; cet ouvrage est sous presse ; — d’autres
écrits du même auteur, intitulés : Le procès d’un curé
de Dunkerque, en 4599; — De l’importance de la
philologie ; — L’Hépital des fous, etc.
Les procès-verbaux de la section des arts mentionnent
deux plans de Dunkerque, au XVI°, siècle et en 1851,
par M. Leblond. On y trouve constatés les éloges accordés
par l’opinion publique au tableau de M. Desmidt, repré-
sentant une des brillantes actions navales de Jean Bart.
Cette toile remarquable est dans les pérortions de quatre
mètres sur trois.
Les diverses branches des sciences ont été traitées dans
les ouvrages suivants : Gourbe comparative du motve-
ment de la navigation de Dunkerque, depuis le XIX°.
siècle , par M. Decharme, ingénieur ; — Notice sur la
poulie Herrebrecht, par M. Everhaert; — Note sur une
tige phénoménale de belterave, par M. Ortille ; — Notice
sur le Corpus chronicorum Flandriæ; Notice sur l'église
de West-Cappel, par M. Bonvarlet; — Notice sur les sei-
gneurs de West-Cappel, par M. Cousin ; — Statistique
de la population de Dunkerque, pour 1856, par M. v.
Derode ; — Observations météorologiques, faites à Dun-
kerque , en 14856, par le docteur Bobilier,
Je eiterai aussi les œuvres suivantes produites par les
correspondants de la Société : Théorie de la fermenta-
tion ; —Plan d’une corderie mécanique, par M. Andrieu.
— De la tuberculisation des ganglions bronchiques chez
ladulte, par MM. Duriau et Gleïze ; — Notice sur une
habitation gallo-romaine, trouvée à Fagny (Meuse),
avec plans et dessins, par MM. Ortille et Ottman; —Notice
sur l'abbaye de Beaupré, par le docteur Le Glay, archi-
942 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
viste du Nord; — Lettres sur des médailles d’or gallo-
romaines, découvertes à Ledringhem, par le docteur
Morael de Wormhout.
La Société prépare, en ce moment, la séance publique
qu’elle tient chaque année, le 24 juin, jour de la fête
locale. Ces réunions intéressent vivement la population ;
elles exercent chaque fois sur elle plus d'autorité et
d'influence. La solennité de la distribution des médailles,
décernées aux meilleurs ouvrages scientifiques, artistiques
et littéraires , envoyés au concours ouvert par la Société,
offre un excellent moyen d’émulation, qu’approuveront
tous les esprits que préoccupe le progrès intellectuel des
masses. L'avenir ne peut qu’en recueillir de bons résultats.
La Société Dunkerquoise a adopté une mesure d’un
effet certain pour assurer sa marche vers le but pour
lequel elle a été instituée. Elle a décidé que la perpétuité
serait attachée aux fonctions de son secrétaire, et elle a
confié ces fonctions au plus zélé de ses membres fon-
dateurs, à M, Victor Derode, sous l'inspiration duquel
fut élaboré , en 1851, le réglement qui la régit.
M. _Carlier, en sa qualité de délégué du Comité
flamand de France, à Dunkerque, vous a fait connaître
les travaux de cette Société, instituée, en 1853, pour
sauver de l'oubli le passé de l’histoire religieuse et ci-
vile, des mœurs et des coutumes de la Flandre ; passé
que nous voyons se, démanteler chaque jour , et dont
le langage seul nous est encore conservé intact.
Au préalable, M. Carlier vous a annoncé que le deuxième
volume des Annales du Comité flamand, qui à paru
l’année dernière, et dont le Congrès de 1856 a reçu un
exemplaire, a valu à la Société les plus honorables éloges.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 418956. 943
il a été analysé dans la Revue des Sociétés savantes , et
de chaleureux témoignages d'approbation lui sont venus
de Belgique et d'Allemagne, pays avec lesquels notre
langue nous conserve des affinités sympathiques.
Depuis lors, un nouveau volume d’Annales a été
préparé ; il est sous presse, et ilcontiendra, entre autres
mémoires curieux, une notice de M. Victor Derode sur
la pénalité, au XVEÉ. et au XVII°, siècles, dans la Flandre
maritime , et notamment à Dunkerque. Tous les docu-
ments de ce travail émanent des registres des sentences
criminelles qui. reposent aux archives de la mairie de
cette ville, et sont appuyés de leurs textes flamands. Les
contrevenants à la défense de lire certains livres, sans:
doute ceux qui traitaient des matières de réforme reli-
gieuse , étaient condamnés à payer une amende de 500
carolus ; puis, en cas de récidive, les hommes avaient
la « teste copée, » les femmesétaient « mises en terre
toutes vives. »
Une autre notice, non moins intéressante, est inti-
tulée : Ypres et SL-Dizier ; étude sur deux communes
du moyen-âge. L'auteur y a étudié, sous toutes ses
faces , le fait, unique dans notre histoire nationale, de
la juridiction échevinale de la ville d’Ypres, en Flandre,
établie en 1228 sur la ville de St.-Dizier, en Champagne,
par le-sire de Dampierre etsde.St.-Dizier, qui avait
épousé la sœur de la comtesse. Jeanne. de Flandre. Cette
suprématie de la ville flamande sur la ville _champenoise
fut maintenue, pendant deux siècles et demi, jusqu’en
1470 ; presque toutes les consultations et les sentences
qui la constatent ont été analysées dans le curieux travail
de M. Carlier,
Le Comité flamand a aussi adopté, sur sa pr oposition ,
SU INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la publication d’un Bulletin mensuel, destiné à repro-
duire l’esquisse de ses travaux intérieurs, et les notices
de peu d’étendue, réservant aux volumes de ses Annales
les mémoires de longue haleine. Deux numéros de ce
Bulletin ont été déposés sur le bureau du Congrès. On
remarquera, dans lun d’eux, une notice sur l’argenterie
et les ornements qui furent enlevés aux églises de la cir-
conscription de Dunkerque à l’époque de la Convention.
Le Bulletin mensuel sera adressé à tous les membres
correspondants du Comité, et il aura pour effet de les
intéresser à l’œuvre du Comité flamand , beaucoup plus
que la seule publication annuelle d’un volume d’Annales
qui n’était souvent pas envoyé à chacun d’eux. Ces rela-
tions permanentes entretiendront le zèle des correspon-
dants et les exciteront, sans doute, à prendre eux-mêmes
leur place dans les publications ultérieures du Comité.
Cette mesure répond aux questions qui avaient été
discutées, dans la séance du 30 mars du Congrès de
1856, sur les moyens d'augmenter la mise en circulation
des publications académiques, et sur les améliorations à
apporter dans la part que prennent les correspondants®
des Sociétés aux travaux communs. Elle aura également
pour résultat de consolider et d'augmenter l'influence de
la Société-mère , suivant le vœu exprimé alors par l’ho-
norable directeur du Congrès.
En dehors du Comité. flamand, mais s’y rattachant
intimement , il a été publié par ses membres , d’abord :
la traduction, envers français, d’un petit poème du
célèbre Jacob Cats, intitulé : Kinder "spel, ou les jeux
de l’enfance. Cette traduction est due à M. l’abbé Bloeme
de Roquetoire. Un autre ouvrage a paru ensuite, d’une
plus haute portée scientifique et artistique ; il est du pré-
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 3/8
sident du Comité flamand, M. Ed. de Coussemaker, cor-
respondant de l’Institut de France. Le volume des Chants
populaires des Flamands de France, accompagnés de
leurs mélodies originales, a réalisé, d’une façon plus com-
plète encore pour la Flandre, le beau travail que M. de
La Villemarqué a publié sur les chants de la Bretagne.
Il est fait à l’imitation des grands ouvrages des philo-
logues allemands sur les chants populaires de leur pays.
L'œuvre de M. de Coussemaker est aujourd’hui connue
et appréciée des savants spéciaux qui s'intéressent à cette
partie de l’art poétique et artistique qui sort directement
de la source populaire. Cette œuvre garantit lexcel-
lence de la direction d’études donnée au Comité flamand
de France, et la continuation active de ses efforts vers
le but de son institution.
ORNE.
Dans la note suivante sur les travaux du Comice
agricole de Putanges, M. le comte de Vigneral, son
président, vous a fourni des renseignements pratiques
dont vous apprécierez l'importance:
« Les conférences mensuelles dt Comice ont été pu-
bliées jusqu’en 1853. —1Celles. qui ont eu lieu depuis
cette époque le seront très-prochainement. J'indiquerai
donc brièvement les questions qui ont été QU cette
année, aux membres du Comice,
« L'étude de l'application des instruments nouveaux
a été Pobjet des nombreuses conférences, dans lesquelles
on a déterminé les avantages recueillis par l'expérience.
« Il est difficile de substituer une chose nouvelle à
346 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
une vieille routine. Ce n’estsque par des exemples que
l'on émeut lPhabitant des campagnes.
« Aussi, pour faire apprécier les avantages des se-
moirs mécaniques, le Comice a-t-il procédé d’abord par
la plantation à la main, à l’aide du plantoir Le Docte.
Frappés de l’excessive économie de semence et de la
beauté des récoltes, les cultivateurs ont compris, de
visu , que le semoir mécanique faisait mieux que la main
de l’homme.
« Le Comice à fait venir un semoir de Jacquet-Ro-
billard, d’Arras ; plusieurs cultivateurs en ont fait usage :
cet instrument sera promptement propagé. — Que dire
contre un instrument qui économise la moitié, et plus,
de la semence; d’un instrument dont la propagation
nous préserverait du déficit des années ordinaires ?
En effet, si 12 millions d'hectares sont, chaque année,
consacrés à la culture du blé, on emploie à l’ensemence-
ment, par l’ancienne pratique , 2 hectolitres par hectare,
soit 24 millions d’hectolitres. La moitié, ou le tiers au
moins de cette quantité (c’est-à-dire 12 ou 8 millions
d’hectolitres) serait donc ainsi réservée au commerce, et,
en comblant le déficit habituel, nous réaliserions, chaque
année , une économie de près de 200 millions.
« Pour assurer la production du blé, il faut songer
à l’engrais que réclament nos champs. Pour le produire
en abondance, on doit accroître le nombre et la qualité
du bétail : c’est dans cette double vue que le Comice a
souvent agité la question de. la nourriture des animaux,
parce. qu’elle est pratiquée par l'un des premiers agri-
culteurs du Nord , M. Decrombecque,
« Voyant l'insuffisance de la production de la viande
démontrée par le prix, sans cesse croissant, de cette
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 947
base de notre alimentation , le Comice n’a trouvé de
remède à l'insuffisance du bétail qu’en augmentant,
par le coupage et la fermentation des pailles et des four-
rages ,.les moyens de nourrir, avec les produits ordi-
naires de la ferme, un nombre danimaux double et
triple même de celui qui était précédemment entretenu
surala même ferme.
« Pour obtenir cette fer mentation lorsque les pailles
etles fourrages sont hachés, on les dépose dans des distri-
butions faites en planches, et de grandeur nécéssaire
pour que chaque compartiment, renferme la quantité
de hachis nécessaire à la nourriture du bétail de la
ferme, pendant un jour. On. met 8 litres d’eau pour
h0 kilog. de paille ou. de foin. On mélange avec soin,
par parties, le tourteau et l’avoine. Quand on a ainsi
disposé la nourriture , on la couvre de quelques
planches, et l’on marche dessus pour opérer une forte
compression; puis l’on rejette un peu de paille hachée
par-dessus les planches, afin de prévenir l’évaporation
de la chaleur qui bientôt va se produire.
”_« On-prépare, dans des compartiments séparés, le
- hachis des chevaux et des vaches, car le hachis pour
lesschevaux se compose d'avoine, de paille et de foin:
on ne réduit point la quantité d'avoine que l’on est
habitué à donner aux chevaux: cetie quantité varie
selon la force du cheval, et le travail exigé ; on hache
environ 5 kilog. de paille et au plus 4 kilog. de foin
par tête. Il faut laisser le mélange quarante-huit heures
pour que l’avoine soit suffisamment fermentée et gon-
flée. Quelquefois on y ajoute un peu de tourteau.
« Pour les vaches à lait, on ne peut pas excéder ,
sans nuire à la qualité du lait, la quantité de 1 kilog,
»—.
048 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
et demi de tourteau ; la ration de paille est de 12 kilog.,
par tête ; celle de foin, de la même quantité; ces pro-
portions dépendent cependant de la taille de l’animal. Pour
le bœuf , on élève la quantité de tourteau à 4 kilog. et
plus , toujours selon les circonstances. Le hachis destiné
aux animaux de l'espèce bovine ne doit rester que 24
heures dans les compartiments.
« Il est indispensable d'établir un blutoir qui reçoive
la paille hachée, pour la Séparer de toute la poussière
qu’elle renferme, et qui serait très-nuisible aux ani-
maux.
« Les fourrages coupés en vert doivent être hachés,
mais non fermentés: on évite ainsi un énorme gas-
pillage.
« Ainsi, par ce procédé, une ferme qui entretenait
8 vaches, 4 génisses, 4 à 6 porcs et 4 chevaux, a pu
élever le nombre de ces animaux à 12 vaches laitières,
10 génisses de un à deux ans, 3 taureaux et 2 bœufs
utilisés au service de la ferme.
« Il est vrai de dire que, dès aujourd’hui, les en-
couragements qui ont été judicieusement accordés pour
faire connaître les races bovines les plus disposées à
prendre la graisse, et à la prendre de bonne heure,
ne sont plus nécessaires, Ce n’est pas la graisse qui nous
manque , c’est la matière à engraisser.
« Or, s’il est démontré, par la pratique, qu'il est
possible, à l’aide de la fermentation et du coupage
des pailles et des fourrages même les moins savoureux ,
de nourrir un nombre triple d'animaux sur la même
ferme, le Gouvernement devrait désormais convertir
en primes , accordées aux cultivateurs qui nourriraient
le plus grand nombre d’animauxsurune surface donnée,
é
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 349
les encouragements accordés aux engraisseurs de bétail
dans les concours de boucherie.
"’« Le Comice a engagé aussi ses membres à essayer
l'usage de la marne et de la terre pour la composition
des litières : : les fumiers ainsi préparés sont tout à la
fois un engrais et un amendement ; et, en employant
soit la marne pour les fumiers destinés aux terres d’un
sol léger argileux, soit l'argile pour les fumiers destinés
aux terres calcaires, on réunit les bases les plus riches
et les moins dispendieuses.
« Mais, a pensé encore le Comice, il faut, pour
assurer le progrès agricole, songer avant tout à l’édu-
cation et à l’instruction des populations rurales.
« C’est avec raison que, pour combattre la désertion
des campagnes , les hommes sérieux réclament un autre
enseignement que celui qui est donné dans les écoles
des deux sexes.
« Avec une.meilleure éducation, avec une instruc-
tion agricole pratique , et non scientifique, il sera pos-
sible aux cultivateurs intelligents et attentifs de modifier
leurs habitudes routinières. Alors, par l’accroissement
des produits, il y aura accroissement de salaire ; car,
il faut tout dire , on aurait. tort de penser qu’il est pos-
sible de prévenir l’émigration des campagnes vers les
villes sans la réunion de trois moyens signalés plus
haut, savoir : l'éducation, l'instruction et l'élévation
du salaire.
«Le Comice de Putanges résume donc ses travaux
de l’année dernière par les vœux suivants:
« 1°, Que, par tous les moyens possibles, le Gouver-
nement propage l'introduction des instruments perfec-
tionnés , notamment le hache-paille et les semoirs.
390 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« 2°, Que, pour augmenter le nombre des animaux
de boucherie, le Gouvernement remplace, par des primes
attribuées aux cultivateurs qui nourriront le plus grand +
nombre d'animaux sur une surface donnée, les prix
décernés aujourd’hui aux engraisseurs dans les concours
de boucherie.
« 3°, Que, pour combattre la désertion dés cam-
pagnes, on s’empresse d’aviser, à une réforme complète
de l'éducation et de l'instruction des enfants des deux
sexes dans les campagnes. Ce vœu n'est que. trop mo-
tivé par les faits cités dans le rapport si remarquable ;
de M. Perrot, sur les prisons: ses chiffres ont une
éloquence terrible. — En 1851, les prisons recevaient
4,721 garçons, 836 filles, total : 5,557. — En 1855,
les prisons s’ouvrirent à 7,908 garçons, à 1,940 filles,
total : 9,818, »
M. Pichon-Premèlé, maire de Séez, vous a lu, dans une
de vos séances précédentes , un mémoire sur l’ensemble
des améliorations agricoles qu’il a introduites dans l’ex-
ploitation qu’il dirige depuis trente ans sur ses terres
réunies.de la Cour-d’Aunou et de la Bouverie, toutes
deux situées au territoire d’Aunou-sur-Orne et, pour
partie, sur le territoire de Séez.
Déjà cette importante exploitation a valu à son pro-
priétaire de très-honorables distinctions, entre autres, le
titre de chevalier de la Légion-d’Honneur. _
Fo.
Vous avez entendu avec un vif intérêt les détails que
vous à donnés M. Premêlé sur ses cultures et sur les
résultats avantageux qu’il a obtenus, et vous regret-
terez avec moi que la nature et les limites de mon rap-
port neme permettent pas de reproduire, même par
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 851
extrait, le travail remarquable soumis à votre appré-
ciation ; notre collègue trouvera d’ailleurs des juges
compétents lors du prochain concours régional qui doit
avoir lieu dans le FRAAEENt de l'Orne.
+ | NPab-pÉ GA.
Les mémoires que l’Académie d'Arras (1) publie
annuellement étant adressés au Congrès, il suffira
d’abord de mentionner , dans ce rapport, les sujets
d’un intérêt plus général qui sont traités dans ces
mémoires :
Considérations sur l'Empire romain, par M. Le-
cesne ;
Notice sur Comius, chef des Afpébarés, par le
même ;
Etude sur le jurisconsulte N. Gosson, d'Arras, par
le même ;
Un procès criminel au XVII, siècle (celui de Saint-
Prieul, gouverneur d'Arras), par le mème ;
Notice'sur Quènes de Béthune, poëte du XII°. siècle,
conseiller desBeaudoin et gouverneur der Pique
tinople, par M. d'Héricouri ;
Les poétes historiens, — Chateaubriand. Lure lo ;
— Discussions relatives à la fondation d'hospices ré-
gionaux et à l'aliénation des biens des hospices (pro-
cès-ver baux);—Rapport sur les Fables de M. Derbigny,
par M.-Delalleau ;
La philosophie biblique et e philosophie rationaliste,
par M. Robitaille ;
(4) Note de M, le colonel Répécaud, président de l’Académie,
392 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Rapport sur un ouvrage de M. de Caumont, par le
même ; |
Rapport sur l'Histoire de la démocratie athénienne ,
de M. Filon, doyen de la Faculté de Douai, par
M. Broy;
Enfin, Tableau succinct des progrès récents des
sciences et de l’industrie. — Discussions des divers
projets conçus pour le percement de l’isthme de
Suez.
Après ces indications, disons quelles sont les Douions
qui ont particulièrement occupé l’Académie dans ses
séances hebdomadaires. Dans la séance du 30 novembre
1855, M. Lestoquoy a lu la première partie d’un mémoire
ayant pour objet d'expliquer les battements du cœur: il
désirait que l’Académie émît son opinion sur le principe
dynamique qui servait de base à son explication. Un
membre de la Société, désigné à cet effet, s’est livré
à l’examen de cette question, et son rapport, ainsi
que le mémoire de M. Lestoquoy, ani déposés aux
archives.
Or, un an plus tard, en novembre 1856, dans une
séance de l’Académie des sciences, äl a: été c donné lecture
d’un mémoire dans lequel le docteur Hiffelsheim , phy-
siologiste allemand, attribue les battements du cœur à
la même cause, en s'appuyant sur le même principe
dynamique.
Le docteur Lestoquoy est donc fondé à réclamer Ja
priorité, et l’Académie a décidé que son président ap-
puierait cette réclamation en certifiant les faits qui
viennent d’être exposés.
M. Billet, archiviste de l’Académie, a lu dans diverses
séances : l’Éloge de Turgot ; des Considérations sur
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 353
Lamoignon-Malesherbes ; une Appréciation littéraire
des œuvres de J. Delille ; et enfin des observations sur un
écrit de M. Vogué , relatif à l’état de l’agriculture en
Angleterre, comparé à sa situation en France,
M. H, Corne, membre correspondant, ayant adressé
à l’Académie un exemplaire de son nouvel ouvrage sur
éducation, qui a pour titre : Adrien, M. Laroche a lu
une analyse très-complète de cette importante production.
M. l’abbé Carton, directeur de lInstitution des Sourds-
Muets à Bruges, ayant également adressé à l’Académie
un mémoire qu’il vient de publier et qui a été couronné
par la Société centrale d'éducation et d’assistance des
sourds-muets, M. Auguste Parenty, dàns un rapport
développé, a fait ressortir le mérite de la méthode pro-
posée par M. Carton, pour instruire les sourds-muets dont
l'admission n’a pu avoir lieu dans les institutions qui leur
sont destinées; et l’Académie , jugeant qu'il serait très-
utile de répandre la connaissance de cette méthode, a
chargé son président d'engager M. le Préfet à recom-
mander l'ouvrage de M. l'abbé Carton aux maires et
aux instituteurs du département ; : ce mess b Ê est,
empressé ( de déférer à ce vœu.
Tout récemment , M. d'Héricourt, dans une séance de
l’Académie , a donné lecture d’une notice sur Isabelle de
Hainaut , qui, sans doute, sera insérée dans le volume
de Mémoires que la Société doit prochainement publier.
La fréquence desséances s'oppose à ce que, dans
toutes , il soit fait des lectures aussi importantes ; mais il
arrive que les membres s’y entretiennent de questions
qui ne sont pas sans intérêt.
Ainsi , à l’époque où. des inondations désolaient plu-
sieurs de nos provinces, quelques-uns ayant parlé des
LU
39! INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
causes auxquelles on attribuait ces désastres , l’un d’eux
qui, en 4815, avait eu occasion d'étudier le régime de
la Loire et qui, quelques jours avant l'inondation de
1847, visitait les environs d'Orléans, a dit à quoi on
pouvait attribuer le déversement du fleuve dans le bassin
du Loiret, et par quel moyen, à son avis, on pour-
rait prévenir une semblable catastrophe.
A l’occasion du projet du docteur Grassi, de Milan, re-
latif à l'ascension sur les rampes les plus rapides au moyen
de cylindres enveloppés par une hélice, un membre a fait
part à ses collègues de l’idée qu’il avait eue, dès long-temps,
de remplir le même objet en plaçant contre les rails (sur
ces rampes) des sortes de râteliers à dents cycloïdales.
L'Académie a jugé utile d'insérer, dans le XXVIIE, vo-
lume de ses Mémoires, quelques pièces manuscrites, telles
que d’anciennes traductions des Pensées de Varron; une
préface des Homélies d'Origène, où il est question de
Varron; la suite des Annales de Flandre, de Jacques
Meyer , par son petit-neveu, Philippe Meyer.
Elle a fait imprimer aussi d'anciens manuser its plus
étendus , mais séparément : cal
4° Le Journal de Dom Gérard Robert, “religieux de
l’abbaye de St.-Vaast d’Arras, où sont racontés des faits
arrivés de son temps (2°. moitié du XV°, siècle), e en la
ville d’Arras, et qui ne sont pas étrangers à l’histoire de
France ;
2°, La Chronique d’Arthois, de” » François Bauduin ,
jurisconsulte éminent du XVI, siècle , suivie de son
advis sur le faict de la réformation de l’Église.
Ces deux publications ont été offertes au Congrès.
La notice suivante, sur lés travaux de la Société des
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 39
Antiquaires de la Morinie, est due à M. le marquis de
Gôdefroy-Mesnilglaise, qui en est l’un des membres les
plus actifs et les plus éclairés. L'un des ouvrages qui y
sont cités est le résultat de ses recherches ; c’est ce qui
explique le laconisme avec lequel il en parle; vous
suppléerez, Messieurs, à la discrétion de l’auteur, en
accordant à son œuvre les éloges qu’elle mérite :
« Cette Société continue ses investigations historiques
et archéologiques. Peu nombreuse et donnant à ses
travaux une direction sérieuse, elle procède avec lenteur.
Le neuvième volume de ses Mémoires est de 4854 ; l’im-
pression du dixième n’est pas assez avancée pour qu'il soit
possible. d'exposer les matières qui y sont traitées. Mais
deux ouvrages publiés sous ses auspices ont été l’objet
de Gislinctions signalées. L'édition de Lambert d’Ardre,
chroniqueur de la fin du XII°, siècle, peu connu jus-
qu'ici, donnée par M. le marquis de Godefroy-Mesnil-
glaise, correspondant, a obtenu de l’Institut une mention
très-honorable. au Concours des antiquités nationales
de 1855. Le premier volume de l'Histoire des abbés
de St.-Bertin, par M. Henri de Laplane, secrétaire-gé-
néral, y a été honoré d’une mention pareille, et le suivant
a mérité la première médaille au concours de 1856. La
Société est fière d’un si beau succès que justifie l’im-
portance et l’étendue de ce docte travail, On sait la haute
antiquité de l’abbaye de St.-Bertin ; on sait quel rôle
considérable elle a eu, dans les premiers temps de la
monarchie, et quelle a été son influence sur la civilisation
de nos contrées du Nord-Ouest, M. de Laplane, qui
précédemment avait exploré ses ruines avec tant d’in-
telligence, s’est enfoncévrésolüment dans l'étude de ses
volumineuses archives. Ia, entre autres, dépouillé les
306 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE:
onze tomes in-folio du cartulaire transcrit par D. de
Witte. C’est vous dire qu'il a consacré une patience et
un zèle de Bénédictin à faire connaître au monde reli- 4
gieux et savant la grande communauté bénédictine ,.
pendant les onze siècles de son existence. Cette patience
et ce zèle ne sont point épuisés , Dieu merci, et nous
leur devrons bientôt un travail du même genre sur
l'abbaye de Clairmarais, voisine de St:-Bértin, monu-
ment de la présence de saint Bernard dans la Morinie.
Comment, d’ailleurs, ne serait-il pas encouragé à mar-
cher dans cette voie, lorsqu'un bref du Saint-Père,
conçu dans les termes les plus flatteurs, vient louer
l'Histoire des abbés de’St.=Bertin? EUR à
« La Société, par les soins de deux de ses. membres +
M. le conseiller Tailliar et M, l’avocat Courtois, a publié
tout récemment : Les usaiges et anciennes coustumes
de la conté de Guysnes , un vol. in-8°. Le texte,
reproduit d’après un manuscrit du XV°, siècle, est pré-
cédé d’une analyse raisonnée due à M. Tailliar , et d’un
aperçu historique sur le comté et ses institutions, par
M. Courtois, qui a déjà si bien élucidé la géographie de
cette petite région. Un glossaire, et un plan de la ville et
du château, gravé d'après un manuscrit de la Tour de
Londres, complètent ce volume, témoignage curieux du
droit féodal et municipal au moyen-âge.
« Le Bulletin de la Société, qui paraît à des époques
indéterminées, a mis en lumière, depuis dix-huit mois,
plusieurs pièces inédites, intéressantes pour l’histoire
locale, entre autres des complaintes sur la destruction de
Terouane, par Charles-Quint, événement qui eut un si
grand retentissement au XVI°. siècle.
« Le dernier concours ouvert par elle a été l’oçcasion
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 857
d’une notice de M. le baron de Melicocq, sur.les artistes
_ dramatiques aux XIV°. et XV°, siècles ; notice qui a
valu à son auteur une médaille d'argent,
à M. . « Le concours prochain pose des questions graves.
” H s’agit d'apprécier les institutions militaires du nord de
la France, depuis Charlemagne jusqu'à François I°’, ; de
discuter, en général, l’origine de Ia justice seigneu-
riale, et, en particulier, la juridiction du monastère de
st.-Bertin. |
« Enfin M. Vincent, de l’Académie des Inscriptions,
que la Société s’honore de compter parmi ses membres,
prépare une étude sur, Hesdin, sa ville natale, dont il
voudra bien, je l'espère, donner quelque communication
au Congrès. »
de - mA d'Héricourt , secrétaire actuel de Ia
Pr centrale d'agriculture du Pas-de-Calais, a fait re-
mettre à votre rapporteur.le. Bulletin apricoie publié
par cette société au. commencement de cette année,
Parmi les travaux, qui s'appliquent à l’année 1856, j'ai
remarqué : 1°. deux discours prononcés, le 20 février, l’un
par _M. d'Héricourt , l’autre par M. Clément, sur la
tombe de M. Hocedé, excellent: agriculteur, l’un des
membres les plus distingués de la Société, dont il était
depuis long-temps le secrétaire; 2°. le discours dans
lequel, à la séance publique du 9 novembre, M. le
baron d’Herlincourt, vice-président, a fait ressortir tout
l'avantage que présenterait l’intelligente exploitation .du
sol par les propriétaires eux-mêmes ; 3°. le savant rapport
de M. d’'Héricourt sur les travaux annuels de la Société :
. 4°, une note, par M. d’Herlincourt, sur les expériences
"du système Kennedy, pour les irrigations, faites à sa ferme
308 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. 3
d'Etrépagny; 5°. une notice développée sur la péripneu-
monie épizootique du gros bétail, par M. Mannéchez, ”
J'ajouterai à cette courte analyse la citation entière.
d’une lettre adressée à notre honorable Directeur par.
M. le comte d’Héricourt; vous jugerez de l’importance de
l'essai tenté par notre zélé collègue : …
« On a beaucoup parlé, dit l’auteur de cette lettre,
du repiquage des betteraves et des plantes d'horticulture.
Permettez-moi de vous signaler un moyen employé par
mon jardinier pour obtenir des couches à prix réduit.
« Dans le Pas-de-Calais, le bois, ou, pour mieux
dire , la tige d’œillettes n’était employée qu’au chauffage
du four: on s’en servait aussi däns les chaumières pour
obtenir un feu actif et brillant; mais les cendres en étaient
très-estimées pour les travaux de la buanderie, à cause
des sels qui y sont contenus. Le sieur Alexandre Tur-
lure résolut d'utiliser ces matières comme engrais, et
je crois inutile d’ajouter qu’il obtint d’heureux résultals.
Encouragé dans ses efforts, il se servit des tiges d’œil-
lettes, les lia par poignées, en forma des lits d'environ
4. mètre de hauteur et les couvrit d’un peu de terre. Pour
activer la fermentation, chaque lit doit être abondam-
ment arrosé, le mot noyé serait plus exact. Je n’emploie
plus que ce système pour les couches de mon jardin et
j'obtiens, à un prix réduit, des résultats supérieurs à
ceux du fumier organique. Toutefois, lorsque la tem-
pérature est froide et que les gelées sévissent encore, les
arrosements doivent être faits avec des engrais liquides.
Par ce système, j’ai eu des laitues tout l'hiver, et, à
plusieurs reprises, la fermentation était telle que l’on a
dû saigner la couche: la fumée et la vapeur Séchap-
paient très-épaisses. | en
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 359
n « S'ily a avantage à repiquer les betteraves, question
que je-regarde encore comme très-controversée, l'emploi
.“ides tiges d’œillettes présentera certainement une grande
économie. J'ajouterai que M. Decrombecque, maire de
Lens, dont je n’ai pas à faire l’éloge après l'appréciation
du Congrès, doit expérimenter ce système, et que
M. Cavenne, directeur des contributions indirectes, en
fera l’essai pour la culture du tabac. Il serait bon que la
couche d’œillettes füt étudiée en divers points; et, si je
me permets de la recommander, c’est que je m’appuie
sur dix-huit mois d'expériences heureuses.
« Vous apprécierez sicette communication est de na-
ture à intéresser le Congrès et je vous abandonne cette
note écrite à la hâte, dans laquelle jevous prie de ne voir
que le désir d’apporter, mon faible tribut à une réunion
qui, formée sous vos auspices, se montre, chaque année,
de plus en plus digne des efforts de son directeur, »
Vous devez encore à M. le comte d’Héricourt des
détails sur les travaux de la Commission des antiquités
départementales du Pas-de-Calais. Fondée par les soins
et sous l'administration de M. Desmousseaux de Givré,
cetle Commission que dirige, depuis son origine , M. Har-
baville, sans autres ressources qune modeste allocation
de mille francs que lui accorde le Conseil général, a publié
huit livraisons de la Statistique monumentale. Elle a
enrichi cet ouvrage de gravures et de lithographies. Déjà
ses travaux ont été mentionnés dans le compte-rendu de
lInstitut des provinces ; je ne parlerai donc que de
la dernière livraison, parue il y a quelques mois. Elle
contient la description de deux monuments du XVI°.
" “siècle : l'église d’Avesnes-le-Comte, par M. de Linas,
| 4
360 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
membre non-résidant des comités historiques, el celie
d’Ablain-St.-Nazaire. On peut s'étonner de voir’ réunis
deux monuments d’une époque relativement moderne
mais ils se complètent l’un par l’autre. L'église d’Avesnes
a une architecture intérieure d’une richesse qui ne le
cède qu’à la hardiesse de ses formes ; Ablain-St.-Nazaire,
au contraire , mérite une place dans la nomenclature des
gloires architecturales de la France, par le fini et la
légèreté de son ornementation , l'élégance de ses cloche-
tons , l'harmonie de toutes ses parties, la beauté de son
portail et surtont par ses souvenirs historiques. Elevée
par les Bourbon-Carency, elle fut enrichie par la no-
blesse artésienne , et je regrette de ne pouvoir raconter
la charmante légende de son origine.
Outre son Album ou sa Statistique monumentale , la
Commission publie un Bulletin dont le troisième fascicule
est sous presse. Il comprend lestravaux desmoindre impor-
tance : les disserlations historiques, les discussions qui ont
eu lieu au sein du Comité, le récit des excursions, la men-
tion des fouilles faites dans le pays et desrésultats qu’elles
ont produits. Des dessins, confiés au crayon exercé. de
M. Robaut, de Douai, accompagnent le texte. Il est difficile
de citer, car ce serait faire un choix pour lequel, avec sa
modestie ordinaire, M? le comte d’'Héricourt déclare son
incompétence. On prend d’abord les sujets qui con-
viennent davantage à certaines études spéciales, puis
on arrive à connaître tout ce que contient le Bulletin. Tou-
tefois, pour me renfermer dans l’espace restreint laissé au
compte-rendu de chaque Société, je signalerai les com-
munications de M. Grigny, architecte, sur les construc-
tions des XI°, et XII°, siècles, principalement en Artois ;
celles de M. l'abbé Van Drival, sur plusieurs tableauxe r
he.
ds <=
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 361
et notamment sur un pressoir mystique, conservé à
Baralle , et sur diverses pierres tombales, que les soins
de prêtres intelligents ne peuvent pas toujours préserver
contre les destructions.
M. Dancoisne d’Hénin-Liétard , qui possède une riche
collection depuis long-temps connue des érudits, a
entre autres travaux, établi de précieux rapprochements
entre le scel communal d’Arras et une monnaie qu'on
refusait d'attribuer à cette ville. C’est qu’en histoire tout
se lie et qu’en vain l’on établit des classifications ; il n’est
permis de rien négliger, nous devrions dire de rien
ignorer, des documents que nous ont laissés les siècles
glorieux du moyen-âge.
En dehors de la Commission, des ouvrages ont été pu-
bliés ; nous ne parlerons ni des communications faites
à M. le Ministre de l’Instruction publique, ni des articles
insérés dans les Revues belge et française, car on peut
facilement les retrouver. M. Godin, archiviste en chef du
Pas-de-Calais, et son collaborateur, ont terminé leur tra-
vail sur les rues d’Arras (2 vol. in-8°.). On se rappelle
que le but de cet ouvrage est de sauver de l’oubli ces
souvenirs que le temps efface chaque jour ; de décrire les
rares monuments échappés aux révolutions ; de rappeler
des institutions dont on ne connaît présque plus le nom,
ni les services qu’elles ont rendus; d’indiquer, rue par
rue, tous les établissements religieux, municipaux,
féodaux , qui ont eu de l’importance. M. le comte d'Hé-
ricourt ajoute que l’on comprendra qu'il ne lui appartient
_ pas de juger un travail reçu avec sympathie par les habi-
tants d'Arras, et encouragé de si nombreuses souscrip-
tions, que les frais d’impression ont été plus que cou-
verts par la ville elle-même où ce livre était édité. Vous
16
/
362 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
vous joindrez, Messieurs, à la population éclairée
d'Arras pour rendre à l’ouvrage de MM. d’'Héricourt et
Godin la justice qui lui est due.
En terminant, il faut ajouter que la Commission des
antiquités départementales exerceune heureuse influence;
qu’elle est souvent consultée pour des restaurations
d’églises; qu’on lui signale les découvertes dues à la
pioche du travailleur; qu’elle a trouvé, dans MM. les
agents-voyers du département, d’utiles et d’intelligents
auxiliaires; qu’en un mot, elle a le droit de se dire
qu’elle a atteint le but de son institution.
SAÔNE-ET-LOIRE.
M. de Fontenay, en regrettant de ne pouvoir prendre
part aux travaux du Congrès, vous a envoyé, au nom de
la Société Eduenne, Essai sur le système défensif
des Romains, dans le pays Eduen, par M. J.-C.
Bulliot, membre de plusieurs Sociétés archéologiques
(publication de la Société Eduenne, en 256 pages). A
cette publication est jointe une carte des voies romaines
et des retranchements romains de la cité Eduenne.
Cet ouvrage contient de savantes recherches sur des
retranchements antiques de quelques montagnes du pays
Eduen, signalés à l'étude des archéologues au Congrès de
la Société française, réunie à Autun, en 1846. L'auteur,
qui reconnaît, avec modestie, que le lecteur peut n’être pas
d'accord avec lui sur la thèse qu’il a soutenue dans son
ouvrage, a fait, sur les lieux mêmes, l'examen de tous les
postes fortifiés auxquels il a attribué quelque importance,
et ne s’est déterminé qu'après avoir accumulé de nom-
breuses preuves. C’est aux personnes qui eront à même
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 363
de les vérifier , à juger le travail consciencieux et érudit
de l’auteur.
M. le comte d’Esterno vous à fait hommage de son
rapport lu, en 1856, au Conseil général de Saône-et-
Loire sur un projet de modifications à apporter à la
législation sur le cheptel.
SEINE.
M, le vicomte de Cussy vous a dit que l’Académie na-
tionale agricole, manufacturière et commerciale, dont
l'administration est toujours rue Louis-le-Grand, n°. 21
(Paris) , est entrée dans la vingt-Septième année de son
existence, Gette Société est du nombre de celles qui
travaillent sans relâche au progrès de notre agriculture
et au développement de toutes les branches de l'in-
dustrie nationale. Une promesse avait été faite, il y a
deux ans, à tous ceux de ses membres qui ont pris
part à l'exposition universelle de 4855 et à l'exposition
universelle agricole de 1856. Cette promesse a été lar-
gement tenue, le 29 janvier 1857, dans la salle St.-
Jean de l’'Hôtel-de-Ville de Paris. Ce jour-là, l’Académie
| nationale, en présence de plus de quinze cents pêr-
sonnes , a décerné près de sept cents récompenses aux
plus méritants: ces récompenses ont représenté une
valeur de 24,000 fr.
_ Les titres des lauréats sont reproduits dans le procès-
verbal de cette Assemblée générale qui a‘offert, jusqu’à
la fin, le plus vif intérêt.
M. Aymar-Bression , directeur-général, a pu termi-
ner, en 1856, le double travail qu’il avait promis de
faire, et sur l'exposition universelle de 1855, et sur
celle de 1856. |
364 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
Les annales de l’Académie nationale, pour 4856, ren-
ferment des questions de la plus haute importance et
accusent , au sein des Comités de cette institution, une
activité et une intelligence qui doivent servir d'exemple,
J'ajouterai, ce que n’a pas dit le délégué de l’Aca-
démie, que le nom de M. le vicomte de Cussy brille
toujours à la tête de cette Société dont la carrière a
été, jusqu'à ce jour, si taborieuse et si utile.
M. Carlier, en vous parlant de la Société de Sphra-
gistique de Paris, vous a dit:
« Permetlez-moi, en ma qualité de membre délégué
de la Société de Sphragistique de Paris, de vous de-
mander quelques instants, pour appeler votre atlention
sur cette Société qui poursuit, modestement et sans.
bruit, des travaux extrêmement intéressants pour l’his-
toire et pour l'archéologie. Vous êtes tous à même de
juger combien la science sigillographique peut apporter
de lumière dans les questions obscures et épineuses
de l’histoire, combien elle peut rectifier d’appréciations
hasardées, de faits erronés. Celte science fait mainte-
nant partie de l’enseignement de l’École des chartes.
Développée dans les Essais de Paléographie de M. de
Wailly, on n’en trouvait précédemment de notions que
dans le livre de Vredius sur Les sceaux des comtes
de Flandre , et dans quelques ouvrages allemands et
italiens du dernier siècle. Il lui manquait un organe
spécial, une revue, un journal, qui en propageät la
connaissance et le goût. Un artiste plein de dévoue-
ment, M. Forgeais, a eu la pensée de réunir les ma-
tériaux de la science sigillographique dans un recueil,
qui, dès son apparition, a obtenu le suffrage et le
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 365
patronage de tous les érudits. Les sommités de l’Église
et de la science s’y sont associées, et la liste des
membres de la Société de Sphragistique est réellement
resplendissante. On y voit figurer plusieurs membres
de l’Institut des provinces et du Congrès des Sociétés
savantes: MM. le comte de Soultrait ; le comte de Mon-
talembert; Raymond Bordeaux, notre spirituel secré-
tairé ; lé comte d’Héricourt, qui, dans une récente
réunion, s’est si bien rendu linterprète de nos sentiments
pour l’éminent fondateur de l'institution des Congrès.
« Les publications de la Société de Sphragistique n’ont
pas tout le retentissement qu’elles devraient avoir. Vous
approuverez, je pense, Messieurs, que je vous de-
mande la mention, dans votre Annuaire, des travaux,
aussi utiles qu’intéressants , renfermés dans le recueil
de cette Société. Ce recueil, qui paraît en livraisons men-
suelles, en est maintenant à son cinquième volume.
« Je regrette d’avoir été pris un peu à l’improviste,
pour vous parler de cette Société savante , et de n’avoir
à vous présenter, comme spécimen de ses travaux, que
quelques faïbles essais, tentés par moi-même, dans ce
genre d’études. »
Parmi les ouvrages qui vous ont été offerts, et qui
ont été publiés à Paris, je dois citer :
1°. Le Catéchisme d'agriculture , accompagné de
cent figures, par M. Jourdier ; excellent recueil qui
devrait être entre les mains de tous les agriculteurs ;
2°. La publication, par M. Duplès-Agier, d’une
curieuse ordonnance de Philippe-le-Long contre les lé-
preux, sous la date du 21 juin 1321;
3, Le sceau du couvent des Frères-Précheurs de
006 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Bergères-St.-Winoc, par M. Carlier, délégué de la
Société de Sphragistique;
4°. L’Astronomie du jeune âge, par M, Taunay ;
5°. Un mémoire sur les ponts suspendus, et les
machines pour travailler et polir les verres d'optique,
par M. William Stewart , ingénieur civil, à Bordeaux ;
6°. Un mémoire sur la construction et l’exploitation
des canaux des landes de Gascogne, par le même;
7°. La Descriplion des: médailles. et antiquités du
Cabinet du baron Behr, par M. François Lenormant ;
8°, La Culture du lupin à fleurs jaunes, par M. le
comte de Gourcy ; |
9°. Quatre brochures, de M. J.-A. Pichot, contenant
l'exposé d’une institution financière ;
10°. Cinq. brochures contenant le compte-rendu des
importants travaux de, l’Académie nationale agricole,
manufaclurière et commerciale.
SEINE-INFÉRIEURE,
En vous rendant compte des travaux de la Société
libre d’'Émulation, du Commerce et de l'Industrie
de la Seine-Inférieure, M. le comte d’Estaintot, son
délégué , a cru devoir vous entretenir avant tout d’une
œuvre capitale, due à trois membres de cette Société :
je veux parler d’un rapport sur l'Exposition universelle de
4855, rédigé par. MM. J. Girardin, membre de l’Institut
des provinces et correspondant de l’Institut de France ;
Cordier, manufacturier, et E. Burel, ingénieur civil.
Après. avoir fait l’intéressant historique des diverses
expositions qui se. sont succédé depuis l’an VI, époque
à laquelle le ministre François de Neufchâteau eut la
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 367
pensée d'organiser la première fête nationale en faveur
de l’industrie, M. Burel, arrivant à la grande exhibition
universelle de 1855, s’est occupé spécialement de ces
milliers de machines que nous y avons admirées, et
les a appréciées dans leurs principes comme dans leurs
détails : « Un temps viendra, dit-il, où les écrivains
« ne sufliront plus à enregistrer le triomphe de la mé-
« canique, de la physique et des autres sciences appli-
« quées aux arts industriels, »
M. Girardin, avec le talent que vous lui connaissez,
a entretenu ensuite la Société de la partie la plus variée
et la plus intéressante peut-être de l'exposition, c’est-à-
dire, des arts chimiques, ou de l’industrie scientifique
proprement dite.
L'industrie textile, celle des fils et des tissus de
laine, de soie, de chanvre, de lin et de coton, a été
l’objet spécial de l'examen de M. Cordier.
Votre rapporteur voudrait, Messieurs, qu'il lui fût
possible de suivre M. le comte d’Estaintot dans la bril-
Jante analyse qu’il vous a présentée du travail dû à
MM. Burel, Girardin et Cordier ; mais l’espace qui lui
est réservé le met dans la nécessité de vous renvoyer
à ce travail lui-même dont la lecture vous fera con-
naître toute l’importance des produits exposés par le
département de la Seine-Inférieure; il me suffira de vous
dire que, sur 365 exposants, 270 ont mérité les ré-
compenses suivantes, savoir: une décoration, deux
grandes médailles d'honneur, quatre médailles d’hon-
neur , cinquante médailles de 4° classe, cent vingt-
quatre de 2%,, et quatre-vingt-neuf mentions hono-
rables.
Le compte-rendu de M, d’Estaintol se poursuit ainsi:
068 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« Les deux bulletins des travaux de la Société libre
d’émulation , du commerce et de l’industrie (avril 1856),
accusent toute son activité.
« Dans son discours à la séance publique, M. A. Lévy,
président, membre de l’Académie de Rouen, a fait res-
sortir la nécessité, « pour l’homme de science et le
« commerçant, de ne plus désormais rester étrangers
« aux fortes études littéraires. L'écrivain, à son tour,
ne doit pas ignorer les merveilles de la science et de
« l’industrie. » Est-il possible, en effet, de fermer les
yeux en présence de ces vastes horizons qui s'ouvrent
devant nous, et dont la science recule incessamment les
limites ?
« M. E. Burel, ingénieur civil, dans des notes sur la
construction des cheminées d'usine, a fait connaître qu’il
n'est pas rare en Angleterre de rencontrer des chemi-
nées qui dépassent 125 mètres d’élévation à partir du
sol, parfaitement solides et verticales , oscillant majes-
tueusement au gré des vents, sans que leur équilibre
soit en danger. Comment se fait-il qu’en France, leurs
timides rivales soient considérées comme des tours de
force , lorsqu'elles atteignent à peine la moitié de cette
hauteur, et ne sont même souvent achevées que pour
menacer ruine et nécessiter des travaux considérables
sans lesquels on ne pourrait les maintenir debout ?
« M. E. Ducastel, membre résidant, a fait une commu-
nication sur le résidu de défécation du jus de betterave
et la potasse de mélasse de betterave.
« La Société fait professer annuellement un cours de
Droit commercial, de comptabilité commerciale, de mé-
canique pratique, de chaleur appliquée aux arts ,et un
cours de mécanique et de chaleur.
À
à {
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 969
« Dix prix et quatorze accessits ont été décernés , en
séance publique , aux jeunes élèves les plus studieux.
« Cette solennité a eu son cachet de surprise. Lorsque
les lauréats ont été couronnés, M. le Préfet s’est levé et a
prié M. le Président d'inviter MM. Rigault, E. Burel et
Lefort à s'approcher de lui. Ce magistrat, dans une vive
et sympathique allocution, a fait savoir que, sur sa pro-
position , S. Exc. le Ministre de l’Agriculture et du Com-
merce avait accordé, à chacun d'eux, une médaille
d'argent , pour les récompenser des services qu’ils ren-
dent au commerce en professant , avec tant de désinté-
ressement, les cours de la Société. La Compagnie et
l'auditoire ont prouvé leur satisfaction par de chaleureux
applaudissements.
« Au moment où le spectacle des magnificences de
l'Exposition universelle était encore présent à tous les
yeux, ne devait-il pas paraître téméraire d’oser faire
appel aux industriels d’un département qui avait reçu si
largement sa part des récompenses accordées par l’État ?
A ces craintes, la Compagnie a répondu qu’en France
l'intelligence ne se lasse point de produire et que la vue
d’un progrès accompli en suggère un autre, La Société
libre d’émulation , du commerce et de l’industrie a donc
décidé qu'une exposition départementale aurait lieu;
et, pour arriver à ce but, elle n’a reculé devant aucune
peine , devant aucun sacrifice. 134 industriels ont ré-
pondu à son appel.
« Plusieurs des récompenses qui ont été décernées sont
dues tant à la munificence de S. M. l'Empereur qu’au
Conseil municipal de la ville de Rouen.
« Les machines, les tissus, la filature, la teinture, la
fabrication d’horlogerie, les cuirs, l’ivoire, ont rempli et
970 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
orné la salle de lexposition ; 88 industriels ont été
félicités, récompensés ou cités. On a distribué, à cette
fête industrielle , six médailles d'or, neuf en vermeil,
trente-sept médailles d'argent, et trente-six de bronze,
grand et petit module, E
« Un homme utile, de conscience et d’honneur , qui
avait voué toute sa vie de. médecin au service des, mal-
heureux et des infirmes, M. le docteur Nicolle, d’Elbeuf,
est venu clore cette série de récompenses, en recevant
une médaille d'or de 500 francs pour ses appareils des-
tinés à soulager les souffrances du pauvre. |
« La Société d’émulation étend son activité sur tout ce
qui peut stimuler le progrès et atteindre l’Intelligence et
le cœur; les généreuses sympathies qui l’entourent ne.
sont-elles pas la plus belle récompense qu’à son tour
elle puisse recevoir de l'opinion publique ? »
M. Lafond de Lurcy vous a exposé les travaux de la So-
ciété Havraise d’études diverses, pendant l’année 1856.
L'année a été inaugurée par un discours de M. Marie,
président. — Le sujet de ce discours était le médecin,
considéré dans les aptitudes variées qu'il a dû acquérir
par l’étude. presque. encyclopédique des connaissances
humaines, et qui font de lui le membre utile par ex-
cellence dans les Sociétés académiques de province, en
le recommandant, plus que tout autre, aux distinctions.
que confèrent ces Académies.
Pendant la présente année, la Société, fidèle à son
titre, s’est occupée des questions les plus variées,
En littérature, elle a entendu avec plaisir la lecture
de plusieurs pièces de vers, parmi lesquelles les sui-
vantes ont été particulièrement goûtées :
TRAVAUX DES ACADÈMIES EN 1856. 371
Les trois premières, inlitulées: Hymne de l’Asso-
ciation des Enfants de Marie ,—Trilogie à la Vierge,
— Quelques chiquenaudes (Recueil de pensées), ont
été présentées par M. Millet-Saint-Pierre.
M. Dousseau a lu: Le Mont-Blanc (Impressions de
voyage ).
M. le comte Hippolyte Louëêl a offert une pièce sous
le titre de: Souvenirs et Regrets,
Les trois dernières : le Romancero de l’Impératrice
{ Traduction de l’espagnol ), — Poésies catholiques , —
Le maréchal Bugeaud, sont dues à M. Chéron de
Villiers.
M. Millet-Saint-Pierre a fait connaître une comédie du
temps de Louis XIII, et est entré dans quelques con8idé-
rdtions sur l’art dramatique avant Corneilie et Molière,
L'Histoire, l'Archéologie , la Géographie ont été
représentées surtout par MM. Borély, Herval et Dous-
seau.
Le premier a rendu compte à la Société des re-
cherches faites par lui, sur l'invitation de M. le Ministre
de l'instruction publique, dans la partie des archives
du Havre qui se rapporte au règne de Louis XIE et à
la minorité de Louis XIV. Sons les quatre chefs prin-
cipaux de la classification nouvelle. des archives du
Havre , tous les documents ont disparu dans l’époque
qui correspond à celle qu’embrassaient les recherches
de M. Borély. Là, par conséquent, des titres d’une
haute importance historique ont été soustraits par une
main infidèle et restée inconnue. Mais M. Borély a été
assez heureux pour trouver néanmoins quelques pièces,
d’une certaine importance, qui rentrent dans le cadre
tracé par la circulaire ministérielle, Il s’agit de docu«
872 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ments relatifs à la nomination et à l'installation du
gouverneur Armand-Jean du Plessis de Richelieu: lettres-
patentes de Louis XIIL , du 28 décembre 1642 ; —instal-
lation solennelle du Duc, en mai de l’année suivante ;
— letires de Louis XIV et d’Anne d’Autriche, écrites
trois jours après la mort de Louis XII.
M. Herval, dans un mémoire plein d’érudition, a
traité , d’une manière générale, la question des mé-
.dailles et a fait connaître à la Société l’état de la collection
que possède le Musée-Bibliothèque de la ville du Havre.
M. Dousseau a rassemblé dans un album gigantesque
cinq cents esquisses où sont reproduits, avec une fidé-
lite scrupuleuse , les sites les plus remarquables de la
France, en accompagnant chacune d’elles d’une notice
explicative. Une descriplion sommaire de la topographie
et des singularités les plus frappantes de notre pays sert
d'introduction à cet album. Ce travail, digne de lalbum
lui-même, est plein d’aperçus nouveaux et ingénieux, de
rapprochements curieux à propos des divisions terri-
toriales factices ou naturelles, de la position des agi
des chaînes de montagnes, etc. |
M. Chéron de Villiers a lu deux notices, la première sur
un poète aveugle, Joseph Lafon-Labatut ; la seconde, sur
Benvenuto Cellini. Cette dernière est remarquable par
des faits nouveaux et par des appréciations assez ori-
ginales sur l’art à l’époque où vivait le grand statuaire-
ciseleur.
Une pierre lombale appartenant au XIII. siècle, a
été trouvée au Havre (section de Leure). Le savant
archéologue, M. l'abbé Cochet, en a fait l’objet d’une
notice remarquable.
Les sciences philosophiques ont tenu une assez large
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 373
place dans les travaux de la Société, bien qu’elles n'y
aient eu qu’un représentant , M. le docteur Maire. Son
grand travail intitulé : Psychologie physiologique , est
l'essai d’une nouvelle classification de nos passions,
fondée sur leur origine et sur leurs dépendances véri-
tables,
L'Economie publique, appliquée plus spécialement à
ce qui touche à une cité marchande, a fourni d’assez
nombreuses communications.
M. Leudet a présenté plusieurs études de farines amé-
ricaines, de pains simples ou mixtes fabriqués dans un
but économique, et plusieurs notices sur des productions
nouvelles, récemment importées, entre autres le dica,
matière de laquelle on extrait facilement une graisse
précieuse.
M. Borély a lu une notice sur un vin récolté à la côte
d’'Ingouville, L'auteur entrevoit la possibilité de livrer à
la culture de la vigne des étendues considérables de
terrains impropres à tout autre genre d'exploitation.
Suivant lui, la nature de ces terrains , leur exposition,
feraient entrevoir une chance de récolte, bonne en qualité
et en quantité. Le vin d’Ingouville, dégusté au sein de la
Société, a été accueilli avec faveur.
En chimie, M. Michaud a lu un mémoire sur les
propriétés de quelques métaux, qui seraient obtenus à
l'état de pureté parfaite, et sur leurs préparations. Il
s’est proposé surtout la rectification de quelques-uns de
leurs équivalents,
En physique , M. Bénard a donné un travail sur {a
vision , et en particulier sur le défaut de la vue appelé
strabisme.
Enfin, en médecine, M, Lecadre a produit un mémoire
37 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
intitulé : De l'aflinité qui existe entre les différents
exanthèmes.
M. Maire a présenté à la Société des observations
curieuses sur le produit de la conception chez la femme,
transformé en kydatides ou vers vésiculaires.
DEUX-SÈVRES.
« Depuis l’année dernière, la Société de statistique des
Deux-Sèvres (1) a continué ses utiles travaux, On doit
à M. Beaulieu un précieux mémoire sur ce qui nous
reste de la musique des Grecs dans les plus anciens
chants de l’Église ; à M. Bodin, un travail sur le commerce
dans l'arrondissement de Niort; à M. Tonnet, des re-
cherches sur les établissements insalubres ; à M. Plasse,
des études sur la saumure ; à M. Lescœur , la statistique
de nos écoles. Il faut citer surtout l'étude géologique des
tranchées du chemin de fer de Poitiers à la Rochelle, sur
le territoire des Deux-Sèvres , faite par MM. Baugier et
Sauzé. Gette étude a constaté les faits suivants :
4°, De la limite du département de la Vienne à la
vallée de la Sèvre, près St.-Maixent, en marchant du
Nord-Est au Sud-Est, on rencontre les terrains juras-
siques, dans leur ordre chronologique de superposition
depuis l'étage oxfordien jusqu’à l'étage liasien.
2°, Les mêmes terrains se rencontrent en sens inverse,
de la vallée de la Sèvre à la limite du département de
la Charente-Inférieure.
8 La ville de St.-Maixent se trouve placée entre
deux axes parallèles de soulèvement des granites qui ont
(4) Note déposée par M, Ferdinand David, délégué,
TRAVAUX DES ACADÉMIES :EN 1856, 879
relevé à droite et à gauche les couches jurassiques ; ces
axes courent du Sud-Est au Nord-Ouest; entre eux, les ter-
rains se sont brisés , et ont formé un bassin assez consi-
dérable, au fond duquel on rencontre des terrains d’eau
douce presque horizontaux et en discordance complète de
stratification avec les couches j RIPeIqueR qui leur servent
de support.
4°. De ce: que les couches jurassiques sont relevées de:
chaque côté des lignes de soulèvement ; de ce que les
couches d’eau douce reposent sur elles à peu près hori-
zontalement, on peut conclure que le soulèvement des
granites a eu lieu entre la période oxfordienne et la pé-
riode falussienne à laquelle semblent appartenir les dépôts
lacustres,
« La Société ne s’est pas contentée de produire d’utiles
mémoires. Ses collections géologiques ont été disposées et
classées avec le plus grand soin. Les catalogues sur cartes
sont achevés; ils démontrent que le nombre des roches
et fossiles étrangers au département s'élève à 2,089, et
que la collection paléontologique départementale possède
et comprend un nombre d'échantillons qui s'élève à 882.
La Société a fait ensuite exécuter, à Bessac, commune de
Périgné, arrondissement de Melle, des fouilles qui ont
produit des résultats intéressants ; elles ont fait découvrir
de curieuses mosaïques et une belle inscription qui
remonte probablement au deuxième siècle de l’époque
romaine, Elle a ensuite contribué à la restauration d’une
crypte découverte sous l’église de St.-Florent, près
Niort. Cette crypte est un type véritablement précieux:
nulle part les dispositions qu’on y remarque ne se sont
aussi bien conservées. »
376 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
TARN.
La Société scientifique et littéraire de la ville de
Gastres (Tarn) vient, pour la première fois, vous a dit
M. Maurice de Barrau, vice-président et délégué de cette
société , vous demander de l’admettre à prendre part à
vos travaux ; toute jeune encore, puisque sa fondation
ne remonte qu’au 26 novembre 1856, anniversaire de la
fondation de l’Académie de Castres par Paul Pélisson ,
elle a l'espoir de profiter des lumières d’une assemblée
composée d'hommes si éminents, et le désir de pouvoir
par la suite vous apporter un concours plus efficace.
Jusqu'ici, dans ce beau pays Castrais, où l’agriculture
et l’industrie tiennent la première place , tous les travaux
de lettres , de sciences, d'histoire locale, d'archéologie et
de beaux-arts avaient été isolés. Les auteurs ont écrit ou
travaillé avec la conscience de cet isolement qu'ils déplo-
raient. Le but des fondateurs de la Société scientifique et
littéraire a été de rapprocher ces hommes qui, à des
degrés divers et avec des aptitudes différentes, aiment le
travail intellectuel et s'occupent d’études sérieuses, de
leur fournir un point de réunion, de leur donner l'appui
qui résulte d’une communauté d'efforts , de les encou-
rager ainsi à persévérer et par cela même de leur assurer
de la sympathie et de leur préparer des succès.
Faire aimer l'étude, propager les découvertes utiles,
vulgariser les procédés que la science met à la portée de ,
tous, faire connaître les monuments antiques, recon-
stituer l’histoire locale si riche et si peu connue , recher-
cher les origines et constater les phases diverses de la
langue languedocienne qui s’affaiblit tous les jours: voilà
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 377
les buts principaux vers lesquels tendent les efforts des
membres de la Société. “
En travaillant elle-même, en provoquant des recher-
ches, en encourageant des essais, en récompensant des
résultats utiles , la Société espère exercer autour d’elle
cette influence, acquise d'avance à tout ce qui est sincère
et laborieux. La publication régubkère de ses procès-
verbaux dans les journaux de la localité, l’impression de
quelques-uns de ses travaux, et, par-dessus tout cette
autorité qui résulte d’une concentration d’efforts et d’une
persévérance à toute épreuve, lui permettront, elle
l’espère, d'imprimer une impulsion vigoureuse aux es-
prits, et, en les détournant des préoccupations frivoles ou
des tendances exclusivement industrielles, de les pousser
dans cette voie où les intelligences s’agrandissent et se
fécondent au contact de ce qui est beau, bon et utile.
Les premières lectures ont été presque exclusivement _
littéraires, mais plusieurs études archéologiques ou
géologiques sont annoncées, Voici la liste des principales
lectures déjà faites :
Travail, par M. l'abbé Maffre, sur le Rôle de la raison
dans les études philosophiques.
Etude sur les Académies en France, pa = à 1632,
par M. V. Canet,
Etude sur les éléments constitutifs de la langue
française, par M. Aug. Guibal.
Examen de la théorie de l'abbé Paramelle, par
M. l'abbé Boyer ; — Application de ses principes aux
coteaux qui avoisinent Castres.
Note, par M. Maurice de Barrau, sur les deux plus
anciennes grammaires françaises,
Étude sur le Prædium rusticum et sur les écri-
378 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
vains agronomes qui ont servi au P. Vanière, par
M. À. Combes. *
Note sur l’importance des observations météorolo-
giques et sur la création d’un observatoire à Castres,
par M. Tillol.
Communication de deux ellipsographes, et démons-
tration des principes sur lesquels ils reposent, par
M. Valette, Le premier de ces ellipsographes est destiné
aux ouvriers; le second , aux travaux graphiques.
Étude sur les langues méridionales et leurs transfor-
mations, par M. A. Combes.
Étude sur les œuvres mélées de prose et de vers,
par M. Nayral.
Étude sur Horace et ses traducteurs, par M. V.
Canet: — Compte-rendu d’une traduction de ses œuvres
lyriques, par M. le comte G. de Nattes.
VAUCLUSE.
MM. le marquis de Balincourt, J. Olivier, et R. Lançon,
délégués de la Société d'agriculture de Vaucluse, vous
ont présenté le rapport ci-après , sur les travaux de cette
Société :
« La Société d'agriculture de Vaucluse publie avec
succès un bulletin mensuel, destiné à faire connaître et à
vulgariser, non-seulement ses propres travaux, mais
aussi les découvertes , les améliorations réalisées par
d’autres que par elle. Ce bulletin s'adresse surtout aux
cultivateurs de Vaucluse, qui y trouvent de bons conseils,
et des idées pratiques dans d’excellents articles de M.
Fabre, directeur de la ferme-école de Vaucluse.
« La garance et la soie, qui sont les principales richesses
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 379
du département de Vaucluse , ont occupé une grande
place dans les discussions de la Société. M. Picard, l’un de
ses membres, a présenté des considérations très-élevées
et très-complètes sur la culture, la fabrication, et le
commerce de la garance ; il a surtout appelé l'attention
sur les avantages précieux du cabestan à double fonction
de M. Garcin (de l'Isle) qui en est l’inventeur, faisant
mouvoir simultanément, à l’aide de quatre. chevaux,
deux charrues défonceuses , qui agissent en sens con-
traire. Get appareil serait susceptible de réduire le prix de
revient de la garance, dans la plupart. des cas, si ce
n’est dans tous, de 6 fr. à 40 fr, par quintal mé-
trique. |
« L'éducation des vers à soie a été, et devait être éga-
lement l’objet des préoccupations et des études de la
. Société. Plusieurs. de ses membres , entre autres M, de
Gasparin, ont publié, dans le bulletin, des articles très-
remarquables sur ce sujet. Aujourd’hui cette question
préoccupe les agriculteurs de la France et ceux de
tous les autres pays producteurs de soie. L’épidémie
de la gattine est venue apporter la perturbation dans
ces contrées, et, comme l’a dit avec raison M, Guérin-
Méneville, elle est arrivée à un tel degré d'intensité
qu’elle a produit, chez les habitants de ces localités,
une gêne analogue à celles dont souffrent les popu-
lations des bords inondés du Rhône et de la Loire,
« Depuis long-temps, les hommes qui s’occupent de la
sériciculture, au point de vue de la science et de la grande
pratique, ont compris que le meilleur moyen de régénérer
les races de vers à soie, de les rendre plus aptes à résister
aux influences qui peuvent déterminer des épidémies,
serait de ne pas se borner à prendre les cocons destinés à
380 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la graine dans le résultat des éducations faites en vue
seule du produit. Des éducations spéciales pour la graine
ont été conseillées et demandées de tout temps, et les
publications des magnaniers en progrès, notamment
celles qui émanent de la magnanerie expérimentale de
Ste.-Tulle , en font foi; car, outre qu’elles n’ont cessé
de propager cette idée, leurs auteurs l’ont, de plus,
mise en pratique depuis plus de dix ans, avec le plus
grand succès. Cette pensée et beaucoup d’autres, non
moins anciennes et non moins justes, forment tout le
fond d’un remarquable rapport que le célèbre chimiste
M. Dumas a fait récemment à l’Institut sur cette grave
question, à l’occasion des cocons blancs, prônés depuis
long-temps, au nom de M. Brouski, et enfin sous celui
de race André Jean (1).
Pour ne pas discuter ici le fond du procédé, dit André
Jean, nous croyons devoir renvoyer au bulletin de la
Société de Vaucluse, 1857 ,: page 13 , où l’on trouve
des observations à ce sujet. Nous terminérons , comme
M, Dumas, en disant « que des épreuves prolongées,
« variées, et sur une grande échelle, sont les seuls
« moyens de fixer l’opinion sur son emploi par un juge-
« ment certain. » |
« Quant aux causes de la maladie, elles ont été diver-
(4) Les pérsonnes qui voudront étudier franchement ces ques-
tions si graves en ce moment, doivent lire en même temps le
rapport fait à l’Institut par M. Dumas, e4 une brochure publiée
quelques jours avant ce rapport, et qui a pour titre: Production
de la soie. Situation. Maladie et amélioration des races de
vers à soie, par M, Guérin-Méneville; in-8°, Paris , librairie
Huzard,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 381
sement appréciées. En définitive, elles semblent être
les mêmes que celles qui ont amené la maladie des
végétaux , et surtout de la vigne, comme M. Guérin-Mé-
neville l’a démontré dans une notice lue à l’académie
des Sciences , le 29 décembre 1856, et reproduite dans
beaucoup de journaux.
« Dans ce moment, les agriculteurs du midi de la
France, de l'Italie, de l'Espagne, etc.. sont dans une
grande inquiétude relativement à l'éducation des vers à
soie de cette année ; car ils ne peuvent savoir si les
graines, qu’ils se sont procurées par le commerce, ne
sont pas infectées de la maladie régnante.
« Malheureusement nous nous sommes aperçu depuis
plusieurs années, que la spéculation avait introduit des
graines fraudées ; il serait donc à désirer que des per-
sonnes dignes de la confiance des agriculteurs se li-
vrassent à des éducations de graines, et que le produit en,
fût livré avec des garanties suffisantes.
« Le sorgho à sucre , sans avoir été cultivé encore sur
une grande échelle dans le département de Vaucluse , a
donné cependant déjà d’utiles résultats. Plusieurs mem-
bres ont rendu compte à la Société de leurs efforts et de
leur expérience. M. d’Albignac, surtout, a écrit dans le
bulletin , sur la culture du sorgho, divers articles pleins
de science et d'intérêt. M. Olivier s’est également occupé,
à différents points de vue, de cette plante remarquable,
qui a un grand avenir pour les agriculteurs du Midi.
« Les truffes sont devenues l’objet d’un commerce
important dans certaines parties du département, et
particulièrement à Carpentras. Dans un seul marché, il
s’en est vendu jusqu’à 1,500 kilogrammes. Cette inté-
ressante production a souvent occupé les instants de la
982 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Société ; devant elle , s’est agitée la question de savoir
si la truffe était ou n’était pas, comme la noix de galle,
le produit de la piqure d’un insecte aux radicules d’un
chêne ou d’un autre arbre ; cette question est restée sans
solution. La culture de la truffe a fait l’objet d’études
très-instructives, publiées dans le bulletin par MM. de
Gasparin et Picard.
L’inondation du Rhône, dont le département de Vau-
cluse a si cruellement souffert, a donné lieu à de savants
mémoires des deux mêmes membres.
La Société s’est encore particulièrement occupée du
drainage, des engrais, de l'amélioration des races ovines.
En résumé, la Société d’agriculture de Vaucluse
atteint le but qu’elle s’est proposé, celui de répandre
l'instruction parmi les populations rurales du département,
etde leur faire comprendre la nécessité des réformes
agricoles. ;
VIENNE.
Voici, d’après les renseignements fournis par M.
Trichet aîné, secrétaire de la Société d'agriculture ,
belles-lettres, sciences et arts de Poitiers, le résumé des
travaux de cette Société : |
Mémoire sur les Sociétés alimentaires, par M. Garran
de Balzon, conseiller honoraire à la Cour impériale de
Poitiers,
Examen, par la Société, de plusieurs machines à battre,
de moulins portatifs à moudre les grains, construits par
des fabricants d'instruments aratoires.
Examen, par la Société, d’un appareil fumifuge, inventé
par M. A. Pichot ; rapport de M. Oudin.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 41856. 383
Mémoire, par M. de Curson, sur les divers modes d’ex-
ploitation des terres, soit par la culture directe du pro-
priétaire, soit par la régie, soit par le bail à colonage
partiaire , soit par le bail à prix certain.
Mémoire , par M. Jolly, docteur-médecin, sur le bail à
prix certain.
Mémoire, par M. Savattier de Beaupré, sur le colonage
partiaire.
Mémoire par M. Jules Savattier, sur le colonage
partiaire. Enquête ouverte par la Société sur ces ques-
tions. Discussion approfondie,
Concours , ouvert par la Société, pour l’horticulture
maraîchère et florale, et pour l’arboriculture. Inspection
des jardins et pépinières par une Commission. Rapport
de M. David de Thiais. Prix décernés en séance publique.
Essais de culture, par la Société, de l’igname, du sorgho
sucré , de la rhubarbe du Thibet, de diverses espèces de
courges , provenant d'Angleterre et du Canada, — Sirop
de sorgho, présenté par M. Mauduyt.
Culture , par la Société , de diverses espèces de blés
étrangers, provenant de l’exposition universelle de Paris.
Mémoire de M. Bonnet, conseiller , sur le rendement
obtenu.
Drainage exécuté avec succès sur des terrains tourbeux,
par MM. Gaillard, président , et Lafond , membre cor-
respondant de la Société. :
Note, par M. Mauduyt, sur le rendement en viande
nette d’un bœuf Durham abattu.
Coup-d’œil sur le domaine de l’homme ; esquisse géolo-
gique, par M. de Longuemar, vice-président de la
Société.
De l'introduction des races étrangères dans le dépar-
384 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
tement de la Vienne , et de l’amélioration des races
indigènes par le croisement ; par M. Th. Gaillard.
Visite, par une commission , des bestiaux étrangers
importés dans le département ; rapport de M. de
Longuemar.
Renseignements sur l’état des récoltes , fournis par la
Société à M. le Sous-Intendant militaire, pour être
adressés au Ministre.
Note, par M. de Lamarsonnière, docteur-médecin, sur
les moyens de prévenir les inondations.
Examen, dans l'intérêt de l’agriculture locale , du
projet d’un chemin de fer de Nantes à Montluçon par
Bressuire, Parthenay, Poitiers, Montmorillon etGuéret, et
se reliant à celui de Lyon. Examen d'un autre projet de
chemin de fer, de Limoges à Tours et à Paris , et passant
par Vendôme; pétition adressée au Ministre par la
Société.
Rapport, par M. de Longuemar , sur une laiterie établie
à Chaumont près Poitiers, et sur un nouveau mode d’ob-
tenir le beurre.
Note, par M. de Curson > Sur divers +Yéinés usités
pour obtenir le beurre.
Examen du système de panification inventé par M.
Rolland. Enquête ouverte à ce sujet.
La Société des Antiquaires de l'Ouest (4) a publié
le tome XII°, de ses Mémoires (un vol. in-8°. de 530
pages, avec 44 planches dont 9 doubles). 11 contient le
discours du président, M. de Longuemar, sur de curieux
souterrains-refuges ; le rapport du secrétaire, M. Ménard,
(4) Ce résumé a été fourni par M. Ménard, secrétaire.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 385
sur les travaux de la Société pendant l’année 4855; —une
notice de M. de Longuemar, sur quelques poteries antiques
découvertes à Poitiers ; —uneautre de M. Faye, sur la ville
de Mauzé, en Aunis ; —une autre, de M. d’Argenson, sur
l’ancienne châtellenie des Ormes-St.-Martin ;—une autre
encore, de M. de Rochebrune, sur l’abbaye et l’église de
Nieuil-sur-Autize ; —une enfin, de M. Pilotelle, sur M. de
Blossac , ancien intendant du Poitou, et sur la promenade
qui porte son nom à Poitiers, Un essai, de M. Ouvré, sur
l’histoire de Poitiers, depuis la fin de la Ligue jusqu’au
ministère de Richelieu, complète ce volume.
Les quatre bulletins trimestriels, publiés en sus
du volume de Mémoires, renferment les travaux sui-
vants : note, par M. Bonsergent, sur Pierre Mamoris l
curé de St.-Opportune de Poitiers au XV°. siècle ;—note,
par M. Duret, sur l’orthographe de divers noms de per-
sonnes et de lieux ; — note sur divers objets de poterie
gallo-romaine, par M. de Rochebrune ; — notice, par
M. Touchard, sur deux abbayes fondées en Angleterre,
en l’honneur de sainte Radégonde ; — dissertation, par
M. Rainguet , sur l’ancienne maison princière de Pons ;
— notice, par M. l’abbé Auber, sur les fresques de St.-
Pierre-les-Eglises ; — notice, par M. Bourgnon de Layre,
sur la famille Drouauld des Brétignières; — bibliographie
archéologique, par M. Ménard ; — liste officielle des mo-
numents historiques du Poitou ; — bref des. S. Pie IX,
à M. l'abbé Auber, au sujet de son Histoire de la cathé-
drale de Poitiers ; — notice, par M. l'abbé Auber, sur
saint Maximin de Trèves, et sur saint Maximin de
Poitiers ; —notice, par M. l’abbé Barbier de Montault, sur
des élégies poitevines relatives à la mort de saint Bruno:
—Tapport, par M. Rédet, sur les Mémoires de la Société
17
886 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
historique de Styrie ;— note, par M. Meillet, sur som
procédé métalloplastique de reproduction, sur papier, des
médailles ou monnaies ; — comptes-rendus trimestriels,
par M. Ménard.
Divers membres de la Société lui ont, en outre, pré-
senté d’autres travaux dont voiei le détail :
Etudes historiques, par M. Chemioux, sur Jean
Chandos, et sur la lutte entre la France et l’Angleterre au
XIV*. siècle ; —notice, par M. Bonsergent, sur Gaspard de
Rochechouart, et Jeanne de Saulx-Tavanne, sa femme:
—notices, par M. Touchard, sur les communes de Clazay,
de St.-Porchaire, de Champdeniers et sur le château
Salbard ; —résumé, par M. l’abbé Auber, de la première
partie de son Histoire du symbolisme ; — note, par
M. Joslé , sur le souterrain-refuge de Seuilly ; — notice,
par M. d’Argenson, sur le château de la Fontaine , et la
famille Aubéry du Maurier ; — notice, par M. de Lon-
guemar, sur l’abbaye , le chapitre et l’église de St.-Hi-
laire de Poitiers ; — notice , par M. labbé Carrière , sur
l'église St.-Paul de Nimes.
Outre ces travaux écrits, la Société a fait de nombreux
efforts pour la description des anciennes maisons de Poi-
tiers , pour là conservation des châteaux de Chauvigny et
de Loudun, et pour celle des arènes de Poitiers. Elle a vu,
cette année, appliquer, par l'État, 30,000 fr. à restaurer
l’église St.-Hilaire ; allouer 13,000 par le Conseil général
de la Vienne ,.5,000 fr. par le Conseil municipal de Poi-
tiers, 10,000 fr. par l’État, pour continuer à démasquer
l’ancien palais des ducs d'Aquitaine. |
Sa bibliothèque s’est grossie de 248 volumes ou bro-.
chures , d’une masse considérable de pièces, notes et
. documents manuscrits, de 209 gravures ou dessins, Son
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 387
cabinet s’est enrichi de 96 médailles, de 7 sceaux ou em-
_ préintes de sceaux, de 67 meubles, armes, ustensiles,
objets divers ; 41 autres objets antiques sont entrés dansle
musée de la ville joint à celui des Antiquaires de l'Ouest.
Parmi les travaux littéraires et scientifiques qui ont
été publiés dans le département de la Vienne , je dois
mentionner ici ceux qui vous ont été offerts par leurs
auteurs et dont les titres suivent :
1°, Histoire des congrégations religieuses Povigine
poitevine , par Ch. de Chergé, membre de la Commission
archéologique diocésaine de Poitiers (1856, 260 pages).
2°, Histoire de sainte Radégonde, reine de France,
et patronne de Poitiers, par le même.
3°. Les vies des saints du Poilou et des personnages,
d’une éminente piété, qui sont nés ou qui ont vécu
dans cette province.
Le produit de ces trois ouvrages, dédiés à Mg’. l'Évêque
de Poitiers , est affecté à une fondation religieuse qui doit
assurer aux enfants et aux malades d’une pauvre paroisse
de campagne les soins dont ils ont besoin.
4°. Les souterrains-refuges découverts dans l’ancien
Poitou ; discours prononcé à la séance publique de la
Société des Antiquaires de l'Ouest, par M. de re
président.
5°. Un discours, sur la modestie, prononcé à l audiéncé
| de rentrée de la Cour Impériale de Poitiers, par M. Jules
| de La Marsonnière, substitut du procureur-général.
6°. Etudes sur la circulation naturelle des eaux su-
perficielles et souterraines dans le département dela
Vienne , par M. de Longuemar. Ces études comprennent
des considérations sur le drainage et expliquent : 4°, l’ori-
388 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANEF.
gine des sources naturelles ; 2°, la théorie du gisement des
sources cachées ; 3°. la théorie des puits artésiens ; elles
sont accompagnées d’une carte géologique et de coupes.
YONNE.
Un compte-rendu très-détaillé, par M. Edmond Challe,
des travaux de la Société des sciences historiques et na-
turelles de l'Yonne, dont ikest le secrétaire, n’a pu, à mon
regret, trouver ici sa place que sous forme d'analyse.
Cette Société se fait toujours remarquer par l’activité
de ses travaux. Elle vient d’achever la publication du
X°, volume de son Bulletin, qui contient des mémoires
d’une remarquable importance. :
Voici l’analyse des principales pièces de ce recueil :
M. Cotteau a continué son travail sur les échinides
fossiles, qui est en si haute estime auprès des hommes de
la science. Il a terminé la partie qui concerne les terrains
de formation jurassique, où il a décrit 40 espèces jusqu’à
présent inédites.
Une assez vive polémique s’est engagée entre Îles
Sociétés historiques de la Bourgogne et M. Delacroix,
président de la Société d’émulation du Doubs, qui à voulu
transporter au sein des àpres montagnes qui séparent
Salins de Besançon , et dans un village appelé Alaise , la
ville d’Alesia, si célèbre par son long siége, décrit dans
le septième livre des Commentaires de César, et que :
jusqu'alors tous les savants s'étaient accordés à placer à
Alise ou Ste.-Reine, dans le département de la Côte-d'Or.
M. Déy a pris part à ce débat, par un mémoire , où la
question se trouve discutée de la manière la plus appro-
fondie.
l È
Re
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 389
Le même auteur a continué son histoire de la ville et
du comté de St.-Fargeau.
M. Camille Dormois a donné une notice historique,
très-complète, sur la commune de Villiers-Vineux.
M. Barrière avait publié, en 1824, les Mémoires du
comte de Brienne, qui, après avoir été secrétaire d’État,
sous la minorité de Louis XIV, et ambassadeur en Suède,
fut, en 1660 , emprisonné à St.-Lazare, pour des causes
assez obscures , mais, à ce qu’il paraît, peu honorables.
Le savant éditeur avait regretté la perte d’une relation,
qu'avait écrite l’auteur, de ses voyages dans le nord de
l'Europe. Le manuscrit original de cette relation a été
retrouvé, à la bibliothèque d’Auxerre , par M. Cherest ,
qui lui a consacré une notice fort intéressante , où l’on
trouve de curieux et nouveaux détails sur l'existence
intime de la reine Christine de Suède.
La biographie des hommes éminents de la contrée tient -
une assez grande place dans le bulletin de la Société.
On doit à M. Duché une notice biographique sur un
diplomate auxerrois, Joseph Villetard, qui fut l’in-
strument principal de l’anéantissement de la république
vénitienne , en 1797. Ce grand fait historique y est
éclairé par des documents jusqu’à présent inédits.
M. Salomon a donné l’histoire de son grand-oncle,
Claude Salomon, curé de St.-Regnobert, à Auxerre, dont
le rôle a été assez actif, vers le milieu du siècle dernier,
dans la polémique janséniste qui, après avoir été éteinte
dans tout le reste de la France , avait trouvé un dernier
refuge dans le diocèse de celte ville.
M. A. Challe, membre de l’Institut des provinces, a
exhumé , d’après des manuscrits de la Bibliothèque
impériale et du Vatican, la figure d’un moine, appelé
390 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Odoranne, qui vivait à Sens, au commencement du XI°.
siècle. Par une rare exception aux mœurs de cette époque
d’ignorance et de barbarie,cet homme remarquable avait
retrouvé et pratiquait avec grand succès les procédés ou-
bliés de lasculpture, et, en même temps qu’il émerveillait
des œuvres de son génie le roi Robert et sa Cour, écrivait
une chronique des événements de son siècle et des
deux siècles précédents, des traités sur la musique, sur
là théologie, la scolastique., la science. du Droit, et com-
posait des œuvres musicales que M.-de Coussemaker va
bientôt publier. M. Challe a merveilleusement mis en
relief la vie de cet artiste oublié, de ce savant uni-
versel, qui ne fut pas exempte d’agitation et de per-
sécutions, et qui se mêle. à l’histoire de la ville de Sens,
soumise , à cette époque, à de graves et douloureuses
vicissitudes.
La pelite ville d’Avallon n'avait pas d’histoires; M.
Quantin en a recomposé une d’après des comptes derece-
veurs, et autres documents originaux. Déjà précédem-
ment, il avait fait un travail sur le XV*°, siècle; il l’a
continué dans ce volume, pour le siècle suivant.
M. Edmond Challe a expliqué, dans une savante
notice, un bas-relief antique qui vient d’être trouvé dans
le mur romain de la vieille enceinte auxerroise. Le même
auteur a fourni un travail sur des sépultures gauloises
découvertes près de la même ville.
Des membres dela Société ont publié, en dehors du
bulletin, d'importants travaux. M. l’abbé Henry a donné,en
deux volumes in-8°., une histoire de la ville de Seignelay ;
et M. l'abbé Baudiau, une histoire du Morvan, cette contrée
âpre, montagneuse et encore si remarquable par les
mœurs excentriques de ses habitants, qui se trouve enclavée
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 41856. 391
entre la Bourgogne, le Nivernais et l’Auxerrois. Le bulletin
contient des comptes-rendus détaillés, par MM. Quantin
et A. Challe, de ces deux compositions historiques.
La publication du Cartulaire historique et de la Bi-
_ bliothèque historique, compilés sur les chartes et les
chroniques des contrées comprises dans le département
de l’Yonne, par M. Quantin et par M. l’abbé Duru, pour-
suit son cours, "an
La Société des sciences historiques et naturelles de
l'Yonne est active et prospère. Elle compte plus de cent
cinquante membres. Son président a fondé un prix bisan-
nuel de statistique qui va’être, cette année, décerné pour
Ja première fois. Une table décennale de son Bulletin sera
très-prochainement publiée, avec une Histoire de l’impri-
merie dans le département de l'Yonne, par M. Ribière.
La Société a récemment fait opérer, sur l'emplacement
du vieil Auxerre gallo-romain , des fouilles qui ont
produit des résultats précieux dans l'intérêt de l’histoire
locale, et dont il sera rendu compte dans le prochain
bulletin. |
L'existence de la Société départementale d'agricul-
ture du département de l'Yonne ne date que de la fin
de 1856; elle est done trop jeune encore pour avoir des
travaux à présenter au Congrès. En la créant, M. A. Challe,
qui la préside, a voulu combler une lacune regrettable,
Le département de l'Yonne avait bien plusieurs comices
cantonaux, et même des Sociétés d'arrondissement ; mais,
faute d’un lien commun, ces sociétésignoraient respective-
ment les travaux et même l'existence de leurs émules
dans la même circonscription départementale, La Société
nouvelle sera un foyer central destiné à les éclairer
392 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
et à réchauffer leur zèle. Dès son début, elle a compté 350
membres. Suivant ses statuts, elle doit tenir une séance
générale par trimestre, et ouvrir, chaque année, un con-
cours dont le siége sera transporté successivement dans
chaque arrondissement, où une enquête publique sera faite
sur l’état de l’agriculture dans la localité. La distribution
des primes et des récompenses, qui aura lieu le lendemain,
terminera celte réunion annuelle. Le premier volume du
bulletin de la Société paraîtra en novembre prochain.
L'œuvre principale de la Société archéologique de
Sens (4) est d’arracher aux démolisseurs les débris de
sculpture gallo-romaine enfouis dans les murailles qui
forment l'enceinte de la ville et que, malgré ses efforts,
elle voit détruire chaque jour.
Cette année encore, elle a ajouté de nombreux frag-
ments à ceux qu’elle a déjà recueillis, et l'emplacement
que la ville lui a concedé suffit maintenant à peine pour
les contenir.
Plusieurs de ces pierres portent des inscriptions; d’au-
tres, des personnages sculptés en relief, Trois membres
de la Société, MM. Maurice, L. Prou et Boudin ont déjà
dessiné quelques-unes de ces pierres avec la plus scru-
puleuse exactitude, et leurs dessins accompagneront le
savant travail que M. Lallier, président de la Société,
achève en ce moment. Si la Société, après avoir donné une
description des premiers monuments de son musée, a
tardé à publier ses nouvelles richesses , c’est qu’elle avait
épuisé toutes ses ressources pour l’achat des pierres;
c’est aussi qu’elle manquait de dessinateurs assez habiles
(4) Rapport de M, G. Julliot, délégué de la Société,
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 4856. 393
pour reproduire fidèlement ces précieux monuments des
temps passés , et qu’elle ne voulait pas donner des à peu
près, ou publier des dessins que serait venue embellir
limagination de l'artiste,
D’autres inscriptions plus modernes se trouvaient dis-
séminées à Sens et dans les environs; la Société, pour
répondre au vœu des. Exc. le Ministre de l’Instruction
publique, a nommé une commission chargée de les re-
cueillir, et, par les soins de cette commission, S. Exc. a
déjà reçu deux envois de fac-simile et d’estampages.
Une autre commission , chargée par la Société de
réunir les noms des finages et lieux dits de chaque
canton de l’arrondissement, avec les traditions et les
légendes qui s’y rattachent , a déjà produit le commen-
cement d’un travail qui sera d’un haut intérêt historique
et archéologique pour la localité.
La Société a entendu , pendant ses séances ordinaires,
de nombreuses lectures.
M. Al. Hédiard a donné la Traduction d’un obituaire du
Popelin, maladrerie située à 2 kilomètres au nord de Sens ;
ce manuscrit, qui renferme des détails très-intéressants
pour l’histoire des établissements de ce genre en général
et pour celui-ci en particulier , remonte au XIIL°. siècle.
Le même membre a réuni, dans un travail conscien-
cieux, les noms des bienfaiteurs des hospices de Sens et
les services qu'ils ont rendus.
Une Notice sur M. Mégret d’'Étigny, descendant d’une
ancienne famille des environs de Sens, est due à la
plume spirituelle et élégante de M. Déligand.
M. Giguet a lu un rapport sur la traduction des Odes
d'Horace , par M. l’abbé Lallier , vicaire-général de Sens.
L'ancienne Agendicum a fourni aussi son champion
394 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCÉ.
dans la discussion engagée au sujet de l'emplacement
de lAlesia des Commentaires de César. M. Giguet,
connu déjà par ses ouvrages historiques et littéraires , a
donné une courte notice à ce sujet , au mois de janvier
dernier. ;
M. l'abbé Prunier, membre correspondant et tra-
vailleur infatigable, a donné de nombreux travaux :
sur les diverses significations et les divers rôles de la
lettre Y dans la langue française; sur les tapisseries
conservées au trésor de la cathédrale de Sens, et
remontant à 4446 ; sur Guillaume-aux-Blanches-Mains ,
archevêque de Sens, et sur la constitution de Beaumont-
en-Argonne , donnée par lui; sur sept proses tirées du
Bréviaire de Sens , texte, traduction, notation ancienne
et exécution ancienne et moderne; sur la fondation d’une
messe d'enfants, en 1495; enfin, sur les exactions
commises par les gens du roi envers les habitants de
Montachet, en 1651.
La Société doit encore à M. Déy, membre correspon-
dant, une notice sur le père Laire, bibliothécaire à Sens ;
à M. Lallier, un travail sur le produit annuel des terres à
diverses époques ; à M. G. Julliot, un armorial des ar-
chevêques de Sens, dont quelques planches seulement
ont paru.
A la fin de juin 1856, la Société archéologique a tenu
à Sens, avec le concours de la Société d'Auxerre, sa
séance publique ; et, pour rendre cette fête scientifique ,
artistique et littéraire , plus brillante et plus intéressante
à la fois, elle a réuni dans les salons de l’Hôtel-de-Ville
tous les chefs-d’œuvre de peinture et de sculpture qu’elle
a pu trouver dans la ville, ainsi que les œuvres dues à
des artistes Sénonaïis.
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. 395
Une commission avait été chargée de faire exécuter ,
après la séance, divers morceaux de chants religieux ,
choisis parmi les chefs-d’œuvre de diverses époques.
Ces morceaux , parfaitement sentis des exécutants et
rendus avec âme et talent, ont excité l’admiration de
l’Assemblée.
A cette séance , plusieurs travaux ont été lus :
M. l’abbé Carlier, chanoine de Sens, a engagé une
savante discussion sur l’auteur présumé du missel, appelé
missel des Fous.
M. Mondo de Layorse a, par des considérations ingé-
nieuses tirées du calcul des probabilités , établi le degré
de parenté de deux personnes prises au hasard , et traité
cette question piquante : Est-on de la famille de sa
mère ?
M. Giguet a extrait d’un travail auquel il donne la
dernière main, intitulé : Des hôtes illustres dont la
ville de Sens a reçu la visite , une notice sur le passage
du pape Alexandre HIT, à Sens.
M. Quantin, archiviste du département, a fait l’histoire
de l'établissement de la commune dans la même ville.
Enfin, M. Tisserand a terminé la séance par cette
lecture : Sur les beaux-arts aux réunions archéolo-
giques, lecture qui n’était qu’une transition pour arriver
à lexécution de la musique religieuse confiée à sa di-
rection. :
Pendant le courant de cette année , comme pendant
les années précédentes , la Société a acheté, ou reçu à
titre de don, nombre de médailles, d’objets trouvés
dans les fouilles, et d’autres objets modernes d’une
importance assez grande, parmi lesquels un manuscrit
du Koran, annoté par l’émir Abd-el-Kader ; —une lettre du
396 INSTITUT DES PROVINCES DË FRANCE,
Sultan à Louis XIV, et divers objets ayant appartenu à
l’empereur Napoléon I*.: entre autres, un de ses uni-
formes , et plusieurs ouvrages annotés par lui, légués à
la ville par M. Saint-Denis, ancien valet de chemin de
l'Empereur.
La Société archéologique de Sens a perdu, cette
année, un de ses membres les plus dévoués, M. G.
Dubois, petit-fils de M. Leys, ancien membre honoraire
de la Société. A ses derniers moments, M. Dubois a prié
son père de remettre, en son nom, à la Société ar-
chéologique la riche collection de médailles romaines
et byzantines commencée par son aïeul et continuée
par lui. Cette belle collection figure actuellement dans
la grande salle de la bibliothèque de Sens.
SOCIÉTÉS ÉTRANGÈRES.
Deux sociétés étrangères , la Société d'archéologie de
Belgique et la Société d'histoire et d’archéologie de
Genève se sont fait représenter au Congrès, Vous avez
à regretter que cette dernière société ne vous ait pas
fourni le résultat de ses travaux en 1856; elle ne
. vous à fait remettre, en effet, que le tome III°.
(année 1844) des mémoires et documents publiés par
elle.
La date de ce volume ne me permet pas de rendre
compte des précieux documents qu’il renferme , notam-
ment : 4°. de la relation, par M. Rilliet de Candolle,
du procès criminel intenté à Genève, en 1553, contre
Michel Servet qui, réfugié à Genève pour se soustraire
à la peine du feu prononcée contre lui par des juges
catholiques, devait, trois mois après, subir la même
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 41856. 397
peine à laquelle le même crime d’hérésie l'avait fait
condamner par des magistrats protestants; 2° d’un
mémoire sur les hôpitaux de Genève avant la réfor-
mation, par MM. Chaponnière, docteur-médecin , et
Sordet, archiviste.
La Société d'archéologie de Belgique vous a remis
la 4", livraison du tome XIV°. de ses annales. Cette
brochure contient le compte-rendu de la séance géné-
rale de cette Société du 22 décembre 1856, et, en tête
de ce compte-rendu, le discours prononcé, à cette
séance, par l’homme distingué qui la préside, M. le
vicomte de Kerckove-Varent. Le but de ce discours est de
venger l'antiquité et le moyen-âge des dédains de ces.
hommes qui, en trop grand nombre aujourd’hui, sont
voués aux intérêts matériels. L’archéologie, depuis quel-
ques années, a fait cependant de rapides progrès; son
domaine s’élargit et s'étend chaque jour, et l’orateur,
comme la Société à laquelle il s'adresse, en s’attachant
aux traditions du sol belge, trouve, dans le culte de ces
traditions et dans les souvenirs de famille, une sainte
pensée qui élève et fortifie l’âme des nations comme
celle des individus.
Vient ensuite le brillant rapport du secrétaire, M; Van
der Heyden, sur les travaux annuels de l’Académie,
dont les relations sont aujourd’hui très-étendues. De
nombreux membres effectifs et correspondants, d’un
mérite reconnu, et même d’une grande illustration,
ont tenu à honneur d’appartenir à la Compagnie, et
lappui de l’autorité ne lui a pas manqué. D’intéres-
santes publications faites par elle, depuis. sa séance
générale de 1855, sont dues à MM. Diegerick, le baron
398 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de Fierlant, Le Grand de Reulandt, Wleeschouwer ,
Casterman, Adolphe Siret, Léopold de Villers, l'abbé
Van den Nest , Schayes , l’abbé Stroobant, Ed. Van der
Straeten , Ed. Van Cauwenberghe , Carolus, le docteur
Broeckx et Van der Velde. Plusieurs membres de l’Aca-
démie ont reçu d’honorables distinctions du Gouver-
nement belge et des Gouvernements étrangers. Le
compte-rendu se termine par de justes regrets donnés
à la mémoire de plusieurs membres honoraires ou corres-
pondants, entre lesquels je citerai, parce qu’ils sont
français , les noms de MM. le vicomte d’Arlincourt ,
Fortoul , ministre de l'Instruction publique, et Félix
Dupuis, président de la Société des Antiquaires dé
Poitiers. Une notice biographique plus étendue est
enfin consacrée, par le secrétaire de l’Académie , au
célèbre baron de Hammer , le plus savant orientaliste
de notre époque , et à M. Jules Ketele , l’un des archéo-
logues les plus distingués de Belgique. |
La même livraison contient : 4°. un rapport, de M. le
docteur Broeckx, bibliothécaire-archiviste de l’Académie,
sur les échanges faites par elle avec les Sociétés savantes,
tant nationales qu'’étrangères ; 2°, une notice sur les
- ruines de l’abbaye de Villers, par M. Oswald Van den
Berghe ; 3°. une autre notice sur l’ancien prieuré de
Sinnigh, du tiers-ordre de St.-Augustin, dans la province
de Liége, par M. Arnaud Schaepkens , correspondant ;
4°. la suite des analectes archéologiques , historiques,
géographiques , de M. Schayes ; 5°. la suite d’une notice
historique sur le chapitre collégial de Ste.-Dympne, à
Gheel, par M. l'abbé C. Stroobant ; 6°. un mémoire sur
l’ancienne ville de Ghystelles, par M. Legrand ; 7°. un
extrait des procès-verbaux et de la correspondance de
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 41856. 399
l’Académie, où je remarque l'éloge mérité de M. le comte
Félix de Mérode, enlevé, le 7 février dernier, à l’Académie
dont il était l’un des plus anciens membres honoraires ,
et celui d’un membre correspondant , M. Jacques Azaïs,
président et principal fondateur de la Société archéolo-
gique de Béziers.
L’Athénée royal grand-ducal de Luxembourg vous a fait
parvenir le catalogue de sa bibliothèque, ne comprenant
pas moins de 835 pages, précédé d’une notice historique
sur cet établissement, par le professeur A. Namur,
docteur en philosophie, et son bibliothécaire.
Vous avez reçu aussi :
1°. Les Publications de la Société pour la recherche
et la conservation des monuments historiques dans le
grand-duché de Luxembourg, constituée sous le patro-
nage de S. M. le Roi grand-duc, par arrêté, daté de Wal-
ferdange, du 2 septembre 1845.
2°. Le prince de Ligne, ou un écrivain grand-
seigneur. à la fin du XVIII*. siècle, par M. Peeter-
mans ( Liége).
Ce volume est une notice complète et attachante sur
l’auteur des Mélanges militaires, littéraires et senti-
mentaires, et d'autres nombreux écrits, qui disait que
« de toutes les illusions, la plus agréable c’est d'occuper,
« après qu’on n'existe plus. Cette fumée de gloire,
« ajoutait-il, n’est pas déraisonnable et peut faire faire
« de grandes choses. »
3°. Jean-le-Victorieux ; étude bibtarentl. par M.
Oswald Van den Berghe, membre de l’Académie d’archéo-
logie de Belgique ( Louvain; 104 pages ) ; œuvre inté-
ressante, consacrée au vainqueur de Woeringen, au
400 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
chevaleresque duc de Brabant, favori constant de la
Victoire , béni par son peuple, qui a inscrit son nom
parmi ceux des plus généreux bienfaiteurs de lhu-
manité.
4°. Réflexions sur les idées philosophiques de
Lamartine, à propos du Cours familier de littérature,
suivies d’une Ode à Lamartine, par Ferd. Loise, docteur
en philosophie et lettres, professeur de poésie au collége
de Tongres ( Liége }.
M. Loise félicite l’auteur des Méditations el des Har-
monies , à l’occasion de son troisième entretien, d’avoir
fait un complet divorce avec les utopies du rationa-
lisme moderne , et un véritable retour à cette philoso-
phie chrétienne et catholique, que le poète semblait avoir
un instant méconnue, pour suivre le courant du siècle,
bien qu’il soit toujours resté profondément religieux ,
mais d’une manière trop poétique et trop peu positive.
5°. Explications sur l'attribution , à Charlemagne, de
quelques types monétaires, par L. de Coster (Bruxelles).
Extrait de la Revue numismatique belge ; savante disser-
tation, dont l'analyse ne peut trouver place ici.
6°. Trois brochures, de M. Alb. d’Otreppe de Bouvette,
récemment nommé membre étranger de l’Institut des
provinces, intitulées : Abnégation et dévouement ; hom-
mage au Gonseil d'administration, et aux membres de
la Société libre d’émulation de Liége; — Évocation,
promesse d’avenir à la même Société ; — Impressions
d'un touriste dans le monde moral, ou course à
travers les sentiments et les idées. Ces deux dernières
publications sont ia continuation de celles que vous
avez déjà reçues, sous le titre d’Essai de Tablettes lié-
geoises, Vous retrouverez , dans ces divers écrits , toutes
TRAVAUX DES ACADÉMIES EN 1856. HO
les qualités du cœur et de l’esprit qui distinguent leur
auteur,
J'ai terminé ma tâche, Messieurs. Si mon rapport a
pris, cette année , des proportions plus étendues que par
le passé, c’est qu'ayant à vous entretenir de vastes tra-
vaux et de nombreuses publications, il m'était difficile
d'être court. Je devais aussi donner une juste satisfaction
aux Sociétés qui ont concouru à nos travaux, en vousfaisant
connaître d’une manière complète, quoique succincte,
la part qu’elles ont prise aux progrès qui se révèlent
tous les jours dans les sciences, les lettres, les arts et
l'industrie. Peut-être était-ce aussi le moyen d’attirer à
vous celles des Sociétés savantes dont nous attendons
encore la coopération ; j'aime à croire qu’elles voudront,
à leur tour, joindre leurs lumières aux vôtres , et aug-
menter ainsi le faisceau des découvertes et des connais-
sances profitables au pays. :
ASSISES SCIENTIFIQUES TENUES EN 1857.
PAR L'INSTITUT DES PROVINCES.
ASSISES FCIENTIFIQUES TENUES EN POITOU
Les 25, 24,25 et 26 Mars 18557.
+
(Présidence de M. ne Loxeuemar, membre de l’Institut des
provinces, )
Les Assises scientifiques du Poitou se sont ouvertes
le 23 mars, et, après cinq séances, ont été closes le 26,
Le bureau s’est composé de MM. pe LONGUEMAR, prési-
dent ; DE CAUMONT, directeur-général de l’Institut des
provinces ; Ouvré, président de la Société des Antiquaires
de l'Ouest ; l’abbé AuBer et REDET, membres de l’Institut
des provinces; FoucarT, doyen de la Faculté de Droit ;
CHENOU, doyen de la Faculté des sciences; MÉNARD,
secrétaire de la Société des Antiquaires de l'Ouest; l’avo-
cat-général DE LA MARSONNIÈRE , vice-président de
la Société des Antiquaires de l'Ouest et secrétaire-gé-
néral des Assises scientifiques du Poitou ; TRICHET,
secrétaire de la Société d’agriculture de Poitiers, et
ARNAUD-MÉNARDIÈRE, Vice-secrétaire de la Société des
Antiquaires de l'Ouest ; ces deux derniers secrétaires
sectionnaires des Assises.
Un nombreux et intelligent auditoire n’a cessé de
manifester, par son assiduité à se rendre aux séances,
\ ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 103
l'intérêt pris par la population de Poitiers aux travaux
de l’Assemblée. On y remarquait : MM. de Sèze, premier
président de la Cour impériale .de Poitiers ; Paulze-
d'Yvoy, préfet de la Vienne; Damay, procureur-géné-
ral; l’abbé Juste, recteur de l’Académie ; Grellaud,
maire de la ville et professeur à la Faculté de Droit de
Poitiers ; Arnaudeau et Merveilleux , présidents de
Chambre; Darnis, premier avocat-général; Baussant,
président du Tribunal civil; Bardy et Jules de La
Marsonnière , avocats-généraux ; Brochain , Legentil ,
Pilotelle, Mauflastre, Duverger, baron Chemineau, Sous-
selier, Vincent, Molinière, Duclaud, Arnauld de Gué-
niveau, Bonnet, Perdriex , Gaillard, Trolley , conseillers
à la Cour impériale ; Babinet et de Gennes, substituts
du procureur-général ; baron Laurenceau, ancien dé-
puté ; Lhuillier et de Vanteaux, colonel et lieutenant-
colonel du 2°, Hussards ; Audinet, inspecteur de PAca-
démie; Foucart, Ragon, Martial, Pervinquière et Minier,
professeurs à la Faculté de Droit de Poitiers ; Trouessart
et Chenou, professeurs à la Faculté des sciences; Levieil
de La Marsonnière, président de la Société de médecine
de Poitiers; Malapert, professeur de chimie à l’École de
médecine ; Raynal, professeur de physique au Lycée de
Poitiers; Redet, archiviste du département de la Vienne;
Mauduyt, conservateur du musée dé la ville de. Poitiers;
Ségretain , architecte du département des Deux-Sèvres,
et Jolly Le Terme, architecte du Comité des monuments
historiques, membres de la Société française d’archéo-
logie pour la conservation des monuments; Delastre et
Pabbé de Lacroix, botanistes distingués ; Dupré, Oudin,
Pabbé Lalanne, l'abbé Barbier, Chemioux, de’ Bois-
morand, de La Brosse, de La Tousche, Lecointre,
404 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Dupont, Meillet, Touchard, membres de la Société des
Antiquaires de l'Ouest et de la Société d’agriculture,
et plusieurs ecclésiastiques au nombre desquels le R. P.
Guillermy, de la Société de Jésus.
Mg'. l’Évêque de Poitiers n’a pu, à raison d’un
voyage, assister aux séances. Il en a exprimé ses regrets
par une lettre adressée à M. de Longuemar.
Les Assises scientifiques avaient à opérer sur vingt-
deux questions, posées par l’Institut des provinces. Vingt-
deux mémoires ou notices ont répondu à l'appel fait,
aux hommes d'étude du Poitou, par M. de Caumont, La
session en est redevable à MM. de Longuemar , Ménard,
l'abbé Lalanne , l'abbé Barbier, Raynal, Brouillet, Bardy,
de Vézien, Mauduyt, Meillet, de Rochebrune, Trouessart ,
Pingault , l’abbé de Lacroix, Redet et Pilotelle.
La session a été ouverte par un discours de M. de Lon-
guemar., L’orateur, après avoir insisté sur l'utilité pra-
tique des assises scientifiques, qui offrent aux savants
des provinces un lien pour s’unir et une tribune pour
se produire, remercie M. de Caumont à double titre :
et pour l’œuvre qu’il a fondée, et pour sa présence qui
la féconde. M. le Président trace ensuite le plan général
des études qui vont occuper le Congrès, signale les
mémoires qui doivent répondre aux questions du pro-
gramme, et cite, comme devant fixer particulièrement
l'attention, les travaux préparés par MM. Raynal, Brouil-
let, de Vézien, Malapert, Meillet et Pilotelle, sur la
géologie pure ou envisagée au point de vue agricole ou
industriel; Delastre et de Lacroix, sur la botanique ;
Trouessart, sur la météorologie; Ménard et l’abbé
Barbier, sur l'archéologie locale; Bardy , Redet et l’abbé
Lalanne, sur l’histoire de l’organisation féodale,
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. h05
A la suite de ce discours, M. de Caumont se lève et
prononce l’allocution suivante :
« MESSIEURS,
« Je tiens à remercier M. de Longuemar des soins
empressés qu'il a pris, de concert avec M. l’abbé Auber,
pour rendre cette session intéressante et fructueuse.
Nous pouvons déjà pressentir qu’elle sera féconde, à
n’en juger que par l'indication qui vient de nous être
donnée des mémoires préparés en vue de notre réunion.
« L'utilité des assises scientifiques, Messieurs, n’est
plus hypothétique. C’est un fait désormais acquis. Les
Sociétés savantes des provinces travaillent chacune dans
leur circonscription, conquièrent chaque jour des faits
_ nouveaux, produisent des œuvres souvent excellentes ;
mais il leur manque un lien commun qui leur permette
de se compléter mutuellement par un échange facile de
leurs conquêtes scientifiques. D'un autre côté, parmi
les hommes qui travaillent isolément dans les provinces,
plusieurs renferment modestement dans leurs cartons des
productions dignes de publicité. L'œuvre de l'Institut
des provinces vient en aide à tous ces besoins. Relier
entre elles, et à un point central, toutes les Sociétés
_ savantes de France, interpeller chacune d'elles, dans des
assises solennelles, sur ses travaux et sur les lacunes
qui, lui restant à combler, peuvent être remplies grâce
à l'indication des œuvres qu’une autre a déjà produites ;
ouvrir à Paris, une fois par année, aux députations de
chaque académie des provinces, une tribune offerte par
la Société d'encouragement; prêter soit aux Sociétés
savantes, soit aux travaux individuels de la province,
406 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la publicité de nos annales, telle est l'œuvre de notre
Institut. Cette œuvre a déjà conquis de la popularité. La
publication de nos annales s’est considérablement accrue.
Après avoir commencé par tirer à 400 exemplaires, il
nous a fallu, par suite des nombreuses demandes qui
nous sont adressées d’Allemagneé, porter à 4,000 exem-
plaires notre tirage. Espérons, Messieurs , que nos as-
sises seront de plus en plus fructueuses pour la science.
Ajoutons que nous comptons particulièrement sur Poi-
tiers, cette cité essentiellement parlementaire et aca-
démique, d’où sont déjà sortis tant de travaux dont la
science peut, à bon droit, se féliciter. »
Cette improvisation est accueillie par un sentiment de
vive sympathie , que M. de Longuemar exprime à M. de
Caumont , au nom des Sociétés savantes de Poitiers.
L'ordre du jour appelle la discussion des questions qui
se rattachent à la composition géologique du sol du
département de la Vienne. Avant de poser les diverses
questions du programme , M. de Longuemar présente,
dans un mémoire suceinct, des considérations générales
sur la position géologique du département de la Vienne,
qui lui paraît offrir un sujet d’études particulièrement
intéressant. 11 qualifie volontiers d’exceptionnelle la po-
sition géologique de notre sol, qui occupe une espèce
de détroit entre les deux grands bassins oolithiques du
nord et du sud-ouest de la France, détroit resserré d’une
part par le massif granitique du Limousin, et d’autre
part par les granites de la Vendée. Étagées par les mers
primitives, puis remaniées par des cataclysmes posté-
rieurs , les couches diverses qui composent le sol offrent,
dans un espace resserré, une assez grande variété géo-
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 407
logique. Ce département présente donc un sujet d’études
d'autant plus intéressant, qu’il peut être considéré
comme offrant un caractère exceptionnel.
_ Dans la moitié sud du département, dit M. de Lon-
guemar , la masse du sol appartient à l'oolithe infé-
rieure et à la grande oolithe. Du côté du Nord, et à peu
près à la hauteur de Poitiers, leurs assises disparaissent
sous l’oolithe moyenne qui paraît recouverte , sans in-
termédiaire, par les terrains crétacés inférieurs. Les
parties les plus élevées de cet ensemble, et notamment
les plateaux compris dans l’est et le sud du dépar-
tement, sont revêtus par un manteau interrompu et dé-
chiré d’argiles, de sables, de marnes appartenant au
terrain tertiaire moyen. A l’est et à l’ouest du dépar-
tement, et sur quelques points des vallées intérieures,
à Ligugé notamment , se montrent ou affleurent des
masses granitiques. Entre ces masses et l’oolithe infé-
rieure, s’interposent les marnes et les calcaires du :lias
supérieur. On les voit, en effet, poindre dans presque
toutes les vallées au sud de Poitiers, et se montrer à
découvert sur la lisière de granite, aux abords du Li-
mousin et de la Vendée. |
M. de Longuemar admet volontiers que ces couches
de lias supérieur n’occupent pas leur situation primitive,
et ne se rencontrent où on les trouve que par suite de
dislocations éprouvées depuis leur dépôt, Gette opinion
repose : 4°. sur la constatation faite par MM. de Lon-
guemar et Meillet, près de Mézeaux, d’un contourne-
ment bien prononcé de couches marneuses qui atteste le
soulèvement d’un noyau inférieur; 2°. sur le voisinage
des dolomies qui, fréquemment rencontrées dans l’oolithe
inférieure, témoignent d’une ancienne perturbation du sol.
08 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Au-dessus de la grande oolithe, M. de Longuemar
constate la présence de couches oxfordiennes jusqu'aux
portes de Poitiers. Les couches supérieures de l’oolithe
paraissent manquer, malgré quelques exceptions obser-
vées près de Maillé, sur les bords de la Gartempe et aux
environs de Châtellerault; mais il n’affirme rien. Tout
est à étudier sur ce point.
Aucune trace de dépôts néocomiens , dit M. de Lon-
guemar ; mais on rencontre des grès et sables verts,
des craies tuffeau et des craies marneuses dans presque
toute la partie du département sise au Nord de Mire-
beau, Beaumont et la Rocheposay.
Le terrain tertiaire recouvre tantôt les assises crayeuses,
tantôt les assises de l’oolithe. Il est représenté sur ces
plateaux par une série de sables et d’argiles panachés ,
de marnes d’eau douce et de meulières. Les exceptions
à la disposition générale des couches superficielles, ré-
sultat de l'inégalité de son épaisseur, jettent dans l’appré-
ciation géologique de ce pays une incertitude qui fait
_ regretter à M. de Longuemar que la carte géologique du
pays ne soit pas encore faite. L'absence d’un tel guide
rend fort difficile l'étude de notre géologie locale et ne
permettra de répondre qu’incomplètement aux diverses
questions du programme.
Après avoir esquissé, à grands traits, la physionomie
géologique du département, M. le Président pose les
trois premières questions du programme , ainsi conçues :
« La classification adoptée par les géologues s’applique-
« t-elle parfaitement aux formations de ce département ? »
« En quoi consistent ces formations ? »
« Ne pensez-vous pas, relativement à ces terrains, qu’il
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 03
« y ait des modifications à apporter à la classification ad-
« mise, et quelles sont, à cet égard, vos observations ? »
M. Raynal, professeur de physique au Lycée de Poi-
tiers, signale, dans un intéressant mémoire, les obser-
vations qu’il a faites dans la partie du département de la
Vienne comprise entre Vendeuvre et Pamproux. Son
travail a particulièrement pour objet de répondre à la
2°. question du programme par une description des
formations géologiques, constatées par lui dans la partie
du département soumise à ses explorations. |
“M. Raynal prend, pour centre de ses observations sur
la carte géologique de France, un point un peu au Sud
de Poitiers, où se manifeste l’affleurement des couches
déposées par les mers dans le bassin parisien et le bassin
pyrénéen. Ce point est un petit îlot de granite à gros
grains, tantôt rouge, tantôt vert, tantôt gris, traversé
en quelques points par des filons de quartz, et situé à
Port-Séguin. À partir de ce point, M. Raynal nous fait
explorer, vers le Nord, St.-Benoît, Smarves, Mauroy,
Poitiers , le Porteau, Bonnillet, Vendeuvre, Fruissenay;
et, vers le Sud-Ouest, Mézeaux, Virolet, Ligugé, Lusi-
gnan, Pamproux, jusqu’aux limites du département,
_ * Immédiatement au-dessus du granite, M. Raynal trouve
le lias. Ce terrain qui a commencé à combler les premiers
mégalites du sol, présente trois parties principales : un
calcaire très-dur reposant directement sur le granit, une
couche d'argile bleue au milieu , et à la partie supérieure
des bancs d’un calcaire argileux s'émiettant facilement:
Au-dessus de lias, M. Raynal a reconnu, mais sun
quelques points seulement, l’oolithe inférieure ;: à Port=
Séguin, à Mézeaux , elle n’existe pas, ou est méconnais-
sable , mais elle apparaît à Virolet, à Coulombiers.
18
Lt INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
La grande oolithe existe partout, tantot appuyée sur
l'oolithe inférieure, tantôt reposant directement sur le lias.
Au-dessus des plateaux formés par l’oolithe, M. Raynal
a reconnu l’oxford-clay kellovien, dans la direction Nord,
à Poitiers, — à Bonnillet, où l’oxford-clay proprement
dit est superposé au kellovien; et à Fraissenay, le kim-
meridge-clay ; puis, un peu plus loin, des sables et des
grès verts et les premières bultes de craies.
Les terrains tertiaires, dans les points observés par
M. Raynal, n’offrent qu’une première couche formée de
diverses variétés de quartz roulés, souvent agglutinés en
poudingues par du péroxyde de fer et une couche
d'argile plus ou moins calcaire, avec des rognons de
silex. On y trouve aussi quelquefois des blocs énormes de
matières siliceuses, paraissant jaunies par de l’hydrate.
de péroxyde de fer , et des pierres poreuses, analogues.
aux pierres ponceuses,
M. Raynal signale, comme pouvant se rapporter à des
dépôts diluviens, des masses d’argile rouge, rencontrées
par lui sur plusieurs points.
Quelques particularités observées dans les couches de.
l’oolithe sont, de la part de l’auteur du mémoire, l’objet
d’une description intéressante, en même lemps que de
déductions ingénieuses : il signale, en effet, dans l’oolithe:
inférieure un grand nombre de perforations, en forme
de canaux, irrégulières dans leur diamètre et dans leur
direction, quoique descendant habituellement. Ces cavités,
quelquefois vides, sont le plus habituellement remplies
par un dépôt calcaire peu différent de la roche primitive,
malgré quelques dissemblances dans les teintes ; l'axe de
ces remplissages est occupé souvent, surtout vers la
partie supérieure, par du silex bleu.
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. Al
M. Raynal attribue ces formations à Paction d’une eau
marine , agissant comme dissolvant sur des roches pré-
existantes, détruisant certains points attaquables, et
respectant certains autres. Le pouvoir dissolvant lui pa-
raît, en outre, le résultat d'émanations acides de volcans
sous-marins dont l’action discontinue aurait fini par
s’anéantir , et laisser les dépôts se faire de nouveau dans
des circonstances normales. Ces phénomènes de dépôts
se rattacheraient donc à la formation des dolomies si fré-
quentes dans le departement,
M. Raynal signale aussi, sur les flancs à pic des rochers
de Mauroy, St.-Benoît, le Porteau, etc. , etc. , des
cavernes dont la cause lui paraît devoir être attribuée aux
dislocations qui ont accompagné la formation des vallées,
et à l'entrainement des déblais par les eaux qui se pré-
cipitaient par les fentes du fond.
Enfin l’auteur, dépassant les limites du département de
la Vienne et explorant la partie orientale du département
des Deux-Sèvres, constate, dans la disposition et dans la
nature des couches, des changements qui lui suggèrent
de hautes considérations sur l’idée que nous devons nous
faire de la géographie du sol, à l’époque des formations
oolithiques.
Les mêmes questions sont traitées dans un mémoire de
M. Brouillet, dont M. de Longuemar donne lecture. Ce
mémoire complète, pour ce département, les observations
du précédent, en ce qu’il décrit les formations géologi-
ques de l’arrondissement de Civray, inexploré par
M. Raynal.
Les observations consignées dans ce mémoire se res-
treignent dans le cercle assez étroit du canton de Char-
roux. Toutefois, elles présentent des faits nouveaux et
412 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
inobservés dans la partie du département explorée par
M. Raynal,
Abordant les formations liasiques, M. Brouillet déclare
n'avoir aucun renseignement à fournir sur leur couche
intérieure; mais il indique des marnes bleues et bitumi-
neuses, alternant avec des calcaires bleuâtres, comme
formant la couche moyenne, des marnes schisteuses ,
variant du bleu-jaunâtre au gris-bleuâtre, formant la
couche supérieure.
Les fossiles de cette formation sont des conchifères,
des mollusques , des zoophytes, deux espèces de poissons
sauroïdes et des reptiles du genre crocodilien.
Ses minéraux et ses métaux sont des ovoïdes ferru-
gineux, barytines, calcaires magnésiens noirs contenant
de la galène , et enfin des calcaires coquilliers très-durs.
M. Brouillet passe ensuite à la formation oolithique.
La couche inférieure est une oolithe ferrugineuse com-
prenant des calcaires à entroques, reposant sur une
masse de sable marneux, souvent dolomitique. Puis,
au-dessus de ces couches d’oolithes ferrugineuses ,
M. Brouillet constate la présence d’argiles marneuses ou
terres à foulon , jaunes , bleues ou alternant fréquemment
avec des couches d’un calcaire compacte, dur et bleuâtre, |
que recouvre un autre calcaire blanc-grisètre, souvent
grenu, caverneux et dolomitique.
Les fossiles de cette formation sont des conchifères ,
des zoophytes et des mollusques; les minéraux, des cal-
-caires à eniroques, barytines, calcédoine, silex, sulfure
de fer, marnes, fer en grains et en rognons , manganèse,
el calcaire lithographique. :
Les terrains tertiaires sont composés d’argiles et de
sables gras, bigarrés de rouge, de jaune et de blanc;
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À
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. ‘ 13
de marnes calcaires plus ou moins dures, de silex meu-
liers , de cailloux roulés. ,
Des dépôts considérables de cailloux roulés, de sables,
de graviers, de fer en grains et souvent concrétionnés,
forment le terrain diluvien.
Le fait, observé par M. Brouillet , de l’existence de
l’oolithe ferrugineuse reposant sur des masses de sables
marneux, et surmontés parfois par des argiles mar-
néuses, donne lieu à une interpellation adressée à M. le
Président par M. Raynal. Ce fait n'existe sur aucun des
points où M. Raynal a promené ses investigations. Mais
M. Raynal explique cette différence par cette raison qu’il
a observé une partie du département, et M. Brouillet une
autre. Dans les lieux observés par M. Raynal, l’oolithe
a déjà deux facies ; rien n'empêche qu’elle puisse ailleurs
en avoir un autre, et, de la sorte, tout est ones
sans démenti pour personne.
Des observations ci-dessus rapportées, et des sin-
gularités géologiques constatées dans ce département , il
résulte, pour l’Assemblée, et particulièrement pour MM.
de Longuemar et Raynal,-qu’il pourrait y avoir , ainsi
que l'indique la 3°, question du programme, des modi-
fications à apporter, dans ce département, à la classi-
fication admise pour la généralité de la France. Mais on
ne peut rien préciser à cet égard, quant à présent,
étude géologique détaillée de ce département n'étant
pas encore assez avancée,
Après cette discussion , l'attention de l’Assemblée est
appelée sur la 4°, question du programme , ainsi conçue :
« Les terrains de votre département contiennent-ils
« beaucoup de débris organiques? Les a-t-on recueillis
ht4 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« avec soin? Ces débris appartiennent-ils à des espèces
« connues et bien déterminées? »
MM, de Longuemar , Raynal et Brouillet ont déjà ré-
pondu en partie à celte question ; mais elle est traitée d’une:
manière plus spéciale par MM. de Vézien et Mauduyt.
M. de Vézien, possesseur d’une riche collection géolo-
gique conquise par de longues et intelligentes pérégri-
nations à travers le département de la Vienne, pouvait,
mieux que personne, répondre à eette question. Un
mémoire adressé par lui au Congrès est lu par M. Raynal.
Dans ce mémoire, M. de Vézien énumère les fossiles,
aussi nombreux que variés, découverts et recueillis par
lui dans toutes les localités de ce département. Il si-
gnale, comme offrant une mine féconde aux géologues,
les gisements de Celle-l’Evêcault ; Vivône , Mézeaux,
Maillé , la Grimaudière, Rouillé, Salles et le Moulin-
Pochard , près Mirebeau.
Dans le lias, M. de Vézien a trouvé, à Celle-PEvè-
cault, Vivône, Mézeaux , Maillé et la Grimaudière , des
bélemnites variées, des ammonites et des madrepores
assez curieux ; à Mézeaux, des bivalves nombreux, variés
et bien conservés, dont une modiole parfaitement intacte;
à Vivône, une énorme Vénus; à l’Isle-Jourdain, une
ammonite ayant son test ; à Vivône et Celle-l’Évécault,
des nautiles.
Dans les couches oolithiques , les trouvailles de M. de
Vézien ont été beaucoup plus nombreuses. Aussi ne
cite-t-il que les plus remarquables. A Maillé-sur-Gar-
tempe , dans une couche de grès vert, il a recueilli la
gryphée colombe, et l’ammonite monile ; au même lieu,
dans une couche puissante appartenant à l'étage corallien,
il a trouvé, en abondance, les dicérates, les nérinées,
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 15
les polypiers, des encrinites et d’autres fossiles qu’il n’a
pu encore déterminer. A Rouillé, dans l’oolithe moyenne,
il a rencontré de belles térébratules, des ammonites,
. des nautilites; à Salles, des ancylocératites, et des toxo-
cératites, de l’oolithe moyenne, espèces fort rares ; à
Vouillé , à la Grimaudière, à Migne, à Chasseneuil, à
Bonnillet, il a trouvé, dans les mêmes couches, les mêmes
fossiles, ainsi que des oursins et de jolis bivalves bien
conservés.
A St.-Julien-l’Ars , dans des marnes paraissant appar-
tenir à la dernière limite du groupe oxfordien, M, de
Vézien a trouvé des gervilies, des myes, des gastéro-
podes turbinés et des ammonites dont un bullatus par-
faitement conservé , avec sa bouche entière et intacte.
M. de Vézien ajoute que, dans sa collection, il possède
40 espèces d’ammonites , appartenant aux terrains ooli-
thiques de ce département.
Le grès vert exploré par M. de Vézien, à Vendeuvre et
Lencloître seulement, ne lui a fourni rien de remarquable.
Mais, non loin de Mirebeau, au Moulin-Pochard, il a
trouvé, dans des carrières de sable, des arches, des
cythérées , des pétoncles, des tellines, des ongulines’,
des crassines, des chames, des corbules, des peignes, des
turritelles, quelques cerithes, un troche fort rare, de
beaux oursins , beaucoup de madrépores, des balanes,
et des huîtres à foison. -
Dans la craie tuffeau, à Beaumont et aux environs de
Châtellerault, à Loudun, à Mirebeau et aux Ormes,
M. de Vézien a recueilli des spongiaires ét un ancylo-
céras de la craie , des oursins, d'énormes pétoncles , des
cônes, des pyrules, des volutes, des porcelaines, des
polypiers. Mirebeau a fourni à M. de Vézien sa plus belle
16 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. “
conquête: c’est un petit crustacé qui, à ses yeux, est la
pièce capitale de sa collection.
M. Mauduyt prend, à son tour, la parole et fournit,
dans une courte notice, la description d’un certain nombre
de fossiles trouvés dans les cavernes à ossements de
Lhommaizé, en septembre 14834. :
Ce sont : l'os inter-maxillaire d’un cheval ; — trois
morceaux des maxillaires de la mâchoire inférieure d’un
bœuf ; — une canine inférieure, plusieurs molaires et
un morceau de brèche d’un sanglier ; — l’astragale et les
molaires supérieures d’un grand cerf ; — le tibia, le cal-
caneum et les molaires d’un cerf de moyenne taille ; —
l'os maxillaire et la mâchoire inférieure d’un cerf de
moyenne taille ; — deux morceaux d'os maxillaires, les
canines et les molaires d’une hyène.
M. Mauduyt signale aussi d’autres fossiles , découverts
depuis septembre 1834 : plusieurs bois de cerf de taille et
de forme diverses, une tête de daim avec ses bois, et
des bois de chevreuil trouvés dans les alluvions du Clain
et de la Vône ; — un fémur, une défense et des molaires
d’éléphant, dans les sables de la Folie, près Poitiers ; —
des ossements d’hippopolame, dans les sables de Ligugé ;
— des têtes, mâchoires, dents et vertèbres de sauriens,
découvertes près de Poitiers, dans l’oolithe moyenne ; au
même lieu, dans le même gisement, une belle empreinte
de poisson , et des restes appartenant à des animaux du
même genre, et particulièrement au Lepidotus Fulioni
(Agassis).
Tous ces fossiles font partie de la collection du musée
de Poitiers.
M. Raynal cite des sauriens fossiles trouvés dans le
pays et faisant partie de sa collection. Il exprime, en
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 117
même temps , le regret que l’imperfection des vertèbres
recueillies par lui ne lui pérmette pas de déterminer cer-
tains animaux. M. de Caumont lui signale les progrès
immenses faits, sur celte partie de la science, en Alle-
magne et surtout en Angleterre , et il cite l’excellent ou-
vrage de l’anglais Owen. Il indique , en même temps, à
M. Raynal, M. Deslongchamps, doyen de la Faculté des
sciences, à Caen, qui possède pour la détermination des
fossiles, des documents excellents que son obligeance
met volontiers à la disposition des hommes d'étude par
lesquels il est consulté.
L'ordre du jour appelle la 5°, question du PHAGPA ASS
ainsi conçue :
« Dans quelles proportions numériques les espèces
« nouvelles ou non décrites sont-elles dans les différents
« terrains ? »
Cette question ne peut être résolue, à défaut d’études
suffisantes; la discussion en est remise à une autre session.
M. le Président appelle la discussion sur les 6°. et 7°.
questions, ainsi conçues :
« Combien y a-t-il d'espèces principales de terrains
« meubles dans le pays? — Quelles sont les qualités
« relatives de ces terrains, eu égard aux productions agri-
« coles ? »
M. de Longuemar traite celte question dans un mé-
moire intitulé Géologie agricole. La variété des terrains
meubles du sol de ce département, et la difficulté d’en
fournir une nomenclature exacte, sont indiquées par la va-
riété même dont la physionomie géologique du pays porte
l'empreinte, par l’irrégularité des distributions des couches
remaniées par les cataclysmes et par les affleurements
118 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
divers, sur un espace resserré, du granite, du lias , des
oolithes , des grès verts, des craies tuffeau, des argiles,
des sables et des marnes, des terrains tertiaires. Aussi
M. de Longuemar pose-t-il en fait qu’il ne sera pas possible
de répondre pertinemment à la question du programme
tant que la carte géologique du département ne sera pas
faite. Toutefois, il indique, sur les plateaux et au sud-est
d’une ligne qui courrait de la Guerche à Châtellerault,
Poitiers et Parthenay, les sables et les argiles du terrain
tertiaire moyen , accompagnés parfois de marnes d’eau
douce et de meulières. Ce sont des terrains froids, des
sols de brandes qui toutefois, par un mélange de marnes
d'eau douce, ou de marnes détritiques, appartenant à
l’oolithe , deviennent productifs en blé et en trèfle. Par-
tout où l’oolithe cesse d’être masquée par ces couches ,
le sol devient plus particulièrement calcaire. Quelques-
unes de ces couches sont profondes et fertiles en fro-
ment, orge, luzerne el plantes sarclées. D'une plus
faible puissance sur les flancs des vallées, ces couches
prennent, à raison de leur mélange avec des dé-
bris siliceux, le nom de groges et produisent, à l’aide
d’une culture intelligente l'orge, la vigne , le sainfoin et
même le froment et la luzerne. Enfin, M. de Longuemar
signale certaines parties privilégiées de ce département,
où se rencontrent des terrains d’alluvion profonds et
puisant en eux-mêmes leur fécondité. Ces sols se com-
posent d'éléments calcaires , argileux et sablonneux qui
leur donnent à la fois toute la perméabilité désirable, et
tous les aliments nécessaires à la végétation variée quiles
couvre. C’est au milieu de ces terrains que fleurissent les
cultures maraîchères. Les environs de Lencloître en
offrent un remarquable spécimen.
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. L19
Tout en fournissant ces intéressants documents sur
les terrains meubles du pays et sur leurs qualités rela-
tives, M. de Longuemar ne se dissimule pas que les
études faites sont insuffisantes pour résoudre complète-
ment Îles 6°. et 7°. questions du programme. Il insiste,
de nouveau, sur ce fait regrettable que le département
ne possède pas de carte géologique, disant que, sans
ce guide , il est impossible de procéder méthodiquement
et avec ensemble à l’étude des terrains meubles.
M. de Caumont invite les géologues du pays à doter
le département de cet utile et important travail. Il faut
arriver à faire pour les terrains meubles ce qui est déjà
fait pour les roches, c’est-à-dire indiquer leurs gise-
ments, et les classer dans un ordre méthodique. Tel
est le but que s’est proposé l’Institut des provinces en
formulant ainsi la question.
L'ordre du jour appelle la discussion d’une question
posée par M. de Caumont, depuis la rédaction du pro-
gramme. Elle est ainsi conçue: A-t-il été fait des études
et des coupes des tranchées des chemins de fer ouverts
dans le Poitou?
… M. Ségretain fait connaître que ce travail a été fait
pour le chemin de fer de Niort à Poitiers, par MM.
Baugier et Sauzet, et qu’un mémoire communiqué par
eux à la Société de statistique des Deux-Sèvres va être
incessamment publié. M. Ségrétain, qui a lu ce travail,
le considère comme très-fidèle et très-utile. Les argiles,
entre la Motte et Saint-Maixent y ont été étudiées avec
beaucoup de soin.
Il s'engage , au sujet de l'étage auquel appartiennent
_ces argiles, un échange d'explications entre MM. Raynal,
- Mauduyt et Ségrétain, qui répond, sans toutefois l’affr-
420 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
mer, que ces argilesse rapportent à des étages d’eau douce.
L’attention de l’Assemblée est ensuite appelée sur les
questions 7 bis et 8 du programme , ainsi conçues :
« Quelles sont les terres et les roches utilisées par l’in-
« dustrie locale dans le: département de la Vienne ? A
« quelles formations géologiques appartiennent-elles ?
« Dans quelles localités les rencontre-t-on plus particu-
« lièrement ? L'analyse en a-t-elle été faite, et quelle est
« leur composition? »
M. de Longuemar ouvre la discussion de cette question
par la communication d’une note où sont indiquées toutes
les terres et roches utilisées par l’industrie locale. — 11
signale d’abord les argiles à tuiles et à poteries du terrain
primitif (kaolin),— du lias supérieur, — de l’oolithe,
— du grès vert, — du terrain tertiaire. Il indique des
dolomies , près Charroux, et à la Châtre, près Genouillé ;
de l'argile smectique ou terre à foulon, appartenant à
l’oolithe inférieure, à Charroux et Celle-l'Evêcault ; — des
pierres à bâtir, granite et gneiss, dans les communes
d’Availles et de Ligugé ; — des calcaires, du lias et de
l’oolithe utiles à divers degrés ; des meulières appar-
tenant au système de marnè argileuse du tertiaire moyen,
à Plumartin, dans la forêt de Meulière, à Availles et à
Genouillé ; — des marbres lumachelles à la base du ter-
rain oolithique inférieur , à Joussé , à Asnois et Chatain;
— des marbres gris, jaune et rouge, et des brèches
jaunes et rouges , à la Bonardilière, près Civray ; — des
pierres à chaux, dans toutes les assises calcaires, et des
pierres propres à la fabrication de la chaux hydraulique,
dans l’oolithe inférieure et surtout dans le ljas, à Charroux,
Ligugé et Croutelle; — des lignites dans le lias, à Joussé,
ASSISES SCIENTIFIQUES DUÜ POITOU. 21
à Croutelle et à Queaux:; — un filon d’ampélite graphique
ou charbonneuse de 50 centimètres d'épaisseur , trouvé
à 16 mètres de profondeur dans un puits creusé à la Ger-
monière, commune de Buxerolles ; — des minerais de
fer en grains et en rognons, à Charroux, Mauprevoir ,
dans l’oolithe inférieure, à Verrières et Charroux dans des
terrains diluviens ; — des galènes, dans les calcaires du
lias et l’oolithe ferrugineuse, à Charroux ; — et du man-
ganèse , à Charroux et à Mézeaux.
Après avoir donné ces indications, M. le Président prie
M. Malapert, professeur de chimie à l’école de méde-
cine , de vouloir bien faire connaître à l’Assemblée l’em-
ploi qu’il a fait, pour l’industrie locale, des terres ou
roches de ce département.
M. Malapert fait connaître qu’au hameau de la Châtre,
commune de Genouillé, il à découvert sur un terrain
appartenant à son frère, un gisement de dolomies d’où il
ést parvenu à extraire du sulfate de magnésie dans la
proportion de 44 à 45 pour 100. Cette découverte a été
utilisée, par lui, pour la préparation des eaux gazeuses. Le
sulfate de magnésie ainsi obtenu a, en outre, été employé
par lui avec succès pour des empreintes de médaillons.
La modestie de M, Malapert lui fait garder le silence sur
. un incident qui l’honore; mais M. de Longuemar s’em-
pressé de le faire connaître , et lit un rapport de M. Che-
valier à la Société d'encouragement, où l’on signale
M. Malapert comme ayant rendu un service réel au pays,
en lui donnant, à un état de pureté remarquable, un
produit pour lequel la France avait été jusque-là tribu-
taire de PAngleterre et de l'Allemagne.
La parole est ensuite donnée à M. Meillet sur les mêmes
questions 7 bis et 8
122 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M. Meillet cite les terres à foulon très-pures, près de
Celle-l’Evêcault, sur le bord de la route; quelques li-
gnites à l’état d'accident à Queaux et Croutelle; des
minerais de fer oolithique dans beaucoup de localités, et
en particulier à la Maison-Blanche, à Buxerolles ; et
enfin du manganèse oxydé à l’état pulvérulent, mais
pur, trouvé à Ligugé , dans les dolomies du lias.
M. Meillet signale, en outre, une substance toute nou-
velle , trouvée par lui sur les terrains du chemin de fer
à Ligugé, encaissée dans des argiles que les fossiles lui
désignent comme appartenant à l’oxford-clay. Cette sub-
stance grasse, facile à couper , bigarrée de nuances di-
verses, a reçu de lui, par analogie de consistance d’une
part, et à raison de son élément principal de l’autre, le
nom de stéargilite (suif-argile). Cette substance n’est
comparable à aucune de celles ayant avec elle des res-
semblances. Elle diffère de la nontronite par l'aspect et
les propriétés physiques; de l’halloysite et des allophanes,
à raison de son insolubilité dans l'acide hydrochlorique
bouillant. Sa composition, dont M. Meillet s’est rendu
compte par une simple analyse qualitative , n’ayant pas
eu le temps d’en faire une quantitative, consiste en
silice , alumine , eau , oxyde de manganèse et traces de
potasse, Elle se trouve engagée dans l'argile sous forme
de rognons blancs, jaunes, roses et vert pistache, de
nuances très-pures. Elle se coupe au couteau comme la
bougie stéarique, se fendille dans l’eau, et offre des
caractères assez tranchés pour qu’on doive la considérer
comme une espèce nouvelle. |
M. de Caumont remercie M. Meillet de cette commu-
nication , et lui demande quelques échantillons de cette
substance pour être soumis à l’Institut des provinces ,
dans sa réunion générale, à Paris.
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 4923
A ce moment , les regards de l’Assemblée se fixent sur
un fouillis de jolis objets qui doivent leur création à l’in-
fatigable et intelligente industrie de MM. Meillet et Augé,
et qui révèlent dans notre sol des ressources encore
inconnues. Ce sont de charmantes poteries, aux couleurs
diverses, blanches, grises, jaunes, roses, violettes et
brunes, fabriquées avec des terres du département,
modelées sur l’antique , et à qui les malheurs d’un acci-
dent donnent une ressemblance de plus avec les précieux
débris que, malgré les railleurs, recherche avec tant
d’amour l’antiquaire. On dirait du romain, et, convena-
blement placés par le vieil Edie Occhiltrée près du camp
de Kimprune, ils auraient infailliblement trompé le
vénérable M. Oldbuck lui-même,
M. Meillet donne des explications sur ces produits de
son industrie et sur les matériaux qu’il emploie à leur
fabrication. Les argiles de la plus grande finesse, dit-il,
sont extrêmement communes dans le département de la
Vienne. On en trouve de toutes les nuances. La blanche
se rencontre à la Maison-Blanche , à la Douardière, dans
loxford-clay , à la Roche-de-Bran, en quantité presque
inépuisable , dans l’oolithe supérieure ; la noire, dans
les cavernes des dolomies liasiques de Ligugé ; la rouge,
qui peut rivaliser de finesse avec ce que les Romaïns nous
ont laissé de plus parfait, vient de Château-Fromage , et
semble provenir de l’oolithe supérieure; la bleue, qui
donne un grès d’une extrême blancheur et d’une grande
finesse, a été trouvée à Montamisé ; la violette et la jaune
ont été recueillies près du tunnel de la voie de fer qui
conduit à Bordeaux , et sur le point où , il y a trois ans,
M. Meillet a déjà découvert l’allophane.
A ces communications , M. Meillet ajoute la révélation
h2h INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
d’un fait intéressant. Il a trouvé le gypse en assez grande
abondance à Mézeaux , dans une propriété de M. Paulze-
d'Ivoy, préfet de la Vienne. Cette découverte, faite
dans une dislocation du lias à sa jonction avec l’oolithe,
le porte à penser que la présence du gypse sur ce point
est due à la décomposition du sulfure de fer, si abondant
dans ces sortes de terrains, et que, par conséquent, on
doit trouver là l'indice de couches sous-jacentes plus
puissantes encore. Ce fait lui paraît d'autant plus inté-
ressant pour l’agriculture, que le gisement qu’il signale
se trouve entre des mains guidées par un amour intel-
ligent des sciences agricoles et du bien public.
M. le Président termine la discussion relative aux
questions 7 bis et 8, en donnant lecture d’une lettre de
M. le docteur Pingault, fournissant, sur le même sujet,
d’utiles renseignements,
Dans cettre lettre, M. Pingault fait connaître que les
forges de Verrières sont alimentées par des minerais de
fer recueillis à une lieue à la ronde, dans la localité et
sur la superficie même du terrain. Quelques-uns de ces
minerais sont à l’état d'agglomération plus ou moins
grossière , d’autres à l’état de péroxyde de fer plus ou
moins recouvert de terre glaise ; quelques-uns contien-
nent de l'hématite ou protoxyde de fer, Leur rendement
enfer, si l’on combine les expériences de M. Pelouse
avec celles de MM. Beudant et Dorvault, serait d'environ
55 pour 100. Au milieu même du gisement de ces mi-
nerais s'écoule une source éminemment ferrugineuse ,
contenant le fer à l’état de dissolution ; ses eaux, à peu
près inconnues dans notre département, sont utilement
employées, dans la localité, pour le traitement des femmes
chlorotiques et des individus anémiques.
: ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, | 125
L'Assemblée passe à l'examen de la question 9 du pro-
gramme , ainsi CONÇUE :
« Quels sont les amendements qui paraissent le mieux
-« convenir aux terres arables ? »
M. de Longuemar donne lecture d’une note où il
indique , à ce point de vue, les emplois les plus généraux
des matières rencontrées dans notre sol. Il cite la décou-
verte du gypse dans la Vienne, en 1823 , et lés mémoires
publiés sur cette matière par M. le docteur Canolle (t, I*'.
des Bulletins de la Société d'Agriculture ), et par
M. Babault de Chaumont (t. III du même recueil). — 11
signale, en outre, sur les emplois de la chaux un mémoire
très-complet de M. de Fayolle (t. IT), et un travail de
M. Duval (t. X de ces mêmes Bulletins ). Enfin, il fait
connaître que le département possède trois espèces de
marnes utilisées pour l’agriculture : 4°. celle du lias,
excellente marne, dont les gisements se rencontrent à
Lathus, Queaux et Charroux ; 2°, celle de l’oolithe infé-
rieure , à Charroux; 3°. celle du terrain tertiaire mg à <
que l’on trouve dans le reste du département,
Après ces explications, M. le Président donne la parole
à M. Meillet pour la lecture d’un mémoire sur cette inté-
ressante matière : |
Le mémoire de M. Meillet débute par une protestation
contre les tentatives faites pour nourrir la plante par les
engrais raisonnés, les engrais chimiques et restituteurse.
Tout système absolu , en cette matière, lui paraît puéril
et dangereux. Il s’autorise des expériences de M. Bous- .
singault pour démontrer que la plante peut germiner,
fleurir et fructifier sans autres aliments que ceux trouvés
par elle dans l'air et dans l’eau. Toutefois, M. Meillet ne
nie pas absolument l’action fertilisante de certains engrais.
426 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Le fumier, qui réunit à la fois les substances salines et
les substances azotées, lui paraît le prototype de l’engrais.
Nul engrais, en dépit des combinaisons des chimistes,
ne remplacera le fumier soumis à une putréfaction sa-
gement mesurée, de manière à éviter la volatilisation
des principes fertilisants.
Après quelques développements de cette idée, et après
une comparaison entre les poudrettes de Pariset de Poi-
tiers , qui, par une singularité remarquable, sont plus ou
moins fertilisantes en raison inverse de leur plus ou moins
de richesse en principes assimilables, M. Meillet aborde la
partie de son mémoire qui répond plus spécialement au
programme, à savoir les marnes et la méthode suivant
laquelle on doit les employer,
M. Meillet s'empare des résultats obtenus par les re-
cherches de MM. Boussingault et Deville sur l’eau des
puits et des rivières, où ces savants ont découvert des
quantités d’azotates quelquefois assez fortes, et établit
sur cette donnée tout une nouvelle théorie de l’action de
la marne sur le sol,
Suivant lui, l’action des marnes ne consiste pas pré-
cisément à être un moyen mécanique d’ameublir un sol
trop léger ou trop compacte , pauvre de calcaire ou d’ar-
gile; elle réside surtout dans les minimes débris orga-
niques qu'elles contiennent, et qui constituent pour
elles les éléments d’une puissance fécondante. Les débris
encore organisés qui s’y trouvent sont, suivant M. Meillet,
un ferment qui, par ses évolutions et ses réactions en
présence de l’atmosphère, sert à former des azotates à
base de chaux, de magnésie, d’ammoniaque qui, inces-
samment lessivés par les pluies, vont porter aux racines
de nouveaux sucs nourriciers ; d’où il résulte que les
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 497
meilleures marnes sont celles où l’on trouve le plus de
principes organiques.
En conséquence, M. Meillet a cherché un procédé pour
le dosage des matières organiques contenues dans les
marnes. Ce procédé a été trouvé par lui et est une dé-
couverte dont il revendique la priorité. M. Meillet réalise
le dosage de l’azote contenu dans les marnes par le 80-
dium et le sulfate de cuivre.
A la suite de cette lecture, qui a été écoutée avec
intérêt, mais dont certaines conclusions mériteraient un
examen plus approfondi, la discussion s’est engagée sur
les avantages comparatifs de l’emploi de la marne et de
l'emploi de la chaux. Après cette discussion, à laquelle
ont pris part MM. Trouessart, Raynal, Meillet, de
Caumont , de Longuemar et PiloteHe, on a conclu qu’en
pareille matière il n’y avait rien d’absolu ; que l'intérêt
du propriétaire était le seul guide à suivre, et qu'il était
le seul juge de cet intérêt.
M, le Président pose les questions 40 et 40 bis, ainsi
conçues : -
« Quelle est la nature du sous-sol, et à quelle série de
« couches doit-on le rapporter, d’après les données de la
« géologie ? — Quels sont les terrains du département
« de la Vienne auxquels il convient surtout d'appliquer
« le drainage ? »
Ensuite il donne lecture d’une note sur cette double
question :
Les (1) assises calcaires de l’oolithe qui forment la
(4) Extrait d'un rapport sur le drainage, fait antérieure-
ment à la Société d'agriculture de la Vienne, par M, de
Longuemar,
28 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
masse principale du terrain et qui reposent elles-mêmes
sur le lias, dit M. de Longuemar, sont recouvertes par
deux grands systèmes d’argiles, de marnes et de sables,
qui se montrent ensemble ou séparément, sur quelques
points, mais plus généralement réunis.
Les argiles supérieures forment seules dés couches
assez uniformément répandues sur le sol; les marnes
subordonnées ne se présentent, la plupart du temps, que
par gisements isolés plus ou moins puissants ; les sables
et les argiles inférieurs remplissent les dépressions des
roches calcaires qui les supportent et présentent de nom-
breuses lacunes dans leur assiette.
Pour expliquer ces lacunes si fâcheuses pour l’industrie
des tuiliers (car cette assise renferme la terre à tuile au
milieu de sès bancs de sable }), il suffit de faire observer
qu’une formation géologique n’a presque jamais succédé
à la précédente , sans que celle-ci n’eût éprouvé préala-
blement les ravages qui sont la conséquence naturelle du
déplacement violent d’une grande masse d'eaux.
Il est donc résulté de cette loi, à peu près générale,
que certaines assises ont pu se déposer immédiatement
sur une formation très-ancienne , la formation intermé-
diaire ayant disparu en grande partie par suite du ravage
des eaux; ou bien se concentrer dans une forte dépres-
sion du sol, au lieu de s'étendre d’une manière continue
et régulière tout alentour. C’est là ce qui explique lirré-
gularité du gisement de marnes, sables et argiles infé-
rieurs aux couches superficielles.
Les deux systèmes dont il vient d’être parlé se Ssuc-
cèdent de haut en bas, dans l’ordre que nous allons
décrire :
Une couche superficielle de sable argileux, mêlé de
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. L29
cailloutis, dépassant rarement 33 centimètres d'épaisseur.
Une couche d’argile jaune-rougeâtre , assez ferrugi-
neuse pour que la limonite qu'on y rencontre ait formé
ces agglomérations de galets quartzeux, qu’on appelle
poudingues.
Celle-là atteint souvent 1 mètre de puissance; elle est
liée à une autre assise argileuse passant à la marne d’eau
douce et à la meulière , presque toujours déposées dans
les dépressions des terrains inférieurs.
Ce groupe appartient essentiellement au terrain ter-
tiaire moyen, et sa présence constitue le sol habituel des
brandes du haut Poitou et du Berri.
Parallèlement aux marnes blanches, se présentent les
argiles et les sables panachés par la présence plus ou
moins abondante du fer limoneux ou péroxydé, en pla-
quettes ou de forme pisolithique, souvent sp comme
minerai de fer.
Cette assise fort irrégulière, qui atteint souvent une
puissance de plusieurs mèires, et qui est remarquable
par la présence du mica en paillettes répandu dans la
masse , et la nature presque kaolinique de ses argiles ,
appartient sans doute à la même formation.
Nous avons déjà dit que les tuiliers y trouvaient les
argiles propres à alimenter leur industrie.
Tel est l’ensemble des dépôts sédimentaires ou de
précipitation dont les affleurements, plus ou moins irré-
guliers, constituent la surface de quelques-uns de nos
plateaux.
On sent que la détermination régulière de leurs con-
tours pourra seule permettre d'en évaluer l'étendue, et
de préciser dans quelle proportion les terrains à drainer
se rencontrent dans la contrée.
430 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
La question du drainage ne pouvant, eu égard à l’in-
suffisance des études faites, être traitée avec la précision
commandée par le programme, M. Pilotelle demande
la parole pour préconiser l'emploi du colmatage, pro-
cédé peu connu chez nous, mais populaire en Italie,
où l’on réussit, à l’aide de travaux peu coûteux, à diriger
les eaux malfaisantes , à les discipliner, et à les rendre
non-seulement inoffensives, mais encore auxiliaires de
l’agriculture.
MM. Trouessart et de Caumont partagent la bonne
opinion exprimée par M. Pilotelle sur ce procédé , et ci-
tent, à l'appui , des exemples faits pour le populariser
dans ce département.
A la suite de cette discussion, la parole est donnée à
M. l’abbé de Lacroix, curé de St.-Romain, pour traiter
des 11°, et 42°, questions du programme , ainsi conçues :
u Quels sont les nouveaux faits constatés relativement à
« la distribution géographique des plantes dans le pays ?»
« Quelle influence paraît exercer la nature géologique
« du sol sur la végétation en général, et sur le déve-
« loppement de certains végétaux en particulier ? »
Dans un savant mémoire qui résume de longues années
d'étude, de laborieuses recherches et d’utiles explora-
tions , M. l’abbé de Lacroix énumère les conquêtes nou-
velles faites par la science au profit de la flore poitevine.
Son travail est divisé en quatre parties principales , se
rapportant à quatre groupes d’espèces, classés suivant
les zones auxquelles ils appartiennent. Il traite donc suc-
cessivement des plantes nouvellement découvertes : 4°.
sur les coteaux secs; 2°. dans les bois et les landes :
3°. dans les plaines et les cultures ; 4°. dans les marais
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 31
et sur les bords des eaux, Dans ces diverses catégories,
M. de Lacroix signale certaines plantes manquant, non-
seulement à la flore française, mais encore à la flore
européenne.
Grâce à ses laborieuses recherches, combinées avec
les savants travaux de M. Delastre, autrefois son maître
dans la science et aujourd’hui son collaborateur, M. l'abbé
de Lacroix est en mesure de signaler plus de 130 espèces
phanérogamiques tout-à-fait nouvelles pour la flore de
la Vienne, et dont quelques-unes sont encore introuvées
en France, Nous avons remarqué particulièrement, au
nombre de ces conquêtes : la Viola pratensis, Mert. et
Koch., qu’on n’avait trouvée jusqu'ici que dans le dépar-
tement des Deux-Sèvres ; le Fumana Spachii, Gren. et
Godr., plante tout-à-fait méditerranéenne ; le Cytisus
prostratus , Scop., espèce d’Istrie et de Carniole ; l'Hie-
racium onosmoides, épervière à peu près nouvelle
pour la flore de France, et l’'Euphorbia angulata, Jacq.,
plante fort rare et que, dans tout le bassin de la Loire,
on n’avait trouvée jusqu'ici qu’à Châteauroux.
= Abordant ensuite la section des cryptogames vascu-
laires, M. l’abbé de Lacroix a fait passer sous nos yeux
les plus rares espèces de fougères, au premier rang des-
quelles il a placé le Blechnum spicant, L., dont on n’a
pu encore trouver dans ce département qu’une localité.
Il à également cité l’Isoetes tenuissima, Bor., plante
nouvellement introduite dans la science par M. l’abbé
Chaboisseau.
Les agames-ont offert à M. l’abbé de Lacroix un vaste
champ d’observations et de découvertes importantes. Il
qualifie lui-même d’effrayante la nomenclature des
espèces nouvelles äcquises à la flore poitevine, et s’est
L32 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
vu obligé de se restreindre, dans son mémoire, aux choses
tout-à-fait nouvelles ou curieuses, non-seulement pour
le département, mais encore pour la science. Citons en
particulier les Jungermannia oppositifolia de Lacroix,
espèce entièrement nouvelle ; nigrella, de Not., nou-
velle pour la France; la Lecidea saubineti, Montagn.,
espèce extrêmement rare ; la Scutula Valrothii, Tul.,
dont la découverte en Poitou appartient à M. de Lacroix,
l'Hypocrea latericia, Fr., sphériacée très-rare en Eu-
rope, qui se développe sur le Lactarius deliciosus ;
enfin , le Glæosporium salicinum , et le Glæosporium
Delastri, espèces découvertes par M. l’abbé de Lacroix
et dont la dernière a été dédiée par lui à son savant
maître.
La famille des gastéromycètes, qui a fourni à M. l'abbé
de Lacroix un autre sujet de fructueuses observations,
a été pour lui l’occasion, d’un hommage rendu aux sa-
vants travaux de MM. Tulasne, nos compatriotes et les
condisciples de quelques-uns d’entre nous; c’est à leurs
excellents ouvrages qu’il faut se reporter pour com-
pléter le travail de M. de Lacroix sur cette partie de la
science. Bornons-nous à revendiquer comme une décou-
verte toute poitevine le Mycelium ou blanc de la truffe.
Enfin, Messieurs, après avoir cité quelques espèces
rares de Lycoperdom , M. l’abhé de Lacroix termine son
mémoire par une invocation aussi pieuse qu'éloauente
au Créateur de toutes choses, dont la puissance et la
fécondité se manifestent dans les plus petites comme
dans les plus grandes, dans les plus mystérieuses comme
dans les plus éclatantes de ses œuvres. jt
Après cette lecture, M. labbé de Lecroix entre dans
quelques explications sur les conséquences à tirer de ses
ASSISES SCIENTIFIQUES DU: POITOU, 438
études au point de vue de l'influence que peut exercer
la nature géologique du sol sur ia végétation. Il ne con-
sidère pas que la formation géologique du sol doive
nécessairement et invariablement influer sur les produc-
tions végétales. Son influence directe est souvent modifiée
et:même annihilée par l’interposition de terrains qui leur
sont accidentellement superposés, Ainsi l’on voit, sur des
terrains calcaires, des plantes appartenant par leur ori-
gine aux terres siliceuses, anomalies qui n’en sont pas
en réalité, car elles s'expliquent presque toujours par des
poussières siliceuses apportées par les hasards du vent,
et accumulées , à la faveur des inégalités ou des fissures
du sol. Il cite, à ce sujet, l'exemple des digitales et pro-
voque, sur les habitudes de cette plante, une discussion
à laquelle prennent, part MM, de Caumont, Meillet,
Mauduyt et de Longuemar. M. de Longuemar termine la
discussion par la lecture d’une note publiée par lui, en
1843, sur ses observations. dans le département de
l'Yonne (4), et confirme, par des exemples, l’opinion
émise par M. l'abbé de Lacroix.
Après celte discussion, M+ Carmignac - Descombes
appelle l'attention de l’Assemblée sur les terrains tour-
beux de ce département, qu’il considère comme pouvant :
être utilisés pour les engrais. Il propose à l’Institut des
provinces de mettre à l'étude cette question importante.
L'existence de terrains tourbeux dans le département
est, dit M. de Longuemar, un objet d'étude et d'essais
d'amélioration pour plusieurs agriculteurs. Il cite l’exem-
ple de M. de Curzon qui, en sillonnant de fossés des
(4) Études géologiques sur les terrains de la rive gauche de
l’ Yonne, Auxerre, 4848.
19
43% INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
terrains de cette nature, et en exhaussant les terres avec
les déblais des fossés, a complètement assaini ses marais,
et les a rendus productifs. Les mottes, c’est le nom que
portent en Vendée les planches ainsi formées , lui donnent
d'excellentes récoltes en productions maraîchères.
M. Meillet propose l’emploi de la chaux comme un
excellent moyen pour rendre les terrains tourbeux pro-
pres à la culture. L’acide humique, dit-il, s’oppose à la
nitrification du sol , essentielle pour la fertilité. Décom-
posez l'acide humique avec de la chaux vive, et le sol,
désormais susceptible de nitrification, pourra être uti-
lement soumis à la culture.
L'Assemblée remercie M. Carmignac-Descombes de sa
communication, et la recommande à l’attention des agri-
culteurs. Elle passe ensuite à l'examen de la 13°. question
du programme : |
« A-t-on fait, dans le pays, des observations météoro-
« logiques suivies ? Quels résullats en a-t-on obtenus ? »
La parole est donnée à M. Trouessart, professeur de
physique à la Faculté des sciences de Poitiers.
Le travail de M. Trouessart sur la météorologie de
Poitiers n’est pas seulement une œuvre de science , c'est
encore une bonne action: c’est de la piété scientifique.
Signaler au respect de notre génération la mémoire d’un
savant modeste, sauver de la poussière des archives et
des ténèbres de l'oubli l’œuvre consciencieuse de qua-
rante années de sa vie, donner à cette œuvre un corps
par la méthode, une vie par la pensée , un coloris par le
style, c’est faire deux bonnes choses à la fois : une
bonne action et un bon ouvrage.
M. Trouessart a, en effet, entrepris de faire connaître
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 435
kes observations météorologiques de M. le docteur de La
Mazière , œuvre de patience accomplie jour par jour, à
trois heures marquées, sans interruption, pendant qua-
rante années consécutives, de 1778 à 1819; —— œuvre
rare dans l’histoire de la météorologie (1) ; — œuvre de
persévérance accomplie au milieu de tous les genres
d’orages, sous les foudres mêmes de 1793, avec le calme
de l'homme de paix, avec l’impassibilité du vrai savant
qui, l'œil fixé sur une idée, ne s’en distrait pas et ne
s’'émeut de rien.
M. Trouessart ordonne en six parlies son travail sur
les observations de M. de La Mazière, Il traite succes-
sivement de la température, des vents, des hauteurs du
baromètre, de la pluie, des tonnerre, grêle et brouil-:
lard, et enfin des particularités météorologiques rela-
tives à quelques années.
La température moyenne de Poitiers, prise sur les
quarante années d'observations météorologiques de M. de
La Mazière, serait de 12° 03 centigrades. M. Trouessart,
tenant compte des variations diurnes de da température,
fait descendre cette moyenne à 11° 33, température
habituelle des mois d’avril et octobre. e
Les vents sont répartis par M. Trouessart entre quatre
régions, qui forment l'horizon de Poitiers. L’une, sise au
Sud-Ouest, celle de la pluie , nous menace pendant la
(1) Un autre travail de ce genre (quarante-trois années
d'observations météorologiques) a été fait, dans un dépar-
tement voisin, à Limoges, par M. Juge de Saint-Martin, con-
seiller au présidial de Limoges, Averti de l'existence de ce
travail par M. Bardy, petit-fils de l’auteur, M. Trouessart
se propose d'en faire l’objet d’une nouvelle étude.
136 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
majeure partie de l’année. C’est ce que nous devons
conclure des observations de M. de La Mazière, puisqu'il
n’est que deux mois, juillet et mars, où elles nous
donnent un espoir fondé d’en être exemptés. L'autre
région, celle du Nord-Est, nous envoie l'extrême froid
en mars et extrême chaleur en juillet. La. troisième, qui
règne au Nord-Ouest, souffle, en août , les bourrasques
et la quatrième, sise au Sud, donne issue aux. vents pré-
curseurs des averses. Au milieu de ces vents pleins de
menaces il reste, et c’est une expérience que nous faisons
tous les jours, fort peu de place pour le beau temps.
M. Trouessart nous entretient ensuite des pluies et fait
connaître qu'il a pu, d’après M. de La Mazière, fixer en
moyenne le maximum des pluies en octobre, et-le mini-
mumen août. Mais il a, dans l’infaillibilité des moyennes,
un manque de foi qui va jusqu'à l’incrédulité. Il a trop
vu les démentis qui leur sont donnés, chaque jour, par
celui qui tient dans sa main le beau temps, les vents
et l’orage ! Sur ce point, M. Trouessart est désespérant
pour ceux qui font de la statistique toute leur science ,
et il leur porte un coup mortel lorsque lui, si savant, avoue
humblement, comme conclusion, que, malgré les moyen-
nes , il ne peut nous prédire le temps qu’il fera demain.
Il nous apprend aussi qu'à Poitiers la moyenne du
tonnerre est de 16 jours par année, celle des éclairs de
8 jours ; celle de la grèle , 5 jours ; celle du brouillard,
55 jours. Nous entendons gronder la foudre en juillet
juin et septembre ; la grêle nous menace en avril, mars
et février, et nous vivons dans les brouillards en décem-
bre, novembre et janvier. Telles sont les données fournies
par quarante-une années d'expérience.
Le mémoire de M. Trouessart se termine par un
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. h37
exposé des particularités météorologiques relatives à
certaines années. Les grands hivers 1788-89 , 1774-75,
4798-99 , — les hivers doux 1790-91, 1797-98, — les
hivers tardifs 4785 et 1696, — les étés les plus chauds
1778, 4793, 1803 , — les étés les moins chauds 1816,—
les années de grande sécheresse 4803, 1793, 1807 et
4818, — les années de pluie 1788, 1811, 1816 et 1781,
— les années fécondes en phénomènes exceptionnels,
tels qu’orages, tremblements de terre, invasion d'insectes
malfaisants, neiges tardives, dévastations de récoltes,
sont signalés, par M. Trouessart avec un soin minutieux
dont la valeur est encore rehaussée par des réflexions
aussi ingénieuses que savantes.
Cette lecture est écoutée avec l'attention que notre
savant professeur de physique est habitué à rencontrer
au milieu de tous ses auditoires.
L'ordre du jour appelle la discussion sur les questions |
du programme relatives à l'archéologie. Avant d'aborder
cette matière, M. de Longüemar présente quelques ob-
servations pouvant servir de transition de la géologie à
l'archéologie, et prouve, par certains faits mal appréciés
par plusieurs, que ces deux sciences ont des points de
contact et peuvent quelquefois se servir mutuellement
. d’auxiliaire. Ces observations portent sur les puits ou
excavations affectant la forme cylindrique, si communs
dans nos rochers, et attribués à tort, par l'opinion vul-
gaire, à des travaux de main d'homme. Suivant les uns,
ces exCavations ont été creusées pour servir de silos ;
suivant d’autres, elles sont dues au culte qui s’y cachait
pour rendre des oracles. Ces excavations, dit M. de
Longuemar, ont pu être employées à ces divers usages,
mais elles ne doivent pas leur origine à la main de.
38 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
l'homme ; ce sont les eaux lorrentielles qui, aux époques
antérieures aux terrains tertiaires, ont attaqué les
parties les plus tendres des rochers, fait tarière en
tourbillonnant, et perforé le sol. L'espèce de ciment
incrusté de galets siliceux , qui tapisse sur certains points
les parois de ces puits, est le produit des dépôts laissés
par les eaux, et non l’œuvre de la main humaine. Il
faut donc restituer à l’action de la nature ce qu’on
avait, à tort, attribué à l’industrie des anciennes géné-
rations.
La géologie est également utile, dit M. de Longuemar,
pour expliquer sur certains terrains la présence de dol-
mens qui, formés de blocs étrangers au sol sur lequel
ils s'élèvent, font supposer un transport lointain par les
Gaulois, érecteurs de. ces monuments. Plusieurs per-
sonnes font, en conséquence, à nos ancêtres les honneurs
de connaissances pratiques très-étendues en dynamique ;
c’est une exagération. Ces pierres n’ont pas été trans-
portées. La géologie vient en aide à l'archéologie pour
faire la lumière sur ce point. Quelques-unes de ces
pierres sont des blocs erratiques apportés par les eaux
diluviennes sur un sol auquel ils sont étrangers ; d’autres
sont des blocs de grès ferrugineux formés dans le sable.
Les eaux ont enlevé le sable, et laissé le grès dans un
état qui fait contraste avec l’aspect général du sol. M. de
Longuemar cite plusieurs de nos pierres levées à l’appui de
cette thèse qui est la vraie, et démontre, par conséquent,
qu’en échange des services qu’elle peut en attendre,
l'archéologie fera bien de vivre en paix avec la géologie.
Après cette intéressante communication, M. le Prési-
dent donne la parole à M. Ménard, secrétaire de la Société
Ces Antiquaires de l'Ouest, qui, répondant à la question
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, h39
14du programme par un rapport où il a eu l’art de con-
denser beaucoup de choses dans un étroit espace, rend
compte des travaux de statistique monumentale accom-
plis, de 1834 à 1857, par les Sociétés savantes du
département.
Il nous est impossible d’énumérer, après M. Ménard,
les travaux accomplis par les antiquaires de lOuest,
pour rechercher, conserver, restaurer, décrire les mo-
numents de toutes les espèces et de tous les âges, épars
sur ce département et sur les régions circonvoisines.
Disons que , si tout n’est pas décrit, la description n’a
cependant manqué à aucune matière. Monuments cel-
tiques, voies romaines, établissements, monuments,
tombeaux romains et gallo-romains, édifices religieux,
châteaux du moyen-âge et de la renaissance, tout est re-
p résenté dans les Mémoires de la Société des Antiqüaires
de l'Ouest, par des descriptions formant un total de plus
de 170 mémoires, dont quelques-uns s’occupent de plu-
sieurs monuments à la fois.
M. de Caumont félicite la Société des Antiquaires de
l'Ouest des travaux accomplis par ses membres , pour la
description des monuments ; mais il fait remarquer que
ces travaux isolés ne constituent pas une statistique du
département, œuvre indiquée par la question du pro-
gramme. Il importe, dans l'intérêt des monuments d’un
département, qu’ils soient tous indiqués et décrits par
canton, de manière à former un classement raisonné et
méthodique. Le savant Directeur-général de l’Institut des
provinces recommande, avec des instances toutes par-
ticulières, la direclion de cette œuvre à la Société des
Antiquaires de d'Ouest. M. l’abbé Lalanne, curé d'Oiré ,
annonce qu'il se propose de faire la statistique monu-
40 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
mentale de l'arrondissement de Châtellerault. L'Assem-
blée applaudit à ce projet,
Après ces observations , l’Assemblée est appelée à dis-
cuter la 15°, question du programme, ainsi conçue :
« Quelles sont les déductions résultant des études déjà
« faites , soit sous le rapport des établissements romains
« qui ont existé, soit sous le rapport de l’art au moyen-
« âge dans le pays? »
Interpellé par M. le Président sur les catastrophes qui,
suivant lui, ont fait disparaître du sol poitevin les con-
structions romaines dont on retrouve tant de vestiges,
M. Bonsergent déduit les conséquences auxquelles con-
duisent les observations qu'il a faites : ce sont les torches
incendiaires des barbares qui ont fait disparaître les belles
constructions dont les Romains avaient doté notre sol.
I croit pouvoir conclure ainsi, de ce fait, que presque
toutes les ruines découvertes à Poitiers, et particulière-
ment sur les terrains de la rue de l’industrie, sont
recouvertes d’une couche de charbon et de cendre , indi-
quant visiblement les causes de tant de ruines. M. Bon-
sergent cite , en outre, les divers lieux de la cité où des
fouilles ont fait découvrir les traces laissées par Part
romain dans nos contrées. |
De ces faits et de l’existence des innombrables villas des
environs, des arènes pouvant contenir 52,000 specta-
teurs, des aquéducs amenant à Poitiers l’eau de toutes
les vallées supérieures , des nombreux débris d’architec-
ture romaine que l’on retrouve employés comme maté-
riaux dans la construction de l’enceinte visigothe, M. de
Longuemar conclut que lantique Limonum a dù jouer
un rôle important parmi les stations romaines.
ASSISES SCIENTIFIQUES DÜ POITOU. EUR
Ces observations sont, pour M. de Caumont, l’occa-
sion d’un appel à l’érudition des juristes poitevins : le
savant Directeur-général de l’Instilut des provinces se
demande si la destruction de certains édifices romains,
dont on retrouve les débris dans nos anciens murs d’en-
ceinte, ne pourrait pas avoir coïncidé avec quelque dis-
position législative des derniers empereurs d'Occident,
ordonnant la reconstruction des fortifications. M, Foucart
s’empresse de répondre à cet appel : il se livre, de
concert avec M. Ragon, professeur de Droit romain, à
des recherches qui lui font retrouver , au Code Théo-
dosien, des lettres des empereurs Arcadius et Honorius,
répondant à l’idée de M. de Caumont. Édicté pour l'Orient,
en 396 et rendu obligatoire pour l'Occident en 438, cet
ordre impérial prescrivait aux cités la reconstruction de
leurs murs. Il est conçu en ces termes :
« Omnes provinciarum rectores litteris moneantur, ut
« Sciant, ordines atque incolas urbium singularium muros
« vel novos debere facere , vel veteres firmiüs renovare :
« Scilicet hoc pacto impendiis ordinandis, ut adscriptio
« Currat pro viribus singulorum, deinde adscribantur
« pro æstimatione futuri operis territoria civium : ne
« plus poscatur aliquid quam necessitas impetraverit ,
« neve minüs : ne instans impediatur effectus. Oportet
« namque per singula ( non sierilia) juga certa quoque
« distribui, ut par cunctis præbendorum sumptuum ne-
« cessilas imponatur, nemini excusatione vel alia præ-
« sumplione ab hujusmodi immunitate præbenda. Dat.
« IX kalend. april. Arcad. IV, Honor, II, AA coss.
« (396). »
En communiquant ce tékté M. Foucart présente les
observations historiques que voici :
hh2 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Lorsque la domination des Romains, dit-il, fut défi-
nitivement établie dans les Gaules, une paix profonde,
assurée par la constante présence des légions , régna
dans nos contrées. Dans l’état de calme où se trouvait
alors le pays, les fortifications étaient inutiles, et, en
l'absence du stimulant du danger, les municipalités,
dont l'esprit est le même dans tous les temps, se sou-
ciaient fort peu de faire les frais nécessaires pour la
construction ou l'entretien de murs d'enceinte. Les cités
gauloises se trouvaient donc dépourvues de murs, lors-
que après 406, année si fameuse dans les fastes de la
décadence romaine, le péril inspira aux habilants de nos
cités la résolution de se mettre en état de défense.
Stilicon , préoccupé de ses ambitieux projets, était
venu sur les bords du Rhin, où les légions romaines
étaient cantonnées, et les avait emmenées à Rome.
C'était une imprudence, Dégarnir la frontière des Gaules,
c’était la livrer aux barbares. Toutefois, avant de s’éloi-
gner, Silicon prit la précaution de s’entendre avec les
Francs qui, parvenus à se former un petit établissement
vers Cologne, entre le Rhin et la Meuse, promirent de
défendre la frontière. Puis il partit.
Alors, comme si elle n’eût attendu que ce signal, une
formidable horde de barbares fit irruption dans les
Gaules. Goths, Gépides, Vandales, Hérules, Suèves ,
Bourguignons , Saxons, Angles et Juthes se précipitèrent
sur ce malheureux pays, pour la protection duquel les
Francs ne furent qu’une faible barrière. Leur défaite
désastreuse les découragea, et, comme le chien de la
fable, qui voit ne pouvoir défendre le diner de son
maître, ils se résignèrent à prendre une part du festin.
Ce ne fut alors qu’un vaste embrasement dans la
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. ” AH48
Belgique et dans le nord des Gaules. Tout fut mis à feu
et à sang,et une immense terreur s’empara de toutes
les populations du Centre et de l'Ouest. Ne pouvant plus
attendre de secours d’un empire expirant , réduits
à leurs propres forces, stimulés par l’imminence du
péril, les habitants de nos villes se décidèrent à res-
serrer l'enceinte de leurs cités pour présenter moins de
prise à l'ennemi , à abattre les magnifiques édifices qui ,
situés en dehors de l’enceinte, auraient pu couvrir l’as-
saillant, et des débris de ces nobles ruines firent des
matériaux pour leurs murs. C’est alors que les lettres
d’Arcadius et d’Honorius dont nous venons de donner
le texte reçurent en Occident leur exécution; c’est alors
que tombèrent nos arènes, et les somptueux édifices
dont notre sol révèle chaque jour tant de vestiges ; c’est
alors que s’entassèrent, pour former des murs d’en-
ceinte, les matériaux arrachés à nos belles arènes.
M. de Caumont applaudit à la justesse des obser-
vations de M. Foucart, et cite, à l’appui de sa conclu-
sion, divers exemples analogues , constatés par lui dans
des cités de l’ouest et du midi des Gaules (1).
(4) Un autre texte , communiqué par M. Ragon , permet
d’assigner une autre cause à la destruction des édifices païens
dans les Gaules, et à ce fait que leurs débris ont servi de
matériaux pour la construction des murs d'enceinte. C’est celui
de la loi 15 au Code, titre 42,. De operibus publicis. Ce texte
est ainsi conçu : Si aliquando homines emergant, qui a nostra
clementia opus publicum sibi præberi postulaverint +: non nisi
diruta penitùsque destructa , et quæ parüm sunt in usu
civitatum percipiant, Dat. id, decembr,, Honor, 4 et Euthy-
choo coss. (398). »
Cette loi, en date de 398, constate deux choses : 4°, qu’un
hhl INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Après cet incident, la parole est donnée à M. l'abbé
Barbier, pour la lecture de son intéressant mémoire sur
les signes lapidaires relevés par lui dans nos édifices
religieux, civils et militaires.
M. l'abbé Barbier, pour rendre ses explications plus
faciles à saisir, a figuré au crayon blanc, sur un grand
tableau , tous les signes lapidaires qu'il a recueillis à
Poitiers. Il initie ensuite son auditoire à la langue des
pierres : Lapides clamabunt, dit-il; et il fait ressortir tout
Pintérêt que présente l'étude des signes dont se forme
cette langue universelle, parlée au moyen-âge et dans
tous les pays, par les associations ouvrières. Chaque signe
est la marque d’un ouvrier qui fait acte de possession sur
son œuvre, afin que les blocs équarris par lui ne soient
pas confondus avec d’autres, et qu’au jour fixé il touche
son salaire. La variété des signes constatés sur les murs
de la cathédrale porte M. l'abbé Barbier à penser que
certain nombre d’édifices publics tombaient en ruines, diruta
penitüsque destructa ; 2°. que les édifices qui n'avaient plus
de destination, quæ parüm sunt in usu civitatum, étaient
condamnés à mort ou livrés au premier occupant.
Quels étaient cés édifices condamnés à mort? Ceux qui se
rattachaient aux usages et au culte païen, proscrits depuis
Constantin, et livrés aux représailles des chrétiens qui se
vengeaient des outrages reçus par leur foi sur les arènes en-
core fumantes du sang de leurs frères. C'est une cause de
plus de l'indifférence avec laquelle les habitants des cilés, à la
fin du IVe, siècle, jetaient pêle-mêle, dans leurs murs d’en-
ceinte, des débris sculptés provenant des arènes, des temples,
des pierres funéraires païennes, telles que celles de Sabinus,
et tout ce qui pouvait rappeler une époque, un culte et des
noms détestés,
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. hu5
plus de 400 ouvriers ont travaillé simultanément à l’érec-
tion de ce gigantesque édifice.
Cés signes ont été relevés par M. Barbier dans les
églises de St.-Hilaire , Montierneuf , Ste.-Radégonde ,
lecloîtrede Notre-Dame-la-Grande, St.-Pierre, St.-Cybard,
les Augustins, St.-Germain, le Puy-Garreau ; sur les restes
de l’ancien évêché, sur les murs de l’enceinte fortifiée ,
sur la tour du Pont-Guillon et sur des édifices modernes,
Ils sont empruntés soit à la nature, soit à la géométrie,
soit à la guerre, soit au culte, soit à l’alphabet. Quelques-
uns paraissent devoir être considérés comme présentant ,
avec le nom de chaque ouvrier, l’analogie qu’on rencontre
dans les armes parlantes ; les autres sont vraisembla-
blement des initiales; d’autres, enfin, des signes de
pure fantaisie. La cathédrale est , de tous les édifices de
Poitiers, celui qui présente la plus grande variété de
signes lapidaires : on en compte 220. C’est là qu'ils
offrent le plus de précision et de netteté. M. Barbier
remarque, du reste, que la perfection des signes lapidaires
est toujours en raison directe des progrès mêmes de Part,
et il nous amène à celte conclusion , aussi ingénieuse
que poétique, qu’au beau temps du moyen-âge tout maçon
était artiste,
L'étude des signes lapidaires n’est pas seulement, pour
M. Barbier, un objet de curiosité, il y trouve un élément
précieux pour l’histoire monumentale du pays. L'origi-
nalité si saillante de l’école poitevine pendant toute la
période romane , signalée par M. de Caumont, trouve son
explication dans les signes lapidaires ; car la présence des
mêmes signes dans les divers monuments du Poitou,
concordant avec l’analogie de leur style, prouve l'emploi
des mêmes ouvriers travaillant, par corporations, sous
hA6 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la même inspiration, et se transmettant leur manière
aussi bien que leur esprit.
M. l'abbé Barbier trouve encore, dans les signes lapi-
daires tracés par l’ouvrier en vue de son salaire, un
moyen de discerner dans les édifices claustraux les mo-
numents dus aux travaux monastiques , de ceux érigés
par les corporations ouvrières. Les signes lapidaires
pourront vider , dit-il, l’importante question de savoir
où finit le travail monastique, où commence le travail
laïque.
Il nous est impossible de citer tout ce que le mémoire
de M. l'abbé Barbier contient de faits intéressants et
d’aperçus ingénieux. Le vif intérêt avec lequel il a été
écouté par l’Assemblée témoigne du mérite des travaux
dont il lui a communiqué le résultat,
. M. de Longuemar prend, à son tour, la parole pour
communiquer à l’Assemblée des réflexions que lui sug-
gère un fait observé par lui dans -un certain nombre
d’églises romanes , telles que St.-Nicolas de Civray, St.-
Jean de la Ville-Dieu, St.-Jouin de Marne, Notre-Dame
de Poitiers, St.-Médard de Thouars, St.-Hilaire de
Foussay, etc. ; voici quel est ce fait :
M. de Longuemar a remarqué dans l’ornementation de
ces églises, des figures en bas-relief, paraissant calquées
sur des modèles byzantins , appliquées en placage sur les
murs, et souvent mutilées pour être plus aisément enca-
drées dans la place qui leur avait été réservée,
L'orateur conclut de ce fait que ces bas-reliefs, exé-
cutés sur des dalles portatives, sortaient d’un atelier
fabriquant les bas-reliefs sur une grande échelle et expé-
diant de tous côtés ses produits. On s’expliquerait ainsi
très-aisément l’analogie entre les décorations d’églises
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 447
placées à une grande distance l’une de l’autre. M, de
Longuemar émet cette opinion qu’il existait dans ces
temps anciens : 4°. des corporations ambulantes, exécu-
tant sur place une partie de l’ornementation, telles que
les chapiteaux , modillons, frises , entablements ; 2°. des
corporations à demeure fixe, exécutant les personnages
des scènes le plus fréquemment adoptées pour l’orne-
mentation.
La parole est ensuite donnée à M. l'abbé Barbier , pour
la lecture d’une notice consacrée à la peinture sur vélin
et à l'application de l’or sur relief,
M. l’abbé Barbier aime le moyen-âge comme l'aime
un sayant, mais surtout comme un prêtre et un arliste
doivent l’aimer. Cette époque, eneffet, est la seule où
la religion fut véritabiement dans l’art, et où l’art fut
entièrement à la religion. Aussi l’art atteignit-il alors,
dans son application aux choses du culte, un: degré de
perfection que nul siècle depuis n’a retrouvée,
C’est à cette pieuse recherche que se livre M. l'abbé
Barbier ; il passe sa vie à consulter les chefs-d’œuvre de
l'art et s’ingénie à leur dérober le secret des naïfs, mais
ingénieux artistes du moyen-âge. Le mémoire dont il
donne lecture a pour objet de nous faire connaître que le
secret des charmantes miniatures sur vélin du moyen-
âge est enfin retrouvé : « Rien ne manque désormais,
nous dit-il, aux mains laborieuses et patientes qui, soit
dans les salons, soit dans les monastères, voudront al-
terner les travaux délicats de l'aiguille et du pinceau, »
Nos lectrices, s’il se trouve des lectrices pour un
compte-rendu scientifique, nous sauront gré de leur faire
connaître le procédé indiqué par M. l'abbé Barbier.
Le papier-carton ou papier Bristol est rejeté par
kh8 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M. Barbier, comme indigne d’une telle destination ; il
n’admet que le vélin, et encore le vélin lisse et non poli,
mat et non luisant. Nos fabriques françaises, et en par-
ticulier celles d’Issoudun, n’offrent pas de produits qui le
satisfassent pleinement, Le vélin de Londres seul ne
laisse rien à désirer,
Une fois en possession d’un vélin parfait, on doit
monter la feuille sur un châssis, auquel on prend soin
de la coudre par des fils nombreux permettant de la
tendre à volonté : c’est, suivant M. l’abhé Barbier, la
meilleure méthode. Si l’on préfère coller la feuille, on
mouille légèrement le vélin au moyen de gomme dé-
layée, on applique au pourtour du châssis, et quand le
tout est parfaitement secet tendu sans pli ni ride, on
dessine et on peint.
Mais il y a peindre et peindre, et la grande difficulté
est de donner à la couleur, et surtout à l’or qu’on
emploie, le merveilleux relief que présentent les mi-
niatures du moyen-âge; c’est là qu'est la nouveauté du
procédé signalé par M. l'abbé Barbier.
« Ayez, dit-il, une forte feuille de papier roulée en
« cône el collée au point de jonction des deux extré-
« mités; tronquez le sommet du cône comme un abat-
« jour de lampe de la dimension que vous y placerez, et
« pratiquez, le long de ses flancs, de longues et étroites
« ouvertures pour donner de l’air à la petite bougie ou
« veilleuse qui brülera au centre; prenez un vase de
« porcelaine résistant au feu, délayez-y avec de l’eau
« une certaine quantité de la poudre qui se vend à
« Londres, Fuller’s-Ratisbonne Place, 34, sous le nom
« de Miss Robert’s Raïsing-Pouders; suspendez le vase
« au somméêt du cône, et chauflez jusqu'à ce que la
«
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. kA9
poudre soit parfaitement fondue ; pour y aider, remuez
avec. un bâton ou un pinceau.
« Quand la fusion est complète, prenez avec un pin-
ceau la poudre devenue liquide , étendez-la aux parties
où vous désirez obtenir un relief. Cette première
couche une fois sèche, appliquez-en une seconde ;
laissez sécher, et mettez autant de couches que-votre
relief l'exige; puis, avec un grattoir bien affilé, net-
toyez de manière que la surface soit unie; cependant,
disposez, vers le milieu du relief, pour le jeu de la
lumière, une ligne continue un peu plus saillante, et
faites fuir les deux côtés en pente légère et presque
- insensible.
« Prenez ensuite de l’or en coquille; délayez-le et
appliquez-le au pinceau. Il faut passer et repasser
souvent, afin que la couche soit uniforme et d’une
épaisseur convenable. Pour lui ôter sa teinte mate et
terne, servez-vous, en le polissant, de l’agate re-
courbée qu’emploient les doreurs, ayant soin, avant
de commencer votre opération, d’opposer à la pression
que vous exercez sur le vélin une palette de porce-
laine ou un morceau de verre épais que vous ap-
puierez contre le vélin sur le châssis.
« Il faut ensuite procéder au pointillage. Vous ferez
le pointillé avec un poinçon d’agate dont la pointe ne
sera ni trop aiguë ni trop émoussée. N'oubliez pas la
palette, qui vous empêchera de transpercer le vélin.
« Le gaufrage exigerait une variété de fers que je
n’ai pas encore rencontrés. Vous les remplacerez par
le poinçon d’agate qui, sous la direction d’une main
sûre , tracera des lignes courbes , ou suivra les lignes
droites de la règle,
450 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
« Je termine par ces deux conseils : n’appliquez la
« couleur qu'après votre préparation du relief achevée ,
« et ornez toujours, d’un filet coloré, l’or qui, à ce
« contact, brillera du plus vif éclat. »
Cette intéressante el utile communication est accueillie
par les remerciments de l’Assemblée, qui s’empressera
de lui donner, par l'organe de son secrétaire, une prompte
publicité. :
L'ordre du jour appelle l'examen des questions 16 et
17 du programme :
« Quelle était la hiérarchie féodale des châteaux du
« département ? »
« Combien y avait-il de fiefs et d’arrière-fiefs dépen-
« dant de chaque château ? »
La parole est donnée à M. Rédet, qui lit, sur cette
importante matière, un mémoire où sont condensées de
savantes et laborieuses recherches, dignes en tout point
de celles auxquelles nous a habitués l’infatigable archi-
viste de la Vienne.
Le centre du ressort féodal du Poitou, dit M. Rédet,
était la ville de Poitiers, siége des comtes souverains
qui, du haut de leur tour Maubergeon, commandaient à
de nombreux vassaux.
Le pays soumis à leur domination ne comprenait pas
la totalité du territoire du département de la Vienne ;
mais il y avait compensation, en ce qu’il s’étendait sur
une portion de ce qui forme aujourd’hui les départements
des Deux-Sèvres, de la Charente, de l'Indre et de la
Haute-Vienne.
Sept centres féodaux de ce département étaient en
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOUW 54
dehors de l'hommage des comtes du Poitou, C’élaient les
baronnies de Moncontour (140 fiefs), Mirebeau (40 fiefs),
et la châtellenie de Loudun (70 fiefs), détachées du
Poitou, au X°. siècle, au profit des comtes d'Anjou.
C’étaient aussi les châtellenies de Lussac-les-Châteaux
(46 fiefs), l’Ile-Jourdain (8 paroisses), et Charroux (11
paroisses ), qui dépendaient du comté de la Basse-Marche.
C'était, enfin, la baronnie de Couhé he ficfs #4 qui
relevait de l’abbé de St.-Maixent.
D'un autre côté, 14 paroisses, qui font actuellement
partie du département de la Vienne, étaient étrangères
au Poitou et dépendaient de la vicomté de la Guerche, des
baronnies de la Haye et de Preuilly (Touraine) , et de la
châtellenie de Faye-la-Vineuse ( Anjou). |
Distraction faite de notre territoire, il restait, dans
ce département, aux comtes de Poitou les centres féodaux
que voici : — la vicomté de Châtellerault (120 fiefs }, les
baronnies de Gençay (25 fiefs), Morthemer (28 fiefs),
Dienné {17 fiefs) , Montmorillon (70 fiefs), Gelle-l'Évè-
cault (16 fiefs), Chauvigny et Angles (12 paroisses ) ; —
les châtellenies de Poitiers (52 fiefs), de Montreuil-Bonin
(9 fiefs), Château-Larcher ( 19 fiefs), St.-Savin (21 fiefs),
Lusignan (61 fiefs), Civray (140 fiefs), et Champagné-
St.-Hilaire. |
M. Rédet divise en trois catégories les fiefs de second
ordre, se groupant autour de chacun de ces centres féo-
daux. La première est celle des fiefs relevant immédia-
tement des comtes du Poitou ; la seconde , celle des fiefs
n’en relevant qu’indirectement à titre d’arrière-fiefs ; la
troisième, enfin, se compose des fiefs qui, possédés par
l'Église , étaient affranchis de l'hommage et des autres
devoirs féodaux.
52 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Les fiefs relevant directement des comtes de Poitou
étaient ceux dépendant des baronnies de Gençay et de
Morthemer , et des châtellenies de Poitiers, de Dienné,
Montreuil-Bonin, Château-Larcher et St.-Savin. M. Rédet
fait connaître d’intéressants détails sur les redevances et
charges féodales imposées aux possesseurs de ces diffé-
rents fiefs. Il cite, entre autres , et donne in extenso un
aveu du seigneur de Bren (la Roche-de-Bran), fait pour
piquer la curiosité. Le seigneur de Bren était tenu, lorsque
le comte de Poitou faisait sa première entrée à Poitiers,
de lui préparer un bain, et, avant l’immiersion du comte,
d’en goûter l’eau : charge singulière , mais revendiquée
sans doute , dans les temps féodaux , avec l’ardeur dont
Walter Scott s’égaie, aux dépens de l'excellent baron
Bradwardine de Bradwardine et de Tully-Véolan.
La seconde catégorie, celle des fiefs à mouvance
intermédiaire , se composait de ceux dépendant de la
vicomté de Châtellerault, de la baronnie de Montmo-
rillon et des châtellenies de Civray et Lusignan. Ces
fiefs formaient un nombre total de 3914.
Enfin, la troisième catégorie, celle des fiefs déchargés
de l'hommage et des devoirs féodaux, par respect pour
l'Église, se composait des fiefs des baronnies de Celle-
l’Évêcault , Chauvigny et Angles , appartenant à l’évêque
de Poitiers, et de la châtellenie de Champagné-St-
Hilaire qui, donnée par Clovis, après sa victoire, au
chapitre de St.-Hilaire, a appartenu à cette abbaye pen-
dant treize siècles.
Ces quelques détails , où nous nous bornons à tracer
les grandes divisions, suffiront pour faire apprécier le
soin et la méthode qui ont présidé à l'excellent travail
de M, Rédet,
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. h53
Après cette lecture , la parole est donnée à M. l'abbé
_ Lalanne , curé d’Oiré, pour lire un mémoire en réponse
aux 15°, et 16°. questions du programme, déjà traitées
par M. Rédet. |
M. Lalanne n'aborde pas la question sur un plan
aussi général que M. Rédet; il s'attache à l’arrondis-
sement qui, depuis plusieurs années, est de sa part
l’objet de persévérantes et fructueuses études, et cir-
conscrit son sujet dans la reconstitution historique de
la hiérarchie féodale à Châtellerault.
M. l’abbé Lalanne fixe au IX°. siècle l’origine de la
vicomté de Châtellerault. A cette époque, un comte de
Poitou la donna en apanage au puiné de ses enfants,
et ce titre lui fut conservé jusqu’en 1514, époque à
laquelle Châtellerault fut érigé en duché en faveur de
François de Bourbon par le roi François I‘,
A l’origine, la vicomté de Châtellerault fut divisée
en quatre châtellenies principales : Monthoiron , Gironde -
(aujourd’hui Lencloître), Puymelriou et St.-Rémy,
Ces châtellenies étaient divisées en baronnies, châ-.
tellenies et simples seigneuries , formant un total de
123 fiefs. Ces 123 fiefs eux-mêmes se décomposaient
en une quantité considérable d’arrière-fiefs ; M, l’abbé
Lalanne a suivi la filiation jusqu’au septième degré, en
prenant pour point de départ le vasselage envers le
comte de Poitou d’abord, et le roi ensuite, après la
réunion du Poitou à la couronne,
Le démembrement des châtellenies a empêché M. La-
lanne de déterminer la hiérarchie féodale pour Gironde,
Puymelriou et St.-Rémy; mais il a pu le faire d’une
manière complète pour la grande division féodale de
Monthoiron. M. Lalanne présente ce travail sous la forme
FRA
h54 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
la plus méthodique et la plus facile pour le lecteur,
par le moyen d’un classement alphabétique.
Ce simple aperçu donne une idée de l'intérêt scien-
tifique que présente le consciencieux travail de M. l'abbé
Lalanne. Ajoutons qu’il l'accompagne de documents pré-
sentant tous de l'intérêt , soit comme donnée historique,
soit au point de vue de la singularité, Nous ne laisse-
rons pas sans mention un droit fort extraordinaire ,
quoiqu'il n’eût rien dérange à une époque où les ter-
ritoires , les juridictions et les droits étaient enchevêtrés.
Je veux parler des droits de péage perçus, aux portes
de la ville de Poitiers, par une seigneurie qui n’appar-
tenait pas même à la châtellenie de la capitale, et
dépendait, au contraire, de la circonscription féodale
de Châtellerault. C'était la viguerie de l’ancien Puygar-
reau, sise dans la banlieue de cetie dernière ville. Elle
retirait de ce péage son principal revenu.
La communication de M. Lalanne est accueillie par
les remerciments du Congrès. La science et la méthode
. qui président aux travaux de M. Lalanne nous font favo-
rablement augurer de son Histoire du Chätelleraudais,
qu’il va prochainement publier, et pour laquelle une
souscription est ouverte chez les libraires de Châtelle-
rault et de Poitiers.
La parole est donnée à M. l'avocat général Bardy, pour
répondre à la 18°, question du programme , ainsi conçue :
« Comment se rendait la justice dans la circonscription
« hiérarchique des châteaux ? »
Cette question, la dernière à discuter, a été pour
M. l'avocat général Bardy l’occasion d’un véritable suc-
cès; ce qu’il a fait est un tour de force. Il a improvisé
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 455
un livre. Admetions qu’un sténographe eût été là,
l'improvisation était fixée, et le livre était fait.
M. Bardy annonce, en commençant, qu’il étendra
l'horizon du programme, et comprendra , dans la géné-
ralité de son plan, toute l’organisation judiciaire du
comté du Poitou. Après avoir ainsi marqué la voie qu'il
doit suivre, il remonte aux temps les plus reculés, et
prend à son berceau notre justice féodale.
Il commence par une savante dissertation sur l’éten-
due qu’il faut attribuer au territoire formant la circon-
scription judiciaire des comtes du Poitou. Après avoir
vidé cette question et appuyé ses solutions sur des cartes
dressées par lui à l’aide de documents dignes de foi,
il procède à la division judiciaire de ce territoire, Il
détermine les centres de population qui servaient de
siége aux viguiers, vicaires institués successivement par
le suzerain sur tous les points où les besoins des popu-
lations nécessitaient leur création.
Il énumère 67 vigueries qui formaient la division ju-
diciaire du ressort du comte, et les répartit entre 47
pagi, ou circonscriptions secondaires, de la manière
suivante : Poitiers, 22 vigueries; Brion, 43 ; Thouars,
2 ; Herbauge, 4; Talmondais, 3, Châtellerault, 4:
Gâtine , 5; Melle, 2; Rais, 1; Niort, 2; Aulnis, 2:
Saintonge , 2; Angoumois , 4 ; Tiffauges, 4; Mauzé, 1:
Loudunais, 2; Mirebalais, 4.
Après avoir ainsi déterminé les siéges des. vigueries
et attesté leur existence par une série de titres, s’éche-
lonnant de 775 à 1047, M. Bardy aborde lintéressant
sujet de l’organisation judiciaire elle-même.
Au sommet de la hiérarchie judiciaire féodale il
place le comte du Poitou, siégeant dans son mallum.
456 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Son ressort judiciaire est divisé en vigueries occupées
par des titulaires qui y rendent la justice, et en vi-
gueries faisant partie de son domaine personnel où les
fonctions judiciaires sont remplies par des centeni et
des decani.
Les viguiers jugent, assistés de scabini ou scabinei,
assesseurs Choisis parmi les notables, Ils jugent aussi
par des délégués, prévôts ou châtelains, qui tiennent
d'eux leur autorité,
Les viguiers ne jugent que les causes ordinaires, le
comte suzerain se réservant les plus graves. A cet effet,
il tient périodiquement des assises où le viguier vient
s'inspirer de l’exemple du suzerain.
Peu à peu cette puissante organisation s’affaiblit. Le
morcellement de la souveraineté qu’implique l’idée féo-
dale, s’opère dans la justice comme dans tout le reste.
Les liens se relâchent, les justices se décentralisent.
Les seigneurs du deuxième rang se substituent à ceux
du premier pour le fait de la justice, et se passent de
l’assentiment du suzerain pour la nomination ou la révo-
cation des juges chargés de rendre la justice en son
nom. C’est le signal de la chute des viguiers, qui tom-
bent au XI°. siècle.
A partir de cemoment commence la justice seigneuriale,
rendue, au nom du seigneur, par le prévôt ou par le
bailli, Le prévôt, juge des roturiers ; le baïlli, juge de
tous, juge respecté , dont le nom équivaut à l’idée de
protection et de garantie, non-seulement juge local ,
mais encore juge d'appel.
Ces justices seigneuriales, ainsi constituées, variaient
_à l'infini, au gré des coutumes, au point de vue de
la compétence. Cependant elles se divisaient en trois
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 457
catégories principales : haute , moyenne et basse-
justice. | pres
La haute-justice comprenait 1out; elle savait pléni-
tude de juridiction jusqu’à la mort. Le gibet, le carcan,
la prison sûre étaient ses signes, ses charges, ses pri-
viléges. M. Bardy évalue à 300 le nombre des hautes-
justices dans le Poitou.
La moyenne-justice avait pleine compétence au Civil,
restreinte au criminel. Elle ne jugeait le fait délictueux
que jusqu’à l’effusion de sang , jusqu’à l’amende de 60
sols.
La basse-justice avait une tasigeinle limitation. Sa ju-
-ridiction ne s’étendait que jusqu’à 60 sols au civil, 7 sols
au criminel.
Ges justices n'étaient pas seulement un honneur pour
les seigneurs , c'était une charge souvent lourde. Ils
devaient pourvoir, sur leurs propres revenus, aux frais de
justice.
Ici M. l’avocat-général Bardy présente à l’Assemblée
le tableau de ce qu'était alors la justice: un seigneur
pouvant tout sur les juges institués par lui et révocables
par lui ; des juges sans autorité, parce qu’ils étaient sans
garantie pour la résistance; des abus et des injustices,
qui eussent élé irréparables sans l’appel à tous les degrés.
Nos tendances actuelles sur l'appel, dit l’orateur , sont
toutes différentes de celle qui prédominait dans les temps
féodaux. Nous marchons à là restriction de l'appel ; les
temps féodaux tendaient à son extension pour deux
causes : la première, c’est que l’appel à tous les degrés,
forme impliquée par la féodalité même, était la seule
garantie du justiciable contre des juges qui n'étaient pas
les maîtres de leurs sentences ; la seconde, c’est que la
20
458 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
politique royale était intéressée à favoriser l'appel.
L'appel, qui remontait à la royauté comme à la source
même de la justice, était en effet l'unique prestige par
lequel l’idée monarchique pût se manifester aux turbu-
lents vassaux de la couronne. C’est de là que naquit la
grande pensée d’où sortit, en 4302, linstitution du
parlement.
« C’est à cette date que fut institué le parlement de
Paris. Ce parlement , Messieurs, c’est le vôtre. Il fut le
vôtre, à deux titres : il a siégé parmi vous , etila , chez
vous , sauvé la patrie. Au milieu du plus grand danger
de la France, aux mauvais jours de l’invasion étrangère,
vous reçütes cet honneur insigne de le voir se réfugier
dans vos murs.— Pendant quinze ans, vivant parmi vous,
il s’est inspiré du même cœur, du même patriotisme.
Charles VII vint, et vous lui avez donné Jeanne
d'Arc. »
Nous ne rendons qu’'imparfaitement Fappel fait à ces
grands souvenirs par M. Bardy. Les applaudissements
qui l’interrompent attestent l’éloquence de sa parole, en
même temps que l’enthousiasme qu'éveille toujours, à
Poitiers, un sentiment patriotique noblement exprimé.
M. Bardy, reprenant son discours interrompu si hono-
rablement pour lui, fait l’histoire du parlement , de sa
double autorité judiciaire et politique , et de l’action qu'il
exerce désormais sur les justices de son ressort. Après
s'être reporté aux missi dominici, inspecteurs austères
chargés par les rois de surveiller la justice des comtes,
il raconte les Grands-Jours , solennelles députations des
parlements, contrôle des justiciers et sauve-garde des
faibles, contre les égarements ou les excès du pouvoir ;
— les chevauchers des maîtres des requêtes , membres
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITQOU. 59
d'honneur. du parlement , féaux chevaliers redresseurs
des torts envers la justice; — les commissaires-députés
envoyés, à partir de 4635, dans les provinces, avec
mission d’y connaître de certaines affaires délicates ; —
en un mot, toutes les hautes juridictions exceptionnelles
dont le mandat témoigne de l'amour de nos rois et de
nos parlements pour la sainte cause de la justice.
M. Bardy termine en énumérant les siéges royaux :
présidial, sénéchaussées , bailliages et prévôtés royales ;
il fait connaître leur juridiction , leur compétence , leur
personnel , leur importance relative ; il s'occupe aussi des
juridictions administratives , de la constitution du conseil
supérieur, du grand bailliage ; il jette un coup-d’œil
rapide sur notre coutume qui lui permet de rappeler
deux noms chers à la science, ceux de l'abbé Gibault et
de M. Nicias Gaillard ; enfin, il ne cesse d’intéresser son
auditoire , qui s’aperçoit à ce moment seulement que deux
heures se sont écoulées aussi rapides que cinq mi-
nutes.
Une dernière question est proposée à l’Assemblée, c’est
la question 19, ainsi conçue :
« Quelles sont les collections les plus remarquables
« du pays, en histoire naturelle, en peinture , en sculp-
« ture et objets anciens ? Indiquer quelques-unes des
« raretés qui s’y trouvent. »
Dès la première séance de la session, M. de Longuemar,
devançant l'appel de la question, a voulu initier le
Congrès et l'auditoire à la connaissance des merveilles
scientifiques et artistiques que contiennent les collections
publiques et privées de ce département. C’est un avant-
goût des plaisirs qui seront offerts aux membres du Con-
60 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
grès au sein des collections, où l’obligeance et les soins
de M. de Longuemar leur donneront accès.
M. de Longuemar signale , pour les livres et les ma-
nuscrits, la bibliothèque publique de la ville, celle du
séminaire, les eollections de M, de la Sayette et de
MM. de Boismorand et de Baudus, les archives de la com-
mune de Poitiers, celles de la Préfecture.
L'histoire naturelle offre aussi dans ce département des
collections faites pour intéresser, M. de Longuemar cite,
à ce point de vue, le cabinet d’histoire naturelle de la
ville , celui de la Faculté des sciences, la collection de
M. Garnier, celles de M. de La Sayette, de M”. Des-
courtis de La Valette, de M*°, Le Breton, de MM. de Courcy,
du Fontenioux, Servant, Pingault, de Vézien, Raynal
et Constantin ; enfin les collections de MM. Martin, à
Châtellerault ; de La Tourette, à Loudun ; et Brouillet,
à Charroux.
La peinture est, pour M. de Longuemar, l’occasion de
révéler à son auditoire beaucoup de richesses ignorées :
il signale de belles toiles et de curieuses gravures dans
le musée de la ville, dans les salons ou dans la collection
de M”*, la comtesse de Montchal, de M"°. de La Sayette,
de M. le président Leydet, de M. Lecoïinte, de M. de
Boismorand , de M. Joslé, de M. Moître, de M. Trichet,
de M. l’abbé Barbier, de M. Pabbé Auber, de M. le comte
de Malartic Saint-Jal , de M. l’avocat-général Bardy, de
M. Bonsergent , de M. le conseiller Chemineau.
Les objets d’art précieux , soit par leur antiquité, soit.
par leur style, soit par les mains qui les ont illustrés en les
touchant , sont , à Poitiers, l’objet d’un culte aussi intel-
ligent que passionné. M. de Longuemar cite, au premier
rang, la collection de M*°. de La Sayette, précieux éerin
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. H6À
de richesses artistiques dont la réputation a dépassé le
département pour s'étendre au loin, puis il signale la
collection de M. de Boismorand, si riche en objets cel-
tiques ; celle de M. de La Tourette, à Loudun; de
M. Moître, de M. du Puis-Vaillant, de M. le colonel de
Vanteaux, de M. Servant , adjoint au maire : de M. le
_ comte de Malartic, de M. l’abbé Auber, de M. Brouillet,
à Charroux ; de M. l’abbé Barbier , et de M. leconseiller
Pilotelle , aussi habile à créer avec le ciseau du sculpteur
qu'intelligent à conserver les objets du culte de Panti-
quaire.
M.. de Longuemar cite ensuite notre cabinet des
antiques, riche de précieux débris de l’époque gallo-
romaine ; puis les médailliers si complets de MM.
Lecointre-Dupont, Eugène Lecointre, de MM. Bonsergent,
du Fontenioux, Pichaut, Deniau et de Courey.
Cette énumération, dont la sécheresse disparaît sous le
charme du coloris que M. de Longuemar sait donner à ses
descriptions, est accueillie par l’auditoire comme une
révélation. L'Assemblée remercie M. de Longuemar des
laborieuses et patientes recherches auxquelles il doit
d’avoir pu lui révéler tant de richesses ignorées, et arrête
une visite aux collections pour le mercredi 25 mars.
Le 25 mars, plusieurs membres des Sociétés savantes
de Poitiers accompagnent, dans leur promenade scien-
tifique et artistique, MM. de Longuemar et de Caumont.
M. Pilotelle est chargé de faire, en séance publique, un
rapport sur l’état des collections publiques et privées.
Le 26 mars , à la dernière séance , la parole est donnée
à M. Pilotelle, pour faire son rapport.
Le temps a manqué pour tout voir , dit M. Pilotelle,
et c’est l’éloge de nos richesses, Les cabinets de MM. de
162 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Boismorand, du Puis-Vaillant, Bonsergent, l'abbé Auber:
les tableaux de M. le président Leydet et de M"°, d’Ansay,
n’ont pu être visités soit par ce motif , soit à raison de
l’absence de leurs propriétaires: D'un autre côté, les
visiteurs ont élé contraints, par le défaut de temps , de
s'imposer une dure privation. Ils n’ont pas vu le cabinet
de M"°, de La Sayette. M. Pilotelle en a donné à quelqu'un
une raison qui est tout un hommage rendu à cette riche
collection : « Vous deviez commencer par là, disait le
censeur, »—« Si nous avions commencé par là, a répondu
spirituellement M. Pilotelle , nous n’aurions pas fini. »
Nos promeneurs artistiques, guidés par MM. de
Longuemar et de Caumont, ont visité le cabinet de
M. Garnier , contenant 240 espèces d'oiseaux du dépar-
tement ; — l’hôtel de M. de La Brosse , gracieux édifice
du style de la renaissance, dont la construction est due aux
plans de M. Godineau et au goût éclairé du propriétaire ;
— les curieuses tapisseries du XVI°. siècle, représentant
l’histoire de St.-Étienne et appartenant à M. Bruneteau,
rue de la Psalette-St.-Hilaire ; — les restaurations de
l’église St.-Hilaire; —la riche collection de guipures des
XVI, et XVII, siècles , et d'application sur velours pour
ornements d'église, de M. l’abbé Barbier, précieux échan-
tillons d’un art que M”*, Véïse, habile artiste de cette ville,
fait révivre ; — la belle collection d’armes de M. le colonel
de Vanteaux ; —la salle à manger de M. Pilotelle, entière-
ment meublée de sculptures dues à son ciseau, et d’objets
d’art appropriés au style du meuble ;—un magasin d'objets
d’artetdecuriosités’élevantrue des Halles,sous la direction
d’un sculpteur habile , M. Chalignier, et d’un doreur fort
adroit, M. Pelletier ;—-une collection de serrurerie antique,
présentée par M. Guyon, contre-maitre de M. Morillon ; —
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 468
les verrières du Palais, dues à la fabrication de M. Hivon-
nait ; — enfin, le cabinet et l'atelier de. M. Génin, pré-
parateur naturaliste.
En terminant, le rapporteur signale les trayaux de
plusieurs sculpteurs : MM. Lucas, Cartier, Lecuyer,
Marais, Brix, et particulièrement M. Frottier, qui vient
de terminer quatre confessionnaux du XIII*,. siècle, et
qui sculpte en ce moment douze tabourets dans le
style de la même époque, pour une chapelle de Paris.
Enfin, il fait connaître à l’Assemblée, comme un fait
intéressant pour l’art, la restauration du château de
Cremeau, par M, le comte de Croiï ; la construction , à la
terre de Mariville, d’un château de l’époque gothique,
dite Tudor, confiée à l’habileté de M. Lubac, par M. Lau-
rence, beau-père de M. le conseiller Legentil; et le
château gothique de Cromacre, que vient de bâtir, pour
M. de Lussac, M. Châteignier.
Nous devons, pour donner une idée: plus exacte des
collections poitevines, reproduire in extenso le mémoire
de M. de Longuemar, analysé plus haut :
RAPPORT DE M. DE LONGUEMAR.
Les collections publiques de. la ville de Poitiers com-
prennent :
4°, Une bibliothèque, riche de 24,000 volumes de tous
formats ; 8,000.brochures et 417 manuscrits, au nombre
desquels se trouve la précieuse collection de chartes
originales ou de copies. authentiques que le bénédietin
dom Fonteneau fit extraire des chartriers des abbayes,
des églises et des monastères de l’ancien Poitou. Au
nombre des manuscrits à vignettes , il faut citer un ma-
64 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
gnifique psautier historié, du XV°. siècle, attribué au roi
René, et deux livres d’Heures du XVI°. siècle, enrichis
de vignettes. N'oublions pas un évangéliaire latin, écrit
en onciales du VIII*. siècle, et un missel du XII. , l’un
et l’autre à vignettes, et surtout une copie de la vie de
sainte Radégonde, reine de France, également du XIF°.
siècle , dont les nombreuses vignettes ont la plus grande
analogie avec les fresques de la crypte de St.-Savin. —
Disons tout de suite que le grand séminaire, M”*. de La
Sayette, MM. de Boïsmorand, de Baudus et de La Tou-
rette possèdent également de très-précieux spécimens de
calligraphie et de l'imagerie du moyen-âge.
L'ancienne abbaye de St.-Maixent a fourni à la biblio-
_ thèque de Poitiers une suite de chartes très-anciennes,
et notamment une copie {de 1359) de ce fameux traité de
Bretigny que les États refusèrent d'accepter.
Les cinquante articles qui le composent n’occupent pas
moins de cinq longues feuilles de parchemin, ajustées
bout à bout, sur une longueur de plus de 3 mètres.
214 incunables complètent cette belle collection.
2°. Les archives de la commune de Poitiers présentent
une série de titres fort importants qui remplissent tout
l'intervalle de temps qui sépare le XII°. siècle du XIX°.
3°. Celles de la Préfecture ne comptent pas moins de
3,000 liasses et un millier de registres, renfermant les
précieux rudiments de l’histoire civile et ecclésiastique
de notre ancienne province pendant tout le cours du
moyen-âge.
4°. Le musée d'histoire naturelle qui comprend une
collection remarquable de mammifères, d'oiseaux, de
poissons , de reptiles, d'insectes, appartenant pour la
plupart au département de la Vienne; une série de co-
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 465
quilles vivantes et fossiles, des herbiers généraux ou par-
ticuliers au pays. — La plupart de ces richesses sont dues
à la générosité de M. Servant, ancien ingénieur aux
colonies ; de M. Mongrand, fils, chirurgien de marine,
et de M. Delastre, botaniste de Poitiers , à qui l’on doit
la publication de la Flore de la Vienne.
Les collections particulières d’histoire naturelle sont
fort goûtées à Poitiers, et quelques-unes peuvent rivaliser
avec la précédente. Citons au premier rang M. Garnier,
préparateur habile, qui a monté une suite de 800 oi-
seaux pris dans le pays. — Puis viennent les collections
d’ornithologie, de conchyliologie, de minéralogie, de
Mr°, de La Sayetie, Descourtils et de Courcy ; de MM. de
Malartic, du Fontenioux, Servant ; des docteurs Pingault,
de La Tourette, et Decoux; de M. Génin, naturaliste ;
les suites de fossiles de MM. de Vézien, Martin, de Châtel-
lerault ; Brouillet, de Charroux; Raynal, Constantin, de
Longuemar , etc.
5°. La salle des antiques contient une série d’inscrip-
tions funéraires ou commémoratives, de l’époque romaine
et du moyen-âge, formant une chaîne épigraphique
presque continue jusqu’à nos jours, et de fragments de
statues et de bas-reliefs de toutes les époques, au nombre
desquels il faut citer les belles inscriptions romaines de
Sabinus et de CI. Varenilla, des autels gallo-romains ,
des tombes chrétiennes appartenant aux premiers siècles;
la cheminée du château de Chitré, œuvre historiée de la
Renaissance, et les statues en marbre blanc, d’un fini
précieux, de Jeanne de Vivonne et de Louis XIIT.
6°. Le Cabinet d’objets d’art anciens, renfermant une
bonne suite de monnaies et de médailles historiques , de
cachets et de sceaux d’abbayes, de meubles d’ébène ma-
66 INSTITUT DES PROVINCES DÉ FRANCE.
gnifiquement incrustés, des vases, des plaques, des
crosses , des reliquaires émaillés, de tous les siècles , et
un petit assortiment d'armes offensives et défensives, de
diverses époques.
7°, La galerie de tableaux parmi lesquels on remarque
quelques pages du moyen-âge , reconnaissables à leur
tond d’or, et à la sévérité ou à la naïveté de leurs figures ;
une perspective cavalière de Poitiers pendant le siége de
la ville par Coligny; de bons portraits et des œuvres
estimées d’artistes modernes , au nombre desquels il faut
nommer M, de Curson, un des enfants de notre Poitou.
Puisque nous venons de terminer la rapide nomen-
clature des objets contenus dans nos collections publiques
par la galerie des tableaux, disons tout de suite que, si
toutes les richesses que le Poitou renferme en ce genre
étaient réunies dans un même lieu, on pourrait jouir du
beau spectacle, d’une suite considérable d’œuvres d'élite,
représentant toutes les écoles et tous les siècles où l’art
brilla de quelque éclat.
M°*, de Montchal et Descourtils présenteraient de
magnifiques portraits de famille, peints par les Lar-
guillière et les Vanloo ; — un Van-Dick peint par lui-même,
de bonnes toiles et des cartons de l’école flamande ;
— M°°, de La Sayette, des natures mortes d’une grande
vérité ; un Christ mort de l’école flamande ; une madone
du temps du Pérugin ; un portrait du Christ décoré par
les byzantins. M. le président Leydet possède une belle
série d’originaux des peintres en renom de l’école fran-
çaise moderne , les Greuze , les Boilly, les Fragonard, les
Demarne, les Taunay, les Duval , et les Bertin ; —M. Le
Cointe, deux magnifiques toiles : le Christ descendu de la
Croix, et le Sacrifice d'Abraham , dues à l’école italienne et
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, h67
à l’école espagnole ;—M. de Boismorand, un G. Poussin, un
Wouvermans ; —M. Joslé, une sainte Famille debout, de
l’école florentine ; — M. Moître, des tableaux de piété, de
l’école des Francks , des vues de Rome de Niewlard, des
scènes hollandaises ; — M. Lefranc , un portrait, par Ph.
de Champaigne ; — M. Trichet , une Naissance de Jésus-
Christ, effetde nuit saisissant de vérité ; — l’abbé Barbier,
des Vierges sur bois, du XIII°. au XV°, siècle ; — M. Au-
tellet, des toiles flamandes, une esquisse authentique
du Poussin et de bons tableaux de M. Bruyère, artiste
mort à Poitiers; —M. le comte d’Orfeuille, deux petitsta-
bleaux espagnols,un Sébastien Bourdon, un christau jardin
desOliviers ;— l’abbé Auber, quelques spécimens de pein-
tures byzantines rapportées de Bomarsund, des originaux
de l’école française et de bonnes copies anciennes de la
Vierge-à-la-Chaise et du Sommeil de l’Enfant-Jésus ; —
MM. le comte de Malartic et le baron Laurenceau, une
suite de sépias et d’aquarelles originales, dues au pinceau
des meilleurs artistes contemporains, et provenant du cé-
lèbre album de M". Hyde de Neuville, leur belle-mère ;
—M. Eugène Lecointre, une Tentation de saint Antoine,
de Brauwer ; — M. Deschamps, une Balayeuse de Duval,
et de bonnes copies d’anciens maîtres ; — M, le comte de
Chabot, une suite de portraits historiques , appartenant
pour la plupart à sa famille, peints par des artistes
anciens et modernes ; — M. Marganne, des tableaux de
différentes écoles; — M. Martin, de Châtellerault , une
galerie de 80 tableaux , parmi lesquels bon nombre d’ori-
ginaux des maîtres flamands et hollandais, tels que
Téniers, Van-Goyen , Huysmans, etc., un Paul Véronèse,
un Lantara , un de Marne, etc. ; — M. de Longuemar, de
petits Téniers , un Ostade , un Pinaker, un J. Wan-Velde,
168 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
un $. Bourdon. Une foule d’autres noms nous échappent
sans doute, et nous pourrions ajouter à ces œuvres de
peintres morts en possession de la renommée, des œuvres
sans doute plus modestes, mais non sans mérite, des
artistes du Poitou : le regrettable M. Bruyère, M. Viguier,
MM. Hyvonnait frères, Deschamps, M"*, Voisin, M. Pi-
chaut, qui débute dans la peinture religieuse. — Même,
si nous n’avions peur d’être taxé d’indiscrétion, nous
citerions une foule de noms d’hommes de goût et de
talent qui cultivent la peinture parmi nous, pour y trouver
un agréable délassement des préoccupations ordinaires de
la vie; mais ce serait blesser leur modestie. A la suite
de nos tableaux, ou parallèlement à eux, viendraient les
collections de gravures , eaux-fortes , aquarelles, litho-
graphies, études au crayon, dignes de fixer l’attention.
M. Bardy possède, dans ce genre , une série de des-
sins originaux, coloriés, de tous les types de la popu-
lation algérienne ; une suite de portraits historiques,
variés ; des eaux-fortes de Lucas de Leyde, d’Albert
Durer, de Callot, d’Ostade, de Rembrandt; des gra-
vures de Ville, d’un fini précieux, M. Bonsergent a,
dans sa collection de dessins, de belles gravures de
Nanteuil, d’Avède, de Dollé, de Nevet , de Masson, de
Berwick; une riche série de portraits et un certain
nombre de gravures portant l'empreinte de la verve
satirique du XVI°. siècle. M. Chemineau a recueilli de
bonnes épreuves de gravures espagnoles, reproduisant
les magnifiques toiles de Ribeira , de Murillo, de Vélas-
quez, de Raphaël Minghs. M°°. veuve Bruyères conserve
bon nombre d'œuvres de choix, qui ornent encore ses
cartons. M, de La Sayette possède un précieux carton
de gravures du plus grand mérite, reproduisant les
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 69
œuvres des grands peintres. En outre de sa collection
de gravures, de tous les temps et de tous les maîtres ,
M. Bonsergent, conservateur de la bibliothèque de
Poitiers, a réuni une foule d’objets d’art anciens, tels
que haches, couteaux, pointes de flèches en silex et
en bronze, appartenant aux temps gaulois ou gallo-
romains; styles, fibules, anneaux, pierres gravées,
cachets , sceaux d’abbayes , poteries sigillées, etc. Mais
ce qui rend surtout sa collection remarquable, c’est
une suite, fort importante, de médailles formant une
chaîne continue depuis les époques historiques les plus
reculées de Rome et de la Gaule jusqu’à nos jours, dans
laquelle on remarque une foule de pièces rares et cu-
“rieuses , notamment dans les monnaies royales et dans
les monnaies baronniales. |
La numismatique compile, au surplus, à Poitiers et
dans le Poitou, un grand nombre de prosélytes. A leur
tête, il faut certainement placer le savant M. Lecointre-
Dupont , dont le médaillier est aussi précieux par le
nombre que par le choix des pièces qu’il renferme ;
M. Eugène Lecointre, son neveu; M. du Fontenioux, qui
se borne à réunir les monnaies frappées dans nos an-
ciennes proyinces; M. Pinchaut, les monnaies baronniales:
M. Leniau , les pièces remarquables par leur belle con-
servation; M", des Courtils, de La Sayette et d’autres
encore, dont les noms viendront à propos de collections
variées,
Quand on prononce dans le pays le mot de collections,
il faut, de toute nécessité, débuter par celle de M°°. de La
Sayette, dont le musée particulier a eu les honneurs
d’une mention toute spéciale, au Congrès de 1834, et
qui depuis lors n’a cessé de s’accroitre.
470 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Là, outre les objets d'histoire naturelle, les tableaux,
les médailles, déjà mentionnés précédemment, on ren-
contre à profusion des plaques, des vases, des bijoux
émaillés, de tous les temps, et notamment des belles
époques des maîtres limousins; des encensoirs, des
custodes , des crossés , des tryptiques, des reliquaires
byzantins ou de la renaissance ; des coffrets en ivoire,
en ébène incrusté de nacre ou de cuivre; des siéges,
des chiffonnières, des glaces, des pendules précieuses ,
des Saxe, des Bohême, des grès de toutes formes, de
toutes couleurs et de toutes dimensions ; des statuettes,
des bas-reliefs en métal, en marbre, en albâtre, en
bois ; et, au milieu de tant de raretés, des objets his-
toriques, tels que des flambeaux de Diane de Poitiers,
et de Louis XIV, un livre d’Heures d'Anne de Bretagne ,
et la montre de Jeanne d’Albret.
Après l'immense galerie de M®°. de La Sayette, il
faut jeter un coup-d’œil sur la précieuse et coquette
collection de M. de Boismorand. Là, c’est encore une
foule de plaques émaillées des Laudin , des Nouaïither ;
des émaux byzantins , des statuettes d'ivoire, des vases
et des bijoux gallo-romains ; mais surlout et comme
trait saillant, la plus belle et la plus complète réunion
de haches, de couteaux , de pointes, de flèches et de
javelots en silex, en porphyre, en bronze de l’époque
gauloise , rencontrés dans les tumulus des bords de
la Gartempe.
M. le comte de Tusseau a réuni un ensemble remar-
quable de vases de Palissy ; des émaux des Laudin , des
Courtois, des Nouaither, des Petitot, avec une pro-
fusion de menus objets du moyen-âge. M. de La Brosse
possède également des émaux de premier choix, des
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 74
porcelaines , des coffrets, des statuettes. Plus loin, nous
ferons mention de ses meubles du moyen-âge. M. Mar-
ganne peut montrer des plaques et des coupes émail-
lées ; le docteur Gaillard, deux lampes, des premiers
temps chrétiens, sur l’une desquelles se lit cette in-
scription, rencontrée fréquemment aux Catacombes :
Éyo ee avaataots (1), écrite en vieux caractères grecs.
M. de Malartic possède un double médaillon d'ivoire ,
formant une coquille par leur réunion, et dans chacun
desquels ont été sculptées, par un artiste d'Italie,
l’'Adoration des Mages et la Circoncision , avec une
foule de figures renfermées dans quelques centimètres.
M. Moître, à force de patience et de sagacilé, est par-
venu à réunir 180 plaques émaillées, portant le nom de
tous les artistes Limousins, œuvres parmi lesquelles on
distingue : une Cène et un Ecce-Homo, de Noël Laudin ;
une sainte Famille, de Léonard Limousin ; un Moïse
frappant sur le rocher, de Pierre Raymond.
M. le chevalier du Puis-Vaillant est un de ceux qui
ont commencé, dans Poitiers, à réunir des objets d’art,
et c’est chez lui qu’a pris naissance la Société des Anti-
quaires de l'Ouest. Il possède une foule d’objets intéres-
sants de toutes les époques; quelques-uns même pré-
sentent un véritable intérêt historique. — On voit dans
sa collection une balance romaine complète, de nom-
breux fragments de vases sigillés, des creusets et coins
avec lesquels on fabriquait jadis des monnaies royales,
dans son château de Montreuil-Bonnin:; un couteau à
manche historié de Louis XI; la panoplie d’un cavalier
englouti, en 1557, dans les marais de St.-Quentin, lors
(4) Je suis la résurrection ou la vie,
172 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de la bataille livrée sous les murs de cette ville entre
les Français et l’armée de Philippe IL.
Mais, quand on parle de panoplies remarquables, il
faut se hâter d'arriver au magnifique musée d'armes de
tous les temps et de tous les pays qu’a su réunir M. le
colonel de Vanteaux : ‘cottes de mailles, casques, ar-
mures damasquinées, haches d'armes, arbalètes, épées
et poignards de toutes formes appartenant au moyen-
âge, en compagnie de claymores écossaises, d’épées de
Tolède, de fissahs kabyles, de sabres mexicains, chinois,
japonais, de poignards circassiens, indous et malais.
Quelques-unes de ces armes ont un intérêt historique.
— Une des masses d'armes fut abandonnée sous les murs
de Joigny, par un chevalier anglais, après un assaut in-
fructueux livré, en 4429, à cette ville défendue par ses
seuls habitants ; un large braquemart est l’épée à deux
mains du bourreau de Colmar, arme héréditaire de sa
famille; une des hallebardes est celle de la corporation
des drapiers de Schelestadt,
Un nombre considérable de coffrets de bois incrustés,
de cuir gaufré, de reliquaires, de custodes émaillés, de
terres de Palissy, de grès coloriés, de porcelaines de
Chine , de Saxe et de Sèvres , un médailler gallo-
romain, des bijoux précieux de plusieurs époques, ac-
compagnent la belle collection d'armes de M. de Van-
teaux, qui n’est pas seulement un amateur éclairé des
arts, mais un peintre habile, comme le prouvent les jolies
toiles qui ornent ses appartements.
M. Servant , ancien ingénieur , long-temps attaché aux
colonies de l'Afrique occidentale, en a rapporté un
assortiment complet d’objets usuels et d’armes des peu-
plades du pays, et notamment des arcs de bambou , des
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 473.
flèches, des zaguaies, des carquois, des gibecières , des
ceintures en cuir habilement travaillées , des calumets à
quadruple tuyau , des coiffures, des mocassins en écorce
d'arbre, un siége sculpté en bois de baobab léger comme
du liége, un fétiche hideux, des objets de toilette à
l'usage des Dames du pays, des tambourins et des bam-
boulas, instruments de leur musique discordante.
M. le comte de Malartic a recueilli, dans ses pérégri-
nations en Algérie, une panoplie arabe complète dans
ses moindres détails : le long fusil de l'Atlas, aux capu-
cines d'argent estampé, à la crosse incrustée de corail;
le yatagan au riche fourreau, à la poignée étincelante ;
la ceinture, le turban, la cartouchière, les pistolets,
les longs éperons, les larges étriers de l’Arabe. Un spé-
cimen fort rare de pendule turque, rapportée des Échelles
du Levant, indiquant, outre les heures, les phases et
le couïs de la lune. A côté, il faudrait placer le délicieux
service à café, tissé en filigrane d'argent avec l’art des
Orientaux, que possède M. le comte de Malartic, et la
lampe kabyle à trois becs en grès, rehaussée de vives
couleurs, qui appartient à M. Eugène Lecointre, et l’on
aurait dans un appartement de Poitiers tout un ameuble-
ment oriental,
M. l'abbé Auber a réuni, depuis longues années, un
grand nombre d'objets d’art correspondant à ses pro-
fondes études archéologiques : émaux, cuivres, reli-
quaires, statuettes antiques, vases funéraires , monnaies
anciennes, manuscrits curieux, incunables sortis des
presses de Nuremberg; meubles richement sculptés de la
Renaissance,
MM. de La Tourette père et fils, de Loudun, pos-
sèdent un véritable musée d'objets d’art anciens et
7h INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
d'histoire naturelle, qui a le mérite d'offrir un ensemble
bien complet de toutes les raretés du pays. Parmi les
objets d'histoire naturelle, notons un riche herbier;, des
ossements de grands sauriens et des icthyosarcolithes du
Loudunais. Parmi les objets d’art, citons un précieux
tombeau des premiers temps chrétiens, couvert de bas-
reliefs emblématiques, des panoplies , des émaux, des
bijoux gallo-romains, des faïences de Palissy, des mé-
dailles; les portraits des Guise, des Richelieu, des
Lavallière, des Montespan, œuvres d'artistes contem-
porains de ces célébrités historiques; les Heures de
Jeanne de Bourbon, de sainte Radégonde; des manus-
crits contenant des documents relatifs au Loudunais.
Puisque nous avons franchi les murs de Poitiers,
donnons , d’après une note communiquée par un de nos
confrères de la Société des Antiquaires de l'Ouest (4),
une idée des richesses artistiques répandues, çà et là, en
Vendée. Les églises de Fontenay renferment des tableaux
de Robert Lefebvre, un beau christ en bronze, des ca-
lices historiés du XVI. siècle. Les habitants possèdent :
M. Béchard, un beau dyptique en ivoire du XV°, siècle ;
M. Fillon, numismatiste bien connu du monde savant,
des bijoux et bustes gallo-romains, tout l’attirail d’un
peintre romain trouvé dans un tombeau, près de Fon-
tenay , une vierge processionnelle du temps de Philippe-
Auguste, des dessins de maîtres italiens, et vingt mille
documents manuscrits, du XI°. siècle à nos jours, sur les
chroniques de la Vendée; M'°, Poey-d’Avant, de beaux
émaux limousins. M. Oct. de Rochebrune a réuni dans
l’ancienne habitation de M*°, Rapin, aujourd’hui restaurée
(4) M. Oct, de Rochebrune,
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU, 175
par ses soins, un plafond formé de caissons ornementés
provenant du château de Coulonges; une porte de la
belle époque de la Renaissance; une cheminée pro-
venant du château des Gouverneurs de Fontenay, ornée
de nombreuses caryatides; divers portraits historiques ,
notamment celui de Nicolas de La Reynie, et de Collar-
deau, et des objets d’art du moyen-âge. «
Les habitants de Poitiers et des environs sont fort riches
en vieux meubles sculptés, malgré les tentatives conti-
nuelles faites par les brocanteurs pour les enlever.
Dans Poitiers, ce sont M. l’abbé Auber, que nous avons
nommé déjà; M. de La Brosse, possesseur de magni-
fiques bahuts, buffets, fauteuils, cadres d’une grande
richesse. du XVI*, au XVII, siècle, ornant une habi-
tation reconstruite à neuf dans le style de la Renaïis-
sance; le docteur de La Mardière, chez lequel on voit une
cheminée sculptée sur bois, provenant du château de
Bonnivet, une magnifique porte composée de douze pan-
neaux du style ogival flamboyant; M. l'abbé de l’Arnay,
M. de Boismorand, qui possèdent des panneaux historiés
du meilleur goût , analogues à ceux qui ornent les buffets
d’ébène de nos collections publiques; M. du Puis-Vaillant,
un trône sculpté à jour et qui provient de sainte Ra-
dégonde,
Au-dehors, M. le Curé de Bouresse, M. Bouillet, de.
Charroux, M. de La Tourette, de Loudun, peuvent
montrer les spécimens les plus riches et les plus variés
des ameublements du moyen-âge.
M. Pilotelle ne s’est pas contenté d’en fecueiftir pour
son appartement, à Poitiers; il a fait un tour de force
que lon ne peut guère oser, sans être doué d’un goût
exquis et d’une habileté de main exceptionnelle.
h76 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Sur sa cheminée, une pendule en style de Boule orne
un trumeau de sa façon ; sur les tablettes d’un dressoir et
d’un buffet, dont il a fouillé tous les détails avec la sûreté
d’un maître, il a réuni un nombre incroyable de verres et de
faïences des XV°. et XVI°. siècles; des tables, des chaises
à dossier, les mille fantaisies du même temps y four-
millent, imitées à confondre les connaisseurs,
Terminons, en citant les curieuses tapisseries du
XVI°. siècle de M. Bruneteau, un tableau à l’aiguille
de M”. de La Sayette et de M. Moître, les innombrables
guipures du moyen-âge, si élégantes et si variées, trou-
vées dans le Loudunais, par M. l’abbé Barbier, et qu’une
dame habile de Poitiers, M". Waïsse, a trouvé le secret
d'imiter avec tant de perfection qu’il serait peut-être
utile de communiquer son talent aux communautés
religieuses, pour créer de riches ornements paper à la
célébration du culte.
Avons-nous dit tout? — Non, certes, il aurait fallu
pour cela une enquête de plus longue haleine.—Il aurait
fallu parler de nos monuments religieux qui tous recè-
lent quelque merveille de l’art, quelque rareté qu’on ne
trouverait pas ailleurs. — Nous avons préféré laisser bon
nombre de choses à explorer et à décrire, ne füt-ce que
pour engager les amis des arts et de la science à nous
visiter. Disons-leur à l’avance que, si nous possédons bon
nombre de modèles dans plus d’un genre, nous avons
aussi bon nombre d’estimables artistes qui savent, au
besoin, les imiter et les reproduire. Dans la sculpture,
nous avons cité M. Pilotelle et M. de La Brosse, de Poi-
tiers; M. Brouillet, de Charroux, qui modèle, dessine et
grave ; MM. Hivonnait frères et Pichault, qui se livrent
à la peinture religieuse; M. Yvonnait, qui compose des
ASSISES SCIENTIFIQUES DU POITOU. 477
vitraux d'église; le père Bény, de la Société de Jésus, qui
sculpte admirablement les autels, les chapiteaux, les
tympans de chapelles; d’autres sculpteurs encore, qui
décorent chaque jour les édifices de Poitiers ; des serru-
riers, des ouvriers en bois, des doreurs, des ornema-
nistes, capables de eréer des œuvres d’un véritable
mérite, guidés qu’ils sont par l’étude intelligente des
modèles du moyen-âge.
Les questions du programme étant épuisées, M. de
Caumont prend congé de l'assistance et exprime aux
hommes d’étude de Poitiers sa gratitude, pour l’empres-
sement avec lequelils ont répondu à son appel. En même
temps, M. de Caumont invite les Sociétés savantes de
Poitiers à envoyer des délégués à la session de l’Institut
des provincés qui doit s'ouvrir le 43 avril, à Paris, dans les
locaux qui lui sont prêtés par la Société d’encourage-
ment. L'Institut des provinces, dit M. de Caumont, a eu
en vue de créer un mouvement de flux et de reflux
intellectuel. Si l’Institut va chercher en province les
hommes d'étude, il faut aussi provoquer un mouvement
en sens inverse vers Paris. M. de Caumont insiste donc
pour que les Sociétés savantes de Poitiers se consultent
et désignent des délégués.
_ M. le Président des Assises se lève à son tour, remercie
l'assistance des sympathies qu’elle a bien voulu mani-
fester aux travaux du Congrès par son assiduité à suivre
ses séances, et proclame la clôture des Assises scienti-
fiques du Poitou.
Le Secrétaire-général,
Jules DE LA MARSONNIÈRE.
478 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
ASSISES SCIENTIFIQUES TENUES A AMIENS,
Les ? et 3 juillet 1857.
f
( Présidence de M. le comte De VicneraL, )
La quatrième session des Assises scientifiques de Pi-
cardie ,-dirigées par l’Institut.des provinces, s’est tenue à
Amiensles jeudiet vendredi 2et3 juillet 1857,à8 heures du
soir, sous la présidence de M. le comte de Vigneral, membre
de FInstitut, de l’Académie d'Amiens et de la Société des
Antiquaires de Picardie. De même qu’elle l’avait fait les
années précédentes, l’Administration municipale avait
gracieusement mis à la disposition de M. le Président, la
grande salle de l’Hôtel-de-Ville. Un nombreux concours
de personnes avait répondu à l’invitàtion qui leur avait
été adressée , au nom de l’Institut des provinces; et.leur
présence a prouvé une fois de plus combien, dans cette
cité, étaient justement appréciés les avantages qu'offrent,
dans l'intérêt de la science de semblables réunions dans
lesquelles, suivant une heureuse expression de M. de
Vigneral , chacun s'enrichit de ce qu’il reçoit, sans
s’appauvrir de ce qu’il donne.
Parmi l'auditoire qui a assisté aux séances, on remar-
quait : MM. Breuil, membre de l’Académie d'Amiens,
président de la-Société des Antiquaires de Picardie;
Garnier, conservateur de la Bibliothèque communale,
secrétaire perpétuel de la Société des Antiquaires ; de
Pouques d'Herbinghem, vice-président ; Barot, trésorier ;
Janvier, secrétaire annuel; Dutilleux, Salmon, Forceville,
Dusevel, inspecteur des monuments historiques du dé-
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 479
partement; Vion, Corblet, Billoré, secrétaire-général de
la Mairie d'Amiens, tous membres de la Société des
Antiquaires de Picardie; Eugène Yver, rédacteur en
chef de l’Ami de l’ordre, président de l’Académie
d'Amiens ; Anselin, conseiller de préfecture , secrétaire
perpétuel de l’Académie ; le docteur Andrieu , professeur
à l'Ecole préparatoire de Médecine; Descharmes, profes-
seur de physique au Lycée impérial; Édouard Gand,
dessinateur industriel; Bor, pharmacien, membres de
l’Académie d'Amiens; Joseph Ferrand, sous-préfet ,
secrétaire-général de la préfecture de la Somme; le
comte de Renneville, -agronome ; Thuillier, professeur
d'agriculture ; Despréaux, propriétaire; Dufetel, horti-
culteur ; les docteurs Goze et James, membres de Ja
Société médicale d'Amiens; l’abbé Lardé, de St.-Paul
d’Abbeville; Macque, chef de division à la Préfecture ;
E. Paris, vérificateur des poids et mesures; Scribe,
homme de lettres ; Feragu , artiste; etc.
SÉANCE DU 2 JUILLET.
M. le comte de Vigneral, après avoir appelé au bureau
les présidents et officiers des Sociétés savantes du dépar-
tement et les personnes les plus considérables qui se
trouvent dans la salle, déclare ouvertes les Assises scien-
tifiques de Picardie et prononce l’allocution suivante :
« MESSIEURS ,
« M. le marquis de Chennevières, inspecteur des
musées de province, avait été désigné par M. de Caumont,
pour présider les Assises scientifiques de Picardie , en
4856; mais les occupations imposées par des fonctions
480 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
que M. de Chennevières comprend avec le dévouement
qu’il puise dans l’amour de la science et la connaissance
parfaite des beaux-arts, ne lui ont pas permis de venir
se reposer quelques instants parmi vous.
« Bientôt le musée Napoléon, que vous élevez avec une
si prodigieuse munificence, sera terminé , et alors nous
pourrons , je l'espère, profiter du séjour de M. de Chen-
nevières au milieu de nous, pour tenir, sous sa prési-
dence , les assises scientifiques.
« Depuis notre dernière réunion, grâce à de bien-
veillantes initiatives , j’ai été honoré du titre de membre
titulaire non-résidant de la Société des Antiquaires de
Picardie , et d’associé correspondant de l'Académie des
Sciences et Arts du département de la Somme. Je saisis
avec empressement la commune présence des membres
des deux Sociétés, pour témoigner à mes nouveaux col-
lègues ma vive reconnaissance.
« Je ne pouvais obtenir une distinction plus flatteuse
pour moi, en même temps qu’elle est un témoignage de
l'intérêt que vous inspirent les réunions provoquées par la
direction de l’Institut des provinces. J'avais reçu la mis-
sion de faire connaître, accepter et aimer cette nouvelle
institution; en m’admettant dans vos Sociétés, vous
m'autorisez à penser que j'ai réussi, et je ne crois pas
avoir eu d’autres titres à vos suffrages.
« Depuis long-temps, on se plaignait de l'étendue des
programmes et de l'impossibilité de donner aux questions
difficiles le temps nécessaire pour qu’elles puissent être
convenablement élucidées. Le programme de cette année
est plus restreint et le temps nous manquerait encore
pour l’étudier suffisamment ; mais les personnes dont
l'active coopération a rendu les réunions précédentes
ASSISES SCIENTIFIQUES DE: PICARDIE. A
utiles et brillantes, ont bien voulu préparer à l'avance
des réponses aux principales questions,
«a Au reste, Messieurs, comme vous le savez déjà,
parmi les questions qui vous sont proposées, quelques-
unes ne peuvent pas être résolues immédiatement, elles
vous sont soumises pour obtenir votre opinion sur leur
importance, sur leur opportumité ; pour connaître quels
sont les travaux commencés ou ceux qu’elles peuvent
susciter, et surtout pour améner, faciliter même les
relations entre les hommes ” s’occupent des mêmes
sciences. -
« Cette pensée, bien comprise, agrandit notre horizon,
elle assure pour l’avenir-des études d'autant plus pré-
cieuses que la publicité de l’Institut sert tout à la fois
à établir des rapports utiles entre les hommes d’étude
et à faire connaître et ressortir des travaux qui, sou-
veni, auraient de la peine à être connus et appréciés.
«Je remercie, et j'en suis sûr, vous remercierez avec,
oi, M. Dutilleux d’avoir bien voulu, pendant deux
sessions, se charger de remplir les fonctions de secrétaire ;
la rédaction si lumineuse de ses procès-verbaux a été
récompensée par son entière et intacte reproduction
dans l'Annuaire de l'Institut des provinces ; nous regret-
tons que ses fonctions aujourd’hui ne lui permettent pas
un surcroît de travail,
« M. Janvier, qui consacre ses loisirs à des études dont
il a bien voulu nous faire connaître et aimer les fruits,
a accepté les fonctions de secrétaire ; commencez donc,
Messieurs , vos travaux : la plume de notre habile secré-
taire va recueillir vos pensées, elle adoucira, par les
formes gracieuses du style, les sévérités d’une discussion
sérieuse, »
21
[H82 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
De nombreux applaudissements accueillent ces pa-
roles de M. de Vigneral,
La première question inscrite en tête du programme
est celle-ci :
« Quels ont été, en 1856, les progrès de la géologie
« dans la circonscription ? »
M. le Président rappelle qu'aux précédentes sessions
des assises scientifiques , la réunion avait eu le bonheur
de compter dans son sein un des membres les plus dis-
tingués de la Société géologique de France, M. Buteux
de Fransart, auteur de l’Esquisse géologique sur le
département de la Somme. Peut-être reste-t-il peu de
chose à glaner après les lumineux développements donnés
par ce savant lors de la session de 1853; mais chaque
jour amène des vues nouvelles dans l’horizon des connais-
sances humaines et, depuis cetie époque, cette branche
de la science a pu s'enrichir de nouvelles découvertes.
M. de Renneville voudrait voir déterminer, d’une ma-
nière précise, la valeur qu’on doit assigner à l'expression
de circonscription. Ge terme désigne-t-il l'étendue du dé-
partement de la Somme, ou doit-il s’entendre d’un espace
plus considérable, comme de la Picardie tout entière ,
par exemple ? S'il pose cette question , c’est relativement
aux phosphates de chaux, si importants au point de vue
de l’agriculture. Des couches considérables de cette sub-
stance existent, dit-on, sur les côtes de Picardie, jus-
qu’à Boulogne.
Après les explications données par M. le Président , en
réponse à l'observation de M. de Renneville, et desquelles
il résulte que, par suite de la création récente des assises
scientifiques du Nord , on doit appliquer le terme de la
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. h83
circonscription au département de la Somme et à une
partie des départements limitrophes, de l’Aisne et de
l'Oise, M. Vion signale, à Bouquemaison, dans l’arrondis-
sement de Doullens, la reprise des fouilles autrefois
commencées dans cette localité pour reconnaitre les
gisements d’une mine de charbon de terre. A cette
occasion, il émet le vœu de voir les agents-voyers , lors
de l'exécution de travaux similaires, recueillir et trans-
mettre à l'Autorité des observations qui deviendraient
précieuses pour constater la nature des couches du sol.
Il rappelle, en passant, les découvertes de MM. Boucher-
de-Perthes et Rigollot, dans le diluvium de larrondis-
sement d’Abbeville et de St.-Acheul, découvertes qui
ont soulevé tant de discussions au sein du monde savant.
T1 annonce que M. Boucher-de-Perthes prépare, en ce
moment , une deuxième édition de son travail.
On passe à la question suivante :
« Quels ont été les progrès de la botanique, en
« 1856, dans la circonscription? »
M. Garnier, en réponse à cette question, a le regret de
porter à la connaissance de l'auditoire qu’on s’occupe fort
peu de botanique dans le département ; il y existait autre-
fois une Sociélé Linnéenne qui, depuis long-temps, est dis-
soute. Il a été fait dans cette science peu de progrès, et la
seule personne qui la cultive encore assez activement, at-
testait que, depuis la publication de la flore du département
par M. Pauquy, les découvertes nouvelles atteignaient un
chiffre fort restreint. En revanche, l’horticulture a beau-
coup gagné et l’on doit attribuer sa marche féconde à
l'heureuse. influence exercée par la Société d’horticulture
fondée, depuis une douzaine d'années, à Amiens. Cette
484 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
Société excite l’émulation des pépiniéristes et des jar-
diniers par des expositions périodiques qui ont puissam-
ment contribué à l'importation, dans le pays, des
meilleures espèces de fruits et de légumes, et développé
le goût pour les plus belles fleurs. Elle distribue gratui-
tement des greffes d’une bonne nature. Un cours théorique
et pratique de taille a lieu à l’école normale, 11 a été pro-
fessé d’abord par M. Thuillier-Alloux, un des pépiniéristes
distingués de la ville; il l’est aujourd’hui par M. Douchin,
élève de Lepère. Mais, pour que ce cours puisse produire
d'excellents effets, M. Garnier voudrait voir chaque
instituteur posséder auprès de l’école communale, con-
tigu même à ce bâtiment, s’il se pouvait, un terrain
convenable où il pourrait démontrer, d’une manière irré-
cusable, la supériorité de cette méthode, On tirerait ainsi,
pour l'instruction des campagnes , un parti avantageux
de l’enseignement qui leur a été donné à l’école normale.
M. d’Herbinghem signale, malgré les progrès obtenus,
l'état d’infériorité relative dans lequel se trouve placé
l’art de l’arboriculture dans le département , quand on le
compare à la Belgique et au département du Nord; il
indique le système de taille qui, pratiqué dans ces régions,
donne d'excellents résultats pour la croissance des arbres,
notamment de ceux qui avoisinent les bords de la mer.
M. de Renneville a expérimenté , avec succès, le mode
prescrit par M. d'Herbinghem.
M. Dufetelle donne lecture d’une note sur un charme
commun, Carpinus Betulus, situé dans une propriété, au
Caudas, près Doullens, Au point de vue de la botanique,
dit-il, cet arbre est très-remarquable, surtout si l’on
examine sa forme. C’est un vieux tétard plus que cente-
naire: son tronc penche vers le Nord, sur une inclinaison
Le
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 485
d'à peu près 45 degrés ; son corps est vide, c’est-à-dire
creux, et ouvert au tiers de sa circonférence, Sa végé-
tation est luxuriante, ce qui fait voir qu’à défaut du
canal médullaire un végétal ne meurt pas; il est démontré
par les physiologistes que l'ascension de la sève n’a point
lieu par la moëlle de l'arbre, mais bien par les couches
ligneuses les plus rapprochées du centre', sans pour cela
vouloir dire qu’en s’éloigant du centre vers la circonfé-
rence on ne trouve point de sève. Assurément, dans toutes
les parties d’une plante existe le suc nourricier, mais en
moindre quantité qu’au centre : on peut s’en convaincre
en examinant avec attention la cavité du charme dont
il s’agit, cavité formée par l'absence des couches internes ;
ta couleur livide du bois, résultat de l’exudation du liquide
nourricier, fait bien supposer que k plus forte quantité
de sève est toujours vers le centre. Sur la partie opposée
à la direction de l’inclinaison de cet arbre, ont été ména-
gées, à hauteur d'homme, quelques branches formant
ombrelle, sur le tétard même, qui n’a pas moins de 2
mètres de diamètre ; on a eu soin de laisser toutes les
branches de la circonférence en les dirigeant avec soin
pour former une salle de verdure d’une élévation de
2 mètres et pouvant facilement contenir douze personnes.
Du milieu du tétard part un axe perpendiculaire, terminé
également par une nouvelle salle de verdure d’une dimen-
sion moitié moindre que la première.
M. le Président remercie M. Dufetelle de son intéres-
sante communication, à propos de laquelle M. Goze rap-
pelle l'exemple des saules qui vivent peu d’années, il est
vrai, mais qui vivent bien qu'étant généralement vides ;
et de l’arbre d’Hébecourt, dans la cavité duquel a été
élevée une chapelle, M. Formeville cite aussi, à l’appui
186 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
de l'existence d’arbres sans moëlle, des ormes centenaires
qu’il possède dans ses propriétés, et des pommiers qui,
dans les mêmes conditions, ne se couvrent pas moins
d’une magnifique végétation et produisent une fort bonne
récolte.
On pose la 3°, question du programme, ainsi conçue :
« Quels ont été les progrès de l’agriculture dans la
« circonscription, en 1856? »
M. Salmon, pour répondre à cette question, regrette
que des occupations imprévues et indispensables ne lui
aient pas permis de retracer les progrès agricoles , sinon
dans toute la Picardie ou même dans le département de la
Somme, du moins dans l'arrondissement d'Amiens. Il est
malaisé de dire quels ont été tous les progrès agricoles
accomplis en un an dans un pays. En agriculture, on ne
marche pas aussi vite qu’en industrie, ce n’est pas en un
seul jour que se font les améliorations ; il est vrai qu’une
fois accomplies, elles y sont plus durables. Aussi, M. Sal-
mon croit-il devoir faire remonter le progrès de l’agri-
culture, en Picardie, à la dernière réunion des assises
scientifiques, c’est-à-dire à 4855. Il appelle l’attention
sur la culture des champs et l'élève du bétail dans
l'arrondissement d'Amiens.
Si, au XV°. siècle, on disait proverbialement :
Labours de Picard ,
Humilité de Normand ,
Patienche d’Allemand ,
Ces... coses... ne valent pas un bouchon.
il y a toutefois déjà long-temps que les Picards ont
appris à mieux conduire la charrue : leurs moissons
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. L87
actuelles en font foi. Maïs, sans s'arrêter à signaler leur
état général, M. Salmon s’empresse d'aborder les cultures
nouvellement introduites dans le département : celle de
la betterave sur une vaste échelle doit être citée tout
d’abord ; le département possédait déjà un certain nombre
de sucreries, mais toutes à peu près situées sur le même
point. Depuis 1855, de nouvelles sucreries se sont encore
établies , un assez grand nombre de distilleries de bette-
raves ont été montées, plusieurs notamment aux environs
du chef-lieu. Elles ont nécessité la plañtation d’une très-
grande quantité de betteraves qui ont généralement été
fort bonnes: encore quelques progrès, et bientôt la
Somme n'aura rien à envier au Nord sous le rapport de la
perfection de cette culture. La distillation de la carotte
a été tentée avec succès; celle du topinambour a donné
également un fort bon résultat. Les céréales partagent la
même prospérité : il est telle ferme de l'arrondissement
de Péronne qui obtient 1,600 gerbes de froment par hec-
are, et la première médaille accordée cette année , au
concours régional de Melun, pour les produits agricoles
du sol picard , est une preuve de la bonté de ses cultures.
M. Salmon cite, en passant , l'introduction du sorgho
dont on n’a pas encore obtenu assez de résultats pour pou-
voir asseoir un jugement à cet égard. 11 en est de même,
à son avis, de l'extraction de l’opium d’œillette qui réussit
en petit, mais qui a besoin d’être expérimentée sur une
plus grande échelle, pour être définitivement classée parmi
les produits qu’on peut obtenir de la grande culture.
L'opération du drainage a été tenté pour la première
fois, en 1855, à St.-Fuscien , près Amiens, et couronné
d’un entier succès. Depuis, d’autres travaux de ce genre
ont été exécutés sur différents autres points; mais il
188 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
reste encore bien des terres susceptibles d’être drainées,
et, sous ce rapport, le AR est loin d’être aussi
avancé que celui de l'Oise.
De la perfection des instruments doit résulter la per-
fection de la culture. De grands progrès ont été réalisés
de ce côté. Déjà, depuis plus de vingt ans, la vieille
charrue avait été supplantée par la charrue Wasse, in-
ventée en 1836. Elle a trouvé, à son tour, des concur-
rents redoutables dans le brabant double et dans la
charrue anglaise d'Howard , qui menacent de la reléguer
au second rang des bonnes charrues. Une commission ,
déléguée par le Préfet pour visiter l'Exposition universelle
au profit des intérêts du département, y a fait l’acqui-
sition d’une charrue Howard. Essayée , l’année suivante,
au concours du Comice d'Amiens, sa supériorité fut
- tellement visible , qu’elle est maintenant employée dans
des cultures de l'arrondissement; dans l’arrondissement
d’Abbeville , des moissonneuses système Mac-Cormict
ont été introduites avec succès ; mais on a essayé, au
concours d'Amiens, sans résultat bien satisfaisant, les
machines à faucher de William Dray. Dans cette même
réunion , des prix et des mentions honorables ont été
accordés à des semoirs exposés par des constructeurs
du département de la Somme ; et nous pourrions, à la
rigueur, dit M, Salmon , nous passer maintenant de nos
voisins el avoir cependant, dans notre pays, la plupart
des instruments que nécessite une culture perfectionnée.
Le bétail du département, surtout dans l’arrondis-
sement d'Amiens, est loin d’être satisfaisant. Quelles races
amélioratrices doivent être préférées ? Pour Fespèce bo-
vine, les uns préconisent le Durham, l’Ayr; d’autres le
hollandais. Pour l'espèce bovine, le Dishley jouit d’une
: ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE: 489
grande faveur auprès de certains éleveurs; d’autres
aiment mieux le South-Down. Quant à lespèce porcine,
les races anglaises , notamment le Leicester et le Hamps-
hire, n’ont plus que des partisans et des admirateurs. Il
est aussi des agriculteurs qui élèvent des races indigènes
et déclarent s’en bien trouver. Sans rechercher ceux qui
ont tort et ceux qui ont raison, M. Salmon montre le
Comice agricole d'Amiens favorisant, depuis une dizaine
d'années, pour l'importation de l’espèce bovine, des
reproducteurs hollandais ; celui de Péronne ne prime que
des animaux de race flamande ou de race du pays, pure
ou croisée avec le flamand ; celui d’Abbeville introduit
aussi dans son arrondissement la race flamande. pour
améliorer celle du pays. Les particuliers, de leur côté,
ne restent pas en retard. Dans l'arrondissement de
Montdidier, il a été vendu depuis un an plusieurs cen-
taines de jeunes animaux hollandais, Cette race commence
à s’y répandre surtout dans le canton d’Aïlly-sur -Noye.
D'autres propriétaires emploient avec grand succès la
race de Durham ; M. Cannet, propriétaire de la ferme du
Paraclet, aux environs d'Amiens, à commencé, il ya
deux ans , à introduire dans ses étables, le type écossais
d'Air; il se déclare jusqu’à présent satisfait des résultats,
mais son expérimentation n’a pas encore été suivie pen-
dant un temps assez long pour être complètement décisive.
En 1856, un prix a été obtenu pour la première fois
au concours régional d'animaux de boucherie, à Lille,
_ Concours qui rivalise parfois avec celui de Poissy, pour
une vache flamande appartenant à M. Douville de Fran-
sec. Plusieurs récompenses, pour animaux appartenant
aux espèces bovine et ovine, ont encore été décernées
à d’autres éleveurs du département dans le concours
490 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
régional de Valenciennes et dans les concours universels
de Paris. Enfin, l’orateur se plaît à rappeler les nombreux
et magnifiques succès conquis, celte année, au concours
régional de Melun, par l'honorable Président des Assises
scientifiques qui, en face des habiles cultivateurs de la
Bauce et de la Brie a tenu à honneur de soutenir dignement
la réputation agricole naissante de la vieille Picardie.
Les soins qu’on. apporte maintenant à l’enseignement
agricole contribueront beaucoup , et ont déjà beaucoup
contribué à l’amélioration de l’agriculture dans nos
contrées. Une école normale d'agriculture, la première
qui ait encore porté ce nom, a été fondée en 1855, dans
une ville Picarde, à Beauvais. Le département possède
depuis plusieurs années une chaire d'agriculture, occupée
par un homme aussi modeste que savant , dont les ensei-
gnements ont fait un bien immense. L'école normale du
département de la Somme a un cours d'agriculture
théorique et pratique , des instituteurs communaux
donnent aussi avec succès des leçons d'agriculture à leurs
élèves ; il y a quelques jours à peine, le Comice de Mont-
didier récompensait publiquement, dans son concours ,
l'instituteur qui s'était le plus signalé dans ce genre d’in-
struction, et ceux des disciples qui avaient le mieux
profité des leçons agricoles de leurs maîtres.
M. Vion fait observer que ce n’est point seulement à
Montdidier que des encouragements sont accordés aux
instituteurs : depuis dix à douze ans environ, le Comice
agricole de Doullens leur décerne des primes.
M. Thuilliez ajoute que M. le Président du Comice
d'Amiens est entré dans cette voie, Cette année encore,
un prix sera décerné à un instituteur.
Pour compléter l’intéressante communication de M.
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE, 491
Salmon, sur les progrès agricoles de la circonscription ,
M. Thuilliez entre dans quelques détails sur les opérations
de drainage. Il cite celles exécutées à St.-Fuscien par
M. Salmon lui-même, et qui ont été couronnées des plus
éclatants succès: ses résultats ont été tellement favo-
rables que des haricots, qui demandent un sol aride,
poussent maintenant sur un terrain qui auparavant ne
portait que des joncs maigres. De son côté, l’administra-
tion préfectorale a, à plusieurs reprises, appelé l'attention
de MM. les Sous-Préfets, Maires, Ingénieurs, Présidents
de Comices, Membres des Chambres consultatives d’agri-
culture, Agents-Voyers Propriétaires et Cultivateurs du
département , sur les avantages de l’assèchement des
terres par le drainage, En vue de populariser dans les
campagnes ce nouveau système, elle a employé divers
crédits, mis à sa disposition, par le Ministre de l’agri-
culture et du commerce et par le Conseil général, pour
créer dans chaque arrondissement, sur des propriétés
communales convenablement choisies, un type complet
des travaux à exécuter. Cette opération qui, sans aucun
doute, aura une influence décisive sur l'esprit des cultiva-
teurs, par suite des résultats avantageux qu’elle ne pourra
manquer de produire , se poursuit, en ce moment, sur
d'assez grandes étendues de terrains humides et froids ,
notamment à Bus, arrondissement de Montdidier, sur un
terrain communal d’une superficie de 1 hectare 68 ares; à
Brouchy, arrondissement de Péronne, sur unesuperficie de
6 hectares ; à Milly-les-Doullens, dans la vallée de Grouches
sur 2 à 3 hectares. Là, les terrains drainés viennent d’être
loués par la commune elle-même, à raison de 480 fr.
l'hectare, tandis que des terres non drainées, dans la
même situation, ne produisent que 90 fr. seulement, Ces
49% . INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
faits parlent assez haut. En ce moment, à Airaines , on
pratique le drainage sur environ 4 hectare et demi de
terrain, et M. le Préfet vient récemment de donner des
instructions aux ingénieurs, pour l’étude d’un projet de
dessèchement, par le drainage, de la vallée de la Cologne,
arrondissement de Péronne ; opération qui doit se faire
au moyen d’une association ou sorte de syndicat entre les
propriétaires intéressés.
Les drains sont généralement, dans le département,
posés en suivant les pentes. M. de Vigneral vante le
système du drainage par perforation , système qui a si
bien réussi à l'Irlande et a transformé ce malheureux
pays en une riche province ; il désirerait voir ce pro-
cédé appliqué au département de la Somme.
M. Salmon fait connaître qu’un agriculteur l’a employé,
mais que l’on ignore le succès de son expérimentation.
M. Vion appelle lattention sur les tourbières qui
occupent une si grande partie du sol de notre dépar-
tement, et absorbent ainsi des espaces considérables de
superficie; ne serait-il pas possible, à la fin de lex-
ploitation, d'arriver au dessèchement de ces tourbières ?
M. de Vigneral pense que ce serait alors le cas d’es-
sayer le drainage par perforation , puisque les marais
tourbeux sont exploités généralement jusqu’à une pro-
fondeur de 18 pieds.
M. de Renneville ajoute à ces comm iinleation l'exemple
de M. d'Herlincourt qui, propriétaire d’un marais assis
en contre-bas d’un cours d’eau, et continuellement inondé
par suite de ce voisinage a, dans l’espace de moins de
trois mois, desséché complètement sa propriété, en fai-
sant, par le moyen du drainage , infiltrer les eaux dans
les terrains crayeux qui l'avoisinaient.
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 493
M. Thuilliez signale encore une amélioration capitale,
produite par des changements de terrains destinés à
transformer la nature primitive du sol. A Yzeux, des prés
recouverts d’une terre différente, ont produit des cé-
réales. Cet exemple a été suivi par plusieurs particuliers,
et le sol, parfaitement modifié, a donné d'excellents
résultats, |
La discussion amène la 15°. question du programme :
« Quels progrès la machinerie agricole a-t-elle faits
« dans la circonscription en 1856 ? »
Aux renseignements déjà fournis par M. Salmon )
M. de Vigneral ajoute l'introduction, dans l'arrondissement
de Montdidier, de la moissonneuse Mac-Cormick.
M. Thuilliez constate à son tour, par des chiffres élo-
quents , l’accroissement rapide qu’a subi la mécanique
rurale. il y à dix ans, la culture du département comptait à
peine 70 à 80 machines à battre, leur nombre aujourd’hui
est de près de 200; parmi elles doit figurer dimanche,
au concours d'Amiens, la machine de Varloy-Delos, de
Lille , introduite par M. de Gillès , et qui bat jusqu’à 46
hectolitres par jour. Cette machine est du prix de 250 fr.
On donne lecture de la 6°. question ainsi conçue :
« Quels ont été, en 1856, les progrès pour la che et
« les sciences physiques ? »
M. de Renneville indique l’extraction de l’acool des
tiges du topinambour et l'extraction de l’opium indigène.
M. Decharmes regrette que M. Salmon n'ait pas cru
devoir accorder une mention plus favorable à la culture
de l’opium indigène. Des expériences convaincantes ont
été faites par M, Bénard, c’est aujourd’hui aux cultivateurs
94 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
à les faire sur une plus grande échelle; mais il ne faut pas
se dissimuler que , si les opérations de l’extraction ne
semblent pas encore réussir, c’est que ces opérations
fort délicates ont été généralement mal conduites, et .
qu’elles demandent un apprentissage. Il n’en est pas moins
vrai que cette culture est appelée à donner d’excellents
résultats, puisque M. Renard de Puchevillers y a obtenu
un bénéfice de cent pour cent, A cette occasion, M. De-
charmes rappelle les propriétés de l’opium indigène qui
contient le double, le triple et même le quadruple de mor-
phine de l’opium exotique. Des essais ont été faits pour
connaître la qualité de cette morphine, si, jusqu’à présent :
l'on n’est point encore arrivé à préciser exactement le
degré exact de richesse de cette substance, il a toujours
été constaté qu’elle produisait les mêmes effets que
l’opium étranger.
Suivant M. de Renneville , la plus grande difficulté qui
s’opposera à l'extension de la culture de l’opium indigène,
c’est que l’époque de sa récolte vient coïncider avec elle
des céréales , et qu’on trouvera difficilement des moyens
de la recueillir, tous les bras étant alors occupés à la
moisson. |
M. Thuilliez annonce que M. Renard de Puchevillers
est dans l'intention formelle de continuer , cette année
encore , des expériences de cette culture.
MM. Decharmes et Gand entretiennent la réunion
des observations météorologiques qui ont eu lieu à
Amiens , sous la direction d’une commission prise dans
le sein de l’Académie. Depuis quelques mois, elles ont
été complètement abandonnées ; l’assujettissement qui
en résultait pour les personnes qui avaient bien voulu se
charger de recueillir ces observations et peut-être le peu
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 1495
d'importance attachée à leurs résultats par l'Observatoire
de Paris, auquel elles étaient transmises (sans doute à
cause des différences peu sensibles quelles présentaient,
avec celles faites dans cet établissement ), paraissent être
les causes principales qui ont contribué à leur cessation.
La sixième question était ainsi conçue :
« Quels sont les moyens les plus efficaces pour au-
« gmenter en agriculture le capital intellectuel. A-t-on
« employé jusqu'ici tous les moyens qui peuvent produire
« cet accroissement si désirable ? » |
Suivant M. de Renneville, il n’est qu’un seul moyen,
c’est celui de l'instruction dans les écoles. M. Vion signale
l'excellence des cours d'agriculture professé par M. Thuil-
liez, comme propageant les meilleures doctrines. Il saisit
cette occasion pour reproduire les arguments qu’il a déjà
fait valoir dans la précédénte session sur Putilité des
cours publics préparatoires à l’enseignement des Facultés,
Le grand défaut qui nuit au développement et à la fré-
quentation des cours communaux actuellement existantes
est principalement leur éloignement du centre de la
ville et les heures fâcheuses auxquelles ils se tiennent.
Tel qui voudrait suivre les enseignements de plusieurs
professeurs s’en trouverait empêché par la coïncidence
de leurs leçons , la coordination des heures de ces leçons
serait surtout la principale réforme à désirer.
L'Assemblée approuve ces considérations et M. le Pré-
sident annonce qn’un extrait du procès-verbal sera remis
entre les mains de M. le Maire d'Amiens, qui se montrera
certainement heureux de pouvoir donner une solution
favorable aux vœux légitimes que vient de faire entendre
M, Vion. |
96 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
On donne lecture de la 7°. question :
« Quels sont, dans la circonscription, les établisse-
« ments agricoles dans lesquels on a expérimenté les
« engrais liquides ? »
M. Thuilliez fait connaître les études auxquelles M. de
Gillès se livre, dans sa propriété du Saulchoy, sur un
engrais de M. Salles de la Magdelaine, mais il ignore
encore si ces essais ont produit de bons résultats,
M. Salles n’ayant jamais voulu , au surplus , donner com-
munication de ses procédés. Quant à M. Salmon, il n’a
obtenu aucun succès de l'emploi des blés préparés par ce
mode de pralinage.
MM. Dutilleux, Thuilliez, de Vigneral , de ter
Despréaux , prennent successivement la parole sur les
8°, 9°. et 40°. questions, qui ont pour but de recher-
cher quels sont les moyens pratiques d’obvier à la
déperdition des matières fécales et des purins; sil
n’y aurail pas lieu d’établir une amende municipale
dont seraient passibles tous ceux qui laisseraient s’écouler
sur la voie publique comme cela a lieu , en temps de pluie,
dans toutes nos campagnes, et quel parti l’on pourrait
tirer d’une foule d’immondices qui se perdent dans les
égouts pour aller ensuite salir , infecter et encombrer les
cours des rivières dans leur trajet au centre des villes. I
résulte, des diverses communications faites, par ces cinq
membres, qu’il existe des dispositions législatives qui
permettent de réprimer la négligence coupable de la
plupart des campagnes. En effet, en vertu de l’art. 3
du titre XI de la loi des 16 et 24 août 1790, les maires
peuvent prendre arrêté, portant défense de laisser
s’écouler les purins sur la voie publique. Il y a deux ans,
l'Administration a invité les officiers municipaux à user
ASSISES SCIENTIFIQUES DE. PICARDIE. 1497
du droit que leur accorde cette loi; des arrêtés ont dû
être pris, sont-ils scrupuleusement exécutés ? Mais
mieux que les mesures de police, intérêt du campagnard
amènera les résultats que l’on désire : lorsqu'il aura été
instruit de l’utilité des purins, loin de les laisser perdre,
il les recueillera avec soin. Il y aurait donc lieu de l’édi-
fier sur les avantages qu’il en peut retirer avant que de
recourir à des voies coërcitives.
M. Thuilliez indique une mesure qui a produit, à cet
égard, de bons effets : c’est la récompense accordée par
le Comice agricole d'Amiens à ceux des cultivateurs qui
mettent des gouttières à leur toit pour empêcher, durant
les grandes pluies, les eaux d’inonder leurs cours, et
d'entraîner à leur suite les détritus qui viennent ensuite
salir la voie publique.
Au point de vue de la salubrité, M. Thuilliez recom-
mande l’emploi du plâtre : 1,000 kilog. de plâtre suffisent,
en effet, pour saturer les vapeurs ammoniacales de
100 mètres cubes de fumier; ce procédé est peu coûteux,
puisqu'il n'exige qu’une dépense dé 18 fr. On obtient
encore des résultats plus efficaces en usant du sulfate de
fer. :
On passe à la 12°, question du programme :
« Quels emprunts l’architecture rurale a-t-elle faits,
« en 1856, à l'architecture des chemins de fer pour la
« construction des hangars; quels emprunts peut-elle
« faire encore utilement? » is
M. Thuilliez, en réponse à cette question, indique des
constructions élevées par un cultivateur de Cavillon et la
ferme que vient de faire édifier M. de Chépilly, comme
présentant quelques caractères d'imitation de ce genre
d'architecture.
198 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
M. le Président appelle l'attention de l’auditoire sur les
trois propositions suivantes :
« L'histoire dé l’agriculture au moyen-âge n'est-elle
« pas une des études auxquelles doivent se livrer les So-
« ciétés savantes de la circonscription ?
« Quelles sont les recherches déjà faites ; quelle direc-
« tion ultérieure doit-on donner à ce genre d’étude ?
« Les Sociétés d’agriculture de la circonscription ne
« doivent-elles pas recueillir toutes les traditions relatives
« aux anciens procédés de culture; les pratiques qui vont
« cesser; les meubles qui vont disparaître ne méritent-ils
« pas qu’on en conserve le souvenir ? Ne sont-ce pas là des
« éléments précieux pour l’histoire de l’agriculture ? »
MM. Dutilleux, Thuilliez, Dusevel et Corblet, prennent
la parole sur ces questions. L'histoire de l’agriculture est,
sans contredit , une étude des plus curieuses, mais elle
n’a point encore été faite : il existe cependant certains
travaux particuliers, concernant quelques-unes de ses
parties. Pour n’en citer que quelques-unes, M. l'abbé
Cochet a traité l’histoire de la vigne en Normandie;
M. Dusevel a traité le même sujet pour la Picardie, dans
les bulletins du Comice ; la Commission des usages lo-
caux, instituée par le Gouvernement, a, dans le départe-
ment de la Somme, terminé son travail qui pourra
bientôt être livré à l’impression : sept ou huit usages
seulement présentent le caractère de l’universalité. C’est
donc là un champencore vierge à défricher pour les Sociétés
savantes. On pourrait trouver de précieux documents
pour l'écrire. Ces documents, M. Dusevel les rencontre
dans les anciens baux, et les anciens contrats conservés
dans les études des notaires. M. Corblet en trouve
d’autres, non moins intéressants, dans les règles de plu-
L
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 499
sieurs saints, notamment dans celle de saint Bénoît ; elles
renferment des détails curieux sur l’agriculture monas-
tique qui est la mère de l’agriculture de la France et a
réhabilité et sauvé cette science-mère , abandonnée,
depuis la conquête des barbares, aux mains de colons et
de serfs avilis.
La séance est levée à 10 heures et demie.
SÉANCE DU 3 JUILLET.
A l'ouverture de la séance, M. le Président accorde la
parole à M. Gand qui la demande. :
M. Gand fait l’analyse d’une méthode de classification
ou notation caractéristique des tissus, proposée par
M. Alcan, professeur de tissage au Conservatoire des
arts et métiers de Paris.
Jusqu'à ce jour , personne n’avait eu l’idée de réunir,
en un petit nombre de formules simples et faciles à
retenir, les énoncés de divers éléments qui entrent dans
la composition des étolfes, et cependant elle était
de la plus haute importance. En effet, chaque centre de
fabrique non-seulement s’est créé un vocabulaire parti-
culier et arbitraire pour définir ses procédés de fabrication,
mais encore chaque fabricant a donné un nom de fantaisie
à toute étoffe, nouvelle ou simplement modifiée; il en
résulte, tout à la fois, une confusion regrettable dans les
termes employés par les fabricants et les artistes de
localités différentes, et une incertitude continuelle, pour
ne pas dire une ignorance complète, sur la nature d’étoffes
dont les noms bizarres, empruntés à l'arbitraire du
caprice, n’ont aucune signification technique.
En conséquence, il arrive fort souvent que deux indus-
500 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
triels, n’habitant pas la même ville, ont toutes les peines
du monde à se comprendre lorsqu'ils veulent se commu-
niquer mutuellement la série d'opérations à laquelle ils
ont recours pour la composition d’un tissu donné. Ou bien
qu’un fabricant ne reçoive de l'acheteur qu’une déno-
mination n’indiquant pas le moins du monde Ja combi-
naison de l’étoffe, ni l'espèce de matières employées
suivant tels ou téls croisements, ce fabricant , dit-il , se
trouve tout d’abord dans l'impossibilité de mettre en
œuvre l’article demandé.
M. Gand prouve que la méthode de M. Alcan remédie
à ces inconvénients ; il entre dans plusieurs détails sur le
mécanisme des formules inventées par le savant profes-
seur et il applique ces formules aux principaux articles
fabriqués à Amiens et dans le département de la Somme,
tels que velours de coton, velours d’Utrecht, alépines,
satins américains, barpoors, mousselines festonnées ,
gilets-cachemire , cache-nez , tapis , châles, etc.
Quand toutes les villes manufacturières de France
auront adopté le système de classification ou notation
caractéristique de M. Alcan, les relations seront comme
il vient d’être dit, singulièrement simplifiées. Le pra-
ticien saisira mieux la variété de faits qui constitue
l’industrie des étoffes ; l'artiste pourra, sans difficulté, se
pénétrer des conditions d’exécution de son œuvre ; le
savant enfin, comme le dit fort bien M. Alcan, aura
pour point de départ une série de principes justes et
neitement définis. |
M. le Président remercie M. Gand de lintéressante
communication qu'il vient de faire. Jusqu'à présent, les
industriels avaient cru devoir se tenir éloignés des assises
scientifiques : dans une cité aussi commerçante que la
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 504
ville d'Amiens, une telle abstention était regrettable.
Comme l’agriculture, les sciences ou les arts, l’industrie
doit avoir sa place marquée sur les programmes de
l’Institut des provinces, et la lecture de la note de
M. Gand est d’un favorable augure pour la réalisation
de ce désir ; elle fait naître l'espérance que les prochaines
assises verront l’industrie locale prendre une part plus
active à leurs travaux.
L'ordre du jour appelle la discussion de la 13°. question:
« Quels ont été en 1856, les tendances économiques
« dans la circonscription ? Y a-t-il eu progrès dans la
« moralité des entreprises et la bonne foi des tran-
« saclions ? » |
MM, d’Herbinghem, Asselin et Despréaux, prennent la ‘
parole successivement. IL est difficile de répondre d’une
manière excessivement précise sur ce sujet. Il résulte
toutefois, des détails qu’ils fournissent , que si le rôle des
décisions judiciaires doit être regardé comme le ther-
momètre exact de la bonne foi des transactions civiles ou
commerciales , les tribunaux n’ont pas eu à s'occuper
d’un nombre d’affaires supérieur à celui des années
précédentes.
L’on passe ensuite à la question suivante :
« Quelles sont les études encore à faire pour préciser
« mieux qu’on ne l’a fait jusqu'ici les principes de classi-
« fication chronologique des sépultures et des tom-
« beaux ? »
Dans une brillante improvisation où la pureté et
l'élégance du style le disputent à la solidité du raison-
nement, M. l'abbé Corblet retrace les caractères généraux
qui permettent d’assigner aux sépultures leurs dates et
502 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
leurs origines, Au dernier siècle, les études sur cette
branche de l'archéologie , si l’on en excepte les travaux
de Lebœuf, de Legrand d’Aussy, de Chifflet, l’auteur de
l'Anastasis Childerici, étaient plus spécialement portées
vers les antiquités romaines que vers les antiquités
nationales. C’est en ce siècle qu’on a surtout cherché à
établir les principes de la classification des tombeaux :
de grandes recherches ont été faites principalement par
M. l'abbé Cochet , qui le premier a posé les règles les plus
exactes pour déterminer cette classification. M. Arthur
Mercier a tracé l’histoire de la sépulture chrétienne en
France , d’après les monuments du XI°. au XVI:.
siècle ; enfin, il faut signaler les travaux particuliers de
MM. Danjou, Mathon et Rigollot. La science a-t-elle dit
son dernier mot? M. l’abbé Corblet ne le croit pas. Des
jalons ont été posés, la route a été éclairée, mais peut-
être reste-t-il encore à apprendre : demeure-t-il encore
bien des doutes à éclaircir.
La première époque des sépultures est l’époque cel-
tique. M. de Caumont a présenté, en 1832, la classifi-
cation de ces sépultures. On reconnaissait alors trois
périodes distinctes dans l’époque celtique : l’inhumation,
l’incinération des cadavres, puis le retour à l’inhumation.
Lorsque la dominalion romaine eut conquis la Gaule ,
elle dut imposer avec ses lois ses usages religieux, et la
crémation remplaça alors l’ensevelissement du corps ;
plus tard, quand les Francs eurent à leur tour expulsé
les vainqueurs , ils imposèrent également leurs coutumes
particulières, et l’on revint à l’ensevelissement, Le chris-
tianisme aida vraisemblablement beaucoup à ce retour ,
et peut-être faut-il reconnaître son influence pour faire
admettre celte coutume antérieurement même à l'invasion
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 503
franque. M. Corblet se demande si l’incinération chez les
Celtes avait lieu partout, on n’en trouve pas trace dans
certaines parties de la Bretagne qui surent échapper à la
domination romaine.
M. Corblet entre ensuite dans l'examen des éléments
qui permettent d’assigner aux sépultures l’âge auquel
elles appartiennent. Les vases qui les entourent d’or-
dinaire constituent un argument d’un grand poids. Il est
facile de distinguer les poteries gauloises des poteries
romaines. On rencontre aussi dans les médailles qui les
accompagnent des lumières sur ce sujet.
Dans les sépultures gallo-romaines les cendres du
défunt sont renfermées dans une urne de plomb, de verre
ou de terre de Samos ; on trouve à côté divers instruments
comme des épingles, des fibules, des styles, des bracelets,
des médailles, et surtout les vases qui servaient à contenir
les provisions que l’on y déposait pour les besoins du
voyage qu'entreprenait le mort, et l’obole sans laquelle le
nautonnier de l’Achéron eût refusé au défunt le passage
du sombre bord.
Dans les tombeaux francs, le fr est renfermé dans
un cercueil, couché sur le dos, quelquefois assis.
M. Corblet n’a point expliqué quels pouvaient être les
motifs de cette position. La tête est placée à l'Orient ;
à partir du VILI*. siècle , les chrétiens la placèrent vers
l'Occident pour qu’au jour du jugement dernier les
défunts en sortant du sépulcre puissent apercevoir le
visage du juge suprême, Les tombes franques renferment
encore les armes du guerrier, l'épée, le sabre ou scrama-
raxe, les boucles ou agrafes à plaques du ceinturon , qui
servait à les suspendre au côté des vases grossiers en
terre noire , affectant presque tous la même forme, Enfin
504 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE.
sous les Mérovingiens , apparaissent quelques signes,
emblèmes du christianisme, tels que la croix, les poissons,
symboles du Christ ; les lions.
Les cimetières mérovingiens sont à étudier. Ils ne l'ont
été par l’abbé Cochet que dans là Normandie, et surtout
dans la vallée de l’Eaulne. Faut-il appliquer les caractères
découverts par ce savant archéologue à la race franque
tout entière ou seulement aux Francs, habitant la Nor-
mandie ?
En indiquant les différences qui existent entre les sé
pultures gallo-romaines des trois premiers siècles , et les
sépultures franques des temps mérovingiens , on trouve
naturellement la manière de les distinguer les unes des
autres. Mais il se présente cependant, au IV*, et au
Ve. siècles de notre ère, une époque de transition où la
société est en proie à un travail de dissolution et de
renovation : le Romain vit en présence du barbare qui
bientôt l’expulsera définitivement du sol. Le christia-
nisme ébranle déjà les vieilles superstitions païennes, Les
sépultures de cette époque de transition présentent donc
un caractère de fusion, de mélange entre les traditions
et les usages des deux races. Dans ces tombeaux , on
trouve quelquefois, à côté du corps, les vases servant ,
contenant le miel et le vin : que déduire de ces éléments
contradictoires? Est-ce là une sépulture païenne ou celle
d’un chrétien? Il ne faudrait pas cependant assigner trop
exactement à ces derniers signes une idée de pagna-
nisme. On conserve encore les habitudes des ancêtres,
et bien des usages se pratiquent, encore que la croyance
qu’on y attachait aft disparu depuis long-temps. L’inci-
nération a été pratiquée aussi plus tard dans les villages
que dans les villes , car le christianisme a pris d’abord
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE, 505
racine dans les centres populeux, avant de pénétrer au
sein des campagnes. Une remarque assez bonne à con-
stater pour les tombeaux du IV°. au V*. siècle, c'est que
les cercueils présentent la forme d’un rectangle régulier,
tandis que, postérieurement, ils offrent un rectangle
retiré vers les pieds, |
On n’a pas toujours mis dans les tombeaux , fait ohb-
server M. l’abbé Corblet, la médaille de l’empereur
qui régnait au moment de la mort du défunt. On.a,,
en effet, rencontré, dans des sépultures du X°, siècle,
des médailles du Haut-Empire. GUESO
Les inscriptions , les sépultures , les vases contenant
l’encens et l’eau bénite , indiquent assez l’époque des
tombes chrétiennes du moyen-âge , et M. l'abbé Corblet
a classé ces dernières poteries; mais cette classification
présente des nuances fort délicates.
Résumant en quelques mots les intéressants détails
dans lesquels il vient d'entrer, M. Corblet pense qu’il y
a lieu de diriger les recherches dans le but d'arriver à
connaître, d’une manière positive, si l’inhumation a
persévéré plus ou moins long-temps dans certains pays
qui surent échapper à la conquête romaine ; et quelle a
été la part respective de l'influence chrétienne et de
l'influence franque. La comparaison de tous les objets
trouvés dans les tombeaux barbares de tous pays jette-
rait une vive lumière sur l’époque mérovingienne.
Pour le moyen-âge, enfin, les recherches ne devraient pas
se borner à comprendre la chronologie complète des
dates des tombeaux, mais embrasser encore l'histoire
du deuil, la liturgie des morts, les coutumes, les
usages et les superstitions funèbres de chaque contrée.
M. Dusevel, tout en appréciant l'importance de la com-
22
506 INSTITUT DES PROVINCES DÉ FRANCE.
munication faite par M. l’abbé Corblet, présente cette
observation qu’il ne faudrait pas, pour les tombeaux du
moyen-âge, s'en rapporter scrupuléusement à la lettre aux
inscriptions qu’ils portent. Quelquefois, à cette époque ,
l’on faisait faire sa sépulture de son vivant, |
M. Goze rapporte qu’il y a environ quinze ans, chargé
dé faire, pour le Comité historique des arts et monüments
près le Ministère de l’Instruction publique, la statistique
du canton de Picquignÿ ; M. Jourdain dé Prouvillé, pro-
priétaire du’ château de l'Etoile , commune qui renferme
un camp romain assez bien conservé, lui fit voir des objets
antiques trouvés dans.un champ de sépultures, situé sur
une hauteur; dans la vallée de la Nièvre, entre l'Etoile et
Flixécourt, vis-à-vis l’ancienne abbaye de Morreaucourt.
On y découvrit des armes en fer, trois tombes en pierre
à couvercles cintrés, diminuant de la tête aux pieds et
qui étaient tournées au Levant; à chaque extrémité des
squelettes étaient cinq têtes renversées, disposées symé-
triquement. La tête dé chaque squelette reposait sur trois
pierres; autour étaient des vases en: verre ou en poterie
noire rayés. Dans lintérieur de ces vases on: avait ren-
contré des charbons et des ossements de ‘petits animaux.
On trouva aussi une hache en silex, des bijoux en or,
un anneau, une espèce d’aigle enrichi de grenats pouvant
servir d’agrafe à un manteaw, une rosace # huit pointes
décorée d’entrelacs et de: pierres opaques rouges et
bleues, placée à la hauteur du bras d’un des squelettes ;
elle faisait sans doute partie d'un bracelets des débris
de colliers formés de globes à striés coloriées. Ces tombes
étaient énivironnées düné enceinte de silex superposés
sans rnortier. Dans les environs il en existait d’autres ,
qui, à cetté époque, n'avaient point encore été’explorées.
ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 507
La discussion amène la question suivante :
“4 Quelles sont les dates absolues et incontestables dés
« “édifices religieux des XII. ét XIII, siècles, que l’on
« % pu étudier dans la circonscription ; indiquer le plus
« “exactement et, autant que possible, par des dessins
« Pétat d'avañcement dé ces monuments?
M. Düsevel répond qu'il n'existe dans -la circonscrip:
tion dû département de la Somme, qué trois ou quatré
églises , au plus, ayant des dates exactes, M. Tabbé
Corblet cite l'église de St-Germer de Flaix, près
Beauvais, de style romano-ogival qui appartient HHohé
testablement ‘au XII°. siècle, c’est dans la Picardie et
l‘le-de-France, que l'ogive apparaît pour la première
fois. Rien d’ailleurs , dans les antiales de cette Re
n md une reconstruction pee
Ta 46°. question est ainsi Conçue ; |
“'« Commént réparait-on les chemins ; at Mrgiie îge ;
« dans la circonscription ju eee
Les seigneurs, dit M, Dusevel , étaient chargés de cet
entretien. Les routes se réparaient, où par corvée, ou au
moyen d'hommes que payaient les seigneurs.
M. ‘Janvier ‘ignore quels procédés matériels étaient
pratiqués pour le bon état des voies de communication,
à cette époque , mais il emprunte à excellente publica-
tion des Coulumes locales du bailliage LAiens ; par
M. Bouthors , quelques exemples dés ressotréés fat.
cières employées à cetté déstination. Ainsi, À Vys-sür-
Authie, ‘les voyageurs non privilégiés devaient un droit
de de Cauchie de quatre deniers parisis par char, de déux
deniers p par charrètte, et d’un denier par üne où plusieurs
têtes de bétail. Cette perception étit Te ‘aux
508 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE,
dépenses de voirie; dans la prévoté de Bauquesne, à
Souverain-Bruin et à Riquebourg-St.-Vaast, c’étaient les
riverains qui étaient chargés de l'entretien des chemins;
en échange de cette obligation , ils avaient l’autorisation
de planter sur le bord des routes et de jouir des fruits de
cette plantation. Dans la même prévôté, à Broudain, le
prévôt pouvait, par cri public, et pour le bien commun,
faire rappointer les chemins. Les peines prononcées
contre les défaillants, à son injonction, étaient une
amende de 60 sols et même le bannissement à temps ou
à perpétuité.
M. Goze pense que, malgré les dispositions législatives,
les chemins étaient très-mal entretenus. Il tire surtout
cette induction de l’histoire de la construction de la
cathédrale d'Amiens. Cet édifice, commencé avec des
pierres des environs de Paris, a été achevé avec des
matériaux du pays. C’est au mauvais état des voies de
communication qu’il attribue les causes de la modification
survenue dans l'appareil.
On passe à la discussion de la 17°. question, ainsi
conçue :
« Quelles ont été, durant le moyen-âge, la forme et la
« disposition des fontaines publiques dans les villes et les
u campagnes ? » |
M. Dusevel répond à cette interrogation de la manière
suivante : 11 est probable que cette question ne regarde
pas les sources consacrées à de pieuses pratiques, mais
bien des fontaines civiles, destinées à l’usage et aux be-
soins journaliers du peuple. Gest pourquoi nous répon-
drons, à cette question, que la forme et la disposition des
fontaines publiques, au moyen-âge, sont bien mieux
‘ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE. 509
indiquées, que nous ne pourrions le faire par les dessins
de plusieurs de ces fontaines que l’on voit encore en
France.
Comme exemples, nous nous bornerons à citer ici :
4°. La fontaine de St.-Ferréol de Brioude , qui date de
l’époque romane et dont la vue se trouve dans la France
monumentale , 1 I, pl 74;
2, Une autre fontaine , dont on trouve la parc
dans le Voyage en Languedoc, du baron Taylor, t, I
p. 159, fontaine qui remonte aussi à l’époque romane;
3°, Celle de la place de Cluny, qui passe pour être du
XIV®, siècle , et dont M. Du Sommérard père a donné le
dessin dans son Album des arts au moyer-age, pl. VI,
dre, série ;
k°. Celle de la Cr ix:decPièrre ; à Hotén qui date du
milieu du XV*, siècle : la vue de cette fontaine est repro-
duite par la Normandie , t. IT, pl. 468;
5°. Enfin, une autre fontaine de la même époque, ou à
peu près, dite de St.-Firmin et que l’on voit encore à
Amiens, dans la cave d’une maison, située sur la place
St.-Firmin, Dans les derniers temps, cette fontaine ayant
élé regardée comme une source consacrée à de pieuses
pratiques, plutôt qu’à un service publie, on la décora de
figures représentant le martyre de saint Firmin.
Nous possédons, dans le département de la Somme,
plusieurs fontaines consacrées à des pélerinages ou à des
exercices de dévotion, telles que celles de St.-Antoine
de Conty, de St.-Farsy , à Frohen, de St.-Gautier, à Ber-
taucourt, etc. Il est facile de connaître leur forme et leur
disposition en les examinant , sur place, avec quelque
attention. Mais ce n’est probablement pas de la forme et